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quent avoir commencé que vers l’an du monde z 147»
plufieurs années apres la vocation d Abraham , &
du tems même de l'expedition des Elamites dans le
pays de Chanaan, c’eft-à-dire bien apres les eta-
blilTemens des empires d’Egypte & de Chaldée. Voilà
monde ramenée & réduite à fa jufte époque , 1 histoire
donc la naiffance des plus anciens peuples^ du
de Moyfe confirmée, le fait de la création évidemment
établi, & par cela même l’exiftence de
l’Être fuprème invinciblement démontrée.
Argumentphyjique. Les animaux ne fe perpétuent
que par la voie de la génération ; mais il faut ne-
ceffairement que les deux premiers, de chaque ef-
pece aient été produits ou par la rencontre fortuite
des parties de la matière , ou par la volonté d’un
être intelligent qui difpofe la matière félon fes def-
feins.. 1 . v .
Si la rencontre fortuite des parties de la matière
a produit les premiers animaux, je demande pourquoi
elle n’en produit plus ; & ce n’eft que fur ce;
point que roule tout mon raifonnement. On ne trouvera
pas d’abord grande difficulté à répondre, que
lorfque la terre fe forma, comme elle étoit remplie
d’atomes vifs & agiffans, imprégnée de la même matière
fubtile dont les affres venoient d’être formés,
en un mot, jeune & vigoureufe, elle put être affez
féconde pour pouffer hors d’elle-même toutes les
différentes efpeces d’animaux, & qu’après cette
première production qui dépendoit de tant de rencontres
heureufes & fingulieres, fa fécondité a bien
pu fe perdre & s’épuifer ; que par exemple on voit
tous les jours quelques marais nouvellement defféchés,
qui ont toute unp, autre force pour produire
que 50. ans après, qu’ils qnt été labourés. Mais je prétends
que quand là terre, félon ce qu’qn Juppofe ,
a produit les animaux, elle a dû être dans le même
état oh elle eft préfentement. Il eft certain que la
terre n’a pû produire les animaux que quand elfoa
été en état de les nourrir ; ou du moins il eft certain
que ceux qui ont été la première tige des efpeces
n’ont été produits par la terre, que dans un tems_
où ils ont pû auffi bien être nourris. O r , afin que la
terre nourriffe les animaux, il faut qu’elle leur four-
niffe beaucoup d’herbes différentes ; il faut qu’elle
leur fourniffe des eaux douces qu’ils puiffent boire ;
il faut même que l’air ait un certain degré de fluidité
& de chaleur pour les animaux , dont la v ie a des
rapports affez connus à toutes ces qualités.
Du moment que.l’on me donne la terre couverte
de toutes les efpeces.d’herbes nécefîàirespour la fub-
fiftance des animaux, arrofée de fontaines & de rivières
propres à étancher leur foif, environnée d’un
air refpirable pour eux ; on me la donne dans l’état
où nous la voyons ; car ces trois chofes feulement
en entraînent une infinité d’autres , avec lefquelles
elles ont des liaifons & des enchaînemens. Un brin
d’herbe ne peut croître qu’il ne foit de concert,
pour ainfi dire, avec le refte de la nature. Il faut
de certains fucs dans la terre ; un certain mouvement
dans ces fucs, ni trop fort, ni trop lent ; un
certain foleil pour imprimer ce mouvement ; un
certain milieu par où ce foleil agiffe. Voyez combien
de rapports, quoiqu’on ne les marque pas tous.
L ’air n’a pû avoir les qualités dont il contribue à la
vie des animaux, qu’U n’ait eu à-peu-près en lui le
même mélange & de matières fubtiles, & de vapeurs
groffieres ; & que ce qui yaufe fa pefanteur,
qualité auffi néceffaire qu’aucuhji^utre par rapport
aux animaux, & néceffaire dans un certain degré,
n’ait eu la même aftion. Il eft clair que cela nous me-
neroit encore loin, d’égalité en égalité : fur-tout les
fontaines & les rivières dont les animaux n’ont pû
fe paffer , n’ayant certainement d’autre origine que
les pluies, les animaux n’ont pû naître qu’après qu’il
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à tombé des pluies, c’eft-à-dire un tems confidéra-
ble après la formation de la terre , & par confé-
quent lorfqu’elle a été en état de confiftance, & que
ce cahos, à la faveur duquel on veut tirer les animaux
du néant, a été entièrement fini.
Il eft vrai que les marais nouvellement defféchés
produifent plus que quelque tems après qu’ils l’ont
été ; mais enfin ils produifent toûjours un peu , &c
il fuffiroit que la terre en fît autant ; d’ailleurs le,
plus de fécondité qui eft dans les marais nouvellement
defféchés, vient d’une plus grande quantité de fels
qu’ils avoient amaffés par les pluies ou par le mouvement
de l’air, & qu’ils avoient confervés, tandis
qu’on ne les employoit à rien : mais la terre a toû-,
jours la même quantité de corpufcules ou d’atomes
propres à former des animaux, & la fécondité, loin
de fe perdre, ne doit aucunement diminuer. D e
quoi fe forme un animal ? d’une infinité de corpufcules
qui étoient épars dans les herbes qu’il a mangées,
dans les eaux qu’il, a.bûes , dans l’air qu’il a
refpiré ; c’eft un compofé dont les parties font venues
fe raffembler de mille endroits différens de
notre monde ; ces atomes circulent fans ceffe, ils
forment tantôt une plante, tantôt un animal ; &:
après avoir formé l’un , ils ne font pas moins propres
à former l’autre. Ce ne font donc pas des ato-.
mes d’une nature particulière qui produifent les animaux
; ce n’eft qu’une matière indifférente dont toutes
chofes fe forment fucceffivement, & dont il eft
très-clair que la quantité ne diminue point, puif-
qu’elle fournit toûjours également à tout. Les atomes
, dont on prétend que la rencontre fortuite pro-
duifit au commencement du monde les premiers,
animaux , font contenus dans cette même matière ,
qui fait toutes les générations de notre monde ; car,
quand ces premiers animaux furent morts, les ma-,
chines de leurs corps fe deffaffemblerent, & fe ré-
folurent en parcelles, qui fe difperferent dans la terre
, dans les eaux & dans l’air ; ainfi nous avons encore
aujourd’hui ces atomes précieux, dont fe durent
former tant de machines furprenantes; nous les
avons en la même quantité auffi propres que jamais
à former de ces machines ; ils en forment encore
tous les jours par la voie de la nourriture ; toutes
chofes font dans le même état que quand ils vinrent
à en former par une rencontre fortuite ; à quoi tient-
il que par de pareilles rencontres ils n’en forment encore
quelquefois ?
Tous les animaux, ceux même qu’on avoit foup-
çonné venir ou de pourriture, ou de pouffiere humide
& échauffée, ne viennent que de femences
que l’on n’avoit pas apperçues. On a découvert que
les macreufes fe forment d’oeufs que cette efpece
d’oifeaux fait dans les îles defertes du feptentrion :
& jamais il ne s’engendra de vers fur la viande , où
les mouches n’ont pû laiffer de leurs oeufs. Il en eft
de même de tous les autres animaux que l’on croit
qui naiffent hors de la voie de la génération. Toutes
les expériences modernes confpirent à nous defabu-
fer de cette ancienne erreur ; & je me tiens fûr que
dans peu de tems, il n’y reftera plus le moindre fu-
jet de doute.. Foyes^ C o r r u p t i o n .
Mais en dût-il refter, y eût-il des animaux qui
vinffent hors de la voie de génération, le raifonnement
que j’ai fait n’en deviendroit que plus fort.
Ou ces animaux ne naiffent jamais que par cette voie
de rencontre fortuite ; ou ils naiffent & par cette
voie, & par celle de génération : s’ils naiffent toûjours
par la voie de rencontre fortuite, pourquoi fe
trouve-t-il toûjours dans la matière une difpofition
qui ne les fait naître que de la même maniéré dont
ils font nés au commencement du monde ; & pourquoi
, à l’égard de tous les autres animaux que l’on
fuppofe qui foient nés d’abord de cette maniere-là,
D I Ë toutes les difpofitions de la matière font-elles fi changées
qu’ils ne naiffent jamais que d’une maniéré différente
? S’ils naiffent & par cette voie de rencontre
fortuite, & par celle de génération, pourquoi
toutes les autres efpeces d’animaux n’ont-elles pas
retenu cette double maniéré de naître? Pourquoi
celle qui étoit la plus naturelle, la feule conforme à
la première origine des animaux, s’eft-elle perdue
dans prefque toutes les efpeces ?
Une autre réflexion qui fortifie la première, c’eft
qu’il n’eût pas fuffi que la terre n’eut produit les animaux
, que quand elle étoit dans Une certaine dilpo-
fition où elle n’eft plus. Elle eût dû auffi ne les produire
que dans un état où il euffent pir fe nourrir
de ce qu’elle leur offroit; elle eût dû, par exemple >
ne produire le premier homme qu’à läg e d’un art
ou deux ,, où il eût pû fatisfaire, quoiqu’avec peine,
a fes befoins, & fe fecourir lui -même. Dans la
foibleffe où nous voyons un enfant nouveau né, en
vain on le mettroit au milieu, de la prairie la mieux
couverte d’herbes, auprès des meilleures eaux du
monde, il eft indubitable qu’il ne vivroit pas long-
tems. Mais comment les loix du mouvement produi-
roient-elles d’abord un enfant à l ’âge d’un an ou de
deux? Comment le produiroient-elles même dans
1 état ou il eft préfentement, lorfqu’il vient au monde
? Nous voyons qu’elles n’amenent rien que par
degrés, & qu’il n’y a point d’ouvrages de la nature
qui, depuis les commencemens les plus foibles &
les plus éloignés, ne foient conduits lentement par
une infinité de changemens tous néceffaires jufqu’à
leur derniere perfeftion. Il eût fallu que l’homme
qui eût dû être formé par le concours aveugle de
quelques parties de la matière, eût commencé par
cet atome, où la vie ne fe remarque qu’au mouvement
prefqu’infenfible d’un point ; & je ne crois pas
qu’il y ait d’imagination affez fauffe pour concevoir
d’où cet atome viv an t, jetté au hafard fur la terre
aura pû.tirer du fang ou du chyle tout formé ,1a feule
nourriture qui lui convienne, ni comment il aura
pu croître, expofé à toutes les injures de l’ air. Il
y a là une difficulté qui deviendra toujours plus grand
e , plus elle fera approfondie, & plus ce fera un
habile phyficien qui l’approfondira. La rencontre
fortuite des atomes n ’a donc pû produire les animaux;
il^ a fallu que ces ouvrages foient partis de
la main d ’un être intelligent, c ’eft-à-dire de Dieu
meme : les cieux les aftres font des objets plus ■
eclatans pour les yeux; mais ils n’ont peut-être pas
pour la raifon , des marques plus Tûres de l’a&ion
de leur auteur. Les plus grands ouvrages ne font
pas toujours ceux qui parlent le plus de leur ouvrier.
Que je voie une montagne applanie , je ne fais fi
cela s’eft fait par l’ordre d’un prince ou par un tremblement
de terre ; mais je ferai affûté que c’eft par
l’ordre d’un prince, fi je vois fur une petite colonne
une infeription de deux lignes. Il me paroît que '
ce font les animaux qui portent, pour ainfi dire ,
l’infcription la plus nette , & qui nous apprennent
le mieux qu’il y a un Dieu auteur de 1 univers.
Cette demonftration , dont on peut vanter avec
raifon la fofree & la folidité, eft de M. de Fonte-
pelle, comme nous l’avons déjà dit. Cet article eft tire
des papiers de M. F o r m e y .
D i e u e s t m o n d r o i t , {Hiß. mod.) c’eft le mot
ou la devife des armes d’Angleterre, que prit d’abord
Richard premier ou Coeur-de-lion, qui vivoit
à la fin du xije fiecle, ce qu’il fit pour marquer qu’il
ne tenoit fon royaume d’aucun mortel à titre de
yaffal.
Edouard III. au xjve fiecle le prit enfuite quand
il commença à faire valoir lès prétentions fur la
couronne de France ; & les rois fes fucceffeurs l’ont
continué fans interruption jufqu’au tems du roi Guil-
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i.aufflë ta prificë ^Orange, qui fit uâgë é$ a> mot,
JC maintiendrai, quoiqu'il ordonnât qu’on fe fervît
toujours du premier fur le grand fceau. La reine An-
S B ü M m B m m F ® e&t pris pour fa de.
vue particulière ces deux mots latins .femper eademt,
toujours la meme, à l’exemple de la reine Elizabeth,
royes^ D e v i s e . ( G )
aes gentils, qui tous étoient dès créatures auxquel,
m ° n ren<i01t M h<,nneutà dCls DEESSE , IDOLE , &c. à ^ divinité, VoJy e't Il faut remarquer quç parmi les Grecs & les La-
tins les peuples par le nom d iD ie u , n’enténdoient
H | B B fes-parfait, dont l’éternité eft un attribut
effentiel. Ils appelloient dieux, tous les êtres
qu ils regardoient.comme fupërieurs â là nature humaine,
ou y if pouvoient leur être de quelque utilité,,
ou meme de la colere defquels ils avoient à
cramdie; caf-Jes anciens, comme les modérnes, ont
preique toujours été conduits par l’intérêt propre,
c eft-à-dire 1 efperance du bien & la crainte du mal
Les hommes mêmes , félon eux, pouvoient devenir
aes dieux apres leur mqrt, parce que leur ame pouvoir
acquérir un degré d’excellence qu’ils n’avoient
point eu pendant leur vie ; voye^ A p o t h é o s e &
C o n s é c r a t i o n . Mais qu’on ne croye pas que les
lagçs comme Socrate, Platon,Cicéron,& les antres,
parlallent toûjours félon, les idqes du peuple : ils
Ctoient cependant quelquefois obligés de sV con-
formiuv pour n’être pas àecufés d’athëifme. C ’étoit
le-prétendu crime que l’on imputoit à ceux qui ne
croyoïent qu un Dieu.
Les Poètes., fuivant la remarque du P. le Boffu
étaient théologiens, & ces deux fonôions, quoique’
leparees aujourd’hui, étoient pour lors réunies dans
la meme perfonrte. Koye^ Poesie»
Ils perionmfiereftt les attributs divins, parce mie
la foibleffe de l’efprit humain ne fauroit concevo”
ni expliquer tant de puiffànce & tant daâion dans
une fubftance auffi Ample & auffi indivifible au’eft
celle de Dieu. n
C ’eft ainfi qu’ils ont repféfëiité là toüte-puiffance
de Dieu fous la perfonne & le nom de Jupiter • fa
fageffe fous celui de Minerve; fa juftice fous celui
de Junon. Foye{ E p o p é e , F a b l e , &c>
Les premiers faux-dieux qu’on ait adoré font les
aftres, le ciel, le foleil, Ja lune, à caufe de la chaleur
& de la lumière que les hommes en reçoivent*
I d o l â t r i e , A s t r o n o m i e , É t o i l e , S o l
e i l , &c. enfuite la terre, qui fournit les fruits qui
1er vent à la nourriture des hommes & des animaux i
le feu auffi-bien que l’eau devinrent auffi l’objet du
culte des hommes à caufe des avantages qu’on en
reçoit. Foyeç Eau & F e u . ’
Dans la fuite ces dieux fe font multipliés à l'infint
par le caprice de leurs adorateurs, & il n’y a pref-
qu’aucune chofe qui n’ait été déifiée, fans en excep,
ter celles qui font inutiles ou nuifiblesi
Pour autorifer le crime & juftifier la débauche 1
on fe fit des dieux criminels & débauchés ; des dieux
injuftes & violées ; des dieux avares & voleurs; des
dieux yvrognes , des dieux impudiques , des dieux
cruels & fanguinaires.
Les principaux dieux que les Romains appelloient
i ii mdjorum gentium, & Cicéron dieux celefies, Var-
Iron dieux choijis, Ovide nubiles deos, d’autres- con~
fentes deos, étoient Jupiter, Junon, Vefta, Minerve
Ceres, Diane, Vénus, Mars, Mercure, Neptune !
-Vulcain, A.pollon,
■ Jupiter étoit le dieu du ciel, Neptune le dieu de là
mer, Mars le dieu de la guerre , Apollon celui de
l’Eloquence, de la Poéfie, & de la Medecine; Mer.
cure celui des voleurs, Bacchus celui du v ia , Cu-
pidon celui de l ’amour,