cette variété te remarque âans les^ccen? i e la pr<>
nonciationtlu difcours ordinaire, (tes différais tons
ou accents dépendent uniquement de 1 ouverture g
plus ou moins grande de la glotte.
En quoi confifte donc la différence qui le trouve
entre la parole fimple & k yoix de chant ? _
Les anciens Muficiens ont établi , après Anlto-
xene (Elément, h a rm o n i° . que la voix de chant
paffe d’un degré d’élévation ou d’abaiffement à un
autre degré, c’eft-à-dire d’un ton à l’autre, p a r M
fans .parcourir l ’intervalle qui les fépare ; au lieu
que celle - du difcours s’eleve &c sabaiffe par un
mouvement continu : 20. que la voix de chant le
foûtiént fur le même ton confidéré comme un point
indiviiibie, ce qui n’arrive pas dans la fimple prononciation.
.
Cette marche par faults & avec des repos, eit en
effet celle de la voix de chant. Mais n’y a-t-il rien de
plus dans le chant ? Il y a eu une déclamation tragique
qui admettoit le paffage par fault d un ton a loutre
, & le repos fur un ton. On remarque la meme
chofe dans certains orateurs. Cependant cette déclamation
eft encore différente de la voix de chant.
M. Dodart qui joignoit à l’efprit de difeuflion&C
de recherche-, la plus grande connoiffance de laPhy-
fique, de l’Anatomie, & du jeu méchanique des
parties du corps , avoit particulièrement porte fon
attention fur les organes de la voix. Il obferve i .
que tel homme dont la voix de parole eft déplaifan-
f e , a le chant très-agréable, ou au contraire 2 .
que fi nous n’avons pas entendu chanter quelqu’un,
quelque connoiffance que nous ayons de fa voix de
parole, nous,ne le reconnoîtrons pas à fa voix de
chant. j
M. Dodart, en continuant fes recherches, découvrit
que dans la voix de chant il y a de plus que dan?
celle de la parole, un mouvement de tout le larynx,
c’eft-à-dire de cette partie de la trachée-artere qui
forme comme un nouveau canal qui fe termine à la
glotte, qui en enveloppe & qui en foutient les mufi
clés. La différence‘entre les deux voix vient donc
de celle qu’il y a entre le larynx affis & en repos fur
fës attaches dans la parole, & ce même larynx fuf-
pendu fur fes attaches, en attion & mû par un balancement
de haut en-bas & de bas en-haut. Ce balancement
peut fe comparer au mouvement des.oi-
ieaux qui planent, ou des.poiffons qui fe foutien-
nent à la même place contre le fil de l’eau. Quoique
les ailes des uns & les nageoires des autres paroif-
fent immobiles à l’oe il, elles font de continuelles
vibrations , mais fi courtes & fi promptes qu’elles
font imperceptibles. # <
Le balancement du larynx produit dans la voix
de chant une efpece d’ondulation qui n’eft pas dans
la fimple parole. L’ondulation foùtenue & modérée
dans les belles v o ix , fe fait trop fentir dans les voix
chevrotantes ou foibles. Cette ondulation ne doit
pas fe confondre avec les cadences & les roulemens
qui fe font par des changemens très-prompts & très-
•délicats de l’ouverture de la glotte, & qui font com-
.pofés de l ’intervalle d’un ton ou d’un demi-ton..
La voix., foit du chant, fpit de là parole , vient
toute entière de la glotte, pour le fon & pour le
' ton ; mais l’ondulation vient entièrement du balancement
cette ondulation du larynx qui affette la totalité dé
la voix '& la fubftance même du fon.
Après avoir confidéré la voix dans le fimple cri,’
dans la parole, & dans le chant ; il refte à l’examiner
par rapport à la déclamation naturelle, qui doit etre
le modèle de la déclamation artificielle, foit theatra- .
le , foit oratoire.
de tout le larynx : elle ne fait point partie de
la v o ix , mais elle en affette la totalité.
La déclamation eft, comme nous l’avons déjà dit,'
une affettion ou modification qui arrivé à notre voix
lorfque paffarit d’un état tranquille à un état agité ,
notre ame eft émûe de quelque paflion ou de quelque
fentiment vif. Ces changemens de la voix font invo-.
lontaires, c’eft-à-dire qu’ils accompagnent néceffai-
rement les émotions naturelles, & celles que nous
venons à nous procurer par l’art, en nous pénétrant
d’une fituation par la force de l’imagination feule.
Il réfulte de ce qui vient d’être expofé, que la
voix de chant confifte dans k marche par fault d’un
ton à un autre, dans le fejour fur les tons, & dans
5 Cette ouverture eft ovale iufqu’à huit lignes ; fa largeur n;é fvaa l ognuegruee uqru ’eàf tu dneep luigisn; eq udaatnrse dleesv vieonixn ednet baaifgfue-s ;ta i&lle p. lPulsu se lelell ee fetf to urevfeferrteré, ep ,l upsl ufse lfeos nf ôenfst
grave & fe porte plus loin.
La queftion fe réduit donc aftuellement à favoir J
i° . fi ces changemens de voix expreflifs des pallions
confiftent feulement dans les différens degres d élévation
& d’abbaiffement de la v o ix , & fi en paffant
d’un ton à l’autre, elle marche par une progreffion
fuccefîive & continue, comme dans les accens ou intonations
profodiques du difcours ordinaire ; ou fi
elle marche par fauts comme le chant.
2°. S’il feroit poffible d’exprimer par des lignes ou
notes, ces changemens expreflifs des pallions.
L’opinion commune de ceux qui ont parle de la
■ clamation, fuppofe que fes inflexions font du genre
des intonations muficales, dans lesquelles la voix
procédé dans des intervalles harmoniques, & q u il.
ft très-poflible de les exprimer par les notes ordinales
de la mufique, dont il faudroit tout au plus changer
la valeur, mais dont on conferveroit la proportion
& le rapport. r '
C ’eft le fentiment de l’abbé du Bos, qui a traite
cette queftion avec plus d’étendue que de precifion.
Il fuppofe que la déclamation naturelle a des tons fixes
, & fuit une marche déterminée. Mais fi elle con-
fiftoit dans des intonations muficales &C harmoniques
, elle feroit fixée & déterminée par le chant même
du récitatif. Cependant l’expérience nous montre
que de deux atteurs qui chantent ces mêmes morceaux
avec 1a même jufteffe, l’un nous laiffe froids
& tranquilles,tandis que l’autre avec une voix moins
belle & moins fonore nous émeut & nous tranfporte r
les exemples n’en font pas rares. Il eft éneore a-pro-
pos d’obferver que la déclamation fe marie plus difficilement
avec la voix & le chant, qu’avec celle de
la parole.
L’on en doit conclure que l’expreflion dans lé
chant, eft quelque chofe de différent du chant même
& des intonationsharmoniques ; & quefans .planquer
à ce qui conftitue le chant , l’acteur peut ajoû-
ter l’expreffion ou y manquer.
. Il ne faut pas conclure de-là que toute forte de
chant foit également fufceptible de toute forte d’ex-
preffion. Les atteurs inteîligens n’éprouvent que
trop qu’il y a des chants très-beaux en eux-mêmes ,
qu’il eft prefque impoflible de ployer à une déclama-
tion convenable aux paroles.
Nous pouvons encore remarquer que dans la fimple
déclamation tragique deux a fleurs jouent le même
morceau d’une maniéré différente , & nous af-
fettent également ; le même atteur joue le même
morceau différemment avec le. même fuccès , a
moins que le carattere propre du perfonnage ne foit
fixé par l’hiftoire ou dans l’expofition de la piece.
Si les inflexions expreffives de la déclamation ne font
pas les mêmes que les intonations harmoniques du
chant ; fi elles ne confiftent ni dans l’élévation, ni
dans l’abbaiffement de la voix, ni dans fon renfler
ment & fa diminution, ni dans fa lenteur & fa rapidité,
non plus que dans les repos & dans les filences
; enfin fi la déclamation ne réfulte pas de l’affem-
blage de toutes ces chofes, quoique la plupart l’accompagnent,
il faut donc que cette expreflion dépende
de quelque autre chofe, qui affeûant le fon
même de la v o ix , la met en état d’émouvoir & de
tranfporter notre ame.
Les langues ne font que des inftitutions arbitraires
, que de vains fons pour ceux qui ne les ont pas
apprîtes. Il n’en eft pas ainfi des inflexions expreffives
des pallions, ni des changemens dans la dif-
pofition des traits du vifage : ces lignes peuvent
etre plus ou moins forts, plus ou moins marqués ;
mais ils forment une langue univerfelle pour toutes
les nations. L’intelligence en eft dans le coeur,
dans l’organifation de tous les hommes. Les mêmes
lignes du fentiment, de 1a paflion, ont fouvent des
nuances diftinftives qui marquent des affettions différentes
ou oppofées. On ne s’y méprend point, on
diftingue les larmes que la joie fait répandre, de
celles qui font arrachées par la douleur.
Si nous ne connoiffons pas encore 1a nature de
cette modification expreflive des pallions qui conftitue
la déclamation, fon exiftence n’en eft pas moins
confiante. Peut-être en découvrira-t-on le mécha-
nifme.
Avant M. Dodart on n’avoit jamais penfé au mouvement
du larynx dans le chant, à cette ondulation
du corps même de la voix. La découverte que M.
Ferrein a faite depuis des rubans membraneux dans
la produttion du fon & des tons, fait voir qu’il refte
des chofes à trouver fur les fujets qui femblent épui-
fés. Sans fortir de la queftion préfente, y a-t-il un
fait plus fenfible, & dont le principe foit moins connu
, que la différence de la voix d’un homme & de
celle d’un autre ; différence fi frappante, qu’il eft
aufli facile de les diftinguer que les phyfionomies ?
L’examen dans lequel je fuis entré fait affez voir
que 1a déclamation eft une modification de la voix
diftinfte du fon fimple, de la parole & du chant, &
que ces différentes modifications fe réunifient fans
s’altérer. Il refte à examiner s’il feroit poflible d’exprimer
par des lignes ou notes ces inflexions expreffives
des pallions.
Quand on fuppoferoit avec l’abbé du Bos que ces
inflexions confiftent dans les différens degrés d’élévation
& d’abbaiffement de la v o ix , dans fon renflement
& fa diminution, dans fa rapidité & fa lenteur,
enfin dans les repos placés entre les membres
des phrafes, on ne pourroit pas encore fe fervir des
notes muficales.
La facilité qu’on a trouvé à noter le chant, vient
de ce qu’entre toutes les divifions de l’ottave on s’eft
borné a fix tons fixes & déterminés, ou douze fermions
, qui en parcourant plufieurs ottaves, fe répètent
toûjours dans le même rapport malgré leurs
combinaifons infinies. [ M. Burette a montré que les
anciens employoientpour marquer les tons du chant
jufqu’à 1620 caratteres , auxquels Gui d’Arezzo a
fubftitué un très-petit nombre de notes qui par leur
feule pofition fur une efpece d’échelle , deviennent
fufceptibles d’une infinité de combinaifons. Il feroit
encore très-poflible de fubftituer à 1a méthode d’aujourd’hui
une méthode plus fimple, fi le préjugé d’un
ancien ufage pouvoit céder à la raifon. Ce feroient
des muficiens qui auroient le plus de peine à l’admettre
, & peut-être à la comprendre. ] Mais il n’y
a rien de pareil dans la voix du difcours, foit tranquille
, foit paflionné. Elle marche continuellement
dans des intervalles incommenfurables, & prefque
toûjours hors des modes harmoniques : car je ne pré-
tens pas qu’il ne puiffe quelquefois fe trouver dans
une déclamation chantante & vicieufe, & peut-être
meme dans le difcours ordinaire, quelques inflexions
qui feroient des tons harmoniques ; mais ce font des
Tome i r %
inflexions rares, qui ne rertdrôiént pas la continuité
du difcours fufceptible d’être noté.
L’abbé du Bos dit avoir confulté des muficiens,
qui 1 ont affûré que rien n’étoit plus facile que d’exprimer
les inflexions de la déclamation avec les notes
attuelles de la mufique ; .qu’il fufiiroit de leur don-
»er-/ar^0^ va^eur qu’elles ont dans le chant,
& de faire la^meme réduction à l’égard des mefures.
Je crois que l abbe du Bos & ces muficiens n’avoieht
pas une idée nette & précife de la queftion. i° . Il y
a plufieurs tons qui ne peuvent être coupés en deux
parties égales. 20. On doit faire une grande diftinc-
tion entre des changemens d’inflexions fenfibles, &
des changemens appréciables.' Tout ce qui eft fenfi-•
ble n eft- pas appréciable, & il n’y a que les tons fixes
& déterminés qui puiffent avoir leurs fignes :
tels font les tons harmoniques ; telle eft à l’égard du
fon fimple l’articulation de la parole.
Lorfque je communiquai mon idée à l’académie,
M. Freret l’appuya d’un fait qui mérite d’être remarque.
Arcadio Hoangh, chinois de naiffance.Sc très-
inftruit de fa langue, étant à Paris, un habile muli-
cien qui fentit que cette langue eft chantante, parr-
ce qu’elle eft remplie de monofyllabes dont les ac—
cens font très-marqués pour en varier & déterminer
la lignification, examina ces intonations en les comparant
au fon fixe d’un infiniment. Cependant il ne
put jamais venir à-bout de déterminer le degré d’élévation
ou d’abbaiflement des inflexions chinoifes.
Les plus petites divifions dii ton,' telles que l’epta-
méride de M. Sauveur, ou la différence de la quinte
jufte à la quinte tempérée pour l’accord du clavecin,
étoient éneore trop grandes, quoique cette eptamé-
ride foit la 49e partie du ton, & la 7e du comma :
de plus, la quantité des intonations chinoifes varioit
prefque à chaque fois que Hoangh les répétoit ; ce
qui prouve qu’il peut y avoir encore une latitude
fenfible entre des inflexions très - délicates, & qui
cependant font affez diftinéles pour exprimer des
idees différentes....
S’il n’eft pas poflible de trouver dans la proportion
harmonique des fubdivifions capables d’exprimer
les intonations d’une langue , telle que là chi-
noife qui nous paroît très-chantante, où trouveroit-
on des fubdivifions pour une langue prefque monotone
comme la nôtre?
La compàraifon qu’on fait des prétendues notes
de la déclamation avec celles de la chorégraphie
d’aujourd’hui, n’a aucune exattitude, & appuiè même
mon fentiment. Toutes nos danfes font compo-
fées d’un nombre de pas affez bornés, qui ont chacun
leur nom, & dont la nature eft déterminée. Les
notes chorégraphiques montrent au danfeur quels
pas il doit faire, & quelle ligne il doit décrire fur le
terrein ; mais c’eft la moindre partie du danfeur : ces
notes ne lui apprendront jamais à fairë les pas avec
grâce, à regler les mouvemens du corps, des bras >
de la tête, en un mot toutes les attitudes convenables
à fa taille, à fa figure, & au carattere de fa
danfe.-
Les notes déclamatoires n’auroientipas même l’utilité
médiocre qu’ont les notes chorégraphiques.
Quand on accorderoit que les tons de la déclamation
feroient déterminés qu’ils pourraient être exprimés
par des fignes ; ces lignés formeraient un dictionnaire
fi étendu, qu’il exigeroit unërétudb de plu-*
fieurs années. La déclamation devieridroit un art encore
plus difficile que la mufique des anciens, qui
avoit 1620 notes. Aufli Platon veut-jlquèie& jeunes
gens, qui ne doivent pas faire leur prpfeflipn de la
mufique, n’y facrifient qu,e trois- ans.
Enfin cet art, s’il étoit poflible, ne .fervirqit qu’à
former des atteurs froids, qui par l’affettatipa & une
attention fervile défigurerpient l’expreflipn ..que le
S S s s