proportionnelle à la denfité de Tes rayons à cette
Aijlance. Mais il ne s’enfuit pas de-là que la force
•avec laquelle les objets agiflent fur notre vue dé-
-croifle de même félon cette proportion : la raifon
^en eft fenfible ; car comme la force de la lumière
diminue par la dijlance de l’objet d’où elle part, de
'même la grandeur de l’image fur la rétine décroît
aulîi félon la même proportion ; & par conféquent
cette image fera aufli vive 8c agira aufli fortement
fur la rétine quand l’objet fera éloigné que quand il
fera proche. D ’où il s’enfuit que l’objet paroîtra à
-toute forte de dijlance aufli clair 8c aufli lumineux,
•à moins qu’il n’y ait quelqu’aütre caufe qui y apporte
du changement. Pour connoître cette caufe ,
nous n’avons qu’à laifler entrer dans une chambre
•obfcure par un petit trou un rayon du foleil ; car ce
tfayon ou ce faifceau de rayons paroiflant dans toutes
les politions de l’oeil comme une ligne de lumie-
Te, il eft évident que toute la lumière ne continue
pas fon chemin félon la ligne droite, mais qu’il y en
-a une partie qui eft réfléchie en tous fens de tous les
points du milieu qu’elle traverfe, 8c que c’eft par le
moyen de ces rayons réfléchis que le faifceau de lumière
eft vifible. Par conféquent ce même faifceau
de lumière, à caufe de la diminution continuelle qu’il
fouffre, doit devenir continuellement de plus foible
en plus foible, & cela proportionnellement à l’opacité
du milieu à-travers duquel il palfe : fi l’air eft
pur 8c fera in, il y aura peu de lumière de réfléchie,
& il s’en tranfmettra une moins grande quantité : mais
il n’eft jamais fi pur qu’il n’y ait toûjours quelque
partie de la lumière réfléchie ou interrompue dans
fon trajet, & par conféquent fa force doit toûjours
décroître, à mefure que la dijlanu de l’objet d’où
elle part augmente. Puis donc que la force de la lumière
décroît ainfi continuellement à proportion
que la dijlanu de l’objet d’où elle part augmente ,
il s’enfuit que les objets doivent toûjours paroître
moins lumineux 8c plus teints de la couleur du milieu
à-travers defquels ils font apperçus, à proportion
de l’éloignement où ils feront par rapport à nos
yeux. Lors donc que nous favons d’ailleurs que deux
objets font de la même couleur, fi l’un paroît d’une
couleur plus vive & plus frappante que l’autre, nous
avons appris par l’expérience à conclure que celui
qui paroît d’une couleur plus vive eft leplus proche;
& ç’eft par cette raifon que les corps lumineux ou
très-éclairés paroiffent toûjours plus proches qu’ils
ne le font en effet. De-là il eft aifé de rendre raifon
pourquoi une chambre paroît plus petite après que
fies murs ont été blanchis, & pourquoi pareillement
les collinès paroiffent moins grandes & moins élevées
lorfqu’elles font couvertes de neige. Dans ces
cas & dans d’autres de cette nature, la vivacité &
la force de la couleur font paroître ces objets plus
proches, d’où nous concluons qu’ils font plus petits;
car nous jugeons toûjours de l’étendue 8c de la grandeur
des corps, par la çomparaifon que nous faifons
de leur grandeur apparente avec leurs dijlanus. Par
la même raifon on explique encore pourquoi le feu
8c la flamme paroiflent fi petits lorfqu’on les voit à
une grande dijlance pendant la nuit. La prunelle étant
alors fort dilatée, laifle palfer une plus grande quantité
de rayons de lumière dans l’oeil, 8c cette lumière
agiflant plus fortement fur la rétine, doit faire paroître
l’objet plus proche, d’où l’on juge qu’il eft plus
petit. Comme les objets brillans 8c lumineux paroiffent
plus proches & plus petits qu’ils ne font en effet
, ceux au contraire qui font obfcurs, 8c ceux qui
ne font que foiblement éclairés, paroiflent toûjours
plus éloignés 8c plus grands à raifon de la foiblefle
& de l’obfcurité de leur couleur. C ’eft ce qu’on remarque
particulièrement lorfqu’on regarde des objets
obfcurs à l’entrée de la nuit ; car ces objets paroiflent
alors toujours plus éloignés 8c plus 'grands*
que lorfqu’on les voit pendant Je jour. C ’eft au©
par là meme raifon que la dijlanu apparente & la
grandeur des objets paroiflent augmentées, lorfqu’on
les voit à-travers un air chargé de brouillards ;
car une plus grande quantité de lumière étant interceptée
, ou irrégulièrement brifée dans fon paflage
à-travers le brouillard, il en entrera moins par la
prunelle, & elle agira par conféquent d’une maniéré
plus foible fur la rétine ; donc l’objet fera réputé à
une plus grande dijlanu 8c plus grand qu’il n’eft.
L’erreur de la vûe qui provient de cette caufe eft fi
grande, qu’un animal éloigné a été quelquefois pris
pour un animal beaucoup plus gros étant vu par un
tems de brouillard. Cette opacité de l’atmofphere,
qui empêche une partie de la lumière de parvenir
jufqu’à l’oeil, eft encore la raifon pourquoi le foleil,
la lune , 8c les planètes paroiflent plus foiblement
lorfqu’elles font proches de l’horifon, & qu’elles deviennent
plus brillantes par rapport à nous, à mefure
qu’elles s’élèvent ; parce que les rayons qui en
partent ont une plus grande étendue d’air à traver-
fer, 8c rencontrent plus de vapeurs lorfque ces af-
tres font proches de l’horifon, que lorsqu’ils font
dans une plus grande élévation. Il femble encore
que ce foit là une des raifons pourquoi ces corps
paroiflent toûjours plus grands à mefure qu’ils approchent
de l’horifon. Car puifqu’ils paroiflent plus
foibles ou moins brillans, ils paraîtront aufli à une
plus grande dijlanu ; d’où il s’enfuit qu’ils doivent
paroître plus grands, par la raifon que les objets paroiflent
tels lorfque l’air eft chargé de brouillards.
Il-femble que nous pouvons avec aflurance conclure
de tout ce qui vient d’être dit, que les couleurs
apparentes des objets nous fervent beaucoup pour
nous faire juger de leurs diflanccs, lorfque nous con-
noiflons d’ailleurs la force & la vivacité de leur couleur
à toute autre dijlanu donnée. C ’eft en fuivant ce
principe, que les habiles peintres repréfentent fur un
même plan des objets à diverfes dijlanus, en augmentant
ou en diminuant la vivacité des couleurs *
félon qu’ils ont deflein de les faire paraître plus proches
ou plus éloignés. Il eft bien vrai que la prunelle
par la vertu qu’elle a de fe contracter, fe met toû-
jours dans un degré de dilatation proportionné à la
vivacité ou à la force de la lumière ; d’où l’on pourrait
penfer qu’il nous eft impoflible de juger de la
dijlanu des objets par le fetours de leur couleur apparente
, ou par la force avec laquelle elles agiflent
fur nos yeux. Mais il eft aifé de répondre à cela ,
que l’état de dilatation o.u de contraction de la prunelle
nous eft connu, parce qu’il dépend du mouvement
de l’uvée que nous fentons, & qui procédé du
different degré de force avec lequel la lumière agit
fur nos yeux, qui par conféquent doit toûjours être
fenti. Il s’enfuit de-là que quoique la prunelle par
fa contraction ne laifle pas entrer dans l’oeil une
plus grande quantité de rayons, lorfque l’objet eft
proche que lorfqu’il eft éloigné , nous connoiflons
cependant la force de la lumière qui en part, parce
que nous fentons que la prunelle eft alors contractée.
D ’ailleurs lorfque la prunelle eft dans un état de contraction
, nous voyons plus diftinCtement que lorsqu'elle
eft dilatée, ce qui nous aide encore à juger
de la dijlanu des objets.
Le cinquième moyen confifte dans la diverfe apparence
des petites parties des objets. Lorfque ces
parties paroiflent diftinCtes, nous jugeons que l’objet
eft proche ; mais lorfqu’elles paroiflent confufes,
ou qu’elles ne paroiflent pas du tout, nous eftimons
qu’il eft à une grande dijlanu. Pour entendre cela il
faut confidérer que les diamètres des images qui fe
peignent fur la rétine, diminuent toûjours à proportion
que la dijlanu des objets qu’elles repréfentent
■ni
àiigménte;& pat conféquent un objet pèut difparoître
lôrfqu’on le placera à une fi grande dijlanu de nos
y e u x , que la peinture qu’il fera for la rétine, foit in-
ïenfible à cauledefapetitefle ; & plus l’objet fera petit
, plûtôt il ceflera d’être vifible : de-là vient que les
petites parties d’un objet ne feront pas apperçues à
toutes les diftances;car la partie la moins fenfible fera
toûjours plus petite ou plus grande, proportionnellement
à la dijlance plus ou moins grande de l’objet
même. Ainfi la plus petite partie vifible à la dijlance
d’un pié, deviendra invifible à celle de deux piés ;
la plus petite partie vifible à deux p iés, difparoîtra
à trois, 8c ainfi de toute autre dijlance à l’infini. Il
réfulte évidemment de ce que nous venons de d ire,
que lorfque l’oeil peut voir diftinCtement les petites
parties d’un objet, nous devons juger qu’il eft plus
proche qu’un autre dont nous ne voyons point du
tout les mêmes petites parties, ou dont nous ne les
voyons que confufément.
Enfin le fixieme & dernier moyen confifte en ce
que l’oeil ne repréfente pas à notre ame un feulobjet,
mais qu’il nous fait voir en même tems tous ceux qui
font placés entre nous 8c l’objet principal dont nous
'confidérons la dijlance. Par exemple, lorfque nous
regardons quelqu’objet éloigné, tel qu’un clocher,
nous voyons pour l’ordinaire plufieurs terres & mai-
fons entre nous & lui ; or comme nous jugeons de
la dijlance de ces terres & de Ces bâtimens, 8c que
nous apperçevons en même tems le clocher au-delà
de tous ces objets , nous concluons qu’il eft beaucoup
plus éloigné, 8c même qu’il eft bien plus grand
que lorfque nous le voyons feul 8c fans l’interpofi-
txon d’aucun autre objet vifible. Il eft cependant certain
que l’image de ce clocher qui eft peinte fur la
rétine, eft toûjours la même dans l’un & dans l’autre
ca s , pourvû qu’il foit à une égalé dijlance ; d’où
l’on voit comment nous connoiflons la grandeur des
objets par leur dijlanu apparente, 8c comment les
corps placés entre nous 8c un objet, influent dans le
jugement que nous portons au fujet de fon éloignement.
Il en eft à-peu-près de ce jugement comme
de celui que nous formons fur la grandeur de notre
durée, par le fouvenir confus de tout ce que nous
avons fait 8c de toutes les penfées que nous avons
eues, o u , ce qui eft la même chofe, de la grandeur
& l’étendue du tems qui s’eft écoulé depuis telle action'
; car ce font ces penfées & ces aâions qui mettent
notre ame à portée de juger du tems paffé ou
de i’étendue d’une partie de notre durée : ou plûtôt
le fouvenir confus de toutes ces penfées 8c de toutes
ces aftions, eft la même chofe que le jugement de
notre durée, comme la vûe confufe des champs 8c
des autres objets qui font placés entre nous 8c le
clocher, eft la même chofe que le jugement que
nous formons fur le clocher. Voyei cjfais & obferv,
de Medec. de la foc. d’Edimb. tome IV. p. J2J &fuiv.
Article de M. Formey.
Ajoûtons à cet article, d’après plufieurs philofo-
phes , que quoique le fens de la vûe nous ferve à
juger des dijlanus, cependant nous n’en aurions jamais
eu d’idée par ce fens feul, fans le fecours de
celui du toucher. Voye^ Varticle AVEUGLE, la lettre
fur les aveugles à Vufage de ceux qui voyent, & les
articles Vision , Toucher , &c. Voyez auffi l'ejfai
de M. Jurin fur la vijion difincle & non dijlincle, imprimé
à la fin de Y Optique de M. Smith. DISTANCE accourcie , difantia curtata, lignifie
en Ajlronomie, la dijlance d’une planete au foleil
réduite au plan de l’écliptique, ou l’intervalle qui
eft entre le foleil & le point du plan de l’écliptique
où tombe la perpendiculaire menée de la planete fur
ce plan. On l’appelle ainfi, parce que la dijlance
réelle d’une planete au foleil eft plus grande que fa
dijlance réduite au plan de l’écliptique, puifque la
pïënùéra dé fcës ilfiances eft l grand côté d’un triangle re&ang’hley,p odtohnétn ulaf e ou le dijlance
accourcie eft un des petits côtés. Voyez Lieu 6* Distance.
(O) Distance , (Art rfiilït.) c’eft dans l’ordre de bataille
, l’efpace Ou l’intervalle qu’on laifle entre les
corps dé troupes dont l’armée eft compofée, ou qui
font rangés en ordre de bataille ou en ligne. Voye^ Armée. Les rangs des différens corps de troupes
doivent avoir des difa'nccs réglées. M. le maréchal
de Puyfegur donne douze piés à la dijlance d’un rang
à 1 autre dans le bataillon ; il prétend que c’eft celle
qui convient le mieux pour les marches 8c les différons
mouvemens du bataillon. En bataille les files
n’ont point de dijlance entr’elles, il faut au contraire
qu’elles fe touchent pour être plus en force : on leur
donne deux piés d’épaifleur , pour l ’efpace occupé
par le foldat. Dès que les djtances des rangs & des
files en bataille font réglées , Vil faut (dit l ’illuftre
maréchal qüe nous venons de citer) » que celle
» des files & des rangs en marchant, aufli-bien que
» pour tous les mouvemens, foient les mêmes qu’en
» bataille ; car des que ces dijlànces font réglées
» pour un bataillon en bataille, fi on le fait marcher
».tout entier, il ne doit en marchant ni les étendre
» ni les reflerrer, afin que par-tout où l’on peut l’ar-
» rêter dans fa marche, il foit toûjours en bataille ;
» ce qui ne ferait pas s’il les changeoit ». Art de la
guerre pair M. le maréchal DE PüYSEGUR.
Des troupes qui combattent ne peuvent avoir
trop d’attention à garder leur ordre de bataille 8c
leurs dijlanus ; il dk impoflible qu’elles fe foûtien-
nent & qu’elles agiflent, lorfqu’elles font une efpece
de mafle fans ordre ; c’eft ce qui eft bientôt remarqué
de l’ennemi, « J’ai vû (dit M. le duc de Rohan
dans fon parfait capitaine') » Henri le Grand pour-
» fuivant huit cents chevaux avec moins de deux
.» cents, juger qu’ils ne rendraient point de combat,
» parce qu’ils fe confondoient 8c n’obfervoient point
» leurs dijlànces j ce qui arriva comme il l’avoit préd
i t ». ( 0
DISTENSION, f. f. Ce terme a en Medecine plufieurs
lignifications.
Il fert quelquefois à exprimer la trop grande dilatation
des arteres & des autres vaifleaux. Voyez Vaisseau.
On l’employe quelquefois pour fignifier Y allongement
de tout le corps , qui accompagne le bâillement.
Il fignifie aufli dans certains cas , une efpece de
convuljîon qu’on appelle tétanos, (d)
moDdiItSéT dICesH pIAauSpIiSè,r ef.s ,f . qteurim ceo dnef iCfthei ruàr gaiveo, iirn cdoemux
rangs de cils. Voyeç Cils.
Ce mot eft formé de <ffc, deux fois , 8c ou
çtiïyyç, ordre , rang.
Dans le dijlichiajîs, par-defliis les cils ordinaires
8c naturels, il en croît un autre rang extraordinaire,
qui picotant la membrane de l’oe il, y caufe de la
douleur, & y attire des fluxions & inflammations
accompagnées d’un écoulement continuel de lar-.
mes, 8c fuivies fort fouvent d’ulceres qui font caufo
de la perte de la vûe. Voyc^ Paupières.
On guérit le dijlichiafis en arrachant avec de pe-,
tites pincettes le fécond rang de poils, 8c brûlant
les pores par où ils fortent. ( T )
DISTILLATEUR, f. f. (Artméch.) artifte qui a
le droit de dijliller toutes fortes d’eaux , d’efprirs,
d’huiles, d’eflences, de liqueurs, &c. en qualité de
membre d’une communauté de ce nom , établie en
1699.'Cette communauté a deux jurés, dont l’un
entre en charge & l’autre en fort tous les ans. L’ap-
prentiflage eft de quatre ans, le compagnonage de
deux : un maître ne peut faire qu’un apprenti à là
m 1