
d’o&obre 1690 porte : que les ouvriers monnoyeurs J
feront tenus de les aller prendre dans la chambre
des machines oh ils s’en chargeront, tant fur le régi
fire que tiendra l’entrepreneur, que fur celui qu’ ils
tiendront de leur part, lefquels regiflres feront cotts
6* paraphés par les commiffaires ou jtiges-gardes,
& Jîgnés à chaque livraifon, tant des monnoyeurs
que de Ventrepreneur de la marque fur la tranche,
qui en ce faifant en demeurera bien & valablement
déchargé ; defquels regiflres ledit entrepreneur fournira
au commis à la régie à la fin de chaque journée
un extrait figné 6* certifié de lui. C e qui s’appelle
donner la brève , comme il a été dit des
ouvriers ajufteurs.
On monnoie les flans, tant d’or que d argent,
avec un balancier, auquel les quarrés a monnoyer,
(vulgairement appelés coins) font attaches.
- - Celui de Teffigie eft en deffous du balancier ,
dans une boîte quarrée garnie de vis d’écrous
, pour le ferrer & tenir en état ; & l’autre
en deffus dans une pareille boîte, auffi garnie de
vis & d’écrous, pour retenir le quatre à mon-
noyer.
On pofe le flan fur 'le quarré d’effigie; on
tourne à l’inftant la barre du balancier, qui fait I
tourner la vis qui y eft enclavée; la vis entre
dans l’écrou qui elt au corps du balancier, &
la barre fait ainfi tourner la vis avec tant de
force, que pouffant l’autre quarré fur celui de
l’effigie, le flan, violemment preffé des deux quarrés,
en reçoit les empreintes d’un feul coup en
un moment. Quand ce flan eft ainfi monnoye,
on rappelle : denier de monnoyage. .
Fabrication des monnoies au marteau•
La manière de fabriquer les efpèces au marteau,
a été en ufage en france jufqu’en 1553,
que Henrï II ordohna, par édit du mois de juillet
de la même année : « qu’il feroit fabrique
« des teftons avec le moulin dans fon palais à
« Paris » , ce qui fut exécuté au mois de mars
füivant ; & cette nouvelle fabrique fut établie au
bout du jardin des* étuves, à l’endroit ou font à
préfent les galeries du louvre.
Mais cette nouvelle fabrication ne fut pas
long-temps pratiquée, parce que Henri III défendit
par édit du mois de feptembre 1585 , u de
« ne fe fervir de la fabrication au moulin , que
a pour toutes fortes de médailles antiques & mo-
a dernes, pièces de plaifir & jetons, fans qu il
« pût être fabriqué avec les engins au moulin, au-
« cunes efpèces d’or, d’argent ou de billon ayant
« cours, fi ce n’étoit du très-exprès commande-
« ment & permiffion du R oi, ou de l’ordonnance
u de la cour des monnoies , fous les peines de
« droit. »> Ainfi on fut obligé de reprendre l’u-
fage du marteau.
Cependant la fabrication au moulin fut rétablie
par Louis XIII , par édit du mois de
décembre 1639 ; 6* ce pour empêcher que les efpeces
ne fujfent rognées on altérées ; 6* pour les rendre
beaucoup plus parfaites qu elles ne l etoient dans
les monnoies ordinaires.
Cet édit fut confirmé par déclaration du 30
mars 1640, « par laquelle le même Roi ordonna
« qu’il feroit fabriqué des louis d’or en la monte
noie du moulin établi au château du Louvre,
« & qu’il n’en feroit fabriqué au marteau dans
« les monnoies, que lorfque les ouvriers en pour-
« roient battre en la même perfe&ion qu elles
« fe faifoient au moulin. »
Enfin cette ancienne manière de fabriquer avec
le marteau, a été fupprimée par édit du mois de
mars 1645 • “ Par lequel fa majefté défend aux
« ouvriers & autres officiers des monnoies de
« travailler, ou faire travailler, convertir ou face
briquer aucune monnoie , de quelque qualité
« qu’elle puiffe être, ailleurs ni autrement que
« par la voie du moulin , fous la conduite &
« direôion de la cour, & ce pour rendre toutes
« les monnoies conformes, & pour éviter tous
« les abus qui s’étoient commis jufqu alors pen-
« dant la fabrication au marteau; »
Il eft temps maintenant d’examiner ce qui fe
pratiquoit dans les monnoies, lorfqu’on y fabri-
quoit les efpèces avec le marteau.
On allioit les matières d’or ou d’argent, on
les fondoit, on les jetoit en lames , & on en
faifoit des effais comme il fe pratique aujourd hui.
On faifoit après cela recuire les lames", & on
les étendoit fur l’enclume, ce qui s’appeloit
battre la chaude. . , ' ' '
Quand les lames étoient étendues à peu-pres
de l’épaiffeur des efpèces à fabriquer, le prévôt
ou le lieutenant des ouvriers s’en chargeoit, &
les diftribuoit aux ouvriers pour les couper en
morceaux à peu-près de la grandeur des efpèces,
ce qu’on appeloit couper carreaux.
On faifoit après cela recuire les carreaux; on
les étendoit avec un marteau appelé flattoir;
puis on en coupoit les pointes avec des ci&ires,
ce qui s’appeloit adjufler carreaux , & on les
rendoit ainfi du poids jufte qu’ils dévoient être,
' en les pefant avec les deneraux à mefure qu’on
en coupoit, ce qù’on appeloit approcher carreaux.
On rabattoit enfuite les pointes des carreaux
pour les arrôndif , ce qu’on appeloit réchauffer
carreaux ; on les pinçoit pour cela avec
des tenailles nommées eflanques, que l’on cou-
choit fur l’enclume, de manière qu’en donnant
quelques coups d’un marteau nommé rechauffoir,
fur.la tranche des carreaux, on en rabattoit les
pointes & on les adouciffoit, de forte qu’ils fe
trouvoient du volume des efpèces, ce qu’on appeloit
flattir.
Quand les carreaux avoient été flattis, alors
on les nommoit flans ; le prévôt qui s’étoit charge
des lames, rendoit les flans & les cifailles poids
pour poids comme il s’en étoit chargé, ce qui
s’appeloit
s’appeloit rendre la brève , & le maître payoit
à ce prévôt les droits ordinaires, pour être diftri-
bués à ceux qui avoient ajufté la breve.
Après cela on portoit les flans au blanchiment,
pour donner la couleur aux flans d'or, & blan-
chir ceux d’argent.
Quand les flans étoîent en état d’être mon-
noyés, le prévôt des monnoyeurs s’en chargeoit '
par poids & par compte, & les diftribuoit à
ceux qui les dévoient monnoyer.
On fe fervoit pour cela de deux poinçons appelés
coins, qui étoient de groffeur proportionnée
aux efpèces , dont l’un étoit appelé pile , &
l ’autre troufifeau.
La pile étoit longue de fept à huit pouces,
ayant un rebord appelé talon vers le milieu , &
une queue en forme de gros clou carré, pour
la ficher & enfoncer jufqu’au talon dans un billot
appelé cepeau par .les anciennes ordonnances,
qui étoit vers le bout du banc du mon-
noyeur. .
Il y av-oit fur ces deux coins les empreintes
des efpèces gravées en creux ; favoir, l’écuffon
fur la pile, & la croix ou l’effigie du Roi fur le
trouffeau, & on s’en fervoit à monnoyer ainfi
qu’il fuit :
On enfonçoit la pile à plomb dans le cepeau;
on pofoit le flan fur la pile ; on meitoit le trouf-
feaiu fur le flan , & on le preffoit ainfi d’une
main entre la pile & le trouffeau, à l’endroit des
empreintes ; on donnoit de l’autre main trois ou
quatre coups de marteau en manière de petit
maillet de fer fur le trouffeau , & le flan étoit
ainfi monnoyé des deux côtés.
On retiroit après cela le flan monnoyé; & s’il
y avoit quelques endroits qui ne fuffent pas bien
marqués , on le remettoit entre la pile & le
trouffeau, ce qu’on appeloit rengrèner, & on
donnoit quelques coups du même marteau fur
le trouffean jufqu’à ce qu’il fût monnoyé dans fa
perfection.
On prétend que ces termes de pile & de trouffeau
viennent, favoir, celui de pile, de ce qu’elle
étoit fous le . trouffeau fur lequel on frappoit ;
& celui de trouffeau, parce qu’on le. tenoît &
trouffoit de la main.
Quand les efpèces avoient été ainfi monnoyées,
le prévôt qui s’étoit chargé de la brève les faifoit
porter dans la chambre des délivrances , &
les remettoit entre les mains des juges-gardes,
qui s’en chargeoient fur le regiftre : le maître payoit
à ce prévôt les droits ordinaires, & après cela
les juges-gardes & l’effayeur obférvoient les
mêmes circonftances d’ufage pour les délivrances.
Ce qu’on appelle rerigréner, c’eft remettre les
efpèces entre les carrés , & faire rentrer le gre-
netis & autres empreintes des efpèces dans le
grenetis & empreintés des carrés. Quand les empreintes
des'èfpèces rentrent jufte—dans celles
des carrés , & qu’elles ne varient en aucune
Arts & Métiers. Tome V. Partie. I.
façon ', on peut s’affurer que ce font les mêmes
fur lefquelles elles ont été monnoyées ; mais quand
elles varient ce ne font, pas les mêmes. C ’eft
ainfi que l’on rengrénoit autrefois les efpèces
fur le trouffeau & la pile; & que l’on rengréne
aujourd’hui fur les carrés celles où il y a quelques
défeâuofités : c’eft pourquoi tes ordonnances
veulent que les carrés qui ont fervi à monnoyer
les efpèces, foient confervés par les juges-gardes,
jufqu’à ce qu’ elles aient été jugées definitivement,
après quoi ils doivent être dirt’ormés, & les juges-
gardes en peuvent difpofer fuivant les mêmes
ordonnances.
On appelle auffi rengrèner, quand on frappe
le poinçon d’effigie fur une matrice pour y marquer
l’empreinte de l’effigie en creux, ou quand
on frappe des poinçons fur cette matrice pour y
marquer l’effigie en relief, ou enfin quand on frappe
ces poinçons fur les carrés à monnoyer pour y
marquer l’effigie en creux ; car fi l’ouvrier qui
donne les coups de marteau, ne fait pas chaque
fois le rengrénement , il arrive que les effigies
fe trouvent doublées, ce qui s’appelle tréfiler.
On doit pratiquer de même le rengrénement ,“
quand on frappe les poinçons de croix, ou d’é-
euffon ou de légende fur une matrice, pour y
marquer en creux les empreintes de ces poinçons ;
ou quand on frappe des poinçons fur cette matrice
pour les. marquer des empreintes en relief;
ou quand on frappe ces mêmes poinçons fur les
carrés à monnoyer pour y marquer les empreintes
en creux.
Enfin, on pratique le rengrénement quand il
s’agit d’un faux poinçon1 dont on a marqué des
ouvrages d’or on d’argent ; les experts nommés
rengrènent le poinçon dont il s’agit fur la table
de cuivre où le véritable poinçon a été inculqué,
& quand il ne rengréne pas jufte, ils déclarent
que le poinçon en queftion eft faux, & que les
empreintes qui en ont été faites fur lès ouvrages
font pareillement fauffes.
' Monnoyagè au Laminoir'& au Balancier.
Toutes les efpèces de France ont été fabriquées;
comme on l’a déjà obfervé, au marteau , jufqu’au
règne d’Henri I I , que les inconvéniens de ce
monnoyage firent peufer à lui en fubftituer un
meilleur.
Un menuifier, nommé Aubry Olivier, inventa
pour lors l’art de monnoyer au moulin ; & ce
fut Guillaume de Marillac, général des monnoies,
qui le produifit à la cour, où tout le monde admira
la beauté des effais qu’il fit.
Le Roi lui permit l’établiffement de ce mon-
noyage par fes lettres-patentes du 3 mars 1553 ,
lefquelles portent : « nous avons pourvu Aubry
« Olivier de l’office de maître & conduéieur des
« engins de la monnoie au moulin. »