
Les minières éclairés, dans les départemens
desquels font ces objets, fentant tous les incon-
vèniens qui doivent résulter de pareilles incer-
ci tildes, ont pris les mefures les plus fages pour
les faire ceffer.
Trois chimlftes de l’académie des fçiences,
MM. Hellot, Tillet & Macquer, ont été nommés
pour conftater tout ce qui a rapport aux
effais d’or & d’argent, par des expériences authentiques,
faites fous les yeux de l'homme d’état
qui avoit ce département, & en‘ préfence des
magiftrats de la cour des mon noies.
Il a été conftatè par ces recherches, que le
plomb fait toujours entrer un peu d’argent dans
la coupelle ; & le réglement qui eft intervenu, a
fixé que :
Pour de l’argent d’affinage, il faut deux parties
de plomb fur une d’argent.
Pour de l’argent de vaiffelle à n deniers
12. grains , quatre parties.
Pour de l’argent à n deniers & au-deffbus,
fix parties. • - -
Pour celui à io deniers & au-deffous, huit
parties.
Pour celui à 9 deniers, dix parties.
Pour Celui à 8 deniers, douze parties.
Pour celui à 7 deniers, quatorze parties.
Enfin, pour celui à 6 deniers & au-deffous,
feize parties de plomb.
On choifit deux coupelles égales de grandeur
& de poids ; l’ufage eft de prendre des coupelles
qui pèfent autant que le plomb qu’on emploie
dans l’effai, parce qu’on a obfervè que ce font
celles qui peuvent boire toute la litharge qui fe
forme pendant l’opération.
On les place l’une à côté de l’autre, fous la
mouffle, dans un fourneau d’effai : on allume le
fourneau, on fait rougir les coupelles, & on les
tient rouges pendant une bonne demi-heure
avant d’y rien mettre.
Cette précaution. eft néceffaire pour les sécher
& calciner parfaitement, attendu que fi elles
contenoient quelques parties d’humidité ou de
matière inflammable, cela occafionneroit du bouillonnement
& de l’effervefcence dans l’effai.
Quand les coupelles font rouges à blanc, on
met dans chacune d’elles la quantité de plomb
qh’on a déterminée : on donne chaud, ce qui fe
fait en admettant.beaucoup d’air par le cendrier,
dont ôn ouvre les portes pour cêt effet, jufqu’à.
ce que le plomb , qui eft bientôt fondu, foit
rouge, fumant & agité d’un mouvement qu’on
appelle circulation, & bien découvert, c’eft-à-
dire, que fa furface foit unie & affez nette.
On met alors dans chaque coupelle l’argent
réduit en petites laines , afin qu’il fe fonde, plus
promptement, en continuant à donner chaud, &
même en augmentant la chaleur, par le moyen de
charbons ardens qu’on place à l’entrée de la mouffle :
en Toutient cette' cliaiéür jufqu’à çc que* l’argent
foit entré dans le plomb, c’eft-à-dire, bien'fondu
8c parfaitement mêlé avec ce métal; quandTeffai
eft bien circulant, ou diminue la chaleur, en ôtant
en tout ou en partie les charbons qui font à l’entrée
de la mouffle, & fermant plus ou moins les
portes du fourneau.
On- doit gouverner la chaleur de manière que
les effais aient une furface fenfiblement convexe,
& paroiffent ardens dans les coupelles, qui alors
font moins rouges ; que la fumée qui s’en élève
monte prefque jufqu’à la voûte de la mouffle;
qu’il fe faffe continuellement une ondulation en
tous fens à la furface des effais, ce qui s’appelle
circuler ; que leur milieu foit liffe , & qu’ils
foient entourés d’un petit cercle de litharge qui
s’imbibe continuellement dans les coupelles.
On foutient les effais en cet état jufqu’à la
fin de l’opération , c’eft-à-dire , jufqu’à ce que
le plomb & l’alliage de fin qui fe fige alors,
n’étant plus recouverte d’une pellicule de litharge,
foit devenue tout-d’un-coup vive , brillante 8c
d’un beau luifant, ce qui s'appelle l’éclair ; & fi
l’opération a été bien conduite, les deux effais
doivent faire leur éclair en même-temps, ou à
très-peu d’intervalle l’un de l’autre.
Lorfque l’argent a été bien affiné, on voit immédiatement
après l’éclair, la furface du bouton
toute couverte de couleurs d’iris, qui ondulent
& s’entre-croifent avec beaucoup de rapidité, &
alors le bouton fe fige. , r
La conduite du feu eft un article effentiel.dans
les effais ; il eft important qu’il n’y ait ni trop,
ni trop peu de chaleur, parce que s’il y a trop de
chaleur, le plomb fe fcorifie & paffe dans la oou-
1 pelle fi promptement, qu’il n’a pas le temps de
fcorifier 8c d’emporter avec lui tout l’alliage de
l’argent.
S’il n’y a pas affez de chaleur, la fifharge s’a-
maffe à la furface, & ne pénètre point la coupelle
î les effayeurs difent qu’alors l’effai eft étouffé
ou noyé.
Dans ce cas l’effai n’avancé pas, parce que la
litharge recouvrant la furface du métal, la garantit
du contaâ de l’air , qui eft abfolument ne-
ceffaire pour la calcination des métaux.
On reconnoît qu’un effai a trop chaud , lorfque
la furface du métal fondu eft extrêmement
convexe, qu’il eft agité par une circulation très-
forte ; que la coupelle eft fi ardente, qu’on ne
peut diftinguer les couleurs que la litharge lui
donne en la pénétrant; enfin, lorfque la Fumée
qui s’élève de deffus l’effai, va jufqu’à la voûte
de la mouffle, ou qu’on ne l’apperçoit point du
tout : ce qui arrive, non parce qu’il n’y en a
plus alors, mais parce qu’elle eft fi rouge & fi
ardente, ainfi que tout l’intérieur de la mouffle,
qu’on ne peut la diftinguer.
On doit diminuer dans ce cas la chaleur en
fermant le cendrier ; quelques effàyeurs mettent
même autour des coupelles de petits morceaux
oblongs & froids d’argille cuite, qu’ils appellent
des injlrumens. .
Si au contraire le métal, fondu a une furface
appîatie & très-peu fphérique par rapport à fa
maffe, que la coupelle paroiffe fombre, que la
fumée de l’effai ne faffe que ramper- à fa fur-
face, que la circulation foit très-foible, que les
fcories qui paroiffent comme des gouttes brillantes
n’aient qu’un mouvement lent & ne s’imbibent
point dans la coupelle, on peut être af-
furé que la chaleur eft trop foible, à plus forte
raifon que le métal fe fige ou fe congèle, comme
difent les effayeurs. On doit alors l’augmenter
en ouvrant le cendrier, en plaçant de gros charbons
ardens à l’entrée de la mouffle, ou même
en mettant de pareils charbons en travers fur les
coupelles ; mais il vaut encore beaucoup mieux,
t comme le remarque fort bien M. P cerner, éviter
de tomber dans ce dernier inconvénient, en donnant
plutôt une chaleur trop forte qûe trop foible,
parce que l’excès de chaleur ne préjudicie point
I fi fenfiblement à l’effai.
On commence par donner chaiidauffitôt que le
I plomb eft dans les coupelles, parce qu’il les re-
| Froidit, & qu’il efFnéceffaire qu’il fe fonde prompte-
[ ment, & même que la chaux qui fe forme à fa
I furface auffitôt qu’il eft fondu, fe fonde elie-
I même & fe convertiffe en litharge, parce que
| cette chaux étant beaucoup moins fufible. que le
I plomb, deviendrpit fort difficile à fondre, fi elle
I s’amaffoit en une certaine quantité.,
Lorfqu’on a mis l’argent dans le plomb décou-
[ vert , il faut donner encore plus chaud, non-
I feulement parce que cet argent refroidit beau-
r coup, mais encore parce qu’il eft bien moins fu-
I fible que le plomb ; & comme on doit psoduire
t tous ces effets le plus promptement qu’il eft pof-
| fible , on eft dans le cas de donner plus de cha-
1 leur qu’il n’en faut , & c’eft par cette raifon -
que, lorfque l’argent eft entré dans le plomb , on
I donne froid pour remettre les effais au degré de
[ chaleur convenable.
! Pendant toute cette opération, la chaleur doit
' toujours en augmentant par degrés juffjià’à
la fin, tant parce que le mélange métallique de-
;• v*em d’autant moins fufible , que la quantité de
plomb diminue davantage , que parce que plus
ia proportion d’argent. devient grande , par rapport
à celle du plomb, & plus ce dernier métal,
; garanti par le premier, devient difficile à fcori-
/r ’ ^-D ^ en^orte 5 par cette raifon , que les
; effais aient très chaud dans le temps de leur
; cçlair.
Quand l’opération eft achevée, on laiffe encore
les coupelles au même degré de chaleur,
pendant quelques momens , -pour donner le temps
aux derriieres portions de litharge de s’imbiber
en entier, attendu que , s’il en reftoit un peu
ous les boutons de fin, ils y feroient adhérons.
Après cela on ceffe le feu , on fait refroidir
les coupelles par degrés, jufqu’à ce que les boutons
de fin foient figés entièrement, fur-tout s’ils
font un peu gros , parce que s’ils fe refroidiffent
trop promptement , leur furface extérieure venant
à fe figer 8c à prendre de la retraite, avant
que la partie intérieure fût dans le même état,
comprimeroit fortement cette dernière, qui s’é-
chapperoit avec effort, formeroit des végétations
& même des je ts , en crevant la partie extérieure
figée.
Cèt inconvénient s’appelle écartement 011 végétation
de boutons. On doit l’éviter avec grand foin
dans les effais ; parce que quelquefois il s’élance
de petites parties d’argent hors de la coupelle.
Enfin y quand on eft affuré que les boutons d’effai
font'bien figés jufques dans leur intérieur,
on les fouléve avec un petit outil de fe r , pour
les détacher de la coupelle, lorfqu’ils font encore
très-chauds, parce qu’alors ils s’en détachent
facilement; au lieu-que quand tout eft refroidi,
il arrive fouvent qu’ils adhèrent à la coupelle,
de manière qu’ils en emportent avec eux de petites
parties , ce qui oblige de les nétoyer parfaitement
avec la gratte-boffe. _
Il ne s’agit plus après cela que de pefer bien
exaâement ces boutons à la balance d’effai ; la
quantité dont ils auront diminué par la coupellation
, indiquera au jufte lé titre de la maffe ou
du lingot d’argent effayé.
Il faut obferver que comme il n’y a prefque
point de plomb qui ne contienne naturellement
de l’argent, & qu’après la coupellation cet argent
du plomb fe trouve confondu avec le bouton
du fin , dont il augmente le poids , il eft
très-effentiel de connoître , avant que d’employer
du .plomb dans des effais, la quantité d’argent
qu’il contient naturellement, pour la défalquer
du poids du bouton d’effai.
Pour cela, les effayeurs paffent une certaine
quantité de leur plomb tout foui à la coupelle,
pèfent avec exaditude le petit bouton de fia
qu’ils laiffent : ou bien on peut mettre dans une
troifième coupelle du même plomb, qu’on emploie
daiïs les effais, 8c en poids égal à celui qui
entre dans un effai ; & après l’opération , lorf-
qu’il s’agit de pefer, ou met du côté des poids
le petit bouton de fin laiffé par le plomb feul:
on l’appelle le témoin, cela évite des calculs.
Pour éviter ces petits embarras, les effayeurs
fe procurent ordinairement du plomb qui ne contient
point d’argent, tel qu’eft , à ce qu’on affiire,
celui de Willach, en Carinthie , qui eft recherché
par les effayeurs à caufe de cela.
On remarquera en fécond lieu, qu’il paffe toujours
une certaine quantité de fin dans les coupelles
, ainfi qu’on l’a remarqué depuis longtemps
dans les affinages en grand, & que la
même chofe a lieu auffi dans les effais ou épreuves
en petit ; que cette quantité peut varier, fuivant