
ques qui employent l*or, du furhauflement des
matières premières ?
Nous croyons que l’on peut, fans inconvénient,
diminuer de quelque chofe le prix que le change
accorde à ceux qui portent aux monnoies des
matières d’or & d’argent, & fur-tout pour celles
d’or , dans lès circonftancës préfentes.
Nous avons vu que les ouvriers achètent toujours
plus cher, afin d’avoir la préférence. Si le
ro i, dqnc'l baifle de 6 livres, par exemple', le prix
du marc cror les ouvriers achèteront 6 livres
meilleur marché , la partie d’or dont ils ont un
befoin indifpënfable, & le roi lai flan t aux louis
le même poids , le même titre , il gagnera évidemment
<5 livres de plus fur fon droit de feigneu-
riag*. .
Il n’éft pas clair ,, comme on pourroit peut-être
le croire, que le roi feroit privé pour cela d ; ces
métaux, nous avons vu qu’une pente les’ entreî-
hé en France ; il faut une opération violente
pour les en faire fo rt r , & aufii-côt que les ouvriers
font approvifionnés, le refte doit, de toute
nécefl’ té , être porté aux monnoies pour recevoir
la forme qui aide à leur circulation.
Nous ne croyons pas que les droits que le roi
retient fous le nom _de feigneuriage , foient d’un
très-grand inconvénient , nous croyons même
qu’il eft jufte foutes les fois qu’il n’eft pas exagéré
; car enfin l’empreiive de FêcU efï le garant
de fon titre & de fon poids, comme nous l’a-_
vons déjà remarqué ; la très-grande commodité
qui en réfuite'pour, la rapidité des comptes & là
facilité des échanges doit le payer , puifqu’elle
évite la longueur & les frais aejfals qui feroiént
absolument indifpenfables , f i , comme en Chine ,
par exemple, on prenoit For & l’argent au poids
& au titre reconnu d’après l’expérience.
Il faut donc confidérer cette augmentation de
droit de feigneuriage comme un léger impôt dont
l’or fera grevé , & qui redonnera à l’argent la faveur
qu’il avoit ci-devant, & qu’il mérite par les
raifons fuivantes.
i°. L ’argent, comme métal, mérite la préférence,
parcs qu’il eft plus fréquemment employé dans
les arts. .
2e. Comme mon noyage, il circule plus rapidement.,
parce qu’il éft d’une-garde difficile &
incommode ; il eft d’ailleurs convenablement
coupé pour lés petits échanges, & par là, à la
portée du plus grand nombre,:
3°. L’o r , au contraire , fe .garde facilement &
n’eft employé ou g<rdé que par les riches, qui le
recherchent, foit pour les voyages, foit pour le
jeu , foit enfin pour leurs dépenfes , qui fe font
en plus grofîes ma fies,
4°. Le vrai moyen d’empêcher la fonte des
efpèces , c’eft évidemment de les charger d’une
façop qui feroit perdue ; ce n’éft pas que nous
regardions cette opération comme un crime : lorsqu'un
ouvrier fe le permet, c’eft fans doute qu’il
eft forcé par la rareté momentanée des matières
, &• pi ifqu’il furcharge les métaux d’une façon.,
il y a toujours un avantage pour l ’état ,
puifqu’il a travaillé & que quelqu’un payera
fon ouvrage.
On doit defirer feulement que ce cas là n’arrive
pasfouvent, par la raifon qu’il y a alors une
façon perdue, celle donnée aux écus ; les fondre
pour une autre defti nation , c’eft abattre une mai-
fon pour avoir les matériaux , ce qui n eft pas
toujours un profit clair , ni pour celui qui 1 en-
trepend, ni pour, le pays où on le fait.
Nous nous écartons donc encore, fur l’article
du feigneuriage, de la façon de penfer de 1 Auteur
des obiervations, mais bien légèrement ,
comme on voit ; il defireroit que les frais de fabrication
, fuffent nuis pour le public ; l’inconvénient
ne feroit pas confiderable pour le fife ,
& le public y feroit un gain confiderable , en
ceci fèulement; c’eft que le gouvernement per-
droit totalement l’idée de faire des changemens
fur un objet qu’il eft fi important de laiffer dans
l’état où il eft, quelque foit d’ailleurs cet état.
Nous avons démontré que les métaux font le
figne de l’abondance & de l’nduftrie, ( pour les
pays qui ne lés retirent pas d<* leur propre fol ;
pour lés autres il en eft tout autrement). En fa-
vorifant l’agriculture, les mânufaiftures & le commerce,
ces métaux viendront d’eux-memes, &
l’excédent de ce qui ne fera pas ouvre fera de
toute néceffité porté aux hôtels des monnoies^ .*
toute opération violente pour en avoir plus qu il
n’en vient naturellement , n’eft qu’iin véritable
emprunt, & quiconque emprunte eft plus pau-.
Vre trois mois après , qu’il n’étoit. auparavant.
Nous convenons avec l’Auteur des observations
, que l’appas du gain eft le vrai motif des
projets préfentés fi fouvent an miniftère , bien
| plus encore que du gouvernement , pûifque celui
ci a quelquefois abandonné fon droit de feigneuriage
à ceux qui -promettoient de faire porter
plus de métaux aux hôtels des monnoies que
par le pafle ; l’opération dans ce cas là eft fi fim-
ple , que le mérite ide 1 invention ne vaut pas le
prix qu’on y mer.
Suppofons que le Roi prenne trois livres par
marc d’argent monnoyé , & que les frais reels de
la fabrication femontent'à iq fous ,. il y a 2 livres
io fous de bénéfice : fi on les abandonne a une
compagnie , ceux-ci n’ont qu’à payer 25^ fous
par ma c de plus , & ils auront une pvc:erence
momentanée , qui leur fera enlevée quelque -mps
après par 1- s ouvriers ; alors ils paier-- n; :uc-
çéffivemem 30, 35 , 40fous dé plus. & perdront
eniuiie cet avantage; & lorfqu’ils feront très-; rès
dés limites du gain abfolu iur lé feigneuriage ,
foit par l’augmentation du prix accordé par les
manufacturiers, foit par le change qui devient
dèfavantageux par des achats forcés, ils rendront
leurs comptes &. quitteront la partie. Voilà à-peu-
près en quoi confifte le fecret de ces empiriques
politiques.
Puifque ce font les fnjets de l’état qui-attirent
les métaux dans le Royaume par leur indultrie , :
il paroit allez fimple de lai fier au commerce le
foin de mettre le prix qui convient à chaque ef- ;
pèce, comme il îe fait pour tout le refte des i
denrées, foit qu’il les e x p o r te fo it qu’il les in- ;
troduife en France ; on pouwroit , d’après cette
confidération, établir une foii pour toutes, que j
les matières portées aux rr.onnoyages , réduites
au titre des efpèces en ufage ; perdi oient un, deux , ;
trois pour cent , pour irais &c. de fabrication
quelconque , ce feroit comme un impôt de plus
( que chacun regagneroit par la commodité qu’on
éprouve dans l’ufage des métaux monnoyés,)
dans un pays où il y en a déjà beaucoup, & celui
là , en particulier, nous ne croyons pas que de
le fixer d’une manière invariable puiflè être un
mal nouveau.
Voilà , Monfeigneur, une partie des réflexions
que nous a occafionnées la leâure des obfervations
fur la déclaration du 30 oétobre 1785. Vous verrez
par là que la doctrine de l’Auteur eft celle de tous les
gens du métier, car il eft impoffible que lés autres
chambres du commerce , ayent donné un
autre avis. C ’eft celle dont le maintien inaltérable
importe au public , & par conféquent au gouvernement
j qui ne peut être riche que de la fortune
de fes enfans, puifqu’il ne peut prendre
qu’une partiè de' l’excédent de leurs biens. Les
maximes contraires , miles en vogue par d’obfcu-
■ res intriguans , ne peuvent prendre faveur qu’au-
près de l’ignorance ou de 1 inattention. Que tout
adminiflrateur qui ne voudra pas fe donner la
peine de réfléchir lur ces matières, en livre la dif-
euffion au public , & il verra fuir a jamais ces
proneurs d’arcanes prétendus nouveaux qui, dans
ce genre d’empirifme comme dans tous les autres
, n’ont d’utilité réelle que pour celui qui les
Vend.
Mais pour mettre les futurs adminiftrateurs à
jamais à l’abri des atteintes de la cupidité fur ces
objets , il feroit bien convenable de régler tous
les poids & toutes les mefures d’une manière
générale , & indépendante des métaux même.
Leur prodigieufe variété ne peut fervir qu’à fur-
prendre la bonne-foi peu éclairée ou inattentive ;
& n’eft-il pas bien extraordinaire que le but de
la police des empres étant de mettre le foible à
l’abri du fort, on ne veuille pas la perfectionner
au point de mettre aufli, autant qu il feroit pof-
fible, l’ignorant à l’abri des fupercheries de
l’homme inftruit.
Les lois , qui n’ont fongé qu’à remédier à l’inégalité
des forces phyfiques, n’ont réellement opéré
qu’un changement d’ordre , & faifant tout en faveur
de la force morale , elles ont remplacé un
inconvénient par un autre, & ont laiflë l’inégalité
politique fubfifter dans toute fon étendue.
Nous avons l’honneur d’être avec une parfaite
confidération, &c.
Lettre & réflexions de la chambre du commerce de
L y o n .
Noms avons reçu , Moniteur, avec la lettre que
vous nous avez fait l’honneur de nous écrire le
27 oétobre dernier, les deux exemplaires qui y
étoient joints du mémoire d’obfervations que
vous avez rédigé fur la déclaration du 30 oétobre
1785, concernant les monnoies.
Nous avons lu ce mémoire avec toute l’atten»
tion qu’exige un ouvrage av.ffi intéreflant, & nous
joignons ici les feules réflexions dont nous le
croyons fufceptible :
Nous les foumettons, Monfieur, à vos lumières
, & nous n’en fommes pas moins co i vaincus du
mérite & de la juftefle de vos obiervations :
Nous avons l’honneur d’être avec une refpec-
tueufe confidération, &c.
Réflexions de la chambre du commerce de la ville
de L y o n , fur le mémoire intitulé obfervations
fur la déclaration du 30 oêtobre 1783.
L’Auteur du mémoire démontre, d’une manière
aufli folide .que lumineufe , le piéjudice énorme
qu’ont caufé au commerce & à Fêtai , les fur-
achapts ou remifes que le gouvernement a accordé
trop'fouvent & trop légèrement à quelques
particuliers.
Le numéraire n’eft fufceptible d’un accroilfement
réel & ftabie que de la quotité du bénéfice ré-
fultant de la balance du commerce , déduction
faite de la partie des métaux employée à d’autres
ufiges ; toute opération tendante à furpafler
cette mefure, n’aboutit qji’-a diminuer la créance
proportionellernent à la variation des changes ,
qu’une pareille opération produit à fon préjudice.
Le mémoire contient aufli d’excellentes raifons
pour détruire le faux préjugé du prétendu préjudice
que peut caufer à la nation, l’exportation
& la fonte des efpèces ; il eft prouvé au
contraire que l’un & l’autre . dans certaines cir-
conflances, bien loin de lui être nuifibhs , ne peuvent
tourner qu’à fon avanrage.
Quant à la valeur comparative des métaux ,
il ftmble qu’il eft naturel même utile de fe
rapprocher à un certain degré, de la mefure proportionnelle
établie dans les lieux de leur origine,