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Un mélange fur-tout de quatre onces de platine
& douze de plomb fe caffa en grandes pièces
blanches, brillantes, femblables à du talc ,
qui étant expofées à l’air , changèrent en fort
peu de temps : par exemple, en moins dune
heure , en rougeâtre , pourpre & bleu fonce ; o£
à la longue, mais lentement, prirent une couleur
noire, obfcure & tirant fur le pourpre.
Il naroit donc que les rapports de la platine
avec l’étain & avec le plomb font fort dttte-
rens. Quoiqu'une petite proportion en [ou faille
& tenue futpendue par le plomb à une chaleur
fort douce, une grande proportion n en eft pas,
à beaucoup près, fi aifém.-nt difloute que par
l’étain ; & quand ils font unis par une chaleur
forte, elle fe précipite ert grande partie lorfque
la chaleur fe rallentit. .
Une petite quantité roidit & durcit le plomb
plus qu’elle ne fait l’etain ; mais une grande ne
diminue pas tant, à beaucoup près, fa malléabilité
: un mélange de parties égales de platine
& de plomb, quoiqu’il n’ait rien de la du&ihte..
que chacun des métaux avoit feparement , eft
beaucoup moins' fragile que le mélange de parties
égales de platine & d’étain ; mats les phénomènes
les plus remarquables dans les mélanges
avec le plomb, font le tiffu feuilleté ou fibreux,
& une conteur pourprâtre ou bleuâtre. , ou la
difpofition à acquérir promptement ces couleurs
à l ’air, & le noir auquel ils fe changent en-
"Le bifmuth , comme on a déjà vu , donne
avec la platine, à-peu-près les mêmes apparences
, quoique dans un degte un peu inferieur .
& comme aucun des autres corps métalliques
que j’ai mis à l’effai, ne s’eft trouvé affefler la
platine, ni en être affeaé de cette manière, on
pourra ajouter ces expériences à celles de M.
Geoffroi , inférées dans un des derniers volu-
mes des Mémoires de l’académie des fciences *
afin d’établir une analogie entre le bifmuth 8c le
plomb.
La platine avec l* arfenic.
L’arfenic blanc eft une chaux métallique volatile
, qu’on peut réduire à fa forme métallique ,
en l’expofant à une chaleur moderee avec des
additions inflammables. Un mélangé d arfenic
blanc, & de fel alkali fixe , de chacun un once,
avec deux onces dé poudre de charbon de bois,
étant preffé ’uniment dans un creufet, on eten-
dit une once de platine par-deffus. Alors le creufet
fut couvert & lutté exa&ement, & entretenu
douze heures à une chaleur dé cémentation
modérée, qui vers la fin de l'opération fut
augmentée à un degré confidérable.
En fèparant la platine d’avec le mélangé par
des lotions, beaucoup de fes grains parurent
dirifés , & fon poids fut augmenté de quelque
chofe. Etant enluite expofée brufquement à un
feu très-tort , elle ne le fondit pas , mais jeta
des vapeurs arfenicales ; 8c apres quelles eurént
ceffé, on trouva que la platine pefoit une once jufte
comme auparavant.
Cette expérience paroiffant montrer que la platine
6c l’arfenic ont quelque difpofition à s’unir,
je me difpofois à la pourfuivre, pour voir fi une
plus forte quantité d’arfenic ne pourroit pas fe
combiner avec la platine, de façon à la mettre
en fufion, lorfqu il m’eft tombe entré les mains
un mémoire de M. Scheffer, dans lequel je trouve
fur certe matière une expérience remarquable.
M. Marggraf a pareillement effayé depuis la
platine avec l’arfenic, d’une façon qui n eft pas
fort différente de celle que j’ai rapportée ci-defius.
M. Marggraf a mêlé une dragme de platine
avec deux dragmes d’arfenic blanc , 8c expofé le
mélange au feu dans une retorte de verre. Lar-
fenic s’eft fublimé fans aucune couleur , 8c alaiüé
la platine blanche, ôc fans diminution de fa pe-
fanteur. Le procédé a été répété avec la meme
quantité de nouvel arfenic, 6c le feu augmenté
à un degré aufli fort que l’a pu fuppor-
ter la retorte garnie ; l’arfenic a toujours monté
blanc , mais les grains de platine étoient alors devenus
noirs , quoiqu’ils continuaffent encore a
être malléables, & qu’ils pefaffent autant qu’au-
paravant.
Une dragme de platine, deux d’arfenic & une
de foufre, étant bien mêlées enfemble 8c traitées
de la même manière , l’arfenic 8c le foufre fe
fublimant enfemble, formèrent un compofé rouge,
comme ils font d’ordinaire lorfqu’ils font unis
dans ce$ proportions ; pour la platine, elle devint
noirâtre , Ôc fe trouva peler environ une
trentième partie plus qu’elle ne faifoit d abord.
1.1 femble -donc que par cette manière de conduire
le procédé, l’arfenic a moins d’effet fur la platine
que dans mon expérience rapportée ci-defi*
fus.
M. Scheffer a procédé d’une manière différente ;
il fit d’abord chauffer fortement la platine toute
feule dans un creufet ; enfuite ayant jeté un peu
d’arfenic par-deffus, ils fe fondirent fur-le-champ.
Il remarque que la platine fe fond avec l’arfenic
aufli aifément que le font le cuivre & le ter
lorfqu’ils font mêlés avec l’arfenic 9 quil nelt
pas befoin pour cela d’aucun flux ; quune partie
d’arfenic blanc eft fuffifante pour ving-quarre
parties de platine ; & que la platine ainfi fon-
due avec l’arfenic eft tout-à-fait friable , 8c fan
une caflure grife, ‘comme l’argent imprégné d ar-
fénic. • -*. r
Il a paru, en répétant cette expenence, que ,
quoiqu’on ne puifle pas reprocher a cet ;au“
teur judicieux aucune méprife , cependant le peu
de platine qu’il avoit pour faire cet èffai , la
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tfîis dans l’impoflibilité de découvrir les limitations
, avec lefquelles il faut entendre cette action
forte de Tarfenic fur la platine.
Quand on n’emploie que quelques grains de
platine , on a toutes les apparences d’une vraie
fufion ; mais en prenant une greffe quantité ,
on trouve fréquemment que la fufion n’eft que
fuperficielle & imparfaite.
Une once de platine fut chauffée fortement
dans un creufet, & on jeta par-deffus, à diver,-
fes reprifes, des morceaux d’arfenic blanc, iuf-
qu’à ce que l’arfenic monta à-peu-près à la
même pefanteur que celle de la platine : quelques
uns des grains fe fondirent en gouttes rondes
; la plus grande partie fe joignit en une
malle cohérente , différente de celles dans lef*
quelles vla platine feule fe forme au feu , en ce
que fa furface étoit unie 8c uniforme , & les
grains plus fermement adhérens. J’ai traité'une
autre once de platine de la même manière, &
avec le même fuccès.
La maffe étoit d’une furface unie , comme fi
elle eût été parfaitement fondue ; mais fa partie
intérieure étoit compofée d,e grains de platine
dans leur forme ordinaire. J’ai mis les. deux
mafles dans un creufet avec de nouvel arfenic
mêlé de poudre de charbon de bois , & j’ai
pouffé le tout à un feu violent pendant une
demi-heure : ils ont coulé en un culot , de la !
figure du fond du creufet , uni à l’extérieur ,
& d’une couleur blanche brillante comme celle
du vif-argent , fort caftant, gris en dedans ,
d’un tiftu fpongieux, avec un petit nombre de
grains de platine reliés entiers dans le milieu :
le creufet étoit tapifté d’un verre noir, qui étoit
probablement une vitrification de la partie fer-
rugineufe de la platine , & plufieurs globules
métalliques brillans , adhérens à la matière vi-
treufe.
Le culot fut mis enfuite dans un creufet fortement
chauffé , avec de nouvel arfenic'& du
charbon de bois pulvérifé } & on excita le- feu
avec des fouiHets pendant encore une demi-
heure.
Il fe fondit, comme auparavant, comme une
maffe remplie de petits vuides , dans laquelle
on ne pouvoit plus voir aucuns grains de platine.
Elle fut encore traitée de la même manière
avec de l’arfenic nouveau , & on effaya de la
verfer du creufet : mais quoiqu’on eut donné
une très-forte intenfité au feu , le métal ne voulut
pas couler hors du creufet ; étant donc
pouffé à un feu vif fans aucune addition , la
matière s’épaiflit en un culot de la même apparence
que celui d’auparavant. Mais un morceau
de cette maffe qu’on mit de nouveau dans
un creufet fortement chauffé , ne parut pas Arts 6* Métiers, T»me VPart, IL
s’amollir, ni fouffrir aucun changement dans fa
figure.
Le refte du culot fut enfermé entre deux petits
morceaux de charbon , à chacun defquels on
avoit pratiqué une cavité pour le recevoir : le
ch irbon fut enfuite garni par-tout de lut ; &
quand il fut fec entièrement , on le jeta parmi
les autres matières combuftibles devant le nez
du foufflet : le métal ne changea point de figure
, ni ne diminua de pefanteur. Je pris une
demi-once du métal & je l’arfeniquai encore de
même qu’auparavant , en y ajoutant, à différentes
fois, de plus en plus d’arfenic : il coula
en culot comme auparavant, ma*s on eut beau
augmenter le feu , ou y ajouter de l’arfenic ,
il ne fut pas poiïible de rendre la matière aff
fez claire pour couler hors du creufet. Je pris
encore une demi once de platine , 8c ayant
combiné avec^ elle autant d’arfenic que je le
pus par des içje&ions réitérées , je réduifis
la maffe en une poudre groflière ; je la mêlai
avec du flux noir 8c un peu de nouvel arfenic ,
8c pouffai le tout à un feu très-vi? dans, un creufet
fermé.
Le métal coula en une maffe fpongîeufe , qui
retenoit cà 8c là des particules du flux dan.s fes
cavités , preuve qu’elle n’avoit* pas coulé claire
8c en liqueur.
Il réfulte de tout ceci que la platine fe fond
bien avec l’arfenic , mais moins parfaitement
qu’avec d'autres métaux , 8c qu’il feroit fort
difficile , pour ne pa-: dire impoflible, de l’amener,
fur ce fondement, à une fufion fuffifante pour
la pouvoir verfer dans un moule. Tous les morceaux
imprégnés d’arfenic font caffans , d’une
couleur grifâtre en dedans , 8c d’un tiffu lâche
8c grenu.
Il eft à remarquer que quoique l’atf nie fe
change bientôt dans l’air en une couleur' noirâtre
, 8c qu’étant mêlée avec d’autres métaux ,
elle difpofe la plupart à fe changer de la même
façon , la platine chargée d’arfenic, après avoir
féjourné pendant fept ou huit ans dans une
chambre lèche , conlerve encore à-peu - près
la même apparence qu’elle avoit d’abord.
La platine avec le %inc.
Pour unir le zinc avec la platine , j’ai effayé
d’abord la méthode qu’on obferve communément
pour incorporer le zinc avec le cuivre , 8c en
même temps pour purifier le zinc de ces autres
corps métalliques, qui fe trouvent fouvent mêlés
avec lui ; c’efî-à-dire , d’expofer la platine aux
vapeurs qu’on dégage au moyen du feu 8c d’additions
inflammables, d’avec la calamine, qui