
On appelle or mat, l’or qui, étant mis en oeuvre,
n’efl pas poli.
Or bruni, celui qui eft poli avec la dent-de-
loup, pour détacher les ornemens de leur fond.
Or fculpté, celui dont le blanc a été gravé de
rinceaux & d’ornemens de fculpture.
Or réparé, celui qu’on eft obligé de repaffer
avec du vermeil au pinceau, dans les creux _ de
fculpture , ou pour cacher les défauts de l ’o r , ou
encore pour lui donner un plus bel oeil.
Or btetelé, celui dont le blanc a été haché de
petites bretelures.
Or de mofaique, celui qui, dans un panneau , eft
partagé par petits carreaux ou lofanges , ombrés
en partie de brun , pour paroître de relief.
Or rougeâtre ou verdâtre, celui qui eft glacé de
rouge ou de verd, pour diftinguer les bas-reliefs
& ornemens de leur fond.
Il y a encore de Yor à Vhuile, qui eft de Yor
en feuilles appliqué fur de l’or couleur, aux ouvrages
de dehors, pour mieux réftfter aux injures du
temps , & qui demeure mat.
l’Or moulu , dont on dore au feu le bronze , &
l*or en coquille, qui eft une poudre d’or détrempée
avec de la gomme , dont on ne fait ufage
que pour les dtllins.
Or mat , fe dit des parties d’or fur les bijoux ,
qui ont été amaties & pointillées au cifeletou au
matoir, qui font reftées fur leur couleur jaune ,
ou aux quelles on l’a reftituée par la couleur au
verdet, ou au tire-poil.
Or b a t t u , o u or en feuilles , fe dit de l’or
réduit en feuilles minces & préparées pour la
dorure ; cette préparation eft du relîort du batteur
d’or. Voye^ Batteur d’or.
O r en lames , fe dit de l’or écaché entre
deux roues du moulin à laminer , pour être employé
dans les galons. Comme on ne fait point
de galons d’or à caufe de leur cherté & de la trop
grande pefanreur, ce terme ne peut guère s’entendre
que de l’argent' doré , auquel l’ufàge a
improprement confacré le nom d’or : on dit or en
lame , or trait, or filé , galon d’or , quoiqu’il ne
s’agiffe que de galon d’argent doré, & des parties
qui le cempofent.
Or tra it , fe dit de l’argent doré réduit en
fil extrêmement menu & délié, que l’on emploie
pour faire des boutons .& quelques parties de broderies.
Or filé , fe dit de F argent doré, réduit en lames
minces & étroites, filé enfuite au moulinet fur
de la foie, du fil ou du crin, pour les galons &
la broderie.
Or f a u x , fe dit des lames, paillettes, filés ,
galons, &c, & autres pièces de cuivre doré &
imitant l’or.
O r fin , fe dit de l’or qui eft au titre de 24
karats ; mais comme il eft difficile , & pour- ayifi
dire impoffible de rencontrer de l’or au titre de 24
karats, foit parce que dans les diffolutions les
plus parfaites , ou les affinages les mieux exécutés,
la chaux d’or , ou le régule , refte toujours chargé
de quelque légère partie d’argent, foit qu’avec
les précautions les plus exaftes, il eft difficile
d’empêcher que le morceau deftiné à l’effai ne
contracte quelque légère impureté , il fuffit que le
cornet rapporte 23 k y j de karat pour être réputé
fin ; car alors le poids qui s’en manque étant la
128e. partie du grain de poids de marc, eu égard
au poids d’effai dont on fe fart en France, il eft
fenfible qu'une fi légère diminution, & prefque inévitable
, ne peut nuire à la finefle du titre , & ne
fait que conftater combien on doit apporter de
foin aux affinages, & combien il eft difficile de
dégager entièrement les métaux des parties hétérogènes
qu’ils renferment dans leur fein.
Il en eft de même de l’argent fin, qui doit être
au titre de douze deniers, & que l’on trouve
rarement à ce titre , parce que dans les affinages
les plus complets, & les diffolutions les mieux
faites & les plus foigneufement décantées, il eft
impoffible que l’argent ne retienne quelques parties
de plomb ou de cuivre : celui qui fe trouve an
titre de 11 deniers 23 grains, eft réputé fin ; quelquefois
on en a trouvé à 11 deniers 23 grains ~
mais cela eft très-rare.
Nous remarquons ici en paffant, que les effais
d’argent demandent beaucoup plus de foin & d’attention
que les effais d’or, que leur fûreté dépend
d’un nombre de conditions accumulées, & que
leur certitude phyfique eft bien moins confiante
que celle des effais d’or : car comme cette opération
fe fait au fourneau de réverbère, il eft important
de veiller à ce que le feu ait partout une égale
aélivité : autrement le feu étant plus v if dans une
partie du fourneau que dans l’autre, le plomb entre
plus tôt en a&ion dans une coupelle que dans
l’autre , & la torréfaction étant plus v iv e , il peut
ronger & emporter avec lui quelque parcelle d’argent,
tandis que les autres boutons d’effais fur
lefquels le plomb n’aura eu qu’une aâion lente
par défaut d’a&ivité du feu , pourront retenir dans
leur fein des parcelles de plomb ; ce qui avantage
les uns & fait perdre aux autres.
Il faut en outre bien prendre garde qu’il ne fe
faffe des cheminées, & les boucher à l’inftant
qu’on s’en aperçoit ; autrement l’air frappant fur
le bouton , peut le faire pétiller, & écarter quelques
grains. Il faut d’ailleurs garder fon plomb à
raifon du titre de l’argent qu’on veut effayer ,
autrement on pourroit Taire de grandes erreurs.
Or au titre , fe dit de l’or qui eft au titre de
20 karats , qui eft celui prefcrit par les ordonnances
pour les bijoux d’or.
Or bas , fe dit de l’or qui eft au titre de 10 ,
12 , jufqu’à 19 karats: audeffous du titre de 10
karats , ce n’eft plus proprement qu’un billon d’or.
Or bruni , c’eft de l’or que l’on a liffé & poli
avec un infiniment de fer qu’on appelle brunif-
foir, fi c’eft de l’or ouvré, ou de la dorure fur
métal;
métal • & avec une dent-de-loup, fi c’eft de la
dorure fur détrempe.
Or EN CHAUX , fe dit de l’or réduit en poudre
par quelques diffolutions quelconques.
L’or en chaux eft réputé le plus fin, & c’eft
celui dont fe fervent les doreurs ; mais il eft toujours
prudent d’en faire l’effai avant de l’employer
, & de ne pas s’en rapporter à la foi des
affineurs ou départeurs , attendu qu’ils peuvent
aifément vous tromper : il leur eft facile , en ver-
fant quelques gouttes de vitriol dans leurs diffolutions
, d’y précipiter un peu d’argent, fans alré-
rer la couleur de leurs chaux, & , moyennant cela ,
fans qu*on s’en aperçoive à l’infpe&ion.
Or aigre , fe dit de tout or qui éprouve des
fraôures ou gerfures dans fon emploi, fous l’effort
du marteau ou celui du laminage : fi on n’em-
ployoit que de l’or fin, il eft certain qu’il feroit
plus duâile ; mais comme les ouvrages devien-
droient beaucoiip plus lourds , & n’auroient pas
tant de folidité, ni une auffi belle couleur , il
faut l’allier (car nous remarquerons en paffant ,
que plus les métaux font durs, plus ils font dif-
pofés à recevoir un beau poli ).
Avant qu’on travaillât l’or d’une couleur auffi
rouge que celle qu’on lui donne aujourd’h u i, l’or
ri’étoit pas fi fujet à contracter des aigreurs ,
perce qu’alors on l’allioit avec de l’argent en totalité
où en partie ; mais depuis qu’on l’a voulu avoir
d’un rouge extraordinaire, il a fallu l’allier avec
lè cuivre feul : or , comme l’or ne s’allie pas fi
facilement avec le cuivre qu’avec l’argent, il faut
employer le cuivre de rofette le plus doux qu’il
foit poflible, & en même-temps le plus rouge ;
néanmoins, quelque doux que foit-le cuivre, l’or a
de la peine à le recevoir dans fon fein , & il fuffit
de voir dans le creufet les combats que ce mélange
occafionne, pour juger de, la répugnance qu’a l’or
de s’allier avec le cuivre. Lors donc que i’aloi
occafionne de l’aigreur , on s’en aperçoit aifément
dans le bain ; on voit le bain s’agiter à fa
fuperficie, tantôt jeter des fleurs, tantôt former
des éclairs ; il n’eft point alors de moyen fixe à
indiquer pour l’adoucir : il eft des aigreurs qui
cèdent à la proje&iôn du falpêtre- feul ; il en eft
d’autres qui Veulent le falpêtre & le borax ; une
autre efpèce demande le criftal minéral : en général
, le borax eft ce qui réuffit le mieux , mais
il a l’inconvénient de pâlir l’or.
Quand l’aigreur procède de quelque mélange
de plomb , d’étain , de calamine ou cuivre jaune ,
on s’en aperçoit aifément, parce qu’alors il s’élève
fur la furface de petites biilles de la forme
a-peu-près d’une lentille ; le moyen d’adoucir
cette efpèce d’aigreur , eft le mélange de falpêtre
& de foufre.
Au furplus, c’eft à un artifte intelligent à tâter
fon métal, & a v o ir , par l’efpèce d’aigreur apparente
, quels fels y conviennent le mieux ; mais
il ne doit point verfer fon or , qu’il ne foit affuré
Arts 6* Métiers. Tom. V. Part. IL
de fa dudilité par la tranquillité du bain ; ce qui
fe remarque aifément, fur-tout quand les fels fondus
couvrent exaftement la furface, & qu’aucun
éclair ni bouillonnement ne les fépare ; alors l’or
eft certainement doux.
Il faut encore obferver qu’on ne doit point toucher
l’or en fufion avec du fer, autrement on court
rifque de l’aigrir, ce qui lui eft contraire avec
l’argent, que l’attouchement du fer adoucit. L’argent
n’étant pas fi fujet à contraûer des aigreurs ,
pour peu qu’on lui en aperçoive, le falpêtre ,
quelques croûtes de pain & le favon fuffifent
pour en venir à bout.
O r de couleur , terme qui exprime les différentes
couleurs que l’on a trouvé le moyen de donner
à l’or par l’alliage d’autres métaux avec lui.
On emploie ces ors colorés, ou, pour mieux dire,
nuancés, particulièrement dans les bijoux d’or ,
pour y repréfenter avec plus de vérité les fujets
que l’on veut exécuter , oc approcher, autant qu’il
eft poffible, de l’imitation de la nature.
Veut-on repréfenter une maifon? on emploie
l’or blanc ; un arbre, l’or verd ; une draperie ,
l’or bleu , l’or jaune ; les chairs fe font volontiers
avec de l’or rouge.
On ne connoît quejcinq ors de couleur,qui font l’or
blanc, For jaune, l’or rouge ,. l’or verd, l’or gris ou
bleuâtre.
L’or jaune, eft l’or fin dans toute fa pureté.
L’or rouge, eft un or au titre de 16 karats ^
allié par trois parties d’or fin fur une de cuivre
rofette.
L’or verd eft auffi au titre de 16 karats, fait
avec trois parties d’or fin & une partie d’argent fin.
L’or verd eft . celui dont un : habile artifte peut
tirer le plus de parti pour les nuances , parce que
c’eft celui pu elles fontj le plus fenfibles. Le verd
dont nous venons de donner la proportion, fournira
un beau verd de pré. Mettez ( en confidé-
rant la totalité comme 24 ) 18 parties d’or fin fur
6 d’argent fin , on aura un verd feuille morte ;
en mettant au contraire 10 parties d’argent fin fur
14 d’or fin, on aura un verd d’eau : c’eft à Fartifte
à- confulter fes nuances &. fes fujets pour régler
fes alliages.
L’or gris ou bleu , ou, pour bien dire, ni gris nî
bleu, mais bleuâtre, fe fait par le mélange de
l’arfenic ou de la limaille d’acier : la fumée de l’ar-
fenic étant très-dangereufe, on s’en fert peu ; &
comme il arrive fouvent que la limaille d’acier fe
brûle trop v ite , on a éprouvé que ce qui réuffiffoit
le mieux étoit du gros fil de fer doux, dont or
prend un quart du poids que Fon veut nuancer ,
& que l’on jette dans le creufet.
Lorfque l'or eft en bain , il s’en faifit alors ordinairement
affez vite ; on retire le tout du€eu auffi-
tôt qu’on s’aperçoit que l’incorporation eft faite ;
autrement l’or, en bouillant long-temps, le rejette-
roit de fon fein par feories : cette couleur peu décidée
eft cependant la plus difficile à faire.