
les étendre en pages, que pour étendre feulement
la même quantité de porfes en France, après
en avoir féparé les feuilles dans l’état de molleffe
& d’adhérence où elles fe trouvent. Ainfi 7 en
fuivant la méthode HollandoHe ,on a non-feulement
les bons effets de l’échange, mais encore le
bénéfice de la main-d’oeuvre; Toutes nos opérations
après la ; colle , ne font que des manipulations
de pure nécefîité; aucune ne tend à l’amélioration
de l’étoffe : on expédie le travail fans •
penfer que, par des manoeuvres très-imparfaites ,
on détériore les papiers.
Nous avons vu combien la féparation brufquée
des feuilles de papier nouvellement collées fai-
foit lever de poils à leur fuperficie, & combien
elle groffiffoit le grain dans les fabriques de
France* Nous avons remarqué aufli que ces inégalités
, expofées enfuite à unè defliccation rapide,
fe trouvoiènt invariablement fixées en cet état
après* la colle. Il n’efl donc pas étonnant qu’il
réfulte le plus fouvent de toutes ces opérations
peu réfléchies , une étoffe dure , fèche ', fans
aucune douceur à la furface, au lieu d’urçe étoffe
fouple & ferme, d’un grain uni •& lifle, qu’on
auroit pu obtenir par cette fuite d’apprêts que
nous venons d’expofer.
Si l’on joint à cés corïfidérations celle des caf*
fiés , ou' des autres dèfeâuofités qui font la fuite
de l’étendage fait feuille à feuille après la colle,
malgré l’adreffe fmgulière de nos falerantes, on
fera encore plus frappé de l’avantage que l’échange
a procuré aux Hollandois. Outre les feuilles
cajfèes entièrement & qu’on met au rebut,
combien n’en voit-on pas dont les coins ou pâr=
tie des bords font enlevés & déchirés., au milieu
des efforts continuels qu’il faut faire pour
exécuter cette longue & pénible féparation? C ’eft,
il eft vrai, à la nature de leurs pâtes non pourries
, que les Hollandois doivent l’avantage d’avoir
fupprimé notre étendage feuille à feuille,
parce que leurs papiers peuvent fe prêter à toutes
les manipulations qu’exigent les apprêts qu’ils ont
fubftitués aufîi avantageufement à cet étendage;
au lieu qu’avec nos pâtes pourries, nous fommes
réduits à ne point adopter ces apprêts fans incon-
véniens, quoique nos papiers en aient un fi grand
befoin.
Des papiers cajfés.
On peut fe rappeler que dans les différens détails
de nos procédés , foit de fabrication, foit d’apprêts
, j’ai fouvent fait mention des papiers cajfés.
On a vu les leveurs occupés à détacher des
feutres les feuilles qui adhéroient, & affez fou-
vent déchirer ces feuilles par les coins, du bien
arracher feulement des portions de bordures ,qui
ne pouvoient foutenir l’effort néceffaire pour dégager
la feuille entière.
La même étoffe de pâtes pourries, foumife dè nouveau
en porfes blanches à la preffe , n’a pas encore
acquis une folidité fuffifante pour être relevée fans
que les cajfés fe multiplient à un certain point.
Lorfque nous étendons en pages, nous d é c h irons
encore affez fouvent les feuilles fur to u te
leur longueur, parce qu’une moitié s’enlève p e n dant
que l’autre relie adhérente à la porfe. D ’ailleurs
, nous comptons toujours que deux a tro is
feuilles de l’extrémité de chaque porfe qui fr o ttent
fur le trapan, ou qui portent fur le p la n c h e r
de l’étendoir lorfqu’on ramaffe les pages , font
déchirées de manière à ne plus fervir que d e m a-
culatures. C ’eft un facrifice que notre n é g lig e n c e
femble faire fans regret.
Dans le collage, nous caffons aufîi quelques
feuilles des poignées , fur-tout fi nous les laifïbns
flotter un trop^Jong-temps dans le mouilloir, &
fi les poignées font compofées de pages trop
épaiffes & peu afTouplies, on voit quelquefois de
cés pages entières le cajfer.
Enfin, nous avons fait voir combien l’ufage où
nous étions de féparer. chaque feuille des poignées
après la colle, produifoit de caffés, & les autres
défeéluofitês lemblables, & nous avons m o n tré
cette perte comme une fuite de la méthode de
pourrir.
D’après tous ces détails, on ne fera pas. étonné
de nous voir porter ici les papiers caffés ou déchirés
, au^ quinzième de la fabrication totale du
papier qui 1e fait en France.
Ea Hollande , les fabricans ne comptent guère
que fur un foixantième au plus de papier caffé
ou déchiré, quoique leurs papiers foient expofés
de plus que les nôtres, aux manipulations des
relevages & des preffages de deux échanges. O n
n’aura pas de peine à compter fur cette é v a lu a tion
modérée des pertes des Hollandois, fi l’on
réfléchit à la folidité de leurs étoffes , à la facilité
avec laquelle le leveur détache les fe uilles
des feutres, à la commodité du relevage d a n s les
deux échanges, & aux deux étendages en pages
après les échanges.
Outre cela, je dois faire remarquer que le s fabricans
Hollandois ont la plus grande a tte n tio n
pour que leurs porfes ne foient jamais p lacées
immédiatement fur les plateaux ou trapans , lorf-
qu’après l’échange on les porte à l ’é t e n d o i r : que
des feutres ou des papiers gris bien c o l l é s , les
préfervent d’être déchirés par les frotteméns de
toute efpèce auxquels, les différens tra n f p o rts
les e x p o f e n t ; que ces mêmes papiers gris les fui-
vent dans la préparation des poignées, dans le
collage, dans les opérations de l’échange après la
colle , & enfin dans l’étendage , &c.
On doit fentir, d’après ces détails , combien il
feroit important pour nos fabricans, de prévenir
les caffés, non-feulement dans les manipulations
ordinaires de la fabrication ou des apprêts, mais
encore dans les tranfports & dans les frottemens
auxquels une étoffe auflifoible ne peut paô ré-
fifter fans de grandes précautions.
Des travaux de la-faite.
Après que le papier eft féché feuille à feuille
aux cordes de l’étehdoir, on le recueille & on
en fait dés paquets, qu’on porte à la falle, où il
reçoit fés derniers apprêts, qui confiftent d’abord
à le faire paffer fous la preffe, à le trier, à l’éplucher
, à le plier, à le compter & à le mettre
en main. Il y a quelques fabriques où on le lifle,
où on le b at, & où on l’ébarbe ; mais cela n’eft
pas général, & il y en a beaucoup même où l’on
a fupprimé des préparations qui fe fuppléent avantageufement
par d’autres. Tels font le liffage &
le battage , qui ont été retranchés depuis que, par
les manipulations .de l’échange, on eft parvenu
à adoucir le grain du papier beaucoup mieux
que par ces deux opérations. Nous nous bornerons
donc ici à indiquer les opérations de la
falle, qui font effentielles & indifpenfables.
La fig. 5 repréfente les preffes de la falle & le
falerant, qui met en preffe les papiers, foit au
fortir de l’étendoir, foit après qu’ils ont paffé par
les mains des falerantes. Cette opération eft très-
importante , parce qu?elle fait difparoître beaucoup
de faux plis, les inégalités, les grandes af-
pérités du grain du papier. C’eft aufîi par cette
raifon que les preffes de cet atelier font très-
fortes & doubles, comme on le voit à la fig. 5.,
& dans la vignette de la planche XIII. Il y a dans
cet atelier deux doubles preffes, placées parallèlement
l’une à côté de l’autre. Les deux mon-
tans AB & ab des extrémités de chacune de ces
preffes, ont douze pieds de longueur, & font élé-
gis & équarris à onze pouces fur neuf pieds de
long, avec renforts, boffages & embrèvement ati-
deffus de l’écrou Dd , & fous le feuil dont la
furface fupérieure affleure prefque le rez-de-chauf-
fée, où il eft fcellé dans une’ forte maçonnerie,
aufîi bien que les boffages des éxtrémités inférieures
des montans ou jumelles. Le feuil a deux
pieds de largeur fur dix-huit pouces d’épaiffeur,
& huit pieds neuf pouces de longueur, ainfi que
l’écrou D d , qui eft de bois d’orme, & qui a dix-
huit pouces d’épaiffeur fur vingt - un pouces de
largeur. Il eft percé de trois trous , deux font
taraudés pour recevoir les vis de la preffe ; le
troifième eft une mortaife qui reçoit le tenon
fupérieur en queue d’aronde, lequel termine le
montant du milieu, & a\l moyen duquel il eft
arrêté par des clefs. Le tenon inférieur du même
montant eft fixé au feuil par des clefs qui entrent
deffous le feuil : Jjl y a fix pieds de diftançe de la
furface fupérieure du feuil jufqu’à la furface inférieure
de l’écrou, & trois pieds de diftançe d’un
montant à l’autre. Les faces oppofées des montans
font à rainure, pour recevoir & fervir de guides
aux bancs de preffe entre lefquels & le feuil
! fe fait là compreffion des piles de papier F f qu’on
I y placé. On ne voit dans la vignette qu’un feu!
montant C E , des trois qui compofent la fécondé
preffe parallèle à la première ; dans la fig. T^.on
voit une falerante qui eft aflife à côté d une table ;
qui trie & qui épluche le papier , c’eft-à-dire,
qu’elle en fait plu fie drs lots, fuivant les différens
degrés de perfection ou de difauts qu’elle y remarque
; elle en ôte aufîi les noeuds, les boffes ,’
les fils, les matières hétérogènes qui peuvent gâter
les feuilles ; elle fe fert pour cela d’un grattoir a ,
qu’on voit par terre en b , fig. 2 , enfuite elle plie
feuille à feuille, &rnet chacune de ces feuilles dans
le lot qui leur convient. Là fig. repréfente une-fa'e-
rante qui paffe la lifle fur une feuiile de papier. Eiic t ft
debout devant la table qu’on appelle lijfoir, du
bord de laquelle pend une peau de bafane en ƒ ,
& qu’elle relève & étend fur la table. C ’ eft fur
cette peau qu’elle place la feuille qu’elle veut liffcr,
puis avec une pierre dure & polie , elle frotte en
tous fens la feuille qui n’acquieit pas par ce moyen
un grand apprêt. On voit en a , fig. 2 , la forme
de la pierre à lifler. La fig. 3 eft une falerante occupée
à ployer le papier en deux ; elle fe fert d’un
morceau de bois dur, poli & d’une forme fem-
blable à celle des pierres à lifler, que l’on appelle
aufîi pierre ; c’eft avec ce morceau de bois qu’en
paflant le long du milieu de la feuiile , dont elle
a rapproché les deux bords en les mettant l’un
fur l’autre, qu’elle forme le pli des feuilles. Elle a
devant elle deux piles c d de papier ; dans la
première les feuilles font dans toute leur étendue,
& dans la fécondé d , chaque feuille eft pliée :
c’eft dans ces derniers tas que prend la falerante
{fig. 4 , ) qui compte les feuilles pour en former
les mains de 25 feuilles : 20 de ces mains font une
r-ame marchande , qui conti nt par conféquent
jc o feuilles.
Lorfqu’on a un certain nombre de ces mains,
on les porte fous la preffe pour recevoir le dernier
apprêt, & le plus grand aplstiffemenr qu’il foit
pofïible ; c’eft dans cet état qu’on en fait des paquets
en rames, en les enveloppant de maculatu-
res, & en affujettiffant cette enveloppe par une
ficelle en croix. Le papier eft alors en état d’être
livré & envoyé à fa deftination.
Il y a des fortes de papier dont on laiffe les
feuilles dans toute leur étendue , fans les plier; &
1 il eft à défirer que cet ufage, non-feulement fe
maintienne , mais même s’établiffe plus généralement,
fur-tout quant aux fortes de papiers deftinées
à desufages auxquels le pli nuit beaucoup, comme
les papiers deftinés au deflin , aux tapifferies , aux
carres, & même àTimpreflion des placards, &c.
Dans le bas de la planche XIII, fig. 6 & 7 , on
voit le plan & le profil d’une machine , par le
moyen de laquelle on peut battre le papier; cette
machine, qui fait mouvoir un marteau, confiée
en un arbre fur lequel eft fixée une lanterne de
12 fufeaux; cette lanterne engraine dans une roue
Vv v ij