
ainfi qu’on le verra aux articles de la mouture
des blés humides, des blés très-fecs , & . desmenus
grains.
Tout ce que j’ai obfervé jufqu’ici fur le rayonnement;
des meules, ne regarde que les moulins
de moyenne force, dans lefquels o.n moud, en
24 heures, depuis 10 jufqu’à 30 &: 35 fetiers fur.»,
blé; c’eft-à-dire, fans remoudre les gruaux; car
pour les moulins qui vont très-fort, & dans
lefquels on moud de 30 à 50 fetiers & plus, en
24 heures, il faut que les rayons aient depuis,
deux pouces & demi jufqu’à. trois pouces & demi
de diftance l’un de l’autre, & proportionnellement ■
à l’augmentation de la force du moulin. Il faut
en même temps bien ouvrir le coeur & l’entre-
pied pour faciliter l’entrée du blé dans les meules ,
& pour éviter que la farine s’échauffe.
On r’habille les meules plus avantageufement &
plus commodément avec des marteaux à fxx pannes
ou dents, dont la tête a environ 18 à 20 lignes
de long fur 15 de large; avec ce marteau, un
homme fait autant d’ouvrage que trois. Avec le
côté de ce marteau qui n’a qu’une pointe, on
taille les rayons & les parties dures de la meule.
Cette r’habillure n’éclate point la pierre ; elle eit
plus douce & Supérieure à toute autre, fur-tout
pour les meules très^ardentes ; car, pour celles
qui le font médiocrement, les marteaux Amples
& ordinaires font préférables^ ils font la r’habillure
plus nette.
Quoique la piqûre des meules en rayons foit
recommandée comme la meilleure, cependant il
y a des meules molles , telles que celles dont on
le fert en Périgord, en Poitou & autres Provinces,
qu’il vaut mieux r’habiller à coups perdus, parce
qee les rayons fur ces pierres molles, ne faifant
qu’aplatir feulement le blé, la farine fort graffe,
& le fon refte chargé de farine, à moins qu’on
ne faffe_des rayons très-fins, & à un pouce de
diftance l’un-de l’autre; & quoique ce r’habillage
donne quatre fois plus d’ouvrage qu’un autre, je
le préféré.
Il faut obferver que les meules molles, piquées .
à coups perdus, ne peuvent moudre que le blé
feulement, & qu’il faut abfolument des rayons
pour moudre les gruaux & pour en enlever la
pellicule ; fans quoi la farine eft groffe , molle, :
compacte, mal évidée, fuivant les expériences qui
en ont. été faites en Périgord & en Poitou, j
Les* meules ordinaires,, qui ont depuis cinq
jufqu’à fept pieds de diamètre, fur douze, quinze
& dix-huit pouces d’épaiffeur, durent environ
trente-cinq à quarante ans. Cette durée des meules
dépend toutefois de leur dureté, de la manière
dont elles ont été montées, r’habillées & foignées,
de la manière de moudre plus ou moins gros;
enfin, de la force des moulins, de la qualité des
grains & de l’intelligence des meuniers. Lorfque
les meules ont tourné long-temps, & que leur
épaiffeur eft confidérablement diminuée , on les
taille de nouveau, pour leur donner une furface
oppofée à celle qu’elles avoient ; & les faire fervir
de meules gifantes encore plufieurs années.-
Ces détails prouvent combien il eft eflentiel de
favoir r’habiller & rayonner les meules à propos,
& cet art eft prefque inconnu.
Ces détails, toutefois, ne concernent que la
mouture à blanc, qu’on nomme aufli mouture des
riches ; mais comme un meunier doit favoir pratiquer
toutes fortes de moutures, & travailler pour
les .pauvres encore mieux que pour les riches,
j’indiquerai aux articles des différentes efpèces
de moutures, les différens rhabillages qui leur
conviennent.
On a confeillé de piquer les meules en rond,
en commençant le premier cercle à l’ceillard, en
continuant jufqu’à l’extrémité dè la feuillure , & en
laiffant entre chaque cercle une diftance égale.
Je n’approuve point ce r’habillage pour la mouture
économique, & je doute que ceux qui l’ont
confeillé en connoiffent bien les procédés & les
réfultats.
Ma critique eft fondée fur ce que, par cette
rhabillure , les produits du blé refteroient dans
les meules plus long-temps que par le r’habillage
en rayons du centre à la circonférence, & s’y
échaufferoient.
Ce r’habillage pourrait cependant être bon à
quelque chofe ; mais ce n’eft point ici lë lieu d’en
parler.
Mouture des Meules.
Avant de monter la meule gifante, il faut bien
dreffer l’arbre tournant, c’eft-à-dire, mettre les
tourillons vis-à-vis l’un de l’autre.
Mettre la roue bien jufte dans la reillière au
faut de l’eau.
Pofer la meule gifante bien jufte fur le béfroi.
Jeter un niveau fur les quatre faces, & un autre
niveau par le milieu de l’oeillard, qui tombe jufte
au milieu de l ’arbre tournant, c’eft-à-dire, entre
les deux tourillons.
Prendre garde que la meule gifante ne foit
enfoncée dans les enchevêtrures ; ce qui feroit
rougir la farine.
Monter )a boîte & les boitillons qui doivent
contenir la fufée dans l’oeillard du gîte : prendre
garde que la boîte foit bien droite dans le milieu
de là meule gifante. •
Après 'avoir monté les boîte & boitillons, &
mis la fufée dans le plein milieu de l’anille de la
meule courante , on drefie le rouet, et l’on effaie
quelques tours pour faire engrener les dents bien
également dans la- lanterne. Il faut faire enforte
que le rouet paffe bien , & qu’il embraffe jufte fon
fufeau ; fans cela Ü cahoterait ; ce cahotement
feroit pencher la meule, & feroit un fon dur.
On s’occupe enfuite de la meule courante, en
la fuppofant piquée &. rayonnée félon les principes
ci-devant expliqués; on la pèfe, on la dreffe de
niveau ; en la pefant, on examine fi elle a des
lourds, c’eft-à-dire, fi elle pèfe plus d’un côté que
de l’autre; parce'qu’elle peut être-plus compare
d’un côté que de l’autre, ou parce, qu’elle peut
avoir intérieurement de grands trous qui empêchent
l’égalité, du poids.
Les lourds occafionnent beaucoup d’inconvé-v.
niens; î°. la pente qui fait ufer les meules plus
d’un côté que de l’autre; 2e. ils font étrangler la
fufée du haut en bas , c’eft-à-dire, qu’ils Tufent
plus d’un côté que de l’autre par un plus grand
frottement, ce qui produit dans le bas delà fufée
des lippes, lèvres ou rebords, qui font foulever,
bourdonner & grener la meule, en aloçceaht Si
les lippes ou lèvres, fe^ trouvent dans le haut de la
fufée, elles portent fur les boitillons;, elles échauffent
le fer & gênent rapprochement des meules.
Pour connoître ; les lourds,, on met la meule
•courante fur un pointai, pouf la contre-pefer.
Le Pointai eft un morceau de fer en forme de
pain-de-fucre , qu’on met à la place du fer fur les
boitillons, & qui fait le chandelier à la place de
•la fufée,.- On met enfuite dans l’oeil de l’an illé un
morceau de fer concave,, en chandelier, qu’on y
affujettir. On y fait entrer de,force un petit morceau
de bois.bien dur, dans lequel on fait un
.trou avec une tarière pour y faire entrer le bout
du pointai; alors on met la meule fur le pointai,
& onle fait tourner, pour voir dé .quel côté font
les lourds.
Quand _on a remarqué les lourds, on y coule
du plomb fondu ou du pjlâtjre. fur la partie la plus
• légère-, jufqu’à ce qu’elle foit égale en poids à
-l’autre partie.
f On abat les lippes que les lourds ont pu former
fur la fufée quand des meules ont déjà tourné,
■ car quand elles font neuves, il rfy a .point de lippes,
& quand ; la fufée -eft bien . arrondie , on la place
dans lë ’.plein milieu de il,a meule gifante., & on
fait entrer le papillon dans le trou! quarré de l’anille
fixée à la meule courante ; enfin,[on fait faire
quelques tours à la meule pour vérifier s’il n’y a
plus de lourds, p | , r
, H/aut que la meule gifante foit bien_bordée
de niveau fur les quatre faces, c’eft-à-dire, qu’elle
loit égalé par les bords.
■ Quelques) meuniers font dans Tufage , en bordant
-les; meules, de ménager deux lignes de pente
lur_Ianche, pour faciliter la chute de la farine;
^J^is cette pente-doit être prefque infenfible , & il
eft mieux de bien border les meules de niveau. ’
Le bord de la meule gifante doit être plus
.haut que les enchevêtrures, ou les pièces de bois
qui la fpupennent, dans .lefquelles elle eft enca-
aree & affujettie avec de la maçonnerie dans les
, — «C;.mois-ou quatre lignes a
®q.all“ tJto.“Jou™;eh diminuant;, & venan
a nen a la fin de 1 entre-pied«-'
La meule courante doit au contraire être fia-
nière, c’eft-à-dire, concave proportionnellement à
la convexité de la meule gifante & dans la même
étendue ; & pour que cela faffe plus d ’effet, il faut
que la meule courante foit un peu plus concave
que la gifante n’eft. convexe, afin de donner au
grain la facilité d’entrer dans les meules, & qu’elles
puiffent bien prendre le. blé également.
Pour mettre la meule courante en bon moulage,
il eft eflentiel de bien mettre Fanille dans
le plein milieu de la meule ; fans cela elle cahoteroit
& feroit La queue, c’eft-à-dire, qu’elle débor-
deroit d’un côté..
La meule courante, pour bien opérer, doit être
pofée bien droite , excepté lorfque le moulin eft
en-deftus ; alors le fer.doit avoir un peu de pente
avalant-l’eau. Il faut au contraire que la pente du
fçr foit à mont-l’eau lorfque le moulin eft en-
deftous. Cette' pente du fer -n’eft utile que pour
foutenir le poids de l’eau lorfque les chevilles du
rouet prennent les fufeaux delà lanterne, & qu’il
s’agit de mettre le moulin en mouvement ; ^car
chaque coup de rouet contre la lanterne, frappant
le fer par en-bas, redreffe fa pointe par en-haut,
& par couféquent la meule dans le fens oppofé
où le rouet frappe le fer. Il faut en même temps
avoir attention que cette inclinaifon du fer foit
proportionnée à-la force du mouvement du moulin
, c’eft-à-dire, qu’il faut incliner le fer de huit
à dix lignes pour un moulin de moyenne force ou
qui moud 15 à 25 fetiers en vingt-quatre heures,
& en fuppofant que- le rouet & la lanterne marchent
bien , car fi leur marché eft .gênée, la pente
doit être un peu plus lourde. En général, pour un
moulin qui marche très-bien, le fer doit avoir
moins de pente -, attendu qu’il ne fait point de
faut.
La plupart des meuniers, fous prétexte d’em^
pêcher leur moulin de s’échauffer, ouvrent trop
leurs meules & ne leur font commencera prendre
blé que vers la fin de l’entre-pîed, où le grain
coule entier’fans avoir .été cafté; en conféquence,
la feuillure trouve à travailler tout-à-ia-fois gruau’
fon & farine, & le tout fe fait mal, *
Si dans les meules il n’y avoit que la feuillure
qui dût travailler , il feroit inutile de leur donner
fix pieds deux ou trois pouces de diamètre.
’ Là meule doit -flairé à la fois trois opérations
de mouture; en forrant des bras de fanille &
à quelques pouces plus loin, la meule doit commencer
à cafter le blé, c’eft l’ouvrage du coeur:
enfuite le blé fe raffine à l’entre-pied, qui fait le
gruau; enfin, il tombe à la feuillure, qui ne fais
plus qu’écurer, rouler le fon & faire la fleur.
Lorfque chaque partie de la meule fait ainfi fon
ouvrage, un moulin va toujours en allégeant : il.
faut cependant obferver, i°. qu’un moulin qui va
très-fort doit être un peu plus ouvert & en proportion
de fa force, afin d’empêcher qu’il s’échauffe ;
2.0. que fi le moulin eft très-fort, & les meule«