
cune portion de' la platine fût véritablement
vitrifiée ; on peut plutôt conclure que fi la platine
a difparu dans les deux dernières expériences,
cela vient de ce qu’elle étoit difperfée par toute
la maffe, dans l’état d’une poudre trop déliée
pour être diftinguée : la couleur du verre ne
peut pas être attribuée à la platine , puifque
l ’expérience du n° 3 a fourni des couleurs plus
confidèrables , quoique les grains de platine
foient reftés fans aucune altération.
Dans mes expériences, n°? 1 & 2., & fur-tout
dans la dernière , la platine , quoiqu’elle eût été
atténuée par la folution 8c la précipitation avant fon
mélange avec les ingrèdiens vitrifia ns, fe fépara du
verre dans la fufion , 8c fut raffemblée en particules,
fenfibles , dont quelques-unes même éroient
d'une grandeur confidèrable. Cet effet fut encore
marqué plus fortement dans une expérience de
M. Macquêr.
Le précip té rouge de platine fait par les alka-,
l i s , fut mêlé fur une pierre de porphire, avec
un flux compofé d’une dragme de borax calciné,
une, dragme. de crème de tartre , & deux dra-
gmesde verre blanc qu’ilavoit préparé lui-même, i
avec fix parties de fable blanc .& huit parties de .
borax. Il ne (pécifie pas la proportion du précipité
de platine qu’il ajouta à ce -flux. Le mélange
fut pouffé à un feu de forge, animé par
plufieurs foufflets pendant 35 minutes 8c la
matière étant alors tranquille & en bonne fufion,
il la laiffa refroidir. La partie fupérieure de la
maffe fut un verre noirâtre. Il trouva au fond
du creufet un bouton de platine bien ramaf-
fée , affez brillante 8c unie à la furface , pefant
96 grains
Ce bouton avoit toute l’apparence'd’un métal
qui a reçu une très-bonne fufion. Cependant,
en effayant de l’étendre fous Je marteau , il fe
rompit en deux morceaux , & fit voir une chambre
ou cavité ovale dans fon milieu : la caffure
reffembloit à celle d’un fer caffant à gros grains.
Elle approchoit fort du fer coulé, pour la dureté,
car elle rayoit profondément l’o r, l’argent, le cuivre
, & le fer même.
Le tiffu , la qualité caflfante & la cavité de ce
bouton faifant voir que la platine , quoiqu’ elle
eût approché beaucoup de la fufion , n’avoit
pourtant pas été parfaitement fondue y l’auteur
fe propofe de répéter l’opération avec un degré
de chaleur encore plus fort.
Il faut remarquer dans cette expérience, que
dans le précipité dont on fe fervit, on né peut
pas fuppofer que la platine ait été bien pure de
tous autres métaux. Les folutions de platine contiennent
vifiblement du fe r , comme il paroît ,
en ce qu’elles donnent le bleu avec l’aîkali de
PrufTe : les alkalis, foit fixes ou volatils précipitent
ce fer en même temps que la platine ; 8e
comme une partie dç la platine demeure diffoute,
le précipité peut contenir une plus grande pro^
portion de fer que n’en contenoient les grains
de platine même.
Quoique le fer foit dans un état de chaux,
foluble par le verre, & incapable de fe mêler
avec les corps métalliques dans leur état parfait,
une légère introduction de matière inflammable
|iifit pour le faire revivre, les chaux de fer
paroiflant plus faciles à ranimer que celles de
tout autre métal. La couleur noire du verre
étoit dûrc fans doute au fer ; & il ne faudroit
pas être furpris fi, dans d’autres eflaîs , par la fuit;
on trouvoit que des préparations de platine tei-
gnoient le verre de toutes les couleurs que le
fer peut communiquer.
Si la platine a été réellement fondue, on peut
attribuer fa fufion à un mélange du même métal
; mais il eft très-probable que l’appaience
de fufion n’étoit autre chofe qu’une conglutination
des atomes impalpables dans lefquels la
platine avoit été divifée , femblable à ce que
l’on voit arriver, quand on pouffe le minéral
crud fur un feu violent.
Il paroît, par les expériences rapportées dans
cette feftion, que la platine non-feulement eft
par elle-même réfraétaire dans le feu 5 mais encore
qu’elle rèfifte aux additions, & aux manipulations
par lefquelles tout autre corps métallique
connu eft rongé, diffous , ou changé-en
un état vitreux. S i , comme l’enfeignent. les
Àlchymiftes., les métaux font d’autant plus parfaits,
qu’ils font plus permanens & moins fufcep-
tibles de changemens, on petit affurer que la
platine eft le plus parfait de tous les métaux
connus.
Du mélange de la platine avec les métaux,
La permanence de Ce nouveau métal, fa blancheur
qui ne fe ternit pas, & fa rèfiftance aux
liqueurs qui rongent ou diiiolvent la plupart des
autres métaux, font fans doute de grands avantages
; mais ces avantages font à-peu-près perdus
, ou du moins rendus inutiles, par le défaut
de fufibilité qui puiffe mettre les ouvriers en état
d’en former des vaiffeaux ou uftenfiles.
Nous n’avons guère lieu d’attendre aucuns
ufages de cette efpèce d’un corps fi réfraétaire,
à moins qu’il ne foit combiné avec d’autres métaux
, dont les propres qualités pourront être
améliorées par le mélange de certaines proportions
de celui-ci, ou qui pourront fervir d’intermèdes
pour lier les parties delà platine, fans
faire beaucoup de tort aux propriétés dans lel-
quelles confifte fon excellence.
Ces efpérances ont contribué à m’encourager,
& m’ont fait effayer une fuite. pénible d’expériences
, qui même, faits ces confédérationsne
peuvent manquer de fournir des phénomènes
întéreffans. Je.regrette fort de n’avoir, dans toute
cette feétion, guère autre chofe à rapporter que
mes propres,expériences. MM. Marggraf & Manquer
r.e fe font pas livrés à cette recherche , &
Scheffer n’a pas pu la pouffer bien loin, faute
d’avoir de la platine pour y travailler. Les travaux
réunis de ces Meflieurs nous auroient fans
doute donné des découvertes bien plus importantes.
Comme il eft queftion de diffoudre la platine
par les métaux fondas, nous lui appliquerons ^les
différens corps métalliques , à-peu-près dans 1 ordre
de la facilité qu’ils ont à devenir fluides au
feu, commençant par un fingulier qui fe trouve
naturellement dans l’état de fufion.
La platine avec le mercure,
J’ai fait broyer enfeïnble dans un mortier
de fer une once de platine & fix onces de ^mercure
fin, avec un peu de fel commun & d’eau,
& quelques gouttes d’efprit de fel. Quand le
broiement eût été continué environ fix heures ,
les grains de platine parurent enveloppés de mercure
, de manière qu’ils s’unirent enfemble en
une efpèce d’amalgame imparfait. Après en avoir
verfé le mercure fluide , j’en ai fait évaporer une
partie dans une cuiller de fer ; il laiffa après lui
une quantité confidèrable d’une poudre de couleur
obfcure, entremêlée de particules brillantes.
Une partie du mercure fut paffée à travers un
linge , 8c une partie fut filtree a travers un cuir
mince. Toutes les deuxlaiffèrent auffi,après lé-
vaporation, une poudre femblable : la portion
qui avoit paffé par un linge, en donna une
quantité affez confidèrable ; mais celle qui avoit
filtré à travers lè cuir, en donna fort peu.
M/Scheffer a effayé auffi d’amalgamer le mercure
avec la platine, & rapporte que fon operation
n’a pas réuffi, quoique le broiement ait
été continué avec une légère addition d eau régale
, au moins deux fois auffi long-temps ^qu il
en faut pour l’amalgamation des limailles d acier
avec le mercure , quand on y^ ajoute une folu—
tion de vitriol vert.
Il paroit par l’expérience ci-deffus qu’une grande
partie de la platine , même après avoir ete
long-temps broyée y. demeure encore en grains
entiers non diffous , & combinés avec le mercure
en une malle que l’on ap relie amalgame ; mais
l’adhéfion du mercure à la furface fait Voir une
affinité entre eux deux, ou une difpofition à s u-
nir ; 8c la poudre laiffée. après l’évaporation du
vif-argent paffé par le cuir, eft une preuve qu’il
y a eu quelque portion de la platine véritablement
diffoute.
liai répété l’expérience à plufieurs ^reprifes, &
j’ai toujours trouvé qu’une partie de la platine étoit
diffoute par le mercure , & que les grains non
diffous en étoient enveloppés. £
La platine avec le bifmuth.
Un mélange de flux noir & de fel commun
ayant été mis en fufion dans un creufet, on y
jeta des parties égales de platine & de bifmuth ,
8c on pouffa l’opération à un feu v i f , fortement
excité par des foufflets. Les deux métaux parurent
s’être fondus enfemble au bout de quelques
minutes ; alors ayant retiré du feu 8c laiffé refroidir
le creufet, la maffe métallique qui étoit
au fond, dégagée du flux, fe trouva pefer à-peu-
près autant que les ingrèdiens pefoient d’abord, 61 la perte ne monta pas à plus d’une cent-vingtième
partie. En la brifant, on ne put apercevoir
aucun grain de platine ; ce métal paroifi-
foit tout-à-fait diffous 8c confondu avec le bifmuth.
L’expérience fut répétée dans un fourneau à
vent ; mais à cette chaleur graduée les deux métaux
ne s’unirent pas bien : l’union ne fut parfaite
ic i, que quand on eut augmenté la dofe du
bifmuth juiqu’à environ trois fois la pefanteur
de la platine. Avec de plus grandes quantités
la platine fut fort aifément diffoute dans un fourneau
à vent, auffi bien que dans le fourneau a
foufflets mais dans tous les cas, il s’en precipi-
toit une partie, quand on laiffoit refroidir lentement
le mélange.
J’ai fondu de la platine avéc diverfes proportions
de bifmuth, par exemple, jufqu’à 24 parties
du dernier pour une de platine. Toutes ces
compofitions fe trouvèrent très-caftantes, de même
que le bifmuth feul : elles ne l’étoient pas fen-
fiblement ni pliis ni moins l’une que l’autre. E l- ,
les n’étoient guère plus . dures fous la lime , quç
le bifmuth pur. En les brifant, la furface de la
fra&ure paroiffoit le plus fou vent compofée de
bandes 8c de lames étroites, placées tranfverfa-
lement.
Avec de plus fortes proportions de bifmuth ,
les bandes 8c les lames étoient groffières 8c irrégulières
; avec de plus petites, elles étoient plus
déliées ; 8c quand les deux métaux étoient en
quantités égales, on ne pouvoit prefque, pas les
diétinguer du tout.
Quand les maffes étoient nouvellement cafté es,
elles paroiftoient brillantes & étincelantes , excepté
les compofitions ou il y avoh une grande
proportion de platiné , qui étoit d’une couleur
grifâtre , matte 8c fans aucun brillant. Toutes fe
terniffoient à l’air d une façon remarquable , fe
changeant en une' couleur jaunâtre , pourpre ^
bleuâtre, & à la longue en un noir pourpre.
Chacune d’elles a éprouvé ces changemens, quoique
plus lentement les unes que les autres.