
Le tarare doit faire 80 à ioo tours paï minute :
s’il va plus v ite , il châtie le bon blé avec les
criblures ; s’il va plus doucement, il ne nettoie pas
bien le blé.
En général» fi le mouvement eft trop rapide,
il faut tenir les poulies plu* grandes en haut, .ou
diminuer celles du bas» cela ralentira le mouvement.
Si le mouvement au contraire eft trop lent,
on diminue la poulie d’en-haut, ou l’on en mettra
de plus grandes en-basi Les poulies doivent être
faites en pattes d’écreyiffe, c’eût-à-dire que la
rainure doit être large, d’entrée, & aller toujours
en diminuant, afin que les,cordes ferrent mieux
& tournent plus facilement.
Il faudroit auifi n’employer que des cordes qui
euffent déjà fervi; elles font moins dures. &
tournent plus rondement.
Les cordes, fe raccourciffent dans les temps humides;
,& s’alongent dans les temps-fecs. Pour
remédier à ces inconvéniens, on met au bout d’une
corde une patte de cuir de Hongrie, & une longe
de même cuir à l’autre bout; par ce moyen, on
allonge ou raccourcit .les cordes fuivant le temps.
Si le tarare ne tourne point affez v ite , on
raccourcit les cordes ; s’il va trop v ite , on les
ralonge.
Cet arrangement eft préférable, fans compa-
raifon , aux rouages & aux petits héritions qu’on
pourroit employer dans ces cas, parce que les
poulies coûtent bien moins, durent plus, & font
faciles à faire, à conduire & entretenir, au lieu
qu’il faut un habile charpentier mécanicien pour
exécuter un hériffon , qui' eft fujet à fe déranger ?
plus difficile à conduire', & parce qu’enfin, avec
des cordes & des poulies qui coûtent environ
48 liv ., on fait autant d’ouvragé qu'avec des
héritions qui coûtent vingt à trente louis.
Telle eft en général la méthode du nettoyage
des grains, fi négligé par les laboureurs, excepté ceux
de la Brie, de la Beauce, de l’Ifle de France &
de la Picardie.
Voyons maintenant les procédés du blutage,
puifqu’ils fe, lient avec ceux du nettoyage des
grains.
Procédés du Blutage.
Que les grains foient parfaitement nettoyés, que
les meules foient de bonne qualité , qu’elles foient
bien rayonnées, bien montées , bien dreffées, que
leur mouvement foit régulier, cela rie fuffit point ;
il faut que le blutage foit auifi parfait ; c’eût lui qui
donne à la mouture économique le degré de per-
feâion qui la diftingue de toute autre mouture,
Il y a déjà un grand nombre de moulins économiques
, mais la plupart pèchent par le blutage,
dont l’art eft encore généralement inconnu. T â chons
d’en parler d’une manière inftruâive.
Il ne faut pas que le blutage commande le
moulin en allant trop vite ou trop lentement. Il
faut que les bluteaux tamifent la même quantité
de farine que les meules en font. Si le bluteau
ne tamife pas aufli vite que le moulin moud, il
faut relever l’auget de la trémie, pour empêcher
qu’il ne tombe tant de blé. dans les meules ; alors
les meules n’ayant plus une nourriture fuffifante,
ou manquant de blé, le fon fe broie très-fin, fe
mêle à la farine, la rougit, la rend bife & mauvaife.
Si au contraire le bluteau tamife plus vîte; que
le moulin ne. fournit, il tamife trop fec, & laiffe
paffer du fon avec, la fleur.
Il eft donc très-effentiel que les.bluteaux répondent
à la fineffe de leur étamine & à la force du
moulin ; il eft très-eflentiel que les bluteaux &
les meules'foient d’un accord parfait.
En général, pour le blutage, il faut examiner:
l p. Si le babillard du bluteau fupérieur n’eft
éloigné du tourillon de l’arbre tournant que de
6 ,8, à 10 pouces au plus.
a°. Si la bluterie déchiroit les bluteaux, ou s’ils
blutoient trop fort, il faudroit débrayer la boîte
ou la baguette, pour ralentir & diminuer leurs
coups.
Débrayer & rembrayer, c’eft ferrer plus ou moins
la barre fur la croifée, ou ferrer la baguette plus
ou moins près delà huche du côté de la croifée.
En général, plus on blute & plus on fait de
farine blanche; mais pour bluter, il faut que les
gruaux foient fermes; autrement ils s’engraiffent,
au lieu que les bluteries ôtent aifémentles rougeurs.
La bluterie eft encore d’une grande utilité lorf-
qu’il y a des recoupes qui font dures, ce qui eft
fouvent occafionnè par une r’habillure trop foncée,
ou par la 'nature du blé.
Le plus sûr moyen pour avoir du blanc , eft de
faflèr les gruaux gris, pour en ôter les rougeurs
avant de les moudre; quand ces rougeurs ont été
féparées, on peutenfuite dans le moulage approcher
les meules tant qu’on veut, pour atteindre
les petits gruaux qui ont échappé aux premières
moutures.
Le premier lés de la bluterie fait en dernier
travâil un gruau clair & fin, qu’on peut mêler
en fécond.
Le fécond lés fait un fécond gruau, qui eft bon
pour le pain bis-blanc, & une partie du refte
pour le .bis. Au lieu qu’avec, le dodinage les gruaux
reftans du remoulage font bien plus rouges, & ne
peuvent plus être employés qu’en bis.
Lorfqu’on veiit remoudfe les recoupés en employant
un dodinage,;on eft obligé d’approcher le
moulin , ce qui le fatigue beaucoup & rougit
la farine qui-provient de ces recoupes , au lieu
que par le . moyen d’une bluterie , le moulin va
toujours en allégeant , fans que l’on remette les
rougeurs fous la meule, ce qui fait la farine des
recoupes bien plus claire.
On trouve encore par le remoulage, au premier
lés de la bluterie, jJé petits gruaux bons à mettre
en bis blanc., & le refte en bis, ce qui avantage
beaucoup un moulin, parce que rien n’eft perdu,
& qu’on ne remoud que ce qui eft bon à remoudre?
Il eft vrai que cette méthode oécafionrie des
évaporations; mais on en eft amplement dédommagé
par la qualité & quantité des farines. D ’ailleurs,
il ne faut pas perdre de vue qu’on n’entend
parler ici que d’un moulin à blanc; car pour .un
moulin à bis ou à bis-blanc, le dodinage luffit, &
on peut tirer par fon ufage la totalité des farines.
, Lorfqu’on fe fert d’un dodinage, les gruaux, &
fur-tout les féconds, font fouvent mélés de rougeurs
que la bluterie fépare exa&ement ; & quand
on fait remoudre ces gruaux, qui font durs & petits,
on eft obligé d’approcher les meules pour pouvoir
les remoudre, & l’on rougit la farine en pul-
vérifant les rougeurs que le dodinage a mêlées
aux gruaux bis, ce qu’on évite avec la bluterie.
Sans rejeter le dodinage, on eft afluré par l’expérience,
que la bluterie fait les gruaux plus clairs.
Quelques meuniers fe fervent d’abord du dodinage
pour dégraifler les fonsgras, & enfuite d’une
bluterie; & cette manière de travailler eft très-
bonne. . .
J’ai blâmé précédemment la méthode de ceux
qui préfèrent les bluteaux de foie à ceux d’étamine ;
mais il s’agiffoit alors du bluteau fupérieur qui,
dans tous les cas, doit être de laine,, parce qu’il
eft deftiné à . tamifer la fleur de farine de blé,
qui gommeroit la foie. Ici au contraire il ne s’agit
que du bluteau inférieur pour les gruaux & recoupes
, dont le bluteau fupérieur a ô'té la fine
fleur de farine, graffe par elle-même, & qui a
befoin d’uné forte fecouffé pour être bien blutée,
au lieu que la bluterie cylindrique fuffit pour les
gruaux fecs & les fôns durs.
D ’ailleurs les foies , quintins ou canevas des
cylindres à gruaux, doivent être plus ouverts que
ceux qu’on emploieroit à tamifer la farine de blé,
& , par cela même, ils font moins fujets à s’en-
graiffer. , J
t Ceuxquiontunemplacement affezgrand,feront
bien de laitier fermenter le fort gras avant de le
paffer aux bluteries du magafin d’en-haùt, qui
font mifes en mouvement par les, poulies dôntj’ai
parlé ci-devant ; & , fi l’emplacement le permet,
on fera bien d’avoir deux bluteries' au-deffus l’une
de l’autre; .le gruau fe fépare mieux, & le fon
refte plus fec.
cnre, conviennent à tous.les meuniers, & ils ne
peuvent faire une-bonne mouture fans les pratiquer ;
mais les points capitaux, qui diftingùent la mouture
économique de toute autre, confiftent en
trois opérations effentielles ; favoir : i° . à bien
nettoyer les grains avant de les moudre ; a °.àhroyei
es grains convenablement; 30. à bien féparer,
par les différens bluteaux; les'farines des fons!
recoupes & gruaux, pôur'pôuvoir remoudre ce;
uerniers fepàrément & à-propos , ainfi que je l’a
ueja dit, & qu’ori le yerra dans le chapitre fuivant
Développement des procédés de la mouture économique,
d’après le mémoire de M. Buquet.
Le premier procédé confifte à cribler & nettoyer
le blé avant qu’il tombe dans la trémie des
meules. ■ *. ,.. . Û ’ '
Le fécond, à le moudre de manière qu’il ne puiffe
ni S’échauffer, ni coritràfter aucune mauvaife qualité',
ni fouffrir trop d’évaporation & de déchet.
Le troïfiême, à bluter en même temps que les
meules travaillent, pour feparer les diverfes qualités
de farines & de gruaux.
Le quatrième, à remoudre les différens gruaux
pour en tirer de nouvelles farines.
La première opération du nettoyage des blés fe
fait en tranfoortant les facs au fécond étage du
moulin, où font les cribles. Deux ouvriers, l’un
en-bas, l’autre en-haut, font tout ce fervice. L’un,
avec une brouette, mène les facs jufqu’au pied
du mur du moulin, & deffous la croifée du grenier
par où le fac doit entrer ; le fac arrivé, il
l ’attache au Crochet du cable qui doit l’enlever.
Àutiitôt l’ouvrier qui eft en-haut, en tirant une
corde, fait engrener dans un rouet la lanterne
d’un treuil qui monte fur lé champ le fac attaché
au cable ; lorfqu’il eft arrivé à la croifée du grenier,
l’ouvrier lâche la corde pour défengrener la
lanterne; il détache le fac , & le vide dans le
grenier.
Le blé eft criblé deux fois ; la première, dans
le crible normand à la main, & le réfidu de cette
criblure forme la derniere qualité du blé. La fécondé
fois, dans le grand crible cylindrique, qui nettoie
encore le grain, & le fépare en fes deux autres
qualités, l’une dite tête du blé, & l’autre blé du
milieu. Enfuite il coule à travers le plancher par un
conduit, dans la trémie du tarare, où il eft éventé
par les ailes du ventilateur , ‘ qui le nettoie en chaf-
fant la pouffière, les pailles, la cloque, les grains
légers ou rongés par les infe&es, & fépare, par
fes grilles, là plupart des grains étrangers. Enfin
il tombe pur & net dans la trémie des meules.
Le nettoyage des grains peut fe faire à peu de
frais, ainfi que je l’ai dit ci-devant, & doit fe
faire au moulin, s’il n’a pas été fait au grenier
ni dans la grange.
La fécondé opération confifte à moudre le grain
fans échauffer la farine.
Les meules entre lefquelles4| blé eft introduit,
font piquées en rayons réguliers; elles font dref-
fées félon la méthode ci-devant prefcrite pour les
i mettre en bon moulage ; ces meules bien montées
& bien dreffées, vont toujours en allégeant. Leur
piqûre, plus fine que celle des meules ordinaires ,
fabrique mieux la farine , fans couper le grain ,
ni hacher le fon. A quelques pouces de l’anille,
le blé commence à être concaffé ; au milieu de l’en*
t’repied, fe font lés gruaux ; enfin la feuillure affleure
la farine, & écure le fon.