
plats & autres, lefquelles font appliquées au fortir,
foit de la terre, foit du fable où on les ]eti e en moule.
Le compas , la règle , le tour rond & à contours ,
les forêts , une grande pierre plate pour dreffer les
pièces afin.de les monter droites, & les filières
de toutes fortes de formes & groffeurs, tels font en
général lesfoutils indifpenfables aux opérations de
l’orfévre.
C ’eft avec le fecours de tous ces inftrumens que
I artifte parvient à faire d’un métal, qu’il eft contraint
de réduire dans fon principe en fufion, un
corps dur avec lequel il peut créer en petit les
memes ouvrages que les fculpteurs forment en
grand , avec cette différence que l’orfévre opère
en édifiant, & le fculpteur par dépouillement.
L’orfévre èmploie le borax pour fouder & raf-
fembler plufiéurs pièces, lefquelles, détachées dans
leur principe, n’en font plus qu’une par cet heureux
effet.
Sans entrer dans le détail' de la métallurgie , il
eft pourrait jufte de donner une idée de la matière
dont l’orfévre fait emploi.
L’argent fortant des mines plus ou moins chargé
de matière hétérogènes , fe fixe, par l’effet du raffinage,
à un degré ordinaire que l’on eft convenu
de reconncître pour être au titre de onze deniers
vingt grains, en qualité de fin, quoique la divi-
fion en foit portée à celle de onze deniers vingt-
quatre , qui répondent à douze deniers ; mais ce
degré de fin étant coûteux & difficile à acquérir,
on s’en tient ordinairement au premier, que l’on
Vient de citer.
Cette valeur fictive établit en réalité la valeur
numéraire de 56 liv. pour le marc pefant ; mais
1 argent ne pouvant pas s’employer dans le degré
de fin, parce qu’il feroit trop flexible , les loix
rendues à ce fujet le fixent au titre pour le plus bas
de onze deniers dix grains; c’eft-à-dire, qu’il eft
permis à l’orfévre. d’employer pour la valeur de
quatre francs par marc, une quantité de cuivre
équivalente à cette foraine , laquelle , mêlée avec
- la matière d’argent, réduit ce même bloc ou morceau
d’argent, pefant un marc , à la valeur numéraire
de <2 liv. au lieu de celle de 56 liv. qu’il
vaudrait , s’il étoit?refté à fon degré de fin ordi- :
naire , comme on l’a démontré çi-deffus.
Il en eft de même pour l’or ; c’eft-à-dire, qu’une •
once d’or fin , au titre de 24 karats, valeur fictiv e
à laquelle on eft convenu de s’arrêter pour établir
le dernier degré de fin , & le karat évalué quatre
livres , porte la valeur d’un once à celle de quatre-
vingt feize livres ; mais l’or ne pouvant s’employer
dans cette dernière qualité de fin , par la rai ion
qu’il feroit, comme l’argent, trop flexible , par les
ordonnances il eft permis de le charger dxun cinquième
, c’eft-à-dire, qu’il faut l’allier pour le réduire
au titre de vingt karats, ce qui le réduit
à la valeur numéraire de 80 liv.
II ne faut pas de ce raifonnement tirer la con-
féquence que l’Or au titre de vingt karats, ne doit
fe vendre que 80 liv. l’once , cette matière étant
une denrée , eft fujétte à une augmentation de
prix momentanée dans le commerce, comme
toutes les autres marchandifes, fuivant la rareté
ou l’abondance.
Les matières d’argent éprouvent les mêmes différences.
Il fuffira de dire, pour ne pas trop nous
écarter de notre premier fujet, que depuis la paix
de 1767, le prix de l’or fins’eft toujours foutenu
entre ioj liv. à 101 liv. 10 fols,; 102 & 103, ce
qui fait valoir l’or au titre ordinaire de vingt karats,
entre 84 & 85 liv. l’oncév A l’égard de l’argent,
les variations font moins fréquentes ; mais
il y a cependant lieu de croire qu’il reftera à 53
liv. le marc.
L’art de l’orfèvrerie a créé de même , par une
fuite de luxe, une autre branche de commerce
appelée bijouterie en or ; ce qui a fait donner aux
« artiftes qui s’exercent dans cette partie j le nom de
fabricans en or , lefquels deux noms dérivent
certainement des mots latins auri faber, qui reviennent
également au mot orfèvre.
Les pièces majeures de cette partie font les
boîtes ou tabatières d’o r , les .boîtes _ à mouches &
À rouge , les étuis, les pommes de canne, les
lancetiers , & les garnitures de lunettes de fpeâa-
cle , les chaînes démontrés, les boucles d’o r , &
enfin toutes les boîtes garnies d’o r , ainfi que tous
les autres petits ouvrages dénommés communément
breloques.
Dans le nombre des premières pièces que Ton
vient d’annoncer , quelques-unes méritent d’être
citées en particulier , à caufe de la difficulté de
leur exécution, comme les boîtes de forme oCto-
gone, les boîtes à mouches 8c à rouge, les autres
appelées en termes techniques , boîtes en cage,
lefquelles fervent à encadrer les cailloux , les ma-
gellans , les agates orientales, les peintures, &
enfin toutes les pierres précieufes : ces difficultés
redoublent encore lorfqu’il s’agit de l’exécution
des pièces émaillées.
L’effentiel de l’art de l’orfèvrerie, confifte dans
la compofition toujours renouvelée des bijoux de
différentes efpèces , & particulièrement dans la
perfection du fini dans les ouvrages de grand
prix.
Cet art a le mérite encore d’avoir donné lieu au
renouvellement d’un autre qui a enrichi cette branche
de commerce ; c’eft la peinture en émail.
Nous avons vu deux orfèvres-bijoutiers , les
fleurs Hamelin & Maillé , en 1754, commencer
à peindre en émail fur des bijoux d’o r , & porter
depuis cet art à un point de perfection fi élevé,
que plufiéurs de leurs ouvrages tiennent aujourd’hui
une place-diftinguée dans les ,cabinets de tableaux
les plus précieux.
Nous avons de mêmeda fatisfaCtion d’avoir vu
le bijoutier du roi , M. Drais, compofer & faire
exécuter fous fes yeux des ouvrages d’un mérite
très-particulier.
L’artifte de cette partie effentiel4e.de l’orfévre-
rie eft celui qui a le plus befoin des connoiffan-
ces’ néceffaires dans la métallurgie & la doci-
mafie , pour la préparation & la manière d’em-
ployer un métal qui paraît fi beau quand il eft
ouvragé Cependant, par fia nature , il eft on ne
peut pas moins duCtile. Les matières hétérogènes
qu’il renferme le rendent foüvent impraticable ,
au point que les orfèvres les plus patiens & les plus
expérimentés , font obligés , pour venir à bout dé
l’employer , de l’en dépouiller en entier, .c’eft-à-
dire , de le rendre à fa première qualité d’or fin ,
&enfuite de le recharger de nouveau pour le mettre
au titre preferit. . N
Savoir allier ce métal de maniéré a lui faire prendre
les différentes couleurs dont il eft fu fceptible,
e ft la fcience, particulière de l’orfévre-bijoutier ;
favoir aufti l’allier en qualité & quotité , eft le re-
fuitat d’une, règle, de calcul..dont il convient que
l’orfévre & le bijoutier foient également inftruits.
Les talens fupér leurs des artiftes que l’on a cités
ci-devant avec un grand plaifir, & les fuccès que
nombre de bijoutiers & joailliers de Paris ont
eus par leur mérite particulier , ont contribue a,
établir & confolider pour ^’orfèvrerie; de Paris , la
réputation dont elle jouit juftemént dans tous les-
pays du monde, ainfi que fa fupérioirité*.
D’après ces détails , qui conftituent & établiffent
les parties mécaniques de la bijouterie., & la qua-,
lité des véritables orfèvres-bijoutiers , il eft facile
de .reçonnoître que e?eft par erreur qu’on les a
qualifiés , dans quelques écrits,, ..de marchand^ de
petits.tableaux, vafes dé porcelaine | >&c. Ces derniers
font tout au plus des marchands de, fo:-difants
bijoux & petits meubles ; & attendu.leur qualité
de ne favoir 8c de ne pouvoir rien fabriquer ils
appartiennent à la- communauté des merciers dé-
bitans : c’eft donc bien à tort qu’on a prétendu
les aflimile'r à l’orfèvrerie. -
Il n’eft pas de rigueur, pour.être marchand orfèvre
à Paris, de pofféder tous les talens dont nous
avons donné ci-devant les détails, tous les orfèvres,
n’y font pas néceffités pour vivre honorablement
dans leur état ; mais tous enfemble , orfèvres,
bijoutiers & joailliers, font obligés à une grande
fidélité , non-feulement dans l’emploi de leur matière
, mais encore dans les opérations de leur commerce.
Us s’y obligent par .ferment, lors de leur
réception à la maîtrife ; & c’eft de même cette
fidélité dans fes opérations de commerce & de
fabrique, qui contribue à maintenir l’orfèvrerie de
Paris dans fa fupérioritè éminente, qui lui fait
donner la préférence fur les autres orfèvreries du
mondé. .
Pour convaincre le public & particulièrement
les étrangers,, que ce, que l’on vient de.dire n’eft
point une affertion , il faut leur faire connoître les
précautions que le gouvernement a prifes pour cette
fureté, par les obligations qu’il a imp-ofées aux orfèvres.
Un artifte qui veut fe faire recevoir maître orfèvre
, eft obligé de fe, préfenter devant M. le
procureur du1 roi au châtelet de Paris , pour y
prêter ferment de fidélité dans fon commerce ;
enfuite il monte à la cour des monnoies, où il
eft interrogé fut les différens calculs d éiémens pour
l’emploi des matières d’or & d’argent. S il eft trouvé
capable ., la çaùr l’admet tout de fuite au ferment,
par lequel il -promet d'obfetvcr fidèlement les
ordonnances du roi & les arrêts de la cour ; &
fur les conclufions de M. le procureur-général, il
eft. reçu au même inftant ■ il, eft oblige encore de
donner unecaution de mille livres, pour répondre;
tant envers le roi qu’envers ,1e public , dos contra-
vendons qu’il pourrait commettre. •,
Ce font les gardes-orfèvres- qui le préfenter,t,
& déclarent en même temps..que l ’afpirant a fini
fon apprentiffage,, ou qu’il ,eft,f?ls 4e'..maître , &
que dans l’une ou l’autre qualité, il a fait..chef?
d’oeuvre en leur piréfence.
La première obligation, d un maître orfèvre ,
quand il veut fabriquer , eft celle d’avoir un poim-
çon à lui particulier, qui s’appelle poinçon dq maître.
Il doit être'.compofé dçs lettres initiales,,,de
fon nom , d’une> .devife a fo.n choix, cl une -fleiir
de lys couronnée , & de deux petit«; ronds formant
deux grains pofès parallèlement, afin de fajre ob-
ferver continuellement au fabricant qufil n’a que
deux grains de remède dans l’emploi de ces matières.
. .
U eft tenu aufti de faire infçulper ce poinçon
j fur une .planche de cuivre .dépofée au greffe de la
■ cour des monnoies, & fur une autre dépôfée au
: bureau desrorfèvres .ces. deux infculpaUpns font
' de rigueur , afin d’y avoir recours au befoin /en
cas de contravention de fa part, auquel cas on y
1 procède par voie de comparaifon & de rengrè,-
nernent. .
L’orfévre doit appliquer le poinçon Tur tous les
ouvrages qu’il, commence j 8c prendre beaucoup
de foin pour qu’il ne s’efface• pas dans le cours de
la fabrique', afin que dans tousses temps on puiife
1 le reçonnoître. - ,
Quand fes ouvrages font ébauchés au marteau
feulement, il eft obligé de les porter au bureau
des orfèvres * pour en faire la déclaration au régif-
feur des droits du r o i, lequel applique fur lefdir^s
pièces un. poinçon qui s’appelle poinçon de charge.
Par cette opération le r.égiffeur donne fa reconnoif-
fance. au contribuable de la déclaration, qu ,il a faite
pardeVant lu i, contenant fa founv.flion 4e .apporter
ces mêmes pièces lorfqu’elles feront finies, pour
en acquitter le droit impofé fur les ouvrages d’or
& d’argent,.& qui fe prélève à raifon du poids
qu’ils fe trouvent avoir lors de leur perfection.
Cette fecon.de obligation remplie , il eft forcé
à une traifième plus .importante.,encore pour le
public ,•c’eft. celle .de' dèpofér à rinffant* 8c fans
dépÛt, ces memes pièces, brutes , dans le bureau
. des gardes-orfèvres, appelémaifon commune, pour
ï