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N O I R. (Art et fabrique du )
T
A-ie n o ä eft la couleur la plus oppofée au blanc,
en ce qu’elle eft la plus obfcure de toutes les
couleurs.
L art produit différens noirs par la calcination
ou l ’uftion de matières différentes.
Il y a les noirs de bois de ce r f, d’ivoire et
d'os calcinés dans un vafe couvert.
Le noir d Allemagne eft fait avec la lie de v in ,
les^ noyaux de pèche , l’ivoire & l’os , le tout
brûle & calciné, enfuite lavé & porphyrifé.
C eft de ce noir dont les imprimeurs en taille-
douce fe fervent. Ce noir vient ordinairement de
Francfort, de Mayence & de Strafbourg, ou en
pierre , ou en poudre.
■ R s en fabrique néanmoins en France, qui ne
diffère de celui d’Allemagne , que par la différence
qui fe trouve entre les lies de vin dont il
fe fait.
s Celui de Paris eft même plus eftimé que celui
d’Allemagne, & les imprimeurs en taille-douce
je trouvent plus doux.
Le noir d’Allemagne doit fe choifir humide ,
fans neanmoins avoir été mouille, d’un beau noir,
luifant, doux,, friable, ou facile'à mettre en
poudre , léger, & avec le moins de grains lui-
fans que foire fe peut.
Le noir de terre eft une forte de charbon oflile,
tendre & gras au toucher.
Le noir de fumée eft produit par des réfines
brûlées, telle que la poix, qui eft un fuc ou gomme
ténace, qu’on tire principalement des pins &
fapins.
Lorfqu’on fait brûler ces fubftances réfineufes,
elles donnent une fuie noire & légère (ou le noir
de fumée ) , qui eft d’un grand ufage dans la préparation
de quelques couleurs, & qui entre dans
Ja compofition de l’encre des imprimeurs.
' Le de fumée eft mifcible avec l’eau, par
1 intermède de l’efprit de vin ou de l’eau-de-vie
dont il faut l’imbiber avant de le mêler dans
les couleurs en détrempe.
Voyez l’appareil le plus convenable pour recueillir
la fuie que donne le noir de fumée, tome
IV des gravures. Voici l’explication de la planche
qui en montre le développement.
La figure première repréfente l’intérieur d’une
chambre ou tour ronde , coupée par le diamètre.
Cette chambre eft couverte d’un toit conique ,
au fommet duquel eft fixée une poulie a , fur la-
quelle paffe une corde a b , à. laquelle eft fuf.
pendu un pavillon ou cône de toile , fig. 2 , dont
la bafe, tendue par un cerceau, affleure les parois
intérieures de la tour.
A l’intérieur de cette tour, dont les fenêtres g
8c la porte ƒ doivent être très-clofes, communique
un fourneau qui auroit dû être repréfenté hors
de la tour , en forte que le mur du fourneau fe
fût rencontré à-plomb du mur de la tour, afin
de laiffer le paffage libre au cône de toile, pour
defeendre le long des parois intérieures de la tour
jufqu’à fon rez-de-chauffée, & raffembler par ce
moyen la fuie ( ou le noir de fumée ) contenue
dans fon intérieur; ce qu’il fera facile de
fuppléer en concevant que la cheminée, fig 3,
foit fupprimée jufqu’à la naiffance de la hotte,
8c que le fourneau fort placé au dehors du bâtiment^
comme il a été dit.
Le devant du fourneau a trois ouvertures. La
première, au rez-de-chauffée, eft celle du cendrier
; la fécondé c , eft le foyer : elle répond au
niveau de la grille fur laquelle on place le bois ;
la troifième d , eft celle, par laquelle on introduit
dans la chaudière, fig. 4 , les matières réfineufes
dont la combuftion produit le noir de fumée.
C ’eft par cet appareil qu’on reçoit la fumée qui
s’échappe en flocons de la combuftion de réfine,
de térébenthine, de poix .noire, & de goudron,
qui ne peuvent fervir à autre chofe.
Ces flocons de fuie ou de fumée s’attachent à
la toile, ou aux peaux de mouton dont le cabinet
eft tendu.
En Allemagne, où il fe trouve de vaftes forêts
de pins & de fapins, on fait le noir de fumée
en grand , & l’on çonftruit des fourneaux uniquement
deftinés à cet ufage.
Noir de funtee dont fe fervent les orfèvres.
Pour donner plus d’éclat & plus de jeu aux
diamans, & aux pierres qui les imitent, les orfèvres
joailliers font ufage du noir de fumée dont
ils tapiffent le fond de la monture.
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Voici, d’après Kunkel, la meilleure préparation
de ce noir.
Trempez de la filaffe, du lin , ou du fil crud
j ans de l’huile de lin. Allutrtez-les enfuite: tenez
S e n t e n t au-deffus un vaiffeau de cuivre ; il
•J attachera une fumée , ou fuie tres-déliée ,
ouand vous en aurez fuffifamment, détachez cette
fuie broyez-la avec du vernis de lacque ou
à l’huile dfafpic , & employez cette couleur de la
manière que vous le jugerez a propos ; vous
aurez un très-beau noir luifant.
On emploie auffi, dit-on, l’encre de la Chine
au même ufage.
Le noir de cerf eft ce qui refte dans la cor-
.... aDtès que l’on a tiré de la corne de cerr,
vëfprit fie fol volatil, & l’huile. Ce réfidu fe broyé
avec de l’eau , & fait une forte de noir qui
eft prefque aufi beau & aufli bon que celui
d’ivoire.
Noir pour lu peinture.
On emploie dans la peinture plufieurs efpèces
de noirs différens, tels que le noir d ivoire,
d’os de noyaux de pêches , de charbon , &
pour la frefque, du noir de terre.
Mais le noir d’ivoire eft fans contredit le meilleur
pour la peinture. On le prépare en mettant
des morceaux d’ivoire dans un creufet, avec un
couvercle luté bien exaftement ; car s il y avoir
le moindre jour au creufet il fe confumeroit
entièrement. Il faut mettre le creufet amfi rempli
de morceaux d'ivoire, dans un de ces fours ou
l’on fait cuire la poterie; & pour que 1 ivoire
devienne d’un beau noir, & fort bien cuit, il
faut v laiffer le creufet pendant tout lefpace du
temps qui eft nèceffaire pour cuire les poterie^
On broie enfuite ce noir fur le porphyre le plus,
fin qu’il eft pofîible.
Noir liquide d'Angleterre four Us cuirs.
Ce noir eft d’autant plus à rechercher, qu’il
fait l’effet d’un beau vernis , & qu’il a 1 avantage
Le noir d’os & celui de noyaux de pêches * fe
prépare de la même manière.
Quant au noir de charbon, on ne fait que piler
du charbon dans un mortier, & le broyer ensuite j
à l’eau fur le porphyre. On le met alors fecher
par petits morceaux fur du papier lille. *~-eit un
beau noir pour la peinture.
Le noir de vigne fe tire de farmens brûlés.
C’eftle plus beau de tous les noirs. Plus on le
broie, plus il donne d’eclat.
Le noir de compofition eft le refidu des operations
du bleu de pruffe. Il tire un peu fur le
bleu.
Le noir de pêches fe fait avec les noyaux de
pêches brûlés comme le noir d’ivoire, & broyés
très-fins fur le porphyre. Il fert beaucoup en
peinture.A
rts & Métiers, Tome l - Partie, 1,
de ne tacher ni les mains, ni les bas.
On prend une chopine de bierre , pour fix fols
de noir d’ivoire en poudre, pour deux lois de
fucre candi, pour deux fols de gomme arabique,
& pour deux fols de cire vierge. On met le tout
enfemble dans un pot de terre à trois pieds ; on
le fait bouillir à petit feu fix minutes , puis on
le laiffe refroidir. . , „ . . , Si
Il faut étendre ce noir liquide & froid fur le
cuir avec un pinceau : on fe fert dune brode
neuve & douce, pour l’étendre également; en-
fuite on fe fert d’une autre broffe un peu rude
& neuve , pour fècher le noir. Plus on broffe ,
plus le noir devient beau & poli.
Recette four faire un beau noir.
Pulvérifez des noix de galle , étendez cette
poudre fur une plaque de fer; prenez une antre
plaque de fer rougie au feu , & bioyez la
poudre jufqu’à ce qu'elle rende une certaine huile.
Mêlez cette liqueur hutleufe avec de l eau , &
la broyez de nouveau avec un morceau de cuivre
en forme de bouchon, ou de petit broyon.
' Il réfulte de cette opération une teinture du
plus beau noir. Les dames afiatiques s’en noircit-
fent les cheveux & les fourcils dans le royaume
d’Aftracan.
Teinture en noir publiée à Londres. _
Saturez deux livres de vitriol de cuivre avec
l’alkali fixe. ( On racommande la potaffe d’Amérique
, f* on peut fe la procurer. ) Il faut environ
une quantité de cendre égale au poids du
vitriol. _ , .
On aura foin de faire la leflive des cendres,
& la diffolution du vitriol dans deux vafes fe-
parés ; on les mêlera enfuite ; on agitera ces deux
liqueurs très-exaélement, & on les abandonnera
pendant quelques heures. ^
Il fe formera fur 4e champ un précipité ; &
lorfqu’il fera bien dépofé, il faudra ajouter quelques
gouttes de leflive de cendres fur la liqueur
nageante. Si elle refte claire, c’eft une preuve
qu’elle eft bien faturée ; fi elle ne l’eft point, il
y aura un précipité bleu qui en fera le produit.
Il faut alors ajouter de la leflive de cendres,
jufqu’à ce qu’on foit parvenu à la décompofition
totale du vitrioL de cuivre. Il n’y a pas même
de danger à mettre un excès de leflive de cendres.
Il faut aufli avoir attention de verfer peu-à-peu
la leflive de cendres' fur la diffolution de vitriol ,
Y y