
Técartement eft à-peu près égal au diamètre fu-
périeur de la marmite , pour qù*en tirant le ni ;
la planche ne puiffe pas fe déranger. Au milieu de
cette planche font pratiqués plufieurs trous de dif-
férens diamètres pour toutes les groffeursde ligneül.
Au moyen de cette planche, on a les mains libres
pour diriger le ligneul fur un afple , comme à la précédente
manière , ou fur un rouet, qui n’a pas le j
même inconvénient.
Un autre avantage que procure l’ufage de la
planche qui fert de filière , eft d’y attacher la
fourchette entre les pointes de laquelle paffe le
fil au fond de la marmite..
On eft difpenfé par-là d’arrêter la fourchêtte. '
Ain fi , quand on veut paffer le fil fous la four- i
chette , on enlève la planche & la fourchette à i
la fois.; . u. ' s'** * jV ’ 1
Un autre avantage eft, que cette planche fer-
vant de couvercle à la marmite , s’échauffe , & le
trou par où paffe le ligneul n’eft jamais bouché
par la poix qui retombe à mefure dans la marmite.
Il faut avoir foin de placer le rouet bien en
face de la marmite, afin que le ligneul ne tombe
pas à droite ou à uche ; & même pour le placer
plus également, on fe fert d’une baguette lur laquelle
il gliffe & qui le dirige à volonté.
La conflruétion de ce rouet eft on ne peut pas
plus fimple ; ce n’eft autre chofe qu’un bâtis de
bois , compofé de deux pièces affemblées par les
traverfes à tenons & mortaifes , fur lequel s’élèvent
quatre montans affemblés par le haut au
moyen de deux traverfes , au milieu defquelles
eft une entaille où fe place l’axe du rouet ; cet
axe eft retenu par untaffeau qu’on fixe avec deux
ehevilles.
Quant à la roue , c’eft à-peurprès celle d’un
rouet ordinaire, compofée d’un moyeu, au centre
duquel paffe Varbre , & fur fa circonférence
font affemblés fix rayons , au bout defquels eft
retenue la cerce ou cercle de bois mince avec
quelques clous 'd’épingle ; les deux bouts de ce
cercle font amincis pour être l’un fur l’autre, fans
en augmenter l’épaiffeur.
La manivelle eft formée d’un morceau de bois
-de fix à fept pouces de long , à l’un des bouts
duquel eft un trou carré qui reçoit le bout de
l’arbre , & l’autre reçoit une longue cheville à
tête, qui pàffe au travers du manche, & lui permet
de tourner quand on la tient dans la main.
Il eft certain que l’ufage de ce rouet eft préférable
à celui de l’afple , parce que la furface fur
laquelle fe couche le fil , étant continue , force
la poix de fe fixer à l’endroit où la filière l’a placé ;
au lieu que les vides qui fe trouvent à Pafple ,
lui permettent d' couler vers les ailes. La manière
de relever le fil de deffus ce rouet eft la
même dont on a parlé précédemment.
On vient de voir trois manières d’enduire le
ligneul. La première confifte à l’étaler par terre à
mefure qu’on le retire de la marmite , la fécondé
en le dévidant fur un afple , la tnoifième enfin
en le recevant fur un rouet.
Cës trois opérations exigent que ce travail fe
faffe dans une chambre, où le feul remède contre
l ’odeur forte que cette compofition exhale, a été
de placer la marmite dans une cheminée , par où
le courant de l’air en emporte la plus grande partie
; mais cette odeur fe fait encore bien fentir
à touf le voifinage, malgré cette précaution ; c’eft
pour cela que plufieurs peigners ont coutume de
faire ce travail dans une cour ou jardin , où le
grand air diffipe promptement cette odeur : on
pourroit même conftruire un hangar propre à
cela, qui ne demanderoit pas beaucoup de place.
Manière de po'Jfer le fil dans .une cour ou jardin,
Lorfqu’on poiffe le ligneul en plein air, il faut ,
fubftitùer un fourneau à la cheminée , non pas
cependant que cela foit indifpenfable , puifqu’on
pourroit en conftruire une fous un hangar ; mais
pour plus de commodité on fe fert de fourneaux.
Chaque pays a encore fes uftenfiles particuliers
; ici on fe fert de fourneaux de tôle , là de
terré, & autre part de ceux qu’on voit Communément
dans les cuifines , confiruits en plâtre , &
montés fur quatre pieds pour être plus portatifs.
Ceux de tôle ne font autre chofe qu’un cylindre
de fer battu qu’on nomme tôle. Le fond eft
monté fur trois pieds , & emboîte à recouvrement
le corps du cylindre , qui y eft attaché avec
des rivures.
On a auffi coutume, pour plus de folîdité, de
mettre fur la hauteur deux cercles de fer5’, l’un
au bord fupérieur, & l’autre en bas.
A peu-près au tiers de fa hauteur eft attaché
en-dedans un cercle de fer , ou au moins des
portions de cercle , pour foutenir la grille qui
n’eft elle-même qu’un cercle de fer affez fort ,
fur lequel eft foudée à la forge ou rivée une
quantité plus ou moins grande de tringles auffi
de fer , qu’il eft à propos de placer triangulaire-
ment, & non à plat, afin que la cendre trouvant
deux plans inclinés , tombe & ne bouche' pas les
intervalles, ce qui ralentit l’aélivité du feu.
Sur le devant du fourneau, c’eft-à-«.*f ’ fur le
côté oppofé à la jointure des deux bouts de la
tôle, eft pratiquée une ouverture plus haute que
large, qu’on ferme au befoin avec une porte cintrée
; & même à cette porte qui fert à mettre le
bois ou le charbon dans le fourneau , on en pratique
une plus petite, comme à un poêle ordinaire.
::
Cette dernière fert à donner de l’air au feu , qui
fans cela s’éteindroit, ou du moins fe ralentiront
beaucoup. La manière dont on ferme ces deux
portes avec de petits loquets , eft connue de tout
le monde.
* Pour pouvoir tranfporter ce fournèau plus commodément
, on y attache à deux points oppofés de fa
circonfnocric,
rfrconfêrence, des anfes de fer, qu’on faifit avec
des poignées de bois ou quelques chiffons , pour
ne pas le brûler.
Il y a des ouvriers qui, quand ils placent la marmite
fur ce fourneau , avant d’allumer le feu , luttent
les bords avec de la terre à four, ou autre ,
pour concentrer mieux la chaleur.
V Cet expédient eft fort bon en lui-même ; mais
fi l’on n’avoit point attention , ou de laiffer une
ou deux ouvertures oppofées fur la circonférence ,
ou de pratiquer quelques trous au haut du fourneau
, on verroit infenfiblement le feu s’éteindre ,
ou pour mieux dire , on ne fauroit venir à bout
de l’allumer , car tout le monde fait qu’il lui faut
un courant d’air. . . - i
La marmite étant fur le fourneau , il ett îndil-
penfable d’avoir un point d’appui pour placer le
rochet fur lequel eft le fil ; c’eft à quoi l’on a
pourvu , en imaginant de fe fervir d’une efpèce
de petite cantre ; & quand on veut travailler ,on
place au-deffus de la marmite la même planche
dont nous avons déjà parlé, & qui y eft retenue
au moyen de deux taffeaux qui y font attaches.
Le rouet fur lequel on enveloppe le ligneul ,
eft entièrement femblable à celui dont nous avons
déjà donné la defcription ; mais comme le fourneau
fur lequel on place la marmite eft beaucoup
plus haut que le trépied fur lequel on la mettott, &
qu’il eft néceffaire que cette marmite foit beaucoup
plus baffe que le rouet, il a fallu exhauffer ce rouet au
moyen des quatre pieds qu’on a plantes fous fa bafe.
Je dis qu’il faut que le .rouet foit plus haut que
la planche ou filière qui. eft fur la marmite : en
effet, la direétion fuivant laquelle il faut que le
fil en forte pour que le ligneul foit rond, eft la
ligne perpendiculaire, fans quoi ni la rondeur ni
la groffeur des trous qu’on auroit détermines n’in-
flueroient fur celles du ligneul, qui fe trouveroit
d’autant plus aplati & menu, que cette direâion
feroit plus oblique.
Auffi le bâton que tient l’ouvrier à fa main
gauche , fert autant à relever le fil en fortant de
la filière, qu’à le diftribuer également fur le rouet.
L’ouvrier en opération met à coté de lui une
Corbeille remplie de rochets pleins de f il, & plus
loin un autre panier rempli de charbons pour entretenir
un feu égal fous la marmite. -
Lorfqu’dn ne veut pas faire la dêpenfe d’un
pareil fourneau, .on peut fe fervir d’un rechaud
de terre de creufet, dont l’ufage eft fi commun ;
d’autres fe fervent de celui qu’on voit dans pref-
que toutes les cuifines ; mais on y ajoute une
double porte pour régler plus fûrement la force
du feu.
On peut avec ces fortes de fourneaux tirer le
ligneul des trois manières dont j’ai parlé ci-devant.
On fe place où l’on veut ; l’odeur s’évapore plus
aifément, le jour eft plus beau , & la poix eft
bien plus tôt refroidie : ainfi tout engage à préférer
cette méthode.
Arts 6* Métiers, Tvtne V\ Part. IL
Les -peigners, à qui il importe fi fort que le
ligneul foit d’égale groffeur dans toute fa longueur,
préfèrent celui qui a été fait dans un teins froid,
à celui qu’on a fait dans l’etê ou dans une chambre
échauffée.
Il eft certain que quand il fait froid , la poix
eft fur-le-champ figée , & que le ligneul eft à la
groffeur où la filière l’a mis. Cette obfervation m a
fait penfer que dans l’une & l’autre faifon , fi 1 on
avoit foin de faire paffer le ligneul dans de 1 eau en
fortant de la filière , on lui procurerait cette
égalité fi recherchée , & qu’on obtient fi difficilement.
Je vais propofer au leéleur mes idees a.
ce fujet.
Moyens de rendre le ligneul toujours égal.
Le premier moyen propre à refroidir promptement
le ligneul, eft de monter 1 afple ou le rouet
j fur une auge de bois remplie deau pour cela il
fuffit de pratiquer au milieu de l’épaiffeur des
deux grands côtés une mortaife affez profonde
pour recevoir les tenons arrafes des montans ,
dans lefquels eft une entaille ou repofe 1 axe.
On voit que le fil ne feroit pas plutôt fur
l’afple, qu’étant porté dans l’eau , il feroit promptement
refroidi , & que la poix acquerroit de la
confiftance. D’ailleurs , même avant d arriver à
l’eau , le fil placé à côté d’autre déjà très-froid
& mouillé , feroit lui-même refroiai, & ne pourroit
s’attacher au fil voifin. t >
Ce moyen eft fujst à un inconvénient, c eft
que la rotation élève l’eau & en répand au loin
de tous côtés : par rapport à l’afple, il n y a de
remède qu’à tenir la manivelle un peu longue 9
& s’éloigner de l’auge pour n’ètre pas mouillé.
Quant au rouet, on peut fe fervir du meme
remède, & de plus , placer à quelque diftance
de la roue fur le bord de l’auge une planche ou
autre chofe qui rabatte la plus grande partie de
l’eau ; ce que les couteliers , dont la meule trempe
fans ceffe dans l’eau , appellent rabat-eau, • £
Le fécond moyen eft un peu plus complique ,
mais il n’eft pas fujet aux inconvéniens du premier.
D ’abord on place le rochet fur une broche
de fe r , au haut d’une cantre , de là le fil va au
fond de la marmite s’abreuver de poix, & paffe
par la filière dont j’ai déjà parlé.
A côté du fourneau eft placée une auge de bois
fur fon pied, & fur le bout, près ds la marmite,,
s’élève un montant affemble a tenons & mortaifes ,
au haut duquel eft un enfourchement qui reçoit
une poulie de deux ou trois pouces de long.
Cette poulie a la liberté de tourner fur une
broche de fer qui paffe dans l’épaiffeur du montant
: au fond de l’auge eft attaché un bâtis de
bois , qui porte une poulie fous laquelle pâlie le
ligneul au fond de l’eau ; enfin ce ligneul va fe
dévider fur l’afple que l’ouvrier fait tourner avec
la main droite au moyen d’une manivelle , tandis
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