
il eft dur : on nomme fon dur, un foh auquel
il tient plus de farine, & dans lequel il y a du
gruau; ce qui le rend moins doux & moins mollet
dans la main.
La mouture ruftique donne plus de fon pour
le poids que n’en donnent les autres moutures;
mais elle n’en donné pas plus à la mefure,
parce qu’en général la mouture donne du volume
au grain & au fon.
Le fon acquiert plus de volume par la divifioh;
cependant frori'côntinuoit à le divîfér , il réviêni-
droit à avoir moins de volume. Le fon a beaucoup
de volume, fur-tout le gros fon; mais ce
fon remoulu, en devenant plus fin, perd de fon
volume & reprend plus de poids : on conçoit
pourquoi il faut une mefure moindre'’ pour contenir
un corps , s’il eft en poudre , que s’il' n’èft
que concaffé. Plus le fon eft fin, plus il eft petit,
plus il pèfe: le fac do gros fon pèfe 155 livres;
le fac de femoulage pèfe 255 livres; & le fac
de recoupe pèfe 285 livres, le plus fouvent. Le
petit fon eft plus pefant que le gros fon, comme
le gruau eft plus pefant que la farine.
Les économes prétendent que le fon remoulu
eft plus nourriffant que celui qui ne l’a pas été.
Le Ton pénétré & amolli par l’eau dans laquelle
on l’a mis tremper, devient encore plus nour7
riffant pour* les beftiaux.
Ces économes difent aufli que le gros fon eft
pour les chevaux ; que les autres fons fe mettent
trop en pâtq. S,ejon* eux, les vaches mâchent
mieux que lès chevaux le remoulage ou fleurage;
mais ils prétendent que les vaches ne mangent
pas fi bien les recoupes que les cochons; & ils
trouvent que lès recoupes conviennent mieux aufli
pour engraiffer- les volailles. Les connoiflanc.es
les plus utiles ne font pas celles qui plaifent le
plus ; mais on ne doit pas les négliger
Les recoupes prennent plus d’eau que la farine:
une livre de 10 onces de ce petit fon, boit 13
onces d’eau. Les recoupes fe lient bien en pâtons,
& elles engraiffent parfaitement les volailles.
Le prix des. fons n’eft pas proportionné à leur
poids : lefecond fon fe vend plus cher que lepremier,
& le troifième plus cher que le fécond, à la mefure ;
mais par rapport à leurs poids réciproques, le
λrentier fon, le gros fon, le vend plus cher que
e fécond, & le fécond plus cher que le troifième.
Il y a des fons gras qui pèfent 60 livres de
plus par fetier les uns que les autres ; ces 60
livres d’excédent font 60 livres de farines, qui
font plus de 80 livres de pain cuit. Le fetier de
fon, qui, à la vérité , eft de 25. boiffeaux, qui
pèfe 60 livres de* plus qu’un autre, n’eft pas
vendu plus dans l’exaéle proportion, parce qu’on
le vend à la mefure, & non au poids.
Le fon le plus pefant eft celui de la mouture
niftique, & les fons les moins pefans viennent de
la moüture-en-groffe proprement dite, de la mouture
économique, & de la mouture méridionale.
Les farines mêlées de Ton fin, boivent plus
, d’eau, & font par confisquent plus de pain. Le
fon réduit en parties extrêmement fines eft plus
homogène à la farine avec laquelle il eft confondu,
que ne l’eft le gros fon : on l’apperçoit moins
dans le pain à la vue & au goût, lorfqu’il eft
bien divifé. Il y a des fons qui, par leur nature,
pourroiènt entrer dans la compofition du pain fans
le bifer , lui donnant feulement une Couleur
blonde; tels font les fons provenais des blés de
Flandre & d’Andaloufie.
On fait que dans tous les temps & dans tous
les pays on a fait le pain de munition avec la
farine & le fon enfemble ; ce qui fait de. bon
pain , s’il eft bien préparé.
Le fon eft ordinairement moins fec que la farine,
:ce qui cependant n’eft pas confiant; il y
a des années où le grain eft moins fec intérieurement
qu’extérieurement, félon que la température
de l’air a été plus ou moins fèche depuis
le temps de la fleur du blé.
Le gros . fon fe gâte plus promptement que
ne font les petits fons & les farines. M. Ma-
liffet m’a rapporté, qu’il a fait l’expérience que le
gros fon s’échauffe , c’eft - à - dire, fe corrompt
plus promptement que ne fait le fleurage; &
que les recoupes fe corrompent moins que les
farines, & que le gros fon peut s’échauffer juf-
qu’à prendre feu. Il eft vrai qu’on a moins foin
de remuer le fon que la farine; & au contraire, le
fon auroit befoin d’être plus fouvent remué que la
farine ; il m’a dit aufli que le fon de feigle fe. garde
mieux que le fon de froment. Il croit que plus le
fon eft menu, que plus il eft divifé, moins il fermente.
Le fleurage s’échauffe moins que la farine ;
c’eft pourquoi les farines qui font bifes par le petit
fon , par le fleurage, fe gâtent moins que les farines
blanches.
Je crois que le fon aide beaucoup à la fermentation
de la farine, l’orfqu’il eft mêlé avec elle :
naturellement le gros fon fermente plus que la
farine, & lorfquil eft#mêlé, il la fait plus fermenter,
& il la ferait gâter , fi l’on n’avoit foin
de les remuer.
Il n’arrivait autrefois à Paris , dans les marchés
& fur les ports, que du blé ou des farines
qui n’avoient point été blutées, qui étoient telles
qu’elles étoient forties d’entre les meules avec
tout leur fon : ce n’eft que depuis 1650, qu’on
a commencé d’amener dans cette ville de la
farine blutée. On prétendoit autrefois que la
farine féparée du fon étoit .plus facile à fe corrompre,
& à fe gâter fur les chemins & dans
les marchés.
Le fon eft la partie du froment la plus huileufe;
la partie collante de la farine eft, après le fon,
ce qu’il y a de plus huileux dans le blé , &
elle eft aufli la plus fufceptibleite fermentation &
I de pourriture, parce qu’elle contient moins de
fel ; il y a plus de fel à proportion dans le fon',
que dans la partie collante de la farine.
C’eft pour cette raifon que la fermentation
du fon avec la farine rend la farine meilleure,
moins revêche. La fermentation de la rame donne
une qualité à la farine pour être plus propre à faire
de bon pain, pour diffoudre le collant de la farine.
Il faut joindre du falin au collant pour le
rendre gélatineux , pour le rendre nourriffant. Les
farines deviennent plus falées dans la mouture
méridionale, où on les garde avant de les bluter.
Les fons de feigle, d’o rge, d’avoine & de far-
razin, font moins bons que celui de froment,
dans une proportion encore plus grande que les
farines de feigle, d’orge , d’avoine, & de farrazin
font moins bonnes que la farine de froment.
Du déchet.,
Le mouvement eft le principe de tout déchet;
le mouvement des meules de moulin & celui
des bluteaux, font celui dont il s’agit ici. ‘
La diflipation eft plus grande dans un moulin neuf,
ou dont les meules font nouvellement r’habillées,
c ’eft-à-dire, rabattues, parce qu’il faut que les
trous les plus profonds des meules^fe remplif-
fent d’abord.
Le déchet eft moindre dans un moulin qui eft
en train de bien aller, & dont les meules n’ont
pas befoin d’être repiquées ; car quan# elles en
ont befoin, on eft obligé de moudre plus près
& plus fort, ce qui fait aufli de la diflipation.
Il faut encore obferver que le déchet de ce que
l’on donne à moudre, vient moins de. la diflipation
de la farine par le mouvement du moulin, que des
rifqueS qui arrivent prefque toujours par défaut
d attention & de précifion ; il eft bien difficile,
lorfqu on moud pour plufieurs particuliers \ de
favoir au jufte ce qu’il y en a pour chacun : il
faut que le garde-rmoulin qui le règle foit préfent,
& prêt à mettre dans la trémie le grain qui doit
fuccéder à celui qu’on moud ; il faut qu’il foit
toujours exaél & prêt à en recevoir féparément
le produit, afin de rendre à chacun la farine &
le fon qui lui appartiennent.
Il doit commemrer par connoître ce qui peut
être reffé dans les meules , pour les arrêter à
la prochaine mouture dans le même état ; il faut
qu il prenne garde qu’il ne foit refté de la farine .,
m du grain, dans les autres parties du moulage.
il n y a guère plus de déchet par la mouture
en grand que par celle qui fe fait en petit ; quelquefois
meme il n’y a prefque pas de déchet,
à ° rl8u °'n beaucoup &tout de fuite, comme
on tait pour les fariniers & pour les boulangers •
alors on peut favoir précifément ce qu’il y a de
dechet, ou, plutôt on fait qu’il, n’y en a prefque
a f e f ? ProPortlon de la quantité de grain qu’on
lu : on eftime ordinairement le déchet à
deux livres par fac.
Par une ordonnance de police de 1438, il fut
enjoint aux meuniers de rendre on farine & en
fon le même poids que celui du grain qu’ils
avoient reçu, à deux livres près par fetier : ce
qui fut confirmé l’année fuivante par une ordonnance
de Charles V I I ; & en 1.577; Henri III donna
un règlement par lequel il ordonnoit que les Juges
ou officiers de police affembleront les meuniers &
boulangers 9 pour avifer quel poids & mefure devra
rendre la mouture pour, le blé ou autres grains. .
La mouture ruftique eft celle par laquelle il
fe fait le moins de déchet, parce qu’on n’y moud
qu’une fois, & qu’on y blute par un.feul bluteau.
Le déchet n’y eft que d’une ou de deux livres. On
accorde;.aüx meuniers dans les provinces, deux
livres de déchet par fetier d e '230 à 260 livres.
Le déchet au moulin eft plus confidérable par
la mouture économique, parce qu’il y a plus de
travail dans cette mouture, ce qui fèche la farine.
La farine s’échauffe, s’évapore, & perd de fon
humidité par le mouvement entre les meules , qui
en même temps la rendent plus graffe extérieurement
en exprimant l’huile du grain.
Le déchet n’eft pas feulement proportionné au
nombre des m ou tu re s il l’eft encore à la forte
de mouture. La mouture en groffe, où l’on ne
remoud point, diflipe plus, proportion gardée ,
que la mouture économique, parce qu’en général
la meule va plus fort dans la mouture en groffe ,
que dans la mouture économique.
D ’ailleurs, dans la mouture en groffe proprement
dite, il fe fait à-peu-prés autant de diflipa -
tion par les bluteaux que par les meules.
Le déchet par la mouture méridionale eft moindre
, parce qu’on y moud moins que par la mouture
économique, & moins fort que parla mouture
en groffe proprement dite. On difîipè moins
aufli par les bluteaüx dans la mouture méridionale;
mais'il s7y fait une diflipation qui n’a pas
lieu dans les ■ autres moutures , qui vient de ce
qu’on eft obligé de remuer de temps en temps la
rame, pour qu’elle ne fe gâte pas dans le long
efpace de temps pendant lequel on la garde,' pour
qu’elle fafie Ton effet avant de la bluter, & afin
d’en féparer lés farines, le gréfillon & la repaffe.
Il fe fait du déchet en blutant les farines, les
gruaux & les fons , ce que nous avons rapporté
dans le chapitre de la bluterie. Il y a déchet en
pétrifiant la farine; il y a déchet de la pâté en
cuifant le pain, & il y a encore déchet du pain
en fe refrôidiffant.
Des poids & mefure des blés & de la farine.
En général , le poids eft toujours quelque chofe
de plus certain que :1a mefure, pour tout, particulièrement,
pour la boulangerie; parce que le
pain étant vendu au poids, il y a une proportion
plus exaôe entre le poids du pain & celui