
3°. Les moulins pendans placés fous les ponts
des rivières navigables, & dont la roue à aubes
s’élève ou s’abaifle fuivant la hauteur de l'eau.
4°. Les moulins à cuvette; Comme ils ne font
connus, ditM. Bucquet, que dans nos Provinces
méridionales où l’on en fait ufage , je vais en donner
une idée.
L’arbre tournant de ce moulin eft vertical ,
fon bout fupérieur eft armé d’un fer d’environ
deux pouces en quarré qui porte la meule courante
horizontalement; vers le bas il porte une roue
horizontale d’environ- trois pieds de diamètre.
L’extrémité inférieure de cet arbre fe termine par
un pivot de fer tournant fur une crapaudined’acier
fixée fur un palier au bas de la cuvette. La roue
de ces moulins eft à aubes inclinées ; elle eft enfermée
dans une cuvette ou tonneau en maçonnerie
fans fond , auquel aboutit un courfier auffi en
maçonnerie , d’environ un pied de diamètre plus
ou moins , félon la force de l’eau qui entre avec
précipitation & obliquement par ce courfier dans
la cuvette, où , ne trouvant pas pour fortir d’ouverture
auffi grande que celle par laquelle elle
eft entrée , elle fe gonfle & forme dans cette
cuvette un tourbillon qui force la roue de tourner
avec elle ; en même tems elle s’échappa par les
intervalles que les aubes ont entre elles ; elle fort
par le fond de la cuvette, & s’écoule par le côté
d’av al, où l’on a ménagé une pente.
Ces moulins ont des défauts dont je parlerai
en faifant la defcription du gros de fer & de
l’anille, & à l’article qui traite des défauts des
moulins ordinaires à cuvette, 8cc.
Pour me renfermer dans le programme de l’académie
, je ne décrirai que les moulins en deffous
& en deffus, dont la conftrudlion eft la même,
avec la feule différence ci-devant énoncée. Ils font
de tous les moulins ceux qui font le meilleur fer-
vice 8c le plus continuel.
Les moulins de pied ferme ont fur tous les
autres un grand avantage , c ’eft de pouvoir établir
dans leur partie fupérieure des magafins dans lef-
quels on peut à peu de frais manoeuvrer les
grains , les rafraîchir, cribler & pettoyer avant de
les moudre. Je vais d’abord en1 décrire les différentes
parties.
D efcription de toutes les pièces d'un Moulin économique
, d'apres le Mémoire imprimé de M. de
Bucquet.
La roue. Dans une grande partie des provinces de
France on eft dans l’ufage d’employer des roues de
dix à douze pieds de diamètre, & des rouets qui
n’ont qu’environ quatre pieds de diamètre ; cette
difproportion dans la hauteur de la roue défavan-
tage le moulin*
Lorfque le lieu le permet, il faut donner à la
roue un plus grand diamètre ; il eft plus avantageux
pour la force de l’eau & pour celle du
moulin dont la roue eft le levier. Plus un levier
eft long, plus il opère de. force. Ainfi, lorfque
l’eau eft affez forte , il faut donner à la roue un
diamètre dedix-fept pieds quatre pouces ou environ
jufqu’à l’extrémité des aubes, fur vingt à vingt-
quatre pouces d’aubage ; c’eft-à-dire, de la largeur
de la reillère ou du courfier ; & la roue doit
avoir vingt - quatre aubes d’environ deux pieds
de'largeur chacune.
Si au contraire il y a peu d’eau , ou que fa
chute ne foit pas affez forte , l’aubage, & le fond
du glacis ne doit avoir que douze à quinze pouces
de largeur ; le diamètre de la roue ne fera que d’environ
treize pieds & demi ; on y pourra mettre
trente aubes au lieu de vingt-quatre : il efteffentiel
qu’elles foient d’une bonne longueur, telle que celle
de dix-huit à vingt-quatre pouces , afin d’éviter
le reflux de l ’eau , 8c que le ceintre de la roue ne
touche point, ou très-peu , à l’eau : fi on mettoit
un plus grand nombre d’aubes, l’eau pajotteroit
dans leurs intervalles , ce qui augmenteroit la
réfiftance de la roue, & retarderoit le mouvement
du moulin : en général, plus l’eau eft forte , 8c
moins il faut d’aubes.
Lorfque la chute d’eau d’un moulin en deffous
eft foible , quoiqu’il y en ait beaucoup , il .eft
effentiel de tenir la roue 8c les aubes fort larges ,
c’eft-à-dire, d’environ trois à quatre pieds , &
la reillère à proportion ; alors le volume d’eau
fupplée à la chute, & accélère le mouvement de
la roue.
Les aubes. L’aube doit être faite de bois
d’orme ; c’eft une petite planche attachée aux
coyaux fur le ceintre ou jantes de la roue.
' Les aubes font les bras du levier; elles font
aux moulins à eau ce que les ailes font aux
moulins à vent ; elles doivent être placées droites
fur la roue, 8c non inclinées ; leur inclinaifon
feroit pajotter l’eau , & retarderoit le mouvement
de la roue.
Une, roue dont le nombre d’aubes eft double,
tourne plus vite que celle dont le nombre d’aubes
eft fimple ; il faut qu’elles foient difpofées de
façon que deux aubes foient dans l’eau pendant
que celle d’avant y entre , & que celle d’après en
fort; en tout quatre aubes agiffantes à-la-fois ,
une qui entre dans l’eau, deux qui font dans l’eau,
8c la quatrième qui en fort.
Les coyaux font deux petites pièces de bois
entaillées fur la roue.
Les auges. A l’égard des moulins en deffus, il
faut que l’ouverture des. auges ou pots de la roue
foit proportionnée à la force 8c à la quantité de
l’eau. Lorfque les pots ne font pas affez Ouverts,
l’eau rejaillit, fort de la roue , 8c nuit à fon
mouvement, qpi doit toujours être lefte. A l’égard
de leur nombre, il faut fuivre les mêmes règles
que pour les aubes.
L'arbre tournant eft l’axe de la roue 8c du rouet
qui font en dedans du moulin : cet arbre eft
le centre du mouvement du moulin ; ainfi il doit
être proportionné à fa force 8c à celle de toutes
les pièces fur lefquelles il agit ; il doit avoir environ
feize à vingt pouces de gros en quarré.
Les tourillons 8* les plumarts. Les tourillons, '
qui font les bouts de fer dont les extrémités
de l’arbre tournant font armées , doivent être
dans fon plein milieu ; ils font fupportés par des
plumarts de fonte ou de cuivre , qui doivent leur
fervir de chevet pour les faire tourner plus gai
8c avec moins de frottement. La forme ordinaire
de ces tourillons eft défavantageufe pour les petits
moulins fur - tou t, en ce qu’elle occafionne un
frottement qu’il eft effentiel de diminuer. Ces tourillons
ont ordnairement fix à huit pouces de tour,
& portent fur des plumarts de fix à huit pouces de
longueur. Lorfque ces plumarts font de fer ou de
cuivre, le frottement eft encore confidérable ; mais
lorfqu’ils font de bois, comme dans la plupart des
petits moulins , alors le frottement eft bien plus
confidérable , 8c retarde beaucoup le jeu du
moulin.
Pour remédier à ces inconvéniens, il faudroit
que les tourillons fuffent moins gros , moins
longs , 8c qu’ils fuffent terminés par une boule
d’acier qui porteroit fur des plumarts de cuivre
incruftés fur le chevrefier qui les tiendroit en équilibre
; ces tourillons n’auroient ainfi pas plus
d’un pouce de frottement, 8c les petits moulins
fur-tout y gagneroient beaucoup.
‘ Le rouet eft une roue à dents ou aluchoos,
adaptée fur l’arbre tournant dans la cave du
moulin , pour engrener dans les füfeaux de
la lanterne. Ses dents , aluchons ou chevilles ,
font de petites pièces de bois taillées * jfoit quar-
rément, foit en plan incliné. Le diamètre du
rouet doit être proportionné à celui de la roue :
ainfi , en fiippofant le diamètre de la roue de
dix-fept pieds quatre pouces , tel qu’il eft indiqué
ci-devant, celui du rouet doit être de huit pieds,
c’eft-à-dire, toujours un peu moins de la moitié
du diamètre de la roue. Quand on lui donne la
moitié jufte du diamètre de la roue, cela diminue
la force du levier ou de la roue , 8c ralentit fon
mouvement.
Si le moulin a beaucoup d’eau, le rouet doit
avoir quarante-huit dents à fix pouces de pas ou
d intervalle l’une de l’autre ; il eft néceffaire que
ces dents aient une ligne de pente par pouce ,
fuivant l’épaiffeur du rouet ; c’eft-à-djfe que , fi le
ceintre, la bande , le parement, ou le chanteau ,
( termes fynonymes ) a fix ou huit pouces’ de large,
la dent aura fix à huit lignes de pente, afin que
les fufeaux de la lanterne quittent plus facilement
les dents du rouet ; il eft plus avantageux de
donner cette pente aux lumières ou trous que l’on
fait dans le chanteau du rouet pour y enfoncer
les dents , que fur la tête des dents mêmes ;
cependant on donne quelquefois cette pente aux
dents plutôt qu’à leurs alvéoles , parce que cela
eft plus facile.
Si le moulin a peu d’eau, le rouet doit avoir
jufqu’à 56 & même 60 chevilles. En général, fi
l’eau eft forte, le pas du rouet doit être long 8c
par conféquent avoir moins de chevilles ; 8c fi
l’eau eft foible, fon pas doit être plus court, il
doit avoir plus de chevilles.
Les embrâfures du rouet font des pièces de
bois qui fe croifent pour foutenir la circonférence
du rouet ; elles doivent être fortes à proportion
de fa groffeur.
La lanterne eft un pignon à jour fait en forme
de lanterne , compofé de deux tourtes ou pièces
de bois rondes autour defquelles font les fufeaux
dans lefquels engrènent les dents du rouet. Cette
lanterne eft fixée fur le gros fer qui traverfe les
meules dans leur point de centre , 8c qui fup-
porte 8c fait tourner la meule courante.
D ’après les proportions du rouet ci - devant
indiquées , la lanterne doit avoir dix - huit à
dix-neuf pouces de diamètre, avec huit fufeaux
de même pas, abfolument que les dents du rouet.
Lorfque le moulin a beaucoup d’eau, 8c qu’il
va for t, on peut mettre jufqu’à dix 8c même douze
fufeaux à la lanterne, 8c toujours de même pas
que les dents du rouet ; le moulin fera plus doux,
la meule tournera plus rondement, elle s’-ufera
moins, la mouture fe fera mieux , 8c ce qu’on
perdra en vîteffe , on le gagnera par la qualité
de la mouture, 8c par un plus long fervice du
moulin.
Les proportions entre la roue, le rouet , la
lanterne 8c la meule courante , doivent être telles
que 40 ou 48 dents du rouet 8c huit fufeaux de
la lanterne opèrent cinq ou fix tours de la lanterne
8c de la meule contre un tour de la roue. D ’après
cette règle , on doit préférer le nombre pair des
dents du rouet 8c des fufeaux de la lanterne au
nombre impair.
Il y a deux manières de faire la lanterne ,
favoir , à fufeaux droits, 8c à fufeaux inclinés.
Celle à fufeaux inclinés fe nomme lanterne à fe-
reine*.
On fait auffi les fufeaux en bois ou en fer :
ceux de fer durent plus long-tems , 8c s’ufent moins'
que ceux de bois ; mais ceux-ci ont le mouvement
plus doux, 8c ceux de bois de gayac fur - tout
font préférables, parce que le frottement en eft
plus doux 8c plus folide.
Les dents du rouet 8c les fufeaux de la lanterne
ayant la même inclinaifon , le choc plein qu’ils
fe donnent en tournant eft auffi v if que des coups
de maillet ; 8c fi les fufeaux font de fer, ce choc
caufe au rouet un ébranlement qui occafionne fon
écartement, à moins qu’il ne foit étréfillonné ou
foutenu par derrière avec des pièces de bois
qu’on nomme étréfillons , qui prennent dans le
milieu des deux embrâfures, un bout à la roue
8c l’autre au rouet. Ce choc , faifant le même