
A la grande extrémité fupérieure du blutéau , j
il y a en travers un bâton, par lequel le bluteau
tient à ce moulage.
A ïèxtv émitê inférieure font deux petites cordes
qui le tiennent attaché en dehors ou tombe le
Ion ; il y a deux attaches de cuir pour le fufpen-
dre dans fa longueur
La farine là plus fine ou la plus blançhe paffe
au travers de la partie fupérieure du bluteau. La
farine la plus groffe & la plus bife eft tamifée par
le refte du blutoir dans l’autre extrémité, qui eft
l’inférieure.
Le fon eft jeté hors du bluteau par l’ouverture
inférieure.
Ce fon , qui contient encore de la groffe farine,
eft ce qu’on nomme fon gras. a >
On diftingue en deux parties la farine qui a paffé
par le bluteau , 8c qui eft tombée dans la huche.
Il y a la première farine, faifant les deux tiers
de la totalité, qu’on nomme dans la mouture ruf-
tique la fleur de farine ou la première farine.
L’autre tiers eft la fécondé farine ou le bis-blanc.
Ordinairement on mêle ces deux farines, on les
prend enfemble. • .
La mouture rujlique eft de trois fortes; favoir ,
la mouture pour le pauvre , celle pour le bourgeois , &
celle pour le riche. Ce qui diftingue ces différentes
moutures, c’eft la différente groffeur des bluteaux.
Lorfqu’il eft affez gros pour laiffer paffer le gruau
& la groffe farine avec la fine , il s’échappe beaucoup
de fon avec ; c’eft la mouture pour le pauvre.
__ Quand au contraire le bluteau eft affez fin pour
retenir tout le fon 8c ne laiffer paffer que la fine
fleur de la farine , c’eft la mouture pour 'le riche :
mais le gruau 8c beaucoup de farine reftent avec
ce fon. . » ii ‘
Pour la mouture du bourgeois, le blutoir n eft pas
fi fin que celui pour la mouture du riche, ni fi gros
que celui de la mouture du pauvre ; de forte que
dans cette mouture il paffe du fon avec de la farine,
& il refte de la farine avec le fon.
On voit d’abord en quoi toutes ces moutures
pèchent, 8c particulièrement les deux dernières ;
c’eft qu’il refte beaucoup de farine dans le fon.
Au refte, fi les bluteaux dont on fe fert en
France étoient faits comme ceux d’Allemagne , il
ne feroit pas néceffaire d’en employer autant dans
cete opération.
Quant à la mouture du pauvre, le fon contient
encore du gruau, mais moins que les autres.
D ’ailleurs il vaudroit mieux fe fervir d’un blutoir
moins gros , & ne pas laiffer paffer tant de fon
avec la farine ; il faudroit en tirer le gruau & le
Temoudre , ce qui, avec la première farine, feroit
un pain beaucoup meilleur que n eft celui que Ion
prépare avec la farine faite pour la mouture ordinaire
du pauvre. # f
Ce font des cerceaux qui forment le blutoir ;
il eft parfaitement cylindrique ; 8c comme il eft
mis en mouvement par une manivelle attachée a
l’axe, la farine eft pouffée vers la circonférence
par ce mouvement circulaire : par-là même elle
paffe bien davantage au-travers du blutoir que félon
la méthode allemande, où le blutoir reffemble à
un fac , attaché au moulin dans une polition un
peu inclinée.
La mouture en groffe proprement dite , a été la
première, 8c elle eft encore la plus ordinaire.
Après avoir moulu le grain au moulin, on alloit
dans les maifons féparer le fon de la farine, par
des fas ou des tamis de groffeurs différentes ; &
aujourd’hui c’eft par des bluteaux de diverfes
fcneffes, & en bien plus grand nombre.
Les blutoirs dont on fe fert en France font donc
défeélueux, en ce que le fon fort plus facilement
avec la farine que par les autres blutoirs à l’allemande.
Pour bluter dans la mouture en groffe proprement
dite on emploie ordinairement quatre bluteaux,
chacuns delquel eft compofé de plufieurs étamines
de diverfes groffeurs
La première farine dite de blé, 8c la fécondé farine
de blé, paffent par le premier des bluteaux.
La farine dite bis-blanc eft tamifée par le fécond.
Le blé concaffè qui n’eft pas réduit en farine
affez fine , eft ce qu’on nomme du gruau dans
la mouture feptentrionale chez les meuniers 8c
chez les boulangers ; ailleurs , c’eft-à-dire, chez
les marchands, chez les vermiceliers, & chez les
amateurs des pâtes, ce gruau purifié eft connu fous
le nom de femoule.
Par le troifième bluteau, qui eft compofé de
trois étamines différentes, paffent d’abord le gruau
blanc, enfuite le gruau gris, & enfin le gruau bis•
Le quatrième blutoir , qui eft beaucoup plus
gros que tous les autres , fépare les recoupettes &
les recoupes_ du gros fon , qui eft le fon fec , le
fon maigre. .
Les gruaux qu’on fépare, & qu’on reprend, foit
pour les employer tels qu’ils font, foit pour les
remoudre, font ce qu’on nomme reprifes.
Ce qui refte des moutures après la farine, eft
ce qu’on nomme les iffues ,* les Ions, les recoupes
8c lesYecoupettes font les iffues de la mouture du
grain.
Dans la mouture en groffe proprement dite ,
on repaffe les gruaux par des fas : on en a ordinairement
deux de groffeurs diffemblables pour
paffer les différens gruaux , qu’on fépare, par ce
moyen, d’une efpèce de recoupette.
Ce n’eft pas feulement pour diftinguer les farines
8c les gruaux , c’eft pour les féparer entièrement
des Ions , ce qui ne s’exécuteroit point
aufli parfaitement fi cela ne fe faifoit pas en plufieurs
temps , par parties, dans divers bluteaux,
en féparant d’abord les farines, puis les gruaux,
eufin les recoupettes 8c les recoupes.,.. _
La mouture économique ou par économie, eft
moderne ; elle eft moins en ufage que la mouture-
j en-groffe.
La mouture économique fe pratique plus aux
environs de Paris ; & la moutpre ruftique , par laquelle
on blu,t,e auffi au moulin, fe pratique plus
dans le fond dès provinces.
On ne fubdivife pas la mouture économique ; il
n’y a point plufieurs fortes de cette mouture ; mais
il y a plufieurs façons de la pratiquer, qu’ihfaut
diftinguer.
Il y a deux bluteaux dans la mouture économique.
Par le premier de ces bluteaux paffe la
première farine , dite vulgairement farine de blé,
pour la diftinguer de la farine de gruau remoulu ,
qu’on n’a que par la mouture économique. On
nomme aufli cette farine du premier bluteau, du
blanc Amplement.
Le refte du grain moulu , qui eft le fon gras,
fort par le bout inférieur de ce premier bluteau,
8c rentre par le boiit fupérieur du fécond bluteau,
placé fous ie‘premier.'
Le fécond bluteau eft plus lâche que le premier
: il a le même mouvement. Ce mouvement
eft celui même du moulin, auquel ils font attachés
l’un & l’autrer
On nomme d'odindge ce fécond bluteau de la
mouture économique : il eft toujours plus gros
que le premier bluteau. Le dodinage eft ordinairement
de trois, fouvant de quatre , & dans quelques
moulins , de cinq groffeurs différentes. Le
gruau fin , qui eft le gruau blanc, paffe par la
première partie du dodinage; le gruau gris tombe
de la fécondé ; le gruau bis de la troifième ; la
recoupette de la quatrième , & la recoupe de la
cinquième partie ; enfin le gros fon fort dehors
par l’extrémité de ce bluteau.
On ne connoît en Allemagne, ni ce fécond bluteau
, ni cette manière de . moudre. En Saxe les
meuniers n’ont qu’un blutoir de la même fineffé
pour chaque forte de mouture. Mais ils ont un
blutoir pour le fromènt 8c un autre pour le féigle. '
Celui dont ils fe fervent pour le bourgeois eft
plus fin que celui du boulanger. Ils remoulent plus
fouvent que les François, le froment jufqu’à fix
& neuf fois. Ainfi la farine eft également fine ,
quoiqu’elle ne foit pas toujours de la même blancheur
, ,ce qui n’a pas lieu avec les blutoirs à la
Françoife.
En plufieurs endroits de l’Allemagne on a des
bluteaux compofés de quatre pièces de différentes
fineffes , & la huche dans laquelle tombe la farine
a autant de divifions que le bluteau* On voit clairement
par-là que les blutoirs plus groffiers. laiffent
paffer de la farine groffière, qui doit être remoulue.
C ’eft ce que les François ne peuvent pas faire aufli
fouvent que les Allemands, à càufe du poids
énorme de leurs meules, qui échauffent trop le
grain. __
Il y a des meûniers qui ne prennent le dodinage
que de trois , même feulement de deux
groffeurs, 8c qui ne remoulent qu’une fois ou
deux.
Il y en a q u i, après avoir tiré ainfi tous les
gruaux féparément, les remêlent 8c les font remoudre
enfemble , ce qui en général n’eft pas
une mauvaife pratique.
La plupart des boulangers font remoudre le
gruau à part ; il y en a même qui tirent un fécond
gruau du premier en le remoulant, comme
on tire ce premier en moulant le grain.
La farine qu’on tire du premier gruau , eft
nommée première farine de gruau, ou farine de
bourgeois , ou communément du blanc bourgeois.
Il eft des meuniers qui remoulent jufqu’à fept
fois : on remoud , fur-tout dans les années de
difette , les recoupettes , 8c même les recoupes,
pour qu’étant mifes ainû en farine, elles fe pétrifient
plus aifément ; on les mêle auffi avec une
• partie d’autre farine , pour en faire de meilleur
pain.
La bonté de la farine 8c du gruau dépend beaucoup
de la façon de moudre le grain : la farine
eft différente félon que l’on a moulu plus haut
ou plus bas, plus vite ou plus lentement : en
général, il vaut ipieux moudre plus haut, parce
qu’on perd ainfi moins de farine. Cependant en
moulant bas & doucement, la farine en eft meilleure.
Mais auffi quand on moud lentement,
il y a plus de folle farine pour le meunier. Il eft en
général un milieu à garder en cela, comme dans
tout. .
Dans la mouture économique, il faut commencer
par mettre la meule plus haut que dans la mouture
en groffe , pour faire d’abord la première
farine de b lé , avec le gruau & le fon.
Enfuite on tient, pour remoudre le gruau, la
meule plus bas même que dans la mouture en
groffe ; alors le moulin va plus v ite , parce que
le gruau eft plus aifé à moudre que le grain.
En moulant haut, on fait plus de gruau, parce.
qu’ainfi l’on concaffe ; au lieu qu’en moulant
bas , on fait plus de farine, parce que l’on écrafe
plus le grain.
On moud rond , quand on ne moud ni trop
haut ni trop bas, ni trop vite , ni trop lentement.
Alors on ne fait pas tant de gruau que fi on
mouloit bas 8c lentement.
Il y en a q u i, par moudre rond, entendent
moudre vite ; mais ce n’eft pas la façon la plus
ordinaire de s’exprimer pour dire moudre vite.
Il ne fufiit pas, pour avoir beaucoup de farine
8c pour l’avoir bonne , de là paffer par plufieurs
i bluteaux ; jl faut auffi .en faire la mouture à plufieurs
reprifes.; car fi on moud le grain en une,
feule fois , de façon qu’on le réduife tout en
farine, c’eft-à -d ire , fi on approche affez les
meules, 8c fi on fait aller le moulin affez fort
pour qu’il ne fe faffe point de gruau, on moud auffi
en même temps du fon, qui paffe avec la farine'
par le bluteau, même le plus fin : la .farine .mêlée
de cd fon pulvérifé eft moins, blanche ; 8c elle
prend aufli de la chaleur "avec l’odeur 8c le goût