
dans la monture de l’arbre & de Vanille, que
confiaient les plus grands défauts de la plupart
des moulins ordinaires & de ceux à cuvette.
Dans la plupart des moulins ordinaires, Vanille
porte fur les épaulemens de la fufée, parce
que l’une & l’autre font mal faites. Il refaite
de ces vices de conftru&ion, qu’il n’eft pas pof-
fible de bien dreffer la meule , qu’elle penche
plus d’un côté que de l’autre, qu’elle cahotte en
tournant , & que le broiement du blé fe fait
mal.
Il y a quarante ans que le fieur Rouffeau, Meunier
à Saint Denis, l’homme le plus inftruit alors
en mécanique de moulins, réforma ces défauts
de conftru&ion en perfectionnant les quatre petits
coins de fer, qu’on nomme pipes, dont il combina
la forme avec celle de l’anille & du papil- ■
Ion , tellement qu’il vint à bout d’ajiifter fes
meules de manière que la meule courante , en
repos ou en mouvement, refte toujours mieux en
équilibre fur fon pivot, quelle n’y étoit auparavant
; il fit part de cette réforme à ceux de fes
confrères qu’il connoiffoit ; on en fit ufage dans
plufieurs moulins. Mais cette réforme eft encore
inconnue dans une grande partie du royaume, où
les meules font encore cahottantes & montées à
l ’ancienne mode ; ainfi il eft effentiel de faire con-
noître les moyens de corriger ces défauts, & de
dreffer les meules de manière qu’elles exécutent
facilement la meilleure mouture. G’eft ce que j’ai
tâché de faire en faifant connoître les défauts des
plümars & des tourillons , lorfque j’en ai fait la
defcription à leurs articles , & en donnant les
proportions exa&es de toutes les parties de l’arbre,
du fer, de l’anille, de la crapaudine, & de toutes
les pièces qui concourent avec elles aux effets dé-
firés. Je vais maintenant faire connoître les défauts
des moulins à cuvette.
Défauts des Moulins à cuvette.
Les meules de ces moulins ont ordinairement
de 4 à 5 pieds de diamètre, fur 8 à io pouces
d’épaiffeur ; elles font ordinairement mal piquées
& mal dreffées. On ne pratique dans ces moulins
que la mouture à la groffe ; ils font plus
fujets que les autres à chommer dans les temps
de féchereffe , parce qu’il leur faut plus d’eau &
de rapidité pour les faire tourner, à proportion
de l’ouvrage qu’ils font. Pour en dreffer les
meules, on fait ufage, comme dans la plupart des
moulins ordinaires, de coins de bois, au lieu de
pipes de fer ; aufli ces meules ont-elles toujours
de la pente, & font des farines très-échauffées.
Pour remédier aux défauts de conftruâîon &
de mouture de ces moulins, il faut, i°. employer
un arbre debout d’une force convenable,
c’ell-à-dire d’environ 8 à io pouces de gros ou
en quarré.
2°. Que cet arbre foit placé bien perpendiculairement
fur fa crapaudine.
3°. Que fon bout d’en haut, de la groffeur
d’environ deux pouces en quarré, foit contenu
par une traverfe de bois, & dans un chapeau
de bois.
4°. Que ce chapeau ou trou de bois, fujet à
s’uier par le frottement , foit garni d’un boitillon
de fer a fiez large pour qu’on puiffele garnir en-
dedans de bourre & de graiffe , pour adoucir
le mouvement, & pour pouvoir y inférer des
pipes ou petits coins de fe r , pour contenir &
dreffer les meules.
IL faut ajouter à l’arbre debout un rouet
de couche du diamètre poflible, pour ne pas gêner
le beffroi des meules.
6°. Ajouter encore à l’arbre tournant, une lanterne
avec huit fufeaux qui foient bien de pas
avec les dents du rouet.
7°. Que les meules foient bien placées au droit
de la cuvette avalant l’eau.
8°. Que Vanille & les ferrures foient conditionnées
ainfi qu’il eft dit'à l’article de 1 anille.
q°. Que le mouvement du bluteau par la croi-
fée fur la lanterne, foit régulier.
ro°. Que le petit crible à cylindre placé fous
la huche, au lieu du dodinage, prenne fon mouvement
par des poulies de renvoi, & faffe environ
2,5 à 30- tours par minute, ainfi que les
autres moulins.
Après avoir réformé les défauts de ces moulins
, & pour y pratiquer le criblage des grains,
la mouture & la bluterie des gruaux, il faut :
i° . Un hériffon qui prenne dans le rouet de
couche qui fait tourner la meule, avec un treuil
de couche , tenant d’un bout dans 1 hériffon,
l’autre bout à tourillon de fer tenant foit au
mur, foit dans un poteau debout.
20. Il faut emmancher au treuil "les poulies né-
ceffaires pour faire tourn’er un ventilateur, un
crible cylindrique, une bluterie à fon, & toutes
les machines neceffaires à la perfe&ion de la
mouture. I ^ 1
30. Enfin il faut, ainfi que je l’ai dit aux articles
de criblage & blutage , que le mouvement
de rotation de ces machines foit régulier & parfaitement
d’accord entr’elles.
Moulins fur hateau.
Quant aux moulins pendans & fur bateau, le
criblage & le blutage peuvent s’y exécuter par
des "poulies de renvoi où . par un petit rouage qui
reçoit fon mouvement du même moteur des meules
; & le nwunier intelligent y peut pratiquer
très-bien la mouture économique^ ainfi qu’on
peut s’en convaincre par quelques-uns de ces
moulins qui font fur la Seine : cependant on
préférera toujours les moulins de pied-ferme.
N, B. Nous le répétons : tout cet article des moulins
à eau, fi intéreffant à conferver dans le dépôt
général des fciences & des arts, eft tiré de l’excellent
traité de M. Cèfar Bucquet, auteur de plufieurs
bons ouvrages fur les grains & les farines.
Moulïns 4 vent.
La mécanique des moulins à vent- a beaucoup
de rapport, pour la conftru&ion intérieure, avec
celle des moulins à eau ; mais la puiffance étant
un autre élément, il a fallu une autre mécanique
pour en profiter.
Toute la charpente du moulin à vent eft fou-
tenue par une très-forte pièce de bois qui la traverfe
en partie , & autour de laquelle on peut la
faire tourner à volonté pour préfenter les ailes au
vent, félon que le cours en vient d’un côté ou
d’un autre.
A la queue du moulin eft attachée une longue
pièce dé bois , faifant l’effet d’un très-long levier,
à côté de laquelle eft placée l’échelle qui fert à
monter au moulin.
Le meunier pouffe cette longue pièce de bois,
ou la tire à l’aide d’un tourniquet, ce qui fuffit
pour mettre l’arbre des ailes dans la direéfion
du vent.
Dans l’intérieur du moulin, on rencontre au
premier étage la pièce de bois fur laquelle tourne
le moulin : fur le devant eft la huche pofée fous
les meules pour recevoir la farine.
Dans le fécond étage , on trouve le coffre aux
meules, la trémie & la lanterne au bas du rouet.
Dans le troifième eft l’arbre des ailes , le rouet,
le cerceau qui embraffe le rouet pour le lâcher
ou pour l’arrêter , & un engin à tirer le b lé, qui
reçoit fon mouvement du rouet.
Toute la beauté de l’invention de cette efpèce
de moulin confifte, i°. dans le parfait équilibre dé
la maffe du moulin, qui fe foutient & joue en
l’air fur un fimple piyot.
a0. Dans la difpofition des ailes pour recevoir
le vent.
30. Dans le rapport de la force mouvante avec
la réfiftance des meules & des frottemens.
Afin que la charpente du moulin fût dans un
parfait équilibre autour de fon pivot, on n’a point
placé ce pivot au milieu, mais beaucoup plus en
arrière qu’en devant, parce que l’énorme levier
des ailes & le poids des meules auroit tout entraîné
par devant.
Les quatre grandes ailes du moulin font placées
à un arbre , autour duquel, dans l’intérieur du
moulin, eft attaché un rouet qui fait mouvoir la
lanterne à laquelle eft attaché l’axe de fer qui
met la meule en jeu.
Les ailes du moulin préfentent à volonté plus
ou mains de furface au vent, félon qu’on- étend
les voiles. Toute la liberté du vol des ailes dépend
de l’inclinaifon à l’horizon de l’axe de l’arbre
qui les foutient, & de l’inclinaifon de la furface
-des ailes fur-cet axe.
La preuve en eft démonftrative : la plupart des
vents, au lieu de rouler fur une ligne parallèle à
l’horizon, font un angle avec l’horizon : on s’en
affure, f i , lorfque le vent eft un peu v i f , on
préfente la main au vent en la tenant d’aplomb ,
ou pofée perpendiculairement : on éprouve alors
que l’impreflion du vent n’eft pas aufli forte qu’elle
peut l’être ; mais fi, en continuant à la tenir bien
ouverte, on en incline le dehors en arrière *, on
éprouve une impreflion beaucoup plus forte ,
parce qu’alors le dedans de la main eft exactement
oppofé à la direction du vent.
Telle eft la raifon fort fimple de la pofition
des ailes ; l’axe qui les porte étant incliné à l’horizon
, fe trouve dans la direction du vent, &
oppofe la furface des ailes à cette direction.
Cette inclinaifon de l’axe ne fuffit point : fi les
ailes du moulin étoient toutes quatre placées a
angle droit fur l’axe, l’effort du vent qui agiroit
fur les ailes fe détruiroit lui-même : mais fi des
deux ailes oppofées & parallèles à l’horizon, l’une
détourne fa furface de quelques degrés de l’angle
droit, en regardant la terre, & l’autre en regardant
le c iel, le vent en heurtant contre la fur-
face qui s’incline vers la terre , la fait monter, &
fe gliffant de même contre la furface de l’aile
oppofée qu’il trouve inclinée en fens contraire ,
il la difpofe à defcendre : une aCtion aide l’autre.
Si les deux ailes oppofées & placées de cette manière
, commencent à ébranler la meule , les deux
autres difpofées de même produifent un effet
double.
Tel eft l’artifice fort fimple & en même temps
très-beau, du jeu des meules, de l’équilibre de
la charpente , & du vol des ailes du moulin à
vent.
Quoique ces moulins de différentes efpèces
procurent à la fociêté des avantages confidérables,
ils n’en font pas moins fujets à des inconvéniens
infurmontables, qui arrêtent ordinairement leur
travail, & qui font inféparables des élémens dont
les forces font employées à les faire mouvoir ,
& qui les réduifent fouvent à l ’inaCtion.
Perfonne n’ignore que les moulins à eau font
expofés à chommer une grande partie de l’année, à
caufe des inondations, bu du défaut d’une eau
fuffifante , occafionné par la féchereffe ; quelquefois
, même dans les hivers , grand nombre de ces
moulins font brifés par les glaces.
Les moulins a vent chomment ordinairement
pendant un tiers de l’année, pour ne pas avoir
affez de vent, ou pour être renverfés par la violence
des vents impétueux & des ouragans ; ce
qui occafionné des réparations toujours fort longues,
& fufpend néceffairement leur travail. Combien
de funeftes expériences ont prouvé la vérité
de ces faits, & ont fouvent mis les habitans des
lieux voifins au point de manquer de farine ?
Pour obvier à ces inconvéniens, le fieur Antoine
Macary , mécanicien privilégié de Sa Majefté , &
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