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seulement l’ordre et la tranquillité eussent régné dans ses provinces, mais ses I
peuples encore auroient pris, plus facilement qu on n etoit porte d abord a le croire, I
nos arts, nos goûts et nos moeurs.
Foueh, située sur les bords du Nil et presque sous le meme parallèle qu Afexan- I
drie, se rapproche beaucoup de la position que Ptolemee assigne a MIetelis. Cette I
ville n’est pas peuplée en raison de son étendue. Elle etoit, dans le xv. siècle, I
l’entrepôt de tout le commerce qui se faisoit entre Alexandrie, où abordent les I
bâthnens d’Europe, et le Kaire, où aboutissent les caravanes de 1 intérieur de I
i’Afrique et de l’Arabie. Mais, 1 entretien des canaux au moyen desquels se faisoient I
les transports de Foueh à Alexandrie, ayant été négligé sous le gouvernement des- I
tructeur des Turcs, il a fallu que les marchandises expédiées du Kaire descendissent 1
le Nil jusqu’à Rosette, pour être transportées de là par mer à Alexandrie; dès- I
lors Foueh, ayant perdu tout l’avantage de sa position, déchut considérablement, |
pendant que la même raison occasionnoit 1 accroissement rapide de Rosette, ou I
vinrent se fixer par la suite les consuls Européens qui rcsidoient précédemment I
à Foueh.
On trouve, à deux lieues au nord de cette dernière ville, le gros bourg de I
Metoubis placé sur le bord du fleuve. Metoubis est connu par la licence extreme I
de ses moeurs. C ’est la résidence d un grand nombre d a Iméh. Auprès de ce I
bourg on voit des amas de décombres nommés Koum-cl-Hamar, qui peuvent I
avoir appartenu à une ville ancienne ; peut-e tre est-ce le reste du mur des Mile- I
siens (i), qui étoit, comme l’on sait, voisin du lac de Butos-. -
Ce lac est fort près de Metoubis. 11 occupe, de l’est à l’ouest, plus de la moitié I
de la base du Delta, et est plus rapproché de la branche de Rosette que de celle I
de Damiette. Il est séparé de la mer par une étroite langue de terre, et commu- i
nique avec elle par une seule ouverture, qui est l’ancienne bouche .Sebennytique. I
On trouve sur ses bords quelques ruines Égyptiennes ; la plupart ne présentent |
plus que des décombres, des tessons et des fragmens de briques. Un des monti- I
cules les plus considérables porte le nom de Koum-d- Kebyr ; il est situé vers I
le milieu de la rive méridionale du lac. A une lieue vers 1 e st, est un autre amas I
de décombres rouges, sur lequel s’élève une colonne qu’on aperçoit de fort I
loin. On rencontre aussi entre le lac et la rive occidentale du canal de Tabanyeh, I
en le remontant l’espace de cinq à six lieues depuis son embouchure, plusieurs I
endroits où des ruines et des collines artificielles annoncent l’emplacement de I
quelques villes anciennes. Trois monticules de décombres, nommes Damramy, I
Nemyry et Kalyah, sont groupés sur les rives de la branche Sebennytique. Enfin, I
sur la colline d’el-Handahour, située à cinq lieues de là environ en se reportant I
vers le nord sur les bords du lac et à l’est de l’embouchure du canal, on vbyoit I
encore , quatre ans avant notre arrivée en Égypte, trois grosses pierres qui pro- I
venoient probablement de quelques monumens anciens : à cette époque, un I
kâchef les fit enlever. La colline d’el-FIandahour peut avoir mille mètres de I
longueur sur deux cents de largeur : elle est formée de terres de rapport recou- I
( i ) Strab. Gfogr. I ib .x v n , pag. Boi, edit. 1620.
vertes d’un peu de sable et de fragmens de pierre. C’est peut-être là qu’existoit
autiefois la ville de Padmamunis, capitale de la province Sebennytique inférieure.
Ptolémée la place à l’est de la partie inférieure de la branche Thermutiaque; ce
qui convient à la positron d’el-Handahour relativement à Semennoud, l’ancienne
Sebenny tus, et au canal de Tabanyeh, qui est une portion de l’ancien cours de
la branche Thermutiaque.
Quant à Butos, c’est sur l’autre rive qu’elle étoit placée,, selon le même géographe;
et l’on doit en conséquence, et d’après le témoignage d’Hérodote, en
chercher l’emplacement dans le voisinage du canal et du hic parmi les ruines
dont nous avons parlé précédemment. « Elle est située, dit cet historien, vers
» l’embouchure Sebennytique du Nil ; on la rencontre en remontant de la mer
l par cette embouchure du fleuve,.&c. ; auprès d’elle est un lac spacieux (i). »
*' Cette ville étoit une des plus importantes du Delta: une divinité Égyptienne,
que les Grecs ont regardée comme la même que Latone, y avoit un temple ma-
gnîf^ue ; les oracles qu’elle y rendoit, étoient très - respectés et passoient en
Égypte pour les plus véridiques.
Hérqdote nous a transmis, sur cette ville des détails précieux. « On voit à >5 Butos, dit-if/plusieurs temples, celui d’Apollon et de Diane, et celui de Latone,
» où se rendent les oracles : ce dernier est grand ; ses portiques ont dix orgyies de
» haut. De tout ce que je vis dans l’enceinte consacrée à Latone, la chapelle de
« la déesse me "causa le plus de surprise ; elle est d’une seule pierre de forme
’» cubique ; chacune de ses dimensions est de quarante coudées : une autre pierre
» dont les rebords ont quatre coudées, lui sert de couverture. L ’île de Chemmis,
» presque aussi admirable, est dans un lac profond et spacieux, près du temple de
35 Latone. Les Égyptiens assurent que cette île est flottante; pour moi je ne l’ai vue
33. ni flotter ni remuer. On y remarque une grande chapelle d’Apollon avec trois
33 autels. La terre y produit, sans culture , quantité de palmiers e£ d’autres arbres
33 tant fruitiers que stériles. Voici, selon les Égyptiens, la raison pour laquelle elle
33 flotte : Latone, l’une des plus anciennes divinités , demeuroit à Butos , où
>3 est maintenant son oracle ; Isis lui ayant remis Apollon en dépôt, elle le cacha
3) dans cette île qu’on appelle aujourd’hui l’île flottante, et qui autrefois étoit
33 fixe et immobile : elle le sauva dans le temps même qu’arrivoit Typhon, qui
33 cherchoit par-tout le fils d’Osiris ; car ils disent qu’Apollon et Diane sont nés
33 de Bacchus ( Osiris) et d’Isis, et que Latone fut leur nourrice. Apollqn s’appelle
33 Oms en égyptien ; Cérès, Isis; et Diane, Bubastis (2). 33
Le lac Bourlos renferme une quantité considérable d’îles, la plupart marécageuses
, parmi lesquelles il seroit intéressant de rechercher celles de Chemmis et
d’Helbo, célèbres dans l’antiquité. Nous avons déjà rapporté ce qu’Hérodote
savoit de la première : nous ajouterons que le nom de Xs^u.14, Chemmis, qui lui
fut donné par les Grecs, vient peut-être de 3C«x ou X n w , Chmt ou Chêmi,
nom de 1 Egypte dans l’ancienne langue de ce pays; et l’on conçoit que les Égyptiens
pouvoient donner spécialement, et comme titre d’honneur, le nom A’ile
(1) Liv. 11, §. 155 et 156, traduction de Larcher. (2) fbid.