
2 g 4 o b s e r v a t i o n s s u r l a t o p o g r a p h i e
V I N G T - D E U X I E M E J O U R N É E .
Uuë heure après être, sortis de la vallée de Pharan, nous découvrîmes ; sur un
monticule élevé d’environ trente mètres [quinze toises], un plateau entouré de
hautes montagnes. On voit encore au milieu les débris d’anciennes habitations
construites sans goût, dont les fondations sont faites avec des quartiers de rocher
non taillés ; une partie de ces constructions est en brique crue : au bas de la
montagne sont les restes d’un mur épais qui paroît avoir été bâti pour soutenir
les terres, ou servir de clôture. A l’est et au nord-est, plusieurs petites maisons
sont encore occupées par quelques Arabes, ainsi que des grottes -creusées rustiquement
dans le rocher.
Les Arabes et les moines assurent què les constructions qui sont sur le monticule
au milieu du plateau, sont les Testes d’une petite ville habitée par des Chrétiens, et
démolie par les Arabes qui les en chassèrent ; d’autres prétendent que cette ville
s'est écroulée sur les habitans - qui ont été écrasés par sa chute.
Sur un des pics les plus élevés, appelé pic du Moulin, on trouve les fondations
d une ancienne église, du même temps que les constructions qui sont au bas. Tout
annonce la misère et l’ignorance des anciens habitans de ces bâtimens en ruine, où
rien ne ressemble aux monumens Egyptiens pour la forme et la solidité.
A quinze ou seize milles plus loin (une journée de marche), on voit encore le
pied de la montagne couvert d’inscriptions, avec les chiffres Arabes 11 o, 1 1 1 , t <o,
y oo et 600. Le plus grand nombre de ces inscriptions renferme trop peu de
lettres pour être autre chose que dès noms, dont plusieurs sont précédés ou suivis
d’une croix : on y voit des chevaux et des chameaux gravés, des hommes à cheval;
un, entre autrës, porte une lance dont la pointe est semblable â celle des flèches.
Ces inscriptions sont tantôt sur des pierres horizontales, tantôt sur des pierres
verticales; plusieurs sont renversées, parce que les pierres se sont détachées delà
montagne depuis qu’elles ont été gravées ; elles ne sont jamais à plus de trois mètres
et demi d’élévation [dix à douze pieds], et rarement même sont-elles à cette hauteur.
Cette chaîne de montagnes, qui est de trois milles environ de longueur,est
coupée dans plusieurs endroits par des ravins ou petites vallées, dans lesquelles
on ne trouve point de pierres écrites, si ce n’est dans les angles qui sont sur les
passages.
Aucune de ces inscriptions n’annonce ni le talent'ni l’habitude de graver sur la
pierre. Excepté quelques-unes, en petit nombre, qui sont gravées avec un ciseau,
toutes sont piquées avec une pierre dure ou au marteau ; le dessin des hommes
et des chameaux n’annonce aucun principe de l’art.
Il est difficile de se méprendre sur le but de ces inscriptions ; il est plus difficile
encore d’hésiter sur l’interprétation qu’on doit leur donner : elles ne peuvent avoir
été faites que par des Chrétiens qui alloient en pèlerinage au mont Sinaï. Le plus
grand nçrmbre de ces inscriptions est à l’endroit de la station du soir; il y en a
moins dans le lieu du repos de la journée : on n’en trouve dans aucun autre endroit
de la route.
DE LA P R E S Q U I L E DE SINAI .
Nous copiâmes plusieurs de ces inscriptions, et nous entrâmes ensuite à l’est
dans une vallée étroite, où nous campâmes, après avoir fait trois milles, au pied
d’une montagne granitique, dans la tribu des Aouârml.
V I N G T - T R O I S I E M E J O U R N É E .
Le lendemain, nous ne fîmes qu’onze milles dans une vallée étroite, entre deux
montagnes de grès, sans aucune espèce de végétation, pour arriver sur un plateau
élevé, appelé Ouâdy-KliamcyUl, où nous avons passé la nuit.
V I N G T - Q U A T R I È M E JO U RN É E .
En suivant la vallée un peu plus à l’ouest, nous traversâmes plusieurs ravins
couverts de roches de grès, de granit et de porphyre. Nous nous arrêtâmes à Ouâdy-
Nasb, à dix milles de l’Ouâdy-Khameyleh,au pied d’une montagne de granit couverte
d’inscriptions, quoique ce lieu ne soit qu’une station dans la journée ; car,
pour trouver de l’eau, il faut envoyer les chameaux à plusieurs milles de là.
Nous étions dans la tribu des el-Legât; le cheykh, qui étoit venu au-devant de
nous, nous conduisit à son camp, où nous couchâmes, après avoir mangé la chèvre
sous sa tente.
V I N G T - C I N Q U I È M E J O U R N É E .
Après cinq heures de marche, le lendemain, nous trouvâmes à Ouâdy-Ham-
moud les dernières inscriptions (1). Passant ensuite dans une vallée profonde et
humide, remplie de joncs, plantée de quelques dattiers et couverte en partie de sel
marin et de nitre, sur une longueur de huit milles, nous arrivâmes à Ouâdy-A’sal,
où nous couchâmes.
V I N G T - S I X I ÈM E JO U RN É E .
En suivant la vallée au nord-ouest, nous nous reposâmes un instant à Houseyt,
au-dessus de la baie de Corondel, pour aller camper à Kourfarq, à dix milles de
Houseyt, après avoir atteint un plateau très-élevé, sur lequel on trouve de mauvaise
eau dans une espèce de caverne formée dans la pierre calcaire ; nous traversâmes
la vallée de Corondel, couverte de tamaris, où les Arabes de la tribu des
d-Legât viennent faire du charbon.
V IN G T - S E P T I ÈM E JO U RN É E .
Nous étions encore'à' plus de vingt milles des fontaines de Moïse. Depuis la
fin de la deuxième journée, nous avions quitté les montagnes pour entrer dans un
d’autres pierres gravées. Nous avions marché avec la
certitude de trouver les hiéroglyphes, parce que, lorsque
nous leur faisions observer qu’il existoit encore d’autres
pierres, ils nous indiquoient un endroit plus éloigné où
elles devoient exister : ce n’est qu’en rencontrant les
dernières inscriptions que nous fûmes assurés que nous
avions été trompés. La caravane marçhoit, il n’étoit plus,
temps de retourner sur ses pas.
(1) Voye^, pour toutes les inscriptions, les planches
A et E , A. vol. V. On en trouve une partie dans
le Voyage de Niebuhr en Arabie , tome I ." 11 est
vraisemblable que nous avions passé*!- une très-petite
distance de la montagne sur laquelle cet estimable
voyageur a copié les hiéroglyphes gravés dans son ouvrage.
Mais, soit ignorance, soit mauvaise fo i , nos
Arabes nous assuroient qu’ils ne connoissoient pas