D E S C R I P T I O N H Y D R O G R A PH I Q U E
près du village, quoique la baisse des eaux, qui s’écouloient depuis plus de trois
mois, eût laissé par-tout le sol à découvert.
Je passai la nuit à Nazleh, et j’invitai à souper avec moi le cheykh de ce village,
ainsi qu’A ’ly Aboubekr, neveu de Sâleh, qui étoit venu avec empressement me
rendre sa visite. Je tirai parti de cette réunion, en prenant de chacun en particulier
tous les renseignemens qu’ils pouvoient me donner sur les deserts qui entourent
le Fayoum. On présume bien que je ne négligeai pas ce qui est relatif aux
Oasis, et je remarquai avec plaisir que leurs réponses coincidoient parfaitement
avec les détails que j’avois reçus, quelques jours auparavant, du kâchef Solymân
et de deux habitans de la petite Oasis, que j’avois vus à Médine. Je donnerai plus
bas les résultats de ces conférences.
Nous quittâmes Nazleh le 19 nivôse [9 janvier], à neuf heures et un quart du
matin, et nous fîmes route, toujours par le sud-est, â travers les terres cultivées,
qui étoient alors très-crevassées ; ce qui rendit notre marche pénible jusqu’au Balir
el-Ouâdy, que nous retrouvâmes seulement à onze heures et un quart, en face du
village d’el-A’ryn, situé sur la rive droite. Ici ce ravin avoit au moins 16 à 17 mètres
de profondeur, sur 200 mètres de largeur ; nous y descendîmes pour suivre notre
route dans le fond, qui étoit moins difficile que te dessus des berges. Les eaux
couloient sur la partie droite de son lit, et nous en remontâmes le cours, par une
direction sud, jusqu’à l’embouchure d’un petit canal à droite, qui, me dit-on;
venoit auparavant de Médine en passant par Minyehffet: Se rendoit nu üirket-
Qeroun après avoir arrosé les terres des villages établis sur son cours. Les Arabes
m’assurèrent que le Bahr el-Ouâdy, que je voyois si vaste, avoit été formé par
l’irruption soudaine des eaux échappées lors delà rupture de la digue dè Minyeh;
mais on verra plus bas que cette supposition n’est pas vraisemblable. Les montagnes
à l’ouest ne me parurent ici qu’une légère pente, dont la crête se perdoit
dans un horizon éloigné.
A onze heures et un quart, nous arrivâmes à Abou-Gandyr, village très-élevé,
au sud-sud-est de Nazleh. Du haut du monticule sur lequel ce village est construit,
je distinguois parfaitement Médine, Nazleh, et toute la partie intermédiaire de la
province jusqu’au lac. Une branche du ruisseau qui vient de Minyeh, passe auprès
d’Abou-Gandyr; et comme les "eaux arrivent jusque-là toujours au niveau des terres,
elles forment, en tombant dans l’Ouâdy, une chute d’environ 1 ô' mètres; phénomène
inconnu dans le reste de l’Égypte, où l’établissement de machines mues par
des cours d’eau seroit d’une si grande utilité pour l’irrigation. Mon conducteur,
cheykh A ’iy, trouva à Abou-Gandyr son frère cheykh O ’tmân, chef des tribus établies
autour de ce villagé. Nous ne nous arrêtâmes qu’un quart d’heure dans son
camp pour prendre le café, et nous continuâmes notre route par la direction sucl-
quart-sud-ouest, emmenant cheykh O’tmân avec nous. A midi et un quart nous
rentrâmes dans le désert, dont le sol, plus élevé que la terre cultivée, présente un
sédiment terreux mêlé de sable jaune, couvert de morceaux de pierres calcaires.
Nous étions sur une espèce de plateau, dontlapente insensible s’étend/en descendant
au nord-ouest, vers le Qasr-Qeroun, et au sud-est, vers le village et le
DE B E N Y - S O U E Y F E T DU F AY OUM. 2 1 9
ruisseau de Garâh. Au sud-sud-ouest, la pente se prolonge insensiblement et à
perte de vue en montant.
A une heure moins cinq minutes, nous arrivâmes à une hauteiir isolée, qu’on
appelle Koum-Garâh btael-Malat, ou Medynet-Ma'dy. J’y reconnus des ruines considérables
d’une ville qui s’étendoit tout autour dans la plaine. Je montai sur la hauteur,
et je vis le lac Garâh dans le bas, au sud, à environ une demi-lieue. On me fit
apercevoir au loin, ¿¿ns le sud-sud-ouest, deux montagnes, entre lesquelles sont
les deux Rayân et le chemin pour aller à la petite Oasis, dont je parlerai plus bas.
A l’est-quart-nord-est, la montagne se prolonge jusqu’à la gorge d’Haouârah. Au sud-
est, on voit le village qui porte le nom de Medynet el-Garâh. Le revers de la montagne
qui sépare la vallée de Garâh de celle de l’Egypte, forme une pente douce
et facile.
Nous quittâmes les ruines de Medynet-Ma’dy à une heure et demie, et nous
descendîmes dans un bas-fond de terre végétale légèrement recouverte de sable.
Cette terre, quoique déserte, seroit susceptible de culture; car il y croît spontanément
et sans aucun soin une grande quantité d’arbres et de plantes diverses.’
Un canal dont les bords sont cultivés, coule dans ce bas-fond, et va porter
ses-eaux au sud dans le lac. Nous remontâmes ce canal jusqu’à Medynet-Garâh,
où nous arrivâmes à trois heures après midi. Ce village est entouré d’une muraille
pour sa défense ; mais son intérieur présente un aspect misérable : on y trouve
une maison de mamlouk entièrement ruinée. Les alentours ne sont pas plus
agréables. Bien différent des villages d’Egypte, qu’on reconnoît de loin aux nombreux
palmiers.dont ils sont entourés, Medynet-Garâh n’a pas un seul arbre dans
ses environs, et ne présente que l’aspect de la nudité la plus affreuse. J’y restai
pour passer la nuit : je voulois voir les Kaouâm el-Oitazazé, Arabes dépendans des
Simmâloui qu’on m’avoit signalés comme de rusés voleurs dont je devois me
méfier. Je.ne sais si la présence de cheykh A ’iy et de cheykh O ’tmân leur en imposa;
mais je sortis de leurs mains sans avoir à m’en plaindre. Us me parlèrent avec
plaisir du Modabber Girard, qu’ils avoient vu et accompagné dans son voyage
deux ans. auparavant. Leur cheykh Kramné m’offrit ses services pour me conduire
au lac qu’ils appellent Garâh bta d-Gliaraq, distant du village d’environ deux heures
de chemin au sud. Je les acceptai ; mais je renvoyai cette visite à l’époque où je
me rendrois à la petite Oasis, voyage dont j’avois conçu le projet depuis que je
connoissois les détails et la situation de cette île du désert. J’allai seulement avec
lui visiter des débris informes qui portent le nom de Deyr Zaqkhâoueh bta d-Gharaq,
et dont la position est à environ une lieue de distance du village par la direction
sud-quart-sud-est.
Nous partîmes de Gharaq le 20 nivôse[ 10 janvier], à huit heures moins un
quart du matin, et nous entrâmes à Sennoures, petit village fermé de murs, autour
duquel sont campés les Arabes de la tribu de Ma’rabyn, sur la rive droite du
canal, vis-à-vis de Gharaq. Dirigeant ensuite notre route au nord-est, nous trouvâmes
plusieurs langues de désert coupées par des parties susceptibles de culture.
A neuf heures et demie , nous traversâmes le petit canal qui va se jeter dans
Ê . M . TOM El i . ■ * t e l