2 8 2 OBSERVATIONS SUR LA TOPOGRAPHIE
de Pharaon [ hammam Farà’oun] : elles coulent au pied d une montagne de deux cent
quatre-vingt-dix à trois cent quatre-vingt-six mètres [cent cinquante à deux cents
toises] d’élévation. La première source fournit environ deux pouces d’eau ; le thermomètre
de Réaumur s'y élève à emquante-sixïdegrés. Les pierres sur lesquelles
elle coule, et celles qui bordent le canal, sont couvertes de soufre sublimé ; plusieurs
autres sources coulent à travers le sable sur une longueur de cinquante pas.
A quatre mètres [environ deux toises] d élévation au-dessus de ces sources, on
trouve deux ouvertures : celle qui est a droite, conduit dans une espece de glotte
dans laquelle le thermomètre s’élève à trente-quatre degres au milieu d une chaleur
humide, accompagnée d’une odeur forte de soufre : 1 autre forme 1 entrée d une
excavation qui n’a pas plus d’un demi-mètre [environ quinze à dix-huit pouces]
de haut sur une largeur un peu plus grande, où l’on est obligé, pour arriver a la I
source, de ramper nu, sur une longueur de vingt-trois a vingt-neuf métrés [douze à
quinze toises], dans un sable humide et chaud ; le thermomètre s’y élève à trente-
six degrés. La posture gênante qu’on est forcé de prendre, et 1 excessive chaleur, ont
fait dire à plusieurs voyageurs que la lumière s’éteignoit dans ces espèces de grottes, I
et qu’on avoit à craindre d’y être étouffé en peu de temps. Nous n’y sommes pas
restés assez long-temps pour vérifier cette assertion : mais je n ai pas éprouvé que I
ma respiration fût gênée ; et l’odeur du soufre, dans cet air extrêmement humide, 11
m’a paru supportable.
La baie de Corondel semble avoir été autrefois un assez bon mouillage : ouverte I
à l’ouest, elle étoit à l’abri des vents du nord et du sud; et l’on pouvoit en sortir I
par les vents d’est, qui régnent le plus souvent sur la mer Rouge. Les pluies qui 11
tombent une ou deux fois par an sur les montagnes, y forment des torrens qui
entraînent dans la baie une prodigieuse quantité de cailloux et de quartiers de I
rocher. C ’est là que plusieurs écrivains font arriver Moïse après son passage dans I
la mer Rouge. Cette baie est maintenant sans eau.
H U I T I ÈM E J O U R N É E .
En sortant de la baie de Corondel, on entre dans une vallée étroite, ou p l u t ô t I
dans un ravin que bordent de hautes montagnes à pic, de près de quatre m i l l e s d e
longueur, et à l’extrémité duquel on arrive sur un plateau plante de quelques dat- I
tiers. On y voit un puits d’un mètre [trois pieds environ] de profondeur, qui foui- I
nit une petite quantité de mauvaise eau, à laquelle Pococke a trouve un goût cl a c i e r . I
L ’eau, bientôt épuisée, se renouvelle promptement ; les Arabes en abreuvent fouis. I
chameaux. Ce lieu, nommé Houseyi, à vingt-quatre milles d Abou- S o u e y r a l i , I
quoique fort élevé au-dessus de la mer, est dominé par la chaîne des montagnes qui I
se prolongent du côté de la Syrie. Les Arabes de T o r sont en possession de c e t e r i a i n . I
Nous avions encore douze heures de route avant d arriver au lieu du cam-
peinent. Quoique celui-ci fût plus agréable que tout ce que nous avions rencontre I
depuis le Kaire, nous n’y restâmes que le temps nécessaire pour faire boire nos I
chameaux.
Une longue vallée au sud nous conduisit sur un large plateau entoure de
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montagnes qui le mettent à l’abri des vents du nord : la chaleur, à dix heures du
matin, y étoit excessive; le thermomètre cependant n’étoit qu’à vingt-cinq degrés.
De là, traversant une chaîne de montagnes au sud-est, nous entrâmes dans
la vallée <£el-Tâl, puis dans une gorge où est enterré un cheykh nommé Reys-
tlchemâlelu Un des côtés de la vallée, celui où est son tombeau, porte son nom ; les
Arabes, en passant, y déposent quelques branches d’arbustes ou des morceaux
d’étoffe : l’autrç côté se nomme Chebee]yeh. Ensuite, après avoir parcouru une
vallée plantée de tamaris, on retrouve la mer au sud-ouest : nous nous y arrêtâmes
pour aller, à cinq cents toises au nord, visiter une partie de la montagne
d’où les Arabes tirent du soufre; nous en avons, en effet, trouvé quelques
échantillons bien cristallisés.
Reprenant notre route au sud, nous entrâmes dans une baie fort vaste, bordée
de hautes montagnes qui la mettent à l’abri des vents de nord, de nord-est et de
sud; mais, comme celle de Corondel, elle est presque entièrement comblée. Après
l’avoir tournée en marchant dans l’eau sur une longueur d’environ un mille, on
campe dans la plaine de Makra, au milieu des dunes formées par les touffes de
■tamaris qui arrêtent Jgs sables chassés par les vents du nord. On n’y trouve que de
mauvaise eau. Notre provision d’eau du Nil nous avoit manqué à Soueys, et de
fortes pesanteurs d’estomac nous firent sentir la différence de l’une avec l’autre.
N E U V I È M E J O U R N É E .
Après une heure de route dans cette plaine parsemée d’arbustes, nous entrâmes
dans une vallée couverte de blocs de granit, de porphyre et de cailloux roulés,
détachés de la chaîne qui domine les montagnes calcaires dont nous suivions la
direction, et que nous traversâmes ensuite pour arriver à une vallée appelée Pha-
ran, où nous couchâmes sans trouver d’eau.
Le dixième jour, nous passâmes treize heures dans un désert aride et des vallées
où l’on trouvoit à peine quelques broussailles : la chaîne du mont Sinaï se voit à
l’ouest, et des montagnes calcaires sont à l’est. Nous entrâmes dans l’Ouâdy-Gah,
où, parmi quelques palmiers, nous découvrîmes un palmier doum. Un puits en
maçonnerie, de six pieds de profondeur, fournit une grande quantité de bonne eau.
En traversant ensuite une plaine rase, humide et couverte de sel, on arrive
dans une heure à Tor.
Bonder-Tor, ou Port de Tor.
Un golfe d un mille environ de largeur, sur une profondeur presque égale,
forme le port de T o r , sous le 28° 12' de latitude et le 31“ 20' de longitude septentrionale
du méridien de Paris. Le fond n’en est pas généralement bon : il présente
des bancs.de coraux, des roches couvertes de madrépores et de coquillages à
un ou deux mètres de profondeur [trois à six pieds]; quelques-uns, .presque à fleur
deau, font de toute la partie du nord-ouest une sorte de parterre émaillé de fleurs,
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