subjuguèrent le pays de Barqah ( i) , de Qayrouân (2) et de Tripoli (3), et presque
toute l’ancienne Libye.
Suivant les auteurs Arabes, aussitôt que les Musulmans se furent rendus maîtres
de l’Egypte, ils s’occupèrent d’y organiser un mode de gouvernement, de régler
la répartition des impôts qui étoient perçus par des intendans au nom des klialyfcs
et de construire des Nilomètres dans les diverses provinces qui la composent.
Le célèbre A ’mrou ben el-Aas (4), l’un des plus grands guerriers que les
Musulmans aient eus à leur tête dans les premières années de l’islamisme, fut celui
qu’O ’mar chargea du commandement des troupes qu’il envoyoit faire la conquête
des contrées de l’occident, tandis que les autres armées de ce prince,
marchant à l’orient, s’avançoient contre le roi de Perse.
(1) Barqah tSj* . A’bd -er-Rachyd el-Bakouy place
ce pays,dans le troisième climat.
Je joindrai ici l’article qui concerne ce pays dans
le Khcrydet e l-A ’gâyb o-iLaJI ¿Gy-à- d’Ebn el-Ouardy
dont je possède plusieurs beaux manuscrits :
« La terre de Barqah renfermoit dans les anciens temps
»des villes grandes et jpeuplées; mais maintenant elle
»est déserte, et n’a que peu de culture et cPhabitans:
» on y sème beaucoup de safran [el-^a’/rân jJl]. »
(2) Qayrouân , l’ancienne Cyrene, métropole
de l’Afrique proprement dite. Les géographes Arabes
placent cette ville dans le troisième climat, à trente-trois
parasangesde l’ancienne Carthage et à douze parasanges
de la mer. Elle fut reconstruite par O’qbah ben Nâfe’
qui, après la prise de Barqah, y fut laissé
par A’mrou pour y réunir les habitans de la Barbarie
qui embrassoient l’islamisme. L’an 40 de l’hégire [660
de l’ère Chrétienne], ce général, ayant reçu du khalyfe
Mo’âouyah un renfort'de dix mille hommes, subjugua
toute la province d’Afrique proprement dite, et porta ses
armes au loin jusqu’à la Nigritie; mais, se défiant des Africains,
qu’il voyoit peu affermis dans leur nouvelle religion,
il choisit, pour s’y fortifier et y renfermer ses troupes^et ses
trésors, la ville de Qayrouân, dont la situation éloignée de
la mer, rapprochée de l’intérieur et voisine du désert, le
mettoit en état de contenir le pays et de ne rien craindre
des flottes des Siciliens -et des Romains. Cette ville ne
tarda pas a voir s’élever dans son sein un grand nombre
d’édifices publics et particuliers : bientôt les richesses et
l’abondance y firent fleurir IesMéttres et les arts; mais
l’époque, de sa plus grande splendeur fut sous le règne
des Aglabites [ Al-el-Àghlab cjLcVj ]. Cependant
Zyadet ben el-Aghlab *_slcVI détruisit ses murailles
, de crainte que son ennemi O’mar ben JVIohhâ-
led oJLfi ne s’y fortifiât,’ s’il venoit à bout de s’en
emparer. Qayrouân commença à diminuer et à déchoir
lorsaplbrâhym ben Ahmed ^ 1 ^ , neveu de
Zyâdet, eut bâti, à quatre milles de cette ville, dans la
situation la plus salubre et la plus agréable, la nouvelle
ville de Raqâdah *$S3j~-bu, suivant d’autres, Refâouah
» qui avoit plus de douze mille coudées de tour, et
qu’il destinoit à recevoir les étrangers et l’excédant de la
population de Qayrouân. La nouveauté, dont les hommes
sont si avides en général/fit préférer à l’ancienne ville
la nouvelle, qui devint bientôt la capitale du royaume, f
Qayrouân reprit cependant son ancienne, splendeur :
dans la suite, sous le règne des O’beydites [Beny O’btyiI
(> j], qui prirent le titre de Fatémites, et qui ontI
long-temps régné en Egypte.
A ’bd-er-Rachyjd el-Bakouy .-place cette ville à la
longitude de 4*° f ’ et à là latitude de 310 4'» il en fait
la description suivante : ‘ ■
« Qayrouân, grande' ville d'Afrique, Bâtie par A’qabg
» fils de Nâfe/el-Qourchy, du temps dé Mo’âouyah; il f
» y a deux colonnes qui tous les vendredis, avant le
m lever du soleil,. sont en sueur. »
(3) Tarâbolous ou Tarâbolos jX>, l’an-l
cienne Te/reMf d’Afrique. Lorsque les Arabes veulent I
écrire dans leur langue un nom propre étranger qui com-l
mence par deux consonnes, ils sont obligés d’en faireI
deux syllabes et d’ajouter une voyelle après la première!
consonne; quelquefois même ils la font précéder d’uni
ülyf [ t a\: ainsi ils appellent quelquefois cette villeI
Atrâbôïos . Pour la distinguer de celle du même,
nom en Syrie, ils désignent celle-ci par le nom de Tara-
bolos el-Çfhâm aL&II [Tripoli de Syrie], et celleI
d*Afrique par celui de Tarâbolos el-gharb
[Tripoli de l’occident]. Les géographes Arabes fontI
dépendre cette ville de l’arrondissement de Qayrouân, I
et la placent également dans le troisième climat.
(4) A ’mrou ben e l-A ’às ^Laii ^ j j C’est luiI
qui est reconnu par les historiens Arabes pour le fon-1
dateur de Fostât L lk u j , sur la rive orientale du Nil ; ei I
l ’on peut voir ci-après, dans une note de la seconde partie, I
chap. i.cr, leurs traditions à ce sujet. A’mrou, choisi pour!
arbitre dans la querelle qui s’éleva entre A ’iy et|
A io’âouyah [Moavie I.er ] pour la possession du I
'khalylat, fit déposer A’iy, et proclama Mo’âouyah, qui■
fut le premier khalyfe de la dynastie des Ommiades. I
Le fils d’A’mrou, A ’bd-alla/, .vol , surnommé e/-l
Sahymy , parce qu’il étoit de la tribu de Sahym I
embrassa l’islamisme avant son père, et obtint de I
Mahomet la permission de recueillir par écrit tout ce qu’il I
apprenoit de sa bouche. Cet ouvrage porte le nom de I
Hadyt £>joo. , et comprend ^toutes les traditions et I
révélations Musulmanes.
A’mroù mourut à la Mekke l’an 65 de l’hégire [684 de I
l’ère Chrétienne], quelque temps après la mort d’ yezjd I
o- jJ j , fils de Mo’âouyah.
A ’mrou conquit en peu de temps une grande partie de la Syrie, et arracha
i’Égypte au foible Héraclius (i). Après avoir achevé ia conquête de cette dernière
contrée, l’an 19 de l’hégire [ 64o de l’ère Chrétienne], il'donna lui-même des
ordres pour la construction de deux Nilomètres dans la haute Egypte : le premier
fut placé dans la ville d’Asouân (2), que les Grecs ont connue sous le nom de
Syenc, et qui avoit été le chef-lieu d’un gouvernement particulier sous les empereurs
Romains; il fit élever, quelque temps après, le second Nilomètre à
Denderah (3 ).
O’mar fut remplacé par O ’tmân (4), qui, après un règne de près de douze ans,
laissa le trône à A ’Iy ( j) , fils d’Abou-Tâleb, qui lui-même ne régna pas cinq années.
Hasan (6), fils de A ’iy et de Fâtmah (7 ) , et par conséquent descendant
directement de Mahomet, occupa ensuite le trône; mais, après l’abdication de
ce prince, qui ne régna guère que six mois, le khalyfat passa, l’an 4 i de l’hégire
[661 de l’ère Chrétienne], à la dynastie des Ommiades (8).
Mo’âouyah (9), fils d’Abou-Sofyân, et que nos écrivains ont nommé Moavie I ." ,
fut le premier prince de cette dynastie, qui occupa le trône pendant quatre-vingt-
(1) Les Arabes nomment ce prince Heraql .
('2). Asouân est appelée, par le Vocabulaire
Qobte-Arabe d’Ebn-Kabar, Co**Mf, Souan, tsmimuç.
Benjamin de Tudèie lui donne le nom de Souéneh maniD*
Terentianus, surnommé Aiaurus parce qu’il étoit né en
Afrique, et dont nous avons une pièce de vers intitulée
de Litteris, Syllabis, Pedibus et Aie tris , étoit gouverneur
de cette ville sous le règne de Trajan, vers l’an 90 del’ère
Chrétienne. C’est à cette ville que les géographes Orientaux
placent le commencement du deuxième climat.
(3) Denderah Sjcxi j . Ce nom est celui que porte, chez
les Arabes, l’ancienne ville de Tentyris, célèbre dans
I antiquité par > la haine que ses habitans portoient aux
crocodiles. Dans la langue Qobte, elle est nommée
K.EN'TOJpX Kentôri. On trouve ce nom dans le Vocabulaire
Qobte-Arabe d’Ebn-Kabar: mais on lit Nikentôri
HxKEÎTTCüpï dans le vocabulaire Memphitique de
Montpellier, et dans les actes Qobtes de S. Pachôme
{ Ms. Qobt. Vatic. 69, fol. 14-8)', et dans les actes de
b. Apater, déjà cités, on trouve le mot HspE**--NxKEÎÎ-
TCUpS Pirem - JVikentori [natif de Tentyris], qui en
est dérivé. On lit HxKEÎTTOJpE Nikentôre dans
deux vocabulaires Sa’ydiques de la Bibliothèque du
Roi, Nekentore tÏEKEÎTTOpE dans un autre lexique,
et Nigentôre H x r rEîVTtUpE dans un fragment Sa’y-
dique publié par Mingarelli. Les actes de S. Paphnuce
font mention d’une ville nommée Genterie, que le savant
Tillemont juge avoir été inconnue à tous les géographes;
mais le P. Georgi a prouvé que cette ville n’étoit autre
que Tentyris. Au reste, on trouve encore chez les auteurs
Qobtes le nom de Nitentôri Hx'TEN'TC.UpI, qui se
rapproche davantage de ceux qui ont été donnés à cette
ville par les Grecs et les Latins.
Kircher, page 208, et la Croze, page 4, offrent encore
un autre nom de cette ville, ^2.K0CyEp Di-anocher,
Tanosar, Tirmyt, urbs Ægypti.
A bd-er-Rachyd el-Bakouy en fait la description sui-
« Denderah, jolie ville, à l’occident du N i l, dans le
» Sa’yd : il y a beaucoup d’eaux et d’arbres, des palmiers,
» des baraby [monumens], et autres bâtimens an-
» tiques qui sont autant de talismans. »
(4) O’tman ben A ’jfân y lie ^ qLÔc , troisième successeur
de Mahomet, monta sur le trône l’an 23 de l’hégire
[644,de l’ère Chrétienne], et fut tué l’an 35 de
1 hegire [65 5 de l’ère Chrétienne], après un règne de onze
ans, dix mois et quatorze jours.
(5) -A’fy ben Aby-Tâleb oJLL ^1 j j s , gendre de
Mahomet, fut son quatrième successeur; il monta sur
le trône l’an 35 de l’hégire [655 de l’ère Chrétienne], et
fut tué l’an 40 de l’hégire [660 de l’ère Chrétienne], après
un regne de quatre ans, huit mois et vingt-deux jours.
(6) Le khalyfe el-Hasan ben A ’lyt ben Aby-Tâleb,
oJU» c£Î ¡¿j cinquième successeur de Mahomet
, monta sur le trône l’an 40 de l’hégire [ 660 de
1 ère Chrétienne]; il ne régna que six mois et cinq jours,
et abdiqua l’empire l’an 4 1 de l’hégire [ 661 de l’ère
Chrétienne].
(7) Fâtmah &4LI3 , fille de Mahomet.
(8) Les Ommiades [Beny Otnmyah Jj-j] forment
la première dynastie des khalyfes, laquelle comprend quatorze
souverains.
(9) Aio’âouyah ben Abou-Sojyân qLJu. j j f ^ jujU».
Ce prince, étant encore sous les ordres d’O’mar son arrière
prédécesseur, fit, aunom de ce khalyfe, la conquête
de la ville de Gha^yah oje , sur les frontières de la Syrie
et de l’Egypte. Mo’âouyah fut d’abord reconnu khalyfe
en Egypte seulement, l’an 36 de l’hégire [656 de l’ère
Chrétienne]; ce ne fut que cinq ans après, c’est-à-dire, 1 an 4 1 de l’hegire [661 de l’ère Chrétienne], qu’il devint
seul possesseur du khalyfat universel.
Ce prince, après avoir régné dix-neuf ans, mourut
à Damas, l’an 60 de l’hégire [680 de l’èrë Chrétienne],
à l’âge de soixante-treize ans, ou, suivant d’autres auteurs,
de soixante-dix-huit*ans; quelques-uns même
disent qu’il avoit alors quatre-vingt-cinq ans.