
0 2 4 MEMOIRE SUR L AGRI CULTURE,
Les provisions de la caravane de Goubânyeh consistent en biscuit, en lentilles,
en beurre et en farine. On, trouve en chemin des buissons dont le bois se rt de
combustible : on emporte du dourah et de l’orge pour la nourriture des chameaux.
L alun rendu à Goubânyeh se vend aux marchands qui viennent l’y chercher,
de yo à .60 parats le medd, mesure qui, pour cette marchandise, est équivalente
a un dixième d'ardeb du Kaire.
Une partie des productions de la contrée la plus méridionale de l’Égypte, que
nous venons d indiquer, -est payée en marchandises expédiées du Kaire en retour.
Celles-ci consistent principalement en toiles de lin , en draps, en étoffes de Syrie,
en savon , r iz , fe r , cuivre, plomb et sel.
11 n’y avoit point de droits d’entrée établis sur ces différens objets à Esné,
qui en étoit l’entrepôt. Le gain le plus ordinaire des marchands de cette ville
est de 10 à 20 pour cent: c’est aussi le taux de l'argent prêté à Syène’; cet
intérêt est communément de 10 à 1 1 pour cent.
Le Nil offre une voie si commode pour communiquer du midi au nord de
l’Egypte, qu’il n’est point étonnant que le commerce intérieur de cette contrée
ait suivi cette voie depuis un temps immémorial : aussi ce fleuve est-il couvert
de barques grandes et petites qui le parcourent sans cesse. Celles de la haute
Egypte sont, pour la plupart, comme nous l’avons déjà dit, montées par des
bateliers des environs de Syène et de Philæ, ou même par des Barâbras, qui,
ne trouvant pas à vivre.chez eux, naviguent sur le Nil une partie de l’année,
et rapportent pour 1 entretien de leurs familles le produit de leurs gages, soit
en argent, soit en objets de première nécessité.
Il faut ajouter, indépendamment de l’extrême économie qu’on trouve à transest
plus douce que celle de la Gvtah, station que l’on
trouve sur la route de Qoceyr.
Ces détails sur l'extraction de l'alun et le lieu où il
se trouvé m’ont été donnés à Syène, par un habitant
de Goubânyeh, qui va tous les ans, avec la caravane,
chercher ce sel dans le désert. Un fait que j’ai eu occasion
d’observer, fournit, je crois, le moyen d’expliquer
par analogie la formation de cette couche de sulfate
d’alumine au milieu des sables.
La partie des ruines de Thèbes sur laquelle se trouve
aujourd’hui le village de Karnak, offre une suite de
monticules d’une terre extrêmement friable, provenant
de la 'destruction des briques crues, dont il paraît que
les édifices particuliers de cette ville étoient construits,
et des décombres de toute espèce qui y ont été accumulés
à différentes époques. On trouve, au pourtour de
ces monticules, une petite couche de natron et de mu-
riate de soude, de 3 ou 4 centimètres d’épaisseur, à 15
ou 20 centimètres au-dessous de la surface du sol, dont
elle suit les inflexions en tout sens jusqu’à une certaine
hauteur, passé laquelle on ne trouve plus ces deux sels
en couche continue, quoique la masse entière de ces
décombres en contienne par-tout plus ou moins, que
l’on pourrait obtenir en lessivant.
Pour concevoir la formation de,celte couche saline,
il faut observer que les monticules des ruines dont
il s’agit s’élèvent au-dessus d’une^plaine ordinairement
submergée pendant le débordement du Nil : alors l’eau
qui en baigne le pied, les pénètre à leur partie inférieure,
et, s’élevant au-dessus de son niveau, comme
dans les tuyaux capillaires, dissout les sels contenus
dans les décombres, et s’en charge à mesure qu’elle
monte : maisson ascension a un terme; et il arrive que,
la surface de ces ruines étant considérablement échauffée
par le soleil, les sels commencent à se cristalliser, lorsque
l’eau qui en est chargée est parvenue assez près de cette
surface pour que la chaleur extérieure produise son évaporation
à travers le sol. II se forme aussi une couche
de sel, qui devient annuellement d’autant plus épaisse
que la plaine reste plus long-temps inondée*
II me sentble.qu’on peut expliquer de la même manière
la formation de la couche d’alun que les habitans de
Goubânyeh exploitent dans le désert. Des eaux tenant
ce sel en dissolution filtrent à travers le sable de bas en
haut; et elles viendraient s’écouler à la surface du sol, si,
à 8 ou 10 pouces de cette surface, le sable n’étoit pas
déjà assez échauffé par la chaleur extérieure du soleil
pour opérer l’évaporation de ces eaux à mesure qu’elles
arrivent.
porter
L 1NDUSTRI E ET LE COMMERCE DE L EGYPTE. 0 2 j
porter par eau tous les objets du commerce intérieur de l’Egypte,,que cette
voie est beaucoup plus sûre que la voie de terre. Le défaut presque absolu de
police, le peu de largeur de la vallée, et les habitudes des Arabes qui la bordent,
exposeroient à leurs rapines les denrées que l’on transporterait par terre, tandis
que les grosses barques qui en sont chargées, et qui, outre les bateliers de leurs
équipages, portent ordinairement un certain nombre de voyageurs, sont un peu
plus à l’abri du pillage.
Toutes les villes situées sur le Nil, et même certains villages, sont des lieux
de stationnement pour les barques, qui y prennent ou qui y déposent leurs char-
gemens pendant la saison de l’inondation. Lorsque les canaux dérivés du fleuve
sont navigables, ils servent à transporter par eau sur ces ports, au moyen de
barques plus petites, les productions de l’intérieur des terres. Pendant le reste
de l’année, ces transports s’effectuent à dos de chameau ou à dos d’âne.
En descendant d’Esné par le Nil, la ville de Qous, l’ancienne Coptos, est le
lieu le plus considérable que l’on rencontre : c’est l’entrepôt des blés et autres
grains destinés à être embarqués pour l’Arabie, au port de Qoceyr sur la mer
Rouge. On expédie aussi de Qous, pour le Kaire, une grande quantité de châles
de laine blancs, de la qualité de ceux que l’on fabrique à Qené.
C ’est au marché de cette dernière ville , qui se tient une fois par semaine,
et dans les magasins qui y sont établis, que l’on s’approvisionne des denrées du
pays et des marchandises d’Europe, que les caravanes transportent à Qoceyr.
On expédie de Qené au Kaire des toiles de coton, de l’huile de laitue, des
blés et autres grains ; enfin une grande quantité de ces vases de terre réfrigérans
connus sous le nom de bardaqncs : ce sont les plus estimés de tous ceux de la
même nature qui se fabriquent en Egypte.
En général, il se tient tous les huit jours, dans chaque ville de la haute Egypte,
un marché où: les habitans des villages voisins viennent vendre leurs denrées et
les étoffes qu’ils fabriquent; ce qui n’en est point consommé sur les lieux, est
exporté par des marchands qui en font le commerce. Ainsi les sucres de Far-
chyout, d’Akhmym et de Girgeh, les saffanons de Tahtah, les toiles de lin de
Syout, sont expédiés, pour le Kaire, de même que les blés, les fèves , les lentilles,
et les huiles de lin, de carthame et de colza. Toutes les productions du
sol, et les divers objets de fabrication dont nous avons parlé en traitant de l’agriculture
et de l’industrie de la haute Egypte, sont échangés contre des marchandises
qui viennent du Kaire ; et, à moins que des circonstances particulières ne
les provoquent, cet échange n’éprouve que de légères variations dans les matières
qui en sont l’objet.
Il se tient dans la ville deMédine, capitale du Fayoum, un marché considérable,
où les Arabes qui sont établis aux confins de cette province, viennent s’approvisionner
de ce dont ils ont besoin pour le genre de vie qu’ils mènent : ils y vendent
des chameaux qu’ils élèvent, et des dattes qu’ils vont recueillir dans les oasis. Ces
Arabes se distinguent du reste de la population qui fréquente les marchés, par
l’espèce de vêtement qu’ils portent, et par la lance dont ils sont toujours armés,
É . M . T O M E I I . K ik l