dénomination $ el-keydy ; pendant leur durée, on cultive une première fois le
dourah : la chaleur de la saison , et les arrosemens abondans qu’il reçoit, en accé
lèrent la maturité ; la récolte en est faite trois mois après 1 ensemencement.
Alors commence la seconde époque, celle des cultures el-nabary, temps pendant
lequel on cultive une seconde fois le dourah. Ce dourah d’automne reste
en terre pendant environ cent jours.
Enfin, aux approches du solstice d’hiver, s ouvre lepoque des cultures el-cke-
taouy : l’orge est le seul grain cultivé pendant cette période ; on en fait la récolte
quatre mois après.
Indépendamment de ces trois récoltes consécutives, les habitans d’Éléphantine
retirent de quelques petites portions de leur île le produit de quelques plantes potagères
qu’ils y cultivent pour leurs besoins domestiques ; il y a en outre quatre
cent quarante palmiers environ. La population de cette île peut s elever a deux
cents hommes, dont cinquante seulement sont employés a demeure aux travaux
de l’agriculture ; les autres sont occupés comme mariniers sur les barques du Nil ;
ils ne reviennent dans l’île que pendant les trois mois d hiver.
L ’étendue du terrain cultivable de l’île d’Éléphantine n’est que de 4o feddân;
ils sont arrosés au moyen de six machines a pots, tenues constamment en
activité, parce que le sol, continuellement exhausse depuis une longue suite
de siècles par le dépôt des eaux limoneuses qui y sont versees, se trouve
aujourd’hui beaucoup au-dessus des plus hautes inondations du Nil.
Chaque machine exige l’emploi de douze à quatorze boeufs; ce qui fait, pour
les six, quatre-vingts boeufs environ. Il y a de plus dans 1 île cent ou cent cinquante
chèvres et moutons.
Les produits de chacune des trois cultures auxquelles le territoire d’Éléphantine
est consacré, varient peu d’une année à l’autre : le dourah el-keydy, ou d’été,
donne deux ardeb par feddân; le dourah el-nabâry, ou d automne, en donne quatre;
enfin l’orge el-chetaouy, ou d’hiver, en donne cinq ou six.
De Syène à Edfoû, on cultive la terre aux trois époques de l’année rurale
que nous venons de rappeler ; mais il y a cette différence entre 1 aménagement
de ces terres et celui des terres d’Éléphantine, que ce ne sont point les mêmes
terrains qui sont succèssivement cultivés.
Ainsi, dans le territoire d’Edfoû, sur 10,000 feddân cultivables, on en exploite
80 à 100 seulement pendant l’époque el-keydy; et c’est toujours a la culture
du dourah qu’ils sont consacrés : les terres ainsi cultivées sont celles qui
forment les deux rives du fleuve.
Lorsque les eaux sont assez élevées pour être introduites dans les canaux,
les rives de ces canaux sont également cultivées en dourah pendant la période
el-nabâry; cette culture s’étend sur environ 600 feddân.
Enfin le reste du territoire est cultivé pendant la troisième époque, soit
el-bayâdy, quand il a été inondé naturellement, soit el-chetaouy, quand les eaux
ne sont pas montées sur les terres, et que celles-ci sont arrosées au moyen de
delou. Il faut remarquer, au reste, que ce ne sont pas les mêmes grains qui sont
ensemencés pendant l’hiver sur les terres naturellement inondées et sur celles qui
ont besoin d’arrosemens artificiels.
Le blé , 1 orge , les lentilles, les pois chiches, les lupins, la laitue, la gesse et
les pois des champs sont ensemencés sur les terres qui ont été submergées ; il n’y
aguere que le blé, lorge et le coton que l’on arrose pendant l’hiver.
De toutes les cultures que nous venons d’indiquer, la plus avantageuse est
celle du blé ; viennent ensuite celles de l’orge, des lentilles, du dourah, &c.
Quand les terres sont inondées naturellement plusieurs années de suite, on
peut y semer du blé : cependant, si l’inondation est moins favorable, on alterne
les cultures,reservant celles de I orge , des lentilles et des-fourrages, pour les années
où l’inondation est plus foible.
Généralement sur 30 feddân cultivés el-bayâdy, 10 sont ensemencés en blé,
autant en orge, et 1 o autres en lentilles, gesse et autres menus grains.
La plaine dans laquelle se voient aujourd’hui les ruines de Thèbes, n’est cultivée
que sur la moitié de son étendue : non pas que l’on y manque de moyens
d irrigation naturelle, mais parce que les fellâh sont hors d’état de faire les avances
nécessaires pour la cultiver en entier. La rive gauche de cette plaine m’a paru
moins bien cultivée que la rive droite. Voici la distribution la plus ordinaire des
cultures aux trois époques de l’année rurale.
Sur 4°°0 feddân, 2000 sont cultivés el-bayâdy, 1000 sont cultivés el-keydy,
yoo el-nabâry, enfin 300 el-chetaouy : le territoire des villages de Karnak et de
Louqsor, qui comprend environ 12,000 feddân, pourrait être ainsi aménagé. Dans
1 état actuel d abandon où sont laissés les canaux publics, destinés à faciliter les
irrigations, les grains récoltés dans la plaine de Thèbes servent encore à l’approvisionnement
des marchés de Qous et de Q en é , d’où on les exporte pour
l’Arabie par Qoçeyr ; c’est toujours dans ce canton la culture du blé qui est la
plus avantageuse. Comme la situation des terres détermine l’époque à laquelle
elles doivent être mises en culture, ce sont toujours les champs voisins du Nil
qui sont consacrés aux cultures el-nabâry ; et, comme ils ne rapportent qu’une
fois par an , ils restent pendant huit mois sans être cultivés : les deux plantes
appelées hatfeh et a'âqoul (1), qui servent de pâturage aux chameaux et aux
buffles-, y croissent spontanément pendant cet intervalle. On commence par
nettoyer de ces deux plantes les champs où le dourah doit être semé. La première
est fortement enracinée; mais, pour s’épargner le navail de l’arracher,
on la brûle sur pied. Après avoir arraché la seconde à coups de pioche, on en
fait des tas que l’on brûle également : les cendres en sont laissées sur la terre, à
laquelle on donne ensuite un second labour.
Les environs de Qene sont cultivés aux trois époques de l’année rurale. C’est
la que Ion commence à cultiver les fèves el-bayâdy ; cette culture est la plus
répandue après celle du froment, qui seule occupe un tiers environ des terrains
exploites. Cest aussi a partir de Qené, en descendant le Nil, que commence
la culture du colza.
(1) Halfeh, Poa multiflora ; a’âqoul, Hedysarum Alhagi,