
laine de cette province est aussi la plus estimée : les moutons y sont fort beaux'
et il y en a beaucoup de blancs, tandis que ceux du Sa’yd sont bruns, comme nous
venons de le dire.
La tonte.des moutons se fait dans le Fayoum à deux époques différentes de
l’année : une première fois, au milieu de juin; une seconde fois, en hiver. La
laine de ces animaux est longue et assez fine. Après la tonte, on les couvre
d une espèce de chaperon tissu de feuilles de palmier, pour les préserver de l’ardeur
du soleil. La toison d’un mouton choisi parmi les plus forts pèse communément
de 4 à y rotl.
Ici, àu lieu de laver la laine après qu’elle est détachée du corps de l’animal,
on lave les moutons avant de les tondre : on étend ensuite la laine à la main, et
on l’épluche soigneusement ; ce qui remplace l’opération du cardage. C ’est après
ces préparations grossières qu’elle est filée dans les villages de cette province.
Le prix ordinaire d’un mouton est de 2 ou 3 pataquès. On élève environ
huit cents moutons dans un village où l’on cultive deux mille feddân.
L ’état de pauvreté des fellâh de l’Egypte ne leur permet pas de nourrir d’autres
animaux domestiques que ceux qui sont absolument indispensables à la culture
des terres, ou qui peuvent fournir une partie de la nourriture et du vêtement
de leurs familles : aussi ne trouve-t-on dans tous les villages qu’un certain nombre
de boeufs, de chameaux, de chèvres, de moutons. Quant au cheval, les Égyptiens
paroissent 1 estimer trop pour l’employer aux travaux de l’agriculture :
cet animal n’est pour eux qu’un objet de dépense et de luxe. Comme, dans les
guerres que se font les villages entre eux, le succès dépend presque toujours du
plus grand nombre de cavaliers qu’un parti peut armer, on s’est accoutumé à
mesurer la puissance d’un homme et la considération qu’on lui accorde, sur la
quantité de chevaux qu’il entretient : le prix d’un cheval ordinaire est de 4o
à 60 pataquès.
A u reste, c’est aux Arabes devenus cultivateurs, ou à ceux qui habitent encore
sous des tentes à l’entrée du désert, que l’éducation des chevaux est réservée;
la vente de ceux de ces animaux qu’ils élèvent, fait une partie de leur richesse.
Ce sont eux aussi qui approvisionnent de bétail les différens marchés des villes
et des villages de l’Égypte, soit que les animaux qu’ils y exposent en vente proviennent
de leurs propres troupeaux, soit qu’ils les aient enlevés à main armée
dans les villages qu’ils ont pillés sous quelque prétexte.
Les fellâh et leurs familles élèvent aussi une grande quantité de pigeons et de
poules, de la vente desquels ils retirent quelques légers profits : on a donné ailleurs
une description détaillée des espèces d’étuves appelées ma mal, où l’on fait éclore
les poulets: nous ne reviendrons point ici sur cet objet (1).
II nous reste à parler des abeilles, et de la manière de recueillir le miel. Quoiqu’on
se livre à l’éducation des abeilles dans les diverses provinces de l’Égypte, ce
que nous allons dire est le récit de ce que nous avons vu aux environs de Syout,
(1) Voye^ le Mémoire de MM. Roziére et Rouyer sur l’art de faire éclore les poulets (É. M. tome page zoj ,
et la planche 11 des Arts et Métiers ).
et se rapporte spécialement à ce canton. Il y a des ruches en plus ou moins grande
quantité dans presque tous les villages : elles sont placées tantôt dans les jardins,
tantôt sur les terrasses des maisons. Ce sont des cylindres creux, de terre séchée
au soleil comme des briques crues : ces cylindres ont environ 12 décimètres de
longueur sur 2 de diamètre; on les dispose horizontalement les uns sur les autres,
de sorte qu un rucher présente l’aspect de pièces de bois mises en pile. Chacune
de ces ruches, qui ressemble parfaitementà un bout de tuyau de conduite, se vend
3 médins.
On achète les essaims après les semailles du trèfle, au prix moyen de 60 parais.
Année commune, dix ruches produisent cinquante rotl de miel et deux rotl de
cire : le qantâr de miel, du poids de cent rotl, se vend de y à 8 pataquès; et la
cire, 4o parats le rotl. Le miel de Syout est très-beau ; la chaleur naturelle du
climat le tient toujours à 1 état liquide. On en transporte dans des cruches une
certaine quantité pour être vendue sur les marchés du Kaire. Les ruches du
Sayd ne voyagent point sur le Nil comme celles de la basse Égypte.
Les alvéoles des abeilles sont disposés dans le cylindre creux qui forme la
ruche, en petits pains de trois ou quatre centimètres d’épaisseur, arrangés dans
des plans verticaux les uns derrière les autres ; cette disposition permet d’enlever
les pains de cire et de miel sans détruire l’essaim. Pour cela, on fait du feu à l’en-
tree de la ruche avec de la fiente sèche de buffle ou de chameau ; la fumée fait
reculer les mouches qui occupoient la partie de la ruche la plus voisine de son
entrée; on la débouché en enlevant le plateau de terre qui sert à la fermer;
ensuite, avec une petite spatule de fer que l’on promène circulairement entre
la paroi intérieure du cylindre et les gâteaux de cire, on détache ceux-ci du
cylindre et on les en fait sortir; on continue d’enfumer la ruche et d’enlever
successivement les gateaux d alvéole jusqu’à ce que les abeilles, retirées au fond
de la ruche, nen occupent plus que le tiers environ, dont on leur abandonne
le miel. Cette opération ne se fait qu’une fois par an. Quand on veut peupler
une nouvelle ruche, on y introduit des pains d’alvéole avec les mouches.
S E C T I O N V I I .
De l ’Aménagement des Terres dans les différentes Provinces de l ’Égypte.
L ’Île d’Êléphantine est la première terre cultivée que l’on trouve au-dessous
delà derniere cataracte du Nil; et, comme si elle devoit servir à donner une
idée de la fertilité de 1 Égypte, c’est le lieu de cette contrée qui est le mieux
cultivé et où la terre se repose le moins.
Nous avons dit que l’année rurale des Égyptiens se divisoit en trois périodes,
dont chacune présente les mêmes circonstances que l’année rurale de douze mois
présente dans les autres climats. Labour des terres, semailles , culture et récolte,
chacun de ces divers travaux se répète trois fois par an dans l’île d’Éléphantine.
Un mois avant le solstice d’été, commencent les cultures désignées sous la