» Fayoum ( i ) ; mais le nom sous lequel ii est le plus généralement connu, est
» celui de canal de Joseph (2). On a donné ce nom à ce canal, parce qu’en
» effet la tradition rapporte que ce fut Joseph qui le fit tracer, et qui construisit
» en même temps les levées hautes et épaisses que l’on voit aussi dans cette contrée
» près de la ville de Fayoum (3) ; ce fut aussi lui qui fit creuser le grand lac appelé
» tac du Fayoum (4), ou mer du Fayoum (y), et qui porte aussi le nom de met
» de Joseph (6). Tous ces travaux avoient pour but de rassembler les eaux de
» l’Egypte supérieure, et d’en former comme un dépôt et un grand réservoir,
» afin de fournir les eaux nécessaires au pays, lorsque celles du Nil ne seroient
» pas parvenues à une quantité suffisante. On assure que Joseph fit aussi .construire
» autour de ce l.ap trois grandes villes et cent soixante villages, dont la position
» étoit une des plus agréables de toute l’Egypte. »
El-Maqryzy fait aussi mention de ces mêmes traditions, et dit, dans le chapitre
de son ouvrage où il traite du Fayoum, que Joseph, ayant déterminé les bases
de l'administration pour cette contrée, mesura toute la terre d’Egypte et fixa les
degrés des eaux du Nil, de telle sorte que toutes les terres fussent arrosées régulièrement
et d’une manière égale et suffisante.
D ’autres historiens attribuent la fondation du premier Nilomètre à el-Hâchem (7)
ou Haslym (8), que quelques manuscrits nomment aussi Khaslym (9 ) , ajoutant
qu’il avoit élevé autant de colonnes Nilométriques en Egypte qu’il y a de jours dans
l’année. Les uns placent le premier Nilomètre à Amsous, les autres à Memphis.
Plusieurs autres auteurs Orientaux reculent beaucoup plus encore l’érection
du premier Nilomètre, et prétendent qu’elle est antérieure au déluge : selon eux,
la construction de presque tous les monumens de la haute Egypte, et même de
quelques-uns de la basse, tels que les pyramides, a précédé cette catastrophe. Us
attribuent aussi la fondation des principales villes du Sa’yd à une dynastie antédiluvienne,
composée de dix-huit princes auxquels ils donnent le titre de Kâhen (10).
Je joindrai ici la traduction du chapitre suivant (1 1) d’el-Soyouty, qui contient
leur histoire, rapportée aussi plus au long et avec quelques variantes dans le grand
ouvrage d el-Maqryzy ( 12). C e chapitre, qui est très-court et qui n’a jamais été
(-1) Nahar el-Fayoum
{2) Khalyg Yousef ç ^ j j .
(3) Medynet el-Fayoum p J J I . A’bd-er-Rachyci
rapporte que « la ville de Fayoum est placée dans un
■» terrain bas, et entourée partes eaux du Nil; mais qu’elle
» est garantie des inondations, du côté de la ville, par de
■3» fortes digues solidement construites. »
(4) Bahyret el- Fayoum -yJ jf o je n 'I a n g u e Qobte,
Di-lumnê nte-Phiom ÎTTEcJjO-M- ( Ms.
Qobt. Vatic.*j7,fo l.y ) .
Le mot bahyreh signifie proprement en arabe
■petite mer. Suivant A’bd-er-Rachyd, « ce lac, dont
a» l’eau est douce et qui est très-abondant en poisson,
» n’est éloigné de la ville de Fayoum que d’environ une
» demi-lieue; il est situé àu nord de cette ville, en tour-
» nant un peu vers le couchant. Sa longueur, qui est à
» peu près d une journée, s’étend de l’orient à l’occident.
» Les bords du lac sont plantés d’arbres fruitiers telle—
» ment épais, qu’ils dérobent-Ia vue de ses eaux, qu’on
» n’aperçoit qu’avec peine à travers leurs feuillages. *
(5) Bahar el - Fayoum- I j j . ,
(6) Bahar Yousef j-4 .
(7) E l - Hâchem ■.
(8) Haslym a J L u ..
(9) Khaslym o/— à ..
(10) Kâhen [grands prêtres rois]. Les Arabes modernes
donnent aussi à ce mot la signification de magicien.
(11) Ce chapitre est intitulé :
t3)" 1 b LJI lJ— «. -9 y.. . +n » Cil— lo Jj— • j )
Zikrmin meleh Mesr qabl el-Toufàn [Histoire des princes
qui ont régné en Egypte avant le déluge ].
(12) Dans le chapitre intitulé:
Zihr medynet Amsous ou a’gâyb-hâ, ou molouk-hâ [Histoire
de la ville d’Arasous, de ses merveilles et de ses rois].,
publié,
publié, renferme un grand nombre de traditions fabuleuses; mais, comme elles
se rapportent presque toutes au Nil et à ses accroissemens annuels, je n’ai pas
cru devoir les omettre, afin qu’on pût en faire la comparaison avec les autres
traditions que nous connoissons déjà sur ce sujet.
« El-Masa’oudy (1) rapporte que le premier des princes qui régnèrept en Egypte
■a après la confusion des langues (2), fut Neqrâouch (3). 11 étoit savant dans l’art
» de la divination (4), dans la magie et dans la science des talismans (y) : on le re-
» garde comme le fondateur de la ville d’Afsous (6), dans laquelle il construisit
» beaucoup de monumens admirables, parmi lesquels on cite deux rangs de statues
» en pierre noire (7) qu’il plaça au milieu de la ville. Lorsqu’une caravane (8)
» y arrivoit, elle ne pouvoit s’éloigner de ces deux rangs, et elle étoit forcée de
» passer entre eux. Quand elle étoit au milieu, ces deux rangs se refermoient
» sur elle et la saisissoient, sans qu’elle pût échapper. La durée de son règne fut de
» cent quatre-vingts ans (9).
» Après sa mort, Noqrâs (ro) son fils lui succéda. Ce prince fut, comme son
» père, savant dans la magie et les talismans. Il bâtit en Egypte une ville qu’il
» nomma Halagah.{\ 1) : il construisit aussi derrière el-Rahân (12) trois villes
» fondées sur des piliers, et dans chaque ville il plaça des trésors de science et
» d ’autres choses merveilleuses (13).
» Après la mort de ce prince, son frère Mesrâm ( 14) lui succéda sur le trône.
» Celui-ci fut de même savant et habile dans la magie et l’art des talismans, et il se
» rendit célèbre par des actions étonnantes, parmi lesquelles on cite les suivantes : il
» apprivoisa un lion, le dompta et s’en servit pour monture ; il se plaça sur un trône
» qu’il fit transporter par les Génies (1 y ) jusqu’au milieu de l’Océan (16); il éleva
(i) Ahou-l-Hasan A*/y J » ij—Ai,.1 est plus connu
sous le nom d’el-Afasa'oudy — *uuil qui lui fut donné
parce qu’il tiroit son origine dyE b n -M a s a ’o u d e l-H e ç ly
ïjxma ,jjÎ : il est l’auteur du livre historique et
géographique intitulé, $||J o-— *■
JVIeroug el-dahab ou ma’den el-gouâher [les Prairies
dorées et'les Mines des pierres précieuses].
Cet ouvrage se trouve à la Bibliothèque du Roi ; et
j’en ai rapporté d’Egypte un très-bel exemplaire manuscrit.
EI-Masa’oudy a encore composé plusieurs autres ouvrages.
(2) Tctelbel el-alsm J+ L j. Plusieurs peuples
Orientaux placent la confusion des langues antérieure-
ment au déluge.
(3) Neqrâouch (jSjfjiü. Quelques manuscrits portent
Neqraous Suivant el-Maqryzy, il étoit fils de
Alesrâym ^1
.(4) El-hehânet « 1* 0 .
(s) Fl-telesmât oUuJUJf.
(6) Afsous ; d’autres manuscrits portent Amsous
( .
(7) Suivant el-Maqryzy, il n’y avoit que deux statues.
(8) Suivant el-Maqryzy, «une troupe de brigands.»
(9) Suivant d autres auteurs Arabes, « ce prince
Ê . M . T O M E I I .
» ordonna de faire, du côté de la Nubie, des travaux
» pour redresser le lit du N i l, dont le cours étoit par-
» tagé en deux branches par une montagne : if remonta
» ce fleuve jusqu’à Gebel el-Qomr_^Uî JLja. [Montagne
» des Tourterelles], nommé vulgairement Gebel el-Qamar
** J-h?- [Montagne de la Lune]; et il plaça des statues
» auprès de sa source. »
Ils ajoutent que, quand il mourut, il laissa de grands
trésors qu’on enferma dans son cercueil.
(10) Noqrâs ^ ^— H_J. Quelques manuscrits portent
Noqâres yvjUü.
(11) Halagah mLs. .
(12) El-Rahân qI».j l \.
(* 3) Quelques auteurs ajoutent que ce prince voyagea
jusqu’à l’Océan.
0 4 ) Mesram Quelques auteurs ajoutent que
ce fut ce prince qui donna son nom à l’Egypte.
(15) Ginn qa. . La religion musulmane admet l’existence
de ces etres intermédiaires entre l’homme et la divinité
: il en est souvent question dans le Qorân. Salomon
et plusieurs rois les assujettirent à leur pouvoir- Les
traditions les placent dans un pays fabuleux que les
Orientaux appellent Ginnistân [Pays des Génies],
(16) Bahar el-mahyt [la Mer qui entoure
la terre]. Les Orientaux lui donnent encore d’autres noms,
dont quelques-uns sont cités dans les notes ci-dessus.
L