
<5 o O MÉMOIRE SUR L’AGRICULTURE,
à carreaux bleus, qui sert à quelques parties du vêtement des hommes et des
femmes. Les pièces de cette toile ont seize pyk de long et se vendent de 4 j à 60 parats. On y fabrique encore une espèce de toile bleue très-étroite,
appelée kirka, laquelle n’est point en usage dans le pays, mais que l’on expédie
en Syrie par la voie de Damiette ; la longueur des pièces de cette toile est de
dix-huit pyk. Enfin on y fabrique une toile d emballage, dont la piece, de
vingt pyk de long, se vend 45 parats.
La fabrique de ces, diverses sortes de toiles s’étend dans tous les villages des
environs de Tantah, et particulièrement a Mehallet-Marhoum, a Bermeh, a
Abyâr, à Bassyoum,&c. Les tisserands de ces endroits viennent vendre le produit
de leur travail au marché qui se tient à Tantah le dimanche de chaque semaine.
Quelques villages du De lta, et notamment celui de Kalyn, fournissent à la
consommation du pays, outre. les toiles dont on vient de parler et les étoffés
de laine désignées généralement sous le nom de sauf, une espèce particulière de
châles, d’une étoffe appelée cliadd, qui est tissue de laine et de lin.
Les toiles claires bé-haouâchy, qui portent sur leurs bords trois ou quatre raies
d’un tissu plus serré, et qui sont employées à fane des chemises blanches ou
bleues, sont les seules toiles de lin que l’on fabrique en quantité notable a Se-
mennoud. Près de trois cents métiers y sont employés ; mais on en compte un
bien plus grand nombre dans les environs de cette ville. Les pièces de ces toiles
ont vingt-six pyk beledy de long, et vingt doigts de ce meme pyk de largeur. Il
s’agit ici de .la mesure du Kaire, et non pas de celle de Menouf, de Tantah,
d’Abyâr,&c., qui est de quatre doigts plus longue, c’est-à-dire, dans le rapport de
28 à 24 avec le pyk beledy du Kaire.
La façon d’une de ces pièces de toile exige trois journées de tisserand, et se
paye 24 parats. Le prix d’une pièce varie de ioj à 160 médins, suivant son
degré de finesse.
Il se tient à Semennoud, tous les mercredis, un marche qui est abondamment
fourni des différentes toiles de lin fabriquées dans le Delta, et notamment à
Mehallet el-Kebyr, &c. Des marchands de la ville en achètent une partie, qui est
expédiée en Syrie par Damiette : on en envoie aussi a Constantinople par les
ports de Rosette et d’Alexandrie.
Les moutons que l’on élève dans les provinces de Gharbyeh et de Charqyeh,
fournissent la laine dont on fabrique dans le Delta les souf, qui servent, comme
nous l’avons déjà dit, à faire la robe ou le vêtement extérieur des fellâ li, soit
qu’on lui conserve la couleur brune de la laine, soit qu’on la teigne en bleu foncé.
Les pièces de soief ont la même largeur que les pièces de toile de lin, mais dix-huit
pyk de longueur seulement. Il faut huit jours de tisserand pour fabriquer une de
ces pièces ; ce qui en fait revenir la façon à 90 ou 100 parats : elles se vendent,
suivant leur qualité, de 3 à y pataquès. Cette fabrication d’étoffe de laine occupe
à Semennoud une cinquantaine de métiers environ. Un plus grand nombre de
métiers étoient employés, dans les villages d alentour, à fabriquer ces étoffes de laine
noire de mêmes dimensions, qui, beaucoup plus recherchées par les gens aises, se
vendent
l ’ i n d u s t r i e e t l e c o m m e r c e d e l ’ é g y p t e . 60 l
vendent jusqua 1000 médins la pièce, et sont l’objet d’une exportation assez
importante pour la Syrie.
La ville de Mehallet el-Kebyr est exclusivement en possession, dans le Delta,
de là fabrique des étoffes de soie : neuf cents: ouvriers au moins y sont constamment
employés.
Ces étoffes de Mehallet el-Kebyr servent à faire des rideaux de fenêtre, des
couvertures de dyouân, et des coussins, des tapis de table brochés en or et en
argent, des ceintures, de grands voiles noirs pour les femmes, des mouchoirs
de la même couleur dont elles se,couvrent la tête, et une espèce de vêtement
de femme appelée chalast.
Ces différens objets fabriqués à Mehallet el-Kebyr se vendent et se consomment
dans les différentes villes de l’Égypte, ou sont expédiés dans les différentes possessions
de l’empire Ottoman.
Il y a aussi dans cette ville des ateliers de teinture pour la soie : on la teint
en jaune, en rouge, en noir, en vert, en orangé, en bleu céleste, en bleu
foncé. C ’étoit au Kaire seulement qu’elle étoit teinte en rose ; on faisoit aussi
venir de cette ville les fils d’or et d’argent qui entroient dans la fabrication des
étoffes brochées de Mehallet el-Kebyr.
Le commerce entre Mehallet el-Kebyr et la Syrie se faisoit par l’entremise des
marchands de Damiette ; ils faisoient venir la soie de ce pays, et y renvoyoient
une partie des ouvrages qui en étoient fabriqués en Egypte.
Le tissage des étoffes de coton occupoit autrefois à Mehallet el-Kebyr jusqu’à
deux mille ouvriers, nombre qui se trouvoit réduit à cinq cents pendant notre
séjour dans cette contrée. Le coton qu’ils employoient provenoit de la province
de Mansourah, ou de la Syrie, dont on tiroit le plus estimé. Les pièces de toile
de coton de cette fabrique ont généralement seize pyk de long ; elles ne diffèrent
que par leur largeur ou par leur qualité : aussi leurs prix varient-ils de
45 à 150 médins.
On faisoit aussi à Mehallet el-Kebyr une petite quantité de toile de lin, mais
d’une qualité inférieure à celle que l’on tiroit des villages voisins.
La ville de Rosette possède plusieurs fabriques de toiles de lin et de coton,
ainsi que de tissus particuliers, mélangés de ces deux madères ; enfin d’une
espece de toile de lin rayée de soie blanche, employée spécialement à faire des
chemises de femme.
Les fabricans de Rosette tiroient le lin des environs de cette ville, ou des
provinces de Gharbyeh et de Menoufyeh ; ils tiroient le coton des provinces de
Damanhour ou de Mansourah. Ils faisoient venir de Syrie la soie qu'ils mettoient
en oeuvre.
On exerce à Damiette la même industrie sur le lin , le coton et la soie, et
ces matières proviennent des mêmes lieux ; mais on fabrique spécialement dans
cette ville des toiles de lin qui portent pour ornement des lisières de soie de
couleur.
Il y existe, à cet effet, deux ateliers de teinture, qui sont constamment entreÉ.
M. T O M E I I . Ggg g