jeter les eaux du fleuve dans le lac qui lui a donné son nom. Le lac Maréotis, qui,
selon Strabon (i), s’étendoit jusqu’à Tapo suis sur le golfe Plinthine, étoit entouré
de riches habitations, de bourgs et de villes, dont Maréa étoit la capitale. Cette
ville existoit long-temps avant Cambyse, l’an 229 de Rome, y 25 ans avant notre
ère. Hérodote dit à ce sujet (2) :
« Les habitans de Maréa, ayant pris en aversion les cérémonies religieuses
» des Égyptiens, envoyèrent consulter l’oracle de Jupiter Ammon, pour savoir
» s’ils devoient être assujettis à ces lois ; car ils prétendoient être des peuples de
» la Libye. L ’oracle répondit que tous les pays que le Nil couvroit de ses eaux,
» appartenoient à l’Égypte, et que les peuples qui en buvoient, étoient Égyptiens. »
Cette province limitrophe des déserts de la Libye, ayant toujours été soumise
aux princes de l’Égypte, et devant d’ailleurs ses habitations et sa culture aux
eaux du Nil, est, de fait, province dépendante de l’Égypte; et dans ce cas, la décision
de l’oracle d’Ammon paroît aussi juste que naturelle.
On doit à Ptolémée les noms des principales villes et bourgades de ce nome,
dont il donne les positions géographiques ainsi qu’il suit {3) :
IN D IC A T IO N DES LIEUX. LONGJtTUDE. LATITUDE.
Aiartoti Nomi Littora.
Chimo vicus.. . . . ........... ........................ .. 59° 3°* 31“ 6'
Plinthine . . . . ........... . ....................................... i 94j.
m 0.
Ghersonesus parva, port us. .................................. 60. 0. m 6.
■ Afareoti Nomi Civitatcs et Villa.
Monocaininum . . . . ................................. . * . . . . 59- 10. 3°. 3°.
Halmyrae ............................................. .. 59- 4o. 30. 5° .
Taposirk.. .................. .. i - . . . 59- 50. 3°. m
59- 10. 3°. 20.
Antiphili........................................... . . . . . . . . M 59- 30. 3<?-. '20.
Hierax........... fe.............................. . . . . . . . . . . i 94o,
30. 4?-
Phomothis................................ 60. 0. 3°. 40-
Palae Manx v i c u s . ^ . 60. 0. 3°. ip .
Maria palus.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . t . . . . . . . . , 60. 15* 3° . 5°-
Alexandria... . Rhacotis................................................ 60. 3°* 3 *• 0.
Canobos. . . Menelai metropolis ......................... 60. j g § 3 - 6.
On pourroit facilement, avec cette indication de la position respective des
principaux lieux.de cet ancien nome, en dresser une carte ; mais, en l’analysant,
( r ) H e ro d . H i s t . lib . I I , S' X V I I I . (3) P lo ie r a , e x edit. Franc. R a p h e len g ii, L iig d u n i
(2 ) S t ra b . Ceogr . lib . X V I I . B a ta v o r am , 1 5 8 6 , in - fo l.; 31a®. ¡ t , ¿ - 2 « # .
on
on s’aperçoit bientôt des erreurs qui résultent évidemment des données de
latitude. Comment, en effet, Chersoncsus parva, que l’on connoît généralement,
et à n’en pas douter, pour avoir occupé la position actuelle du Marabou, petit
cap avec un fortin, situé à deux petites lieues sur la côte qui court au sud-
ouest d’Alexandrie, se trouve-t-elle indiquée à un dixième de degré au nord
du parallèle de cette capitale ! On pourroit trouver plus à reprendre encore à la
position de Plinthine, qui, beaucoup plus éloignée dans le sud-ouest, est indiquée
sur le parallèle même d’Alexandrie.
On conçoit difficilement que Ptolénfée, géographe et astronome de l’école
d’Alexandrie, et qui vivoit dans cette ville de i ty à 161 de Père vulgaire, ait
pu commettre de pareilles erreurs sur des positions de lieux si voisins de cette
capitale de l’Égypte, avec laquelle ces mêmes lieux avoient des relations très-
grandes sous les rapports de la politique, du commerce et de la religion. Il paroît
plus vraisemblable de les attribuer aux copistes et .traducteurs de ce géographe,
ou mieux encore à ses commentateurs, ainsi que le dit M. Gossellin dans sa
Géographie des Grecs (t).
Strabon place différemment les villes maritimes de ce nome : il parle de
Cynossema, et de Taposiris qu’il dit ne pas être située tout-à-fait sur les bords
de la mer, et où l’on célébroit de grandes fêtes; ensuite d’une autre Taposiris
assez distante de cette première, où, annuellement et vers le printemps, il y
avoit un grand concours de peuple, et sur-tout de jeunes gens qui prenoient
la plus grande part aux fêtes qui s’y donnoient. Strabon donne à entendre
que, comme à Canope et à Mendès, il s’y passoit des scènes licencieuses que
Jes prêtres couvroient des voiles de leurs mystères (2). Après ces deux Taposiris,
venoient Plinthine, Nicioe Pagns, et Cliersonesus , petit cap qui, ayant une forteresse
avec garnison, n’étoit éloigné d’Alexandrie que de soixante-dix stades (six
mille six cent cinquante toises au stade Grec ou Olympique de quatre-vingt-
quinze toises).
Cette province étoit renommée sur-tout par l’excellence de ses vins, qui avoient
la qualité de se conserver long-temps, et dont Alexandrie faisoit une grande
exportation à Rome et en d’autres pays étrangers. Ce pays étoit encore fertile
en oliviers, mais dune espèce inférieure à celle que l’on cultivoit dans le nome
Arsinoite, laquelle donnoit en abondance de l’huile d’une bonne qualité.
Ce nome, dans les premiers siècles du christianisme et sous les empereurs
(1) M. Gossellin, dans sa Géographie des Grecs ana- des Egyptiens, ne parle des fêtes annuelles qui secélé-
Iysée, pag. iz j , et liv. il,p a g . ¡68 de ses Recherches sur broient à Mendès, qu’avec une réticence scrupuleuse,
la navigation des anciens, dit que Posidonius proposa comme en général des mystères de l'Egypte, auxquels il
à 1 école d Alexandrie une nouvelle mesure du degré fut initié; mais, si cet historien sut garderie secret qu’il
terrestre. Cette mesure, qui fut adoptée, réduisit à cinq avoit sans doute juré aux prêtres Égyptiens, sur tout ce
cents stades la valeur du degré, qui, avant, étoit évalué à qui tenoit à leur religion , les patriarches d’Alexandrie
sept cents stades, pour les distances prises dans le sens des et les Pères de la primitive Église n’ont pas craint J’en
latitudes. On changea à Alexandrie les anciens itiné- dévoiler la turpitude dans leurs écrits. On peut consul-
raires ; mais quelques-uns furent sans doute oubliés, ter, à ce sujet, les, notes 169, 172, 173, 181 et 182
C ’est à ce changement que ce savant attribue les erreurs de M. Larcher sur le livre i l d’Hérodote, tome I I de
qui se sont glissées dans. les tables de Ptolémée. sa traduction, pag. 266, 26/, 270 et 2^1 ; Paris, 1802.
(2) Hérodote, dans le livre où il traite de l’histoire
Ê . M . T O M E I I . B