MÉMO IR E
religion dominante, se regardent comme d’une race privilégiée, à recourir à la
délation pour s’emparer de la place d’un Qobte. C ’est ainsi qu’on nous citoit, à
la monnoie du Kaire, l’exemple d’un Chrétien, ancien chef de l’atelier du blanchiment,
que son second, qui étoit Mahométan, avoit remplacé, après l’avoir
dénoncé et fait décapiter, en produisant de faux témoins qui attestèrent qu'il
avoit blasphémé contre Dieu et son prophète.
Les ouvriers n’emploient point, comme chez nous, plusieurs heures à leurs'
repas ; ils sont extrêmement sobres, et mangent dans leurs ateliers presque en
travaillant (i).
Leur force et leur activité (2), sous un climat et dans un pays dont les habi-
tans sont en général si mous et si apathiques, ont d’abord de quoi surprendre.
C e sont, en effet, des hommes bien différens de ceux qui passent tout le jour,
assis et les jambes croisées, à fumer leur pipe, et qui se maintiennent, par l’usagei
du café, du tabac et des plantes narcotiques, dans un état continuel d’étourdis-
sement et de demi-ivresse.
Cette tendance générale au repos et à une espèce de léthargie doit moins être
attribuée à l’influence du climat qu’à celle du despotisme et du dogme du fatalisme,
qui persuadent à la plupart des Musulmans qu il est inutile de se fatiguer
à la recherche d’un bien-être dont on n’est pas sûr de jouir le lendemain, et de
tâcher de sortir de l’état où l’on suppose que la Providence veut qu’on reste,
parce que le hasard vous y a placé. Il n’y a pas de doute qu’un autre Gouvernement
et des institutions convenables ne puissent rendre les hommes aussi robustes,
aussi ardens au travail, aussi animés d’émulation, que par-tout ailleurs, puisqu’il
suffit, pour changer en quelque sorte leur nature et leurs habitudes, de quelques
circonstances particulières, telles que celles où se trouve l’espèce d’ouvriers dont]
il s’agit. Dès l’âge le plus tendre, ils sont élevés dans cette profession laborieuse;
ils s’y attachent par l’éducation, l’exemple, l’habitude, et par la certitude de
jouir sans trouble de leur modique salaire. En effet, ils sont régulièrement payés
chaque jour à la monnoie, ne sont jamais inquiétés, ni contraints à d’autres]
travaux ou corvées ■ leurs enfans, qu’ils élèvent autour d’eux, reçoivent une légère
rétribution, et eux-mêmes obtiennent des secours lorsque l’âge ou les infirmités
les rendent impropre^ au travail.
On doit observer, du reste, que les ouvriers qui ont le plus d’ardeur et sont
les plus infatigables sont ceux qui se tiennent debout, habitude assez rare, même
parmi les artisans, dont la plupart ne travaillent qu’accroupis, à peu près comme
nos tailleurs. Pour rendre les Orientaux plus forts et plus, actifs, un grand point
seroit de les accoutumer à se tenir debout comme les Européens.
Mais une des causes qui tendent le plus à inspirer l’amour du repos et de
l’oisiveté, c’est l’espèce de honte ou de mépris dont le travail est flétri, chez
un peuple où il a presque constamment existé deux classes bien distinctes,
celle des vainqueurs et des maîtres qui commandent, et celle des vaincus et des
(1) Quelques dattes, ou un peu de légumes confits dans (2) Voyez pag. 420, alin. dern.; ^22, alin. 1 -er; et d23»
Ievihaigre, suffisent pour leur nourriture. alin. 5.
SU R L E S M O N N O I E S D’É G Y P T E . 4 4 \
esclaves qu’ils forcent a travailler pour eux. Ne voyons-nous pas encore des
traces bien marquées d’un préjugé semblable, même chez les nations d’Europe
les plus policées, où la noblesse féodale, qui tire son origine du droit de conquête
et de la force des armes, a toujours cru déroger en travaillant!
Un de ces Turks aussi orgueilleux qu’ignorans, à qui un artiste Français cher-
choit à faire admirer la supériorité des Européens sur les Arabes dans les arts
et l’industrie, lui répondit : Je le crois bien; vous autres infidèles, vous êtes
condamnés au travail, tandis que nous, disciples de Mahomet, nous sommes nés
pour le repos et pour contempler le sublime Qorân.
O B S E R V A T I O N S
N.” 2.
4.
;•
6.
13 et i4.
15 et 16.
Ê . M .
L es chiffres que présente cette colonne sont les numéros d’ordre des pièces de monnoie
gravées dans la planche jointe à ce Mémoire.
L’astérisque [* ] indique ceux des sequins qui présentent, sur l’aire A , le chiffre (ou paraphe )
du sultan : sur les autres ^er-mahboub, le nom du prince est écrit en toutes lettres, du
même côté A .
O n a désigné, dans cette colonne, pour chaque aire A et B , le type de la p ièce, en
indiquant à quelle autre pièce elle est semblable, et. les différences qu’elle présente.
O n y a indiqué, 1 .° le nom du prince et celui de son père, conformes à l’orthographe des
noms Arabes, et tels que les pièces les offrent, soit en forme de chiffre, soit en toutes
lettres ; 2.0 le nom vulgaire ou usité en France sous lequel le prince est connu.
O n y a inscrit l’année de l’hégire où l'avénement du prince a eu lieu, écrite en chiffres
Arabes, et*à côté la lettre Arabe distinctive qu’offrent plusieurs pièces. ( Voye£ pag. 3 6 1 ,
alin. 1 ,er et suiv. )
O n a porté dans cette colonne Farinée de l’ère Chrétienne correspondante à Tannée de
l’hégire dans laquelle l’avénement du prince a eu lieu, et à côté la lettre Française qui
répond à la lettre Arabe distinctive.
O n a porté dans cette colonne ( pour celles des pièces qui offrent cette indication ) , ou
les chiffres Arabes que porte la pièce , soit qu’ils indiquent l’an du règne, soit qu’ils
présentent l’abréviation de l’année de l’hégire dans laquelle ladite pièce a été frappée ;
et au-dessous, en chiffres Français, Tannée de l’hégire que ces chiffres désignent
( voy e%, Pag- 369 » alin. 1 ." ) ; ou bien la lettre distinctive Arabe qui remplace les chiffres
indicatifs de Tannée de fabrication. ( Voye^ pag. 361 , alin. 5.)
O n a porté dans cette colonne, ou les chiffres Français qui répondent aux chiffres Arabes
servant à indiquer Tan du règne ou Tannée de l’hégire dans laquelle la fabrication a
eu lieu, et au-dessous Tannée de Tère Chrétienne correspondante à celle de Thégire
indiquée dans la colonne précédente ; ou les lettres Françaises équivalentes aux lettres
Arabes qui remplacent sur la pièce le chiffre indicatif de Tannée de fabrication.
O n a porté dans ces colonnes, d’abord en drachmes, ou poids du Kaire, ensuite en
grammes, ou poids de France, non le poids qui auroit dû être fixé authentiquement
par la Porte ou le Gouvernement d’Egypte, mais celui qui étoit censé adopté, ou qui
étoit déclaré à cette époque. La col. n.° 1 3 du poids, ainsi que celle du titre n.® 1 7 ,
font voir les altérations successives introduites dans la fabrication des monnoies.
Le poids indiqué dans cette colonne est le poids réel de chaque pièce, tel qu’on Ta trouvé,
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