S U R LES M O N N O I E S D’E G Y P T E . 3 4 3
parpît que, Iayant etc, dans 1 origine, en dynâr, et ensuite dans la monnoie d’or
q u i remplaça le dynâr, on admit concurremment avec cette monnoie, trop rare
pour acquittei les impôts, celle des piastres et thalaris ou ryâl [i j , devenus abondans
dans le commerce et qui avoient alors à peu près la même valeur, en monnoie
courante telle que pouvoient être les dtrhem, les félons ou médins.
Lapataque, monnoie fictive, lors de l’arrivée des Français en Egypte, passoit
pour être de 90 médins, taux auquel A'iy-bey, vers 1773 de notre ère, avoit fixé
la valeur du thalari (2). Alors la pataque monnoie de compte, dans laquelle
se calculoit et se prclevoit 1 impôt, et la pataque monnoie réelle, ou le thalari,
furent toutes deux, pendant quelque temps, de 90 médins; mais, tandis que la
pataque, en matière d’impôt, continua à être de 90 médins, la valeur du thalari
alloiteh augmentant, par la dépréciation des médins, et valoit, lors de notre
arrivée, jusqu’à 150 médins. Comme le sequin zer-mal,bout, à cette dernière
époque, étoit de 180 médins, le demi-sequin, qui en valoit 90, équivaloit à une
pataque monnoie de compte.
En remontant vers l’établissement de l’impôt en pataquès, il est certain que
cette monnoie de compte, ou celle qu’elle remplaça, équivaloit à moins de
9omédins. Les serrâf(3)e t les Qobtes (4) qui étoient chargés de la perception des
impôts, et qui, vers l’époque de la conquête de l’Égypte par les Français, per-
cevoient assez généralement 90 médins pour chaque pataque, ne comptoient
au moukezim (5) que 80 ou 8y médins, et gardoient pour eux la différence, ou
comme profit abusif, ou comme indemnité convenue. Si, par hasard, le contribuable
pay oit en demi-sequins, ils ne prenoient le demi-sequin que pour une
pataque de 85 médins, et le comptoient pour 90 au moultezim.
Les médins perdant continuellement de leur valeur, tandis que le produit
des terres, tant en impôts quen redevances ou prix de ferme, étoit fixé en
pataquès monnoie de compte, le Gouvernement et les moultezim, pour ne pas
voir diminuer continuellement leurs revenus, avoient deux partis à prendre, ou
celui d’évaluer la pataque à un plus grand nombre de médins, à mesure de la
dépréciation de cette derniere monnoie, ou celui d ajouter de nouveaux impôts.
On n eut presque jamais recours au premier moyen ; mais on usa amplement
du se'cond, et l’on créa une foule de contributions additionnelles, dont la quantité
finit par excéder de beaucoup l’impôt primitif (6).
Quoique cette marche soit à peu près celle de la plupart des Gouvernement,
qui, au lieu d’augmenter directement l’impôt territorial, ou le principal des
contributions, élèvent plutôt les recettes, à mesure des besoins de l’État, par
(;>} Voyei Paê* 332 > al™- 2 et not. 3.
(2) Voyeç ibid. alin. i .er et not. i.rc
(3) Ou changeurs publics. Voye^ notre Notice sur les
Poids Arabes,pag. 247,remarq. 26.0 (déjà citéepag. 323,
not. i.rc). Voye^ aussi pag. 42S> not. 2.
(4) Voyei , pour ce qui concerne les fonctions que remplissent
les Qobtes et les serrâf dans la perception des
impôts, le Mémoire sur l’administration de l’Égypte,
par Michel-Ange Lancret, È. M. tout. pag. 242;
et le Mémoire sur les finances de PÉgypte, par M. Estève,
pag.j/2.
(j) Le moultezim est le propriétaire ou seigneur
aes terres, dont le paysan ou colon, qu’on appelle
fellah (voyez pag. 341, not. 3), n’est que le tenancier.
Voye? les Mémoires cités dans la note précédente.
(6) Voyeçj pour ces divers impôts, les Mémoires eide
ssus cités dans la note 4*
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de notre ère].' Sous les dynasties Persanes des Bouydes (1) et des Seljeucydcs ;|J|
les mauvais dirheni se multiplièrent et se répandirent dans les provinces.
M. Tychsen cite des exemples de monnoies Arabes de cuivre dont la légende
porte : « C e dynâr (ou ce dirhern) a été frappé a &c. » Comme les dynâr étoient des
monnoies d’or, et l'es dirlum des monnoies d argent, il paroit évident que ce sont
de fausses pièces qui avoient été dorées ou argentées lors dg leur émission ; à moins
que, pour éviter la dépense de faire fabriquer de nouveaux coins, on n eût employé
pour frapper des pièces de cuivre, ceux qui avoient servi a fabriquer des dynâr.
On a soupçonné les Mamlouks, lorsquils se sont emparés de la monnoie
du Kaire, d’avoir, dans des momens de détresse, altéré les monnoies, et d’avoir
particulièrement fait fabriquer de fausses pièces d or. Nous avons vu au Kaire
plusieurs fondouklis qui passoient pour faux. Nous en avons fait graver un
sous le n.” f . il porte, du côté A , le chiffre du sultan A ’bd-el-Hamyd ben-Ah-
med(3) ; de l’autre côté B , l’année 1 1 87 [ 1 7 7 4 de notre ère], qui est Celle de
l’avénement de ce sultan ; et en haut de la piece, le chiffre 9 , qui indique que
la pièce a été fkbriquée en 118-9 [ ‘ 775 3 (4). époque qui répond au temps où
le Mamlouk Aîaliamed-bey, surnommé Abou-dahab (y) [le pere de lo r ] a cause
de sa prodigalité, ayant succédé à A ly-bey, qui! trahit et fit périr, se preparoita
porter la guerre en Syrie contre Dâher (6), ancien allié S A ’ly-bcy. A u reste, les
chiffres que présentent ces fondouklis ne prouveroient pas quils eussent etc fabriqués
précisément à l’époque qu’ils indiquent ; car il est très-possible, quand il
s’agit de fausse monnoie , que la date elle-meme soit fausse.
Parmi les médins qui circuloient dans le commerce, nous en avons rencontre
quelques-uns de cuivre jaune blanchi.
Monnoie de ■Compte.
O n appelle monnoie de compte, pour la distinguer de la monnoie reelle, une
unité de monnoie fictive qui sert à exprimer et calculer les diverses valeurs : ainsi
notre livre tournois étoit une monnoie de compte, parce que les sommes sexpri-
moient en livres, quoiqu’il n’y eût point de monnoie réelle dune livre.
Nous avons vu que les Égyptiens avoient d’abord compté en dynâr (7), ensuite
en dirhem (8), et même en felous ou monnoie de cuivre (9), et qu’ils comptent
aujourd’hui en médins (10) ; néanmoins les impôts ont été assez anciennement et
continuent à être établis en une monnoie fictive quon appelle pataque (jij.fi
(1) Du nom de Bouyah [ i j y ] , chef de cette dy- (5) <4 ) Voyez p .387, alin.7 , et p-373-
nastie. not* 3- , . ,
(2) OnSelgioucyrla. Emnbe,Selgiomjyoon[UyijJ>~-], (6) . Voyez le V o y ag e en E g y p te et en Syrie
o u p lu tô t Selgouqyah [ ï S y i - ] ; d u n om d e Selgouq M . d e Volney, é d it. d e 1 7 8 7 , to n i. I , pag. 131.
[ ¿ y L ] , un d e leurs chefs. (7) V V K Pa6- 3* 5- a lin . 3 « ™ 'r-
(3) u-f“ 1 o i <**“• Voyez pag. 387, alin. 7. (8) Voyez pag. 329, alin. 6 et suiv.
VoytZ lu planche des monnoies gravées, pièce n.° 5. (9) Voytz pag. 336, alin. i .er et suiv.
(4) Voyez, pour les millésimes, pag. 367, alin. 3 et (10) Voyez pag. 334, alin- 5.
suiv. p if Voyez pag. 332, a lin . 2 et not. 5.