d ’oiseau, près de seize myriamètres; et les deux branches principales du Nil qui
aboutissent à ces deux points, ont de vingt-trois à vingt-quatre myriamètres de ;
développement. La base du Delta est da-peu-près quatorze myriamètres et demi,
en suivant les sinuosités de la côte ; et d environ cent trente-sept mille métrés en
ligne droite, entre les embouchures de Damiette et de Rosette, extrémités de 1
cette base.
Tel est l’aspect général, telle est l'étendue du pays que nous allions parcourir;
pays peu connu avant l’expédition Française, à cause des dangers que les voyageurs
avoient à craindre ep s’éloignant des rives du fleuve...
Nous partîmes du Kaire le j vendémiaire an 8 [27 septembre >799]: on I
vouloit tracer, dans le Delta, des routes militaires, faire des nivellemçns, recon-1
noître et perfectionner le système des canaux de navigation et d’arrosement, i
établir une ligne télégraphique du Kaire à la côte (r), &c. Des instructions nous j
avoient été remises sur ces differens objets, et nous nous embarquâmes à Boulâq, jj
ville riche et commerçante, située sur les bords du N il, a un quart dé lieue du '
Kaire, dont elle est en quelque sorte un faubourg.
Nous montions une congé, sorte de barque fort légère, qui va a la voile et a |
la rame : une petite chambre très-agréablement ornée est placée- vers la poupe,
et sert d’abri contre l’ardeur,du soleil et l’humidité des nuits. 1
A une demi-lieue environ de Boulâq, nous aper.ç.ûmes à notre droite un château
en ruine, où les beys alloi'ent en pompe recevoir les nouveaux pâchâs que la epur >
de Constantinopie leur envoyoit.
(1) A mesure que notre armée s’affoiblissoït, il deve-
noit plus nécessaire d’être informé rapidement des mou-
vemens de Fennemi. On sentoit combien il étoit utile
d’établir des lignes télégraphiques, et l’on rejetoit presque
aussitôt une idée dont l’exécution sembloit impossible.
Mais c’est en vain que l’on manquoit des objets les plus
nécessaires; l’armée possédoit dans M. Conté, directeur de
l’atelier d*e mécanique, un homme dont legénie inventif,
déjà si souvent éprouvé, sut encore une fois surmonter
tous les obstacles. 11 fit en peu de temps d’excellentes
lunettes, et construisit un grand nombre de télégraphes
sur un modèle nouveau. M. Conté étant mort avant
d’avoir publié la description de son télégraphe, nous avons
pensé qu’on seroit peut-être bien aise d’en trouver ici une
description. succincte.
C e télégraphe, dont voici la forme,
se compose, i .°d’un mât vertical dont l’extrémité inférieure
est fixée d’une manière stable dansla maçonnerie de la plateforme
d’une tour; 2.° d’ une pièce en bois de la forme d’une
L , » mobile autour d’un boulon horizontal qui fixe sa
plus grande branche à l’extrémité supérieure du mât ;
3.0 d’une barre de bois qui passe par un anneau placé jj
sur le mât , vers le milieu de sa hauteur. L’extrémité g
supérieure de cette barre s’attache à la pièce L » de ma‘ I
nière à la faire tourner dans un plan vertical autour du 1
boulon qui la fixe au sommet du mât ; ce mouvement ^
s’exécute en tirant la barre .ou en la poussant, à l’aide I
d’une poignée placée à son extrémité inférieure. Le pro-1
longement de cette manivelle se place successivement I
dans plusieurs trous pratiqués dans l’épaisseur des planches I
qui forment un plan vertical au bas du mât. Ces trous I
déterminent pour la pièce L différentes positions qui» I
par leurs combinaisons, expriment-les phrases convenues. I
M. Conté ayant désiré connohre l’équation de la I
courbe que traçoit la cheville sur le plan vertical pro-l
longé indéfiniment, je trouvai qu’elle étoit algébrique du I
sixième degré ; et il est aisé de voir que si l’anneau, que I
nous avons dit considérer comme un point fixe, étoit sur I
la circonférence du cercle donné que décrit l’extrémité I
supérieure de la barre qui passe par cet anneau, et que la I
barre lut égale au diamètre du cercle donné, les deux I
branches de la courbe du télégraphe se composeroient I
chacun d’un arc d’épicycloïde et d’un arc de cercle, de I
manière à former à elles deux une épicycloïde et uni
cercle entiers : l’équation du sixième degré représente le I
système de ces deux courbes, et elle en donne les équa-1
tions séparées, en se décomposant en deux facteurs, I
l’un du second, l’autre du quatrième degré. (D u Bois• I
A y m é . )
Nous avions autour de nous le tableau animé d’une foule de barques se
croisant dans tous les sens ( l ) et fendant lés flots avec lâ voile ou l’aviron, au
bruit des chants des bateliers. Le soleil se couchoit derrière la chaîne Libyque:
ses derniers rayons frappoient encore le sommet des pyramides, dont les masses
inférieures, plongées dans l’ombre, se détachoient sur un ciel de pourpre; de
longues lignes de palmiers formoient d’élégantes colonnades, et desprairies de trèfle
s’étendoient devant nous jusqu’aux sables du désert. On apercevoit sur les bords du-
Nil des troupeaux qui venoient se plonger dans le fleuve; de petits hérons blancs,
reposoient tranquillement sur ie dos noir des buffles ; de jeunes enfans nus et de
couleur de bronze se jouoient sur la rive, et quelquefois l’un d’eux, s’arrêtant
immobile, nous ïetraçoit par sa pose et ses formes les statues de l’ancienne
Egypte. Ces plantes d’Afrique, ces chants Arabes, ces monumens antérieurs à la
civilisation Européenne, et enfin un retour sur nous-mêmes, rappelèrent à notre
esprit notre éloignement de la France, le cours fugitif de la vie humaine et ¡’instabilité
des empires les plus florissans. Long-temps encore, nous disions-nous, l’on-
viendra visiter cette terre classique, berceau des sciences et des arts ; et si les Français,
comme tant d’autres nations célèbres, disparoissent un jour de dessus la terre,
ces pyramides, témoins de leurs victoires et où mille inscriptions attestent leur
passage, en conserveront le souvenir : c’est là, dira-t-on, que de jeunes guerriers,'
nés dans cette belle contrée que bordent la mer et le Rhin, les Pyrénées et les
Alpes, vinrent disputer et enlever l’Égypte aux fiers enfans du Caucase, aux vaillans
Mamlouks; et nos coeurs, à cette anticipation des éloges de l’avenir et du ravage
des siècles, palpitoient orgueilleux de la patrie et s’attendrissoient sur elle.
La nuit nous surprit au milieu de ces pensées. Nous passâmes devant le!
canal d’Abou-Meneggeh ; et parvenus à quinze mille mètres plus bas, à l’endroit où
le Nil, se divisant en deux parties, embrasse 1e Delta, nous suivîmes la branche
de Damiette qui se dirige au nord, tandis que celle de Rosette fait un coude à 1 ouest. Le point de séparation de ces deux branches est nommé, par les gens du
pays, B a tn - e l-B a q a r a h , Ventre de la Vache.
Nous longeâmes les digues qui ferment l’ancien canal de Faraounyeh; et a
quelques mètres au-dessous, nous quittâmes la branche de Damiette pour entrer
dans un petit canal du Delta, navigable seulement dans le temps de l’inondation : ce
canal nous conduisit jusqu’au pied de la butte factice sur laquelle est bâti Menouf
Quelques jours après notre arrivée dans cette ville, nous voulûmes entreprendre
le nivellement du canal de Faraounyeh, et nous nous rendîmes à cet effet
au village de ee nom, situé sur la branche de Damiette. Nous n’avions point pris
d escorte, et souvent des détachemens de nos troupes avoient été attaqués sur
cette route; nous fûmes donc plus heureux que prudens. Peut-être aussi les f e l lâ h
etorenwls devenus moins hardis depuis qu’ils connoissoient les forces de notre
armée et la valeur de nos soldats. Quoi qu’il en soit, nous avons cru remarquer
quils ne sont point aussi médians qu’on le croit communément. Ceux qui ont
J O ilfflL u L ^ K rn Îr110" ^ b' r'gE!.';‘ Ics vcms 1“' Nil presque aussi facile en remontant Mutilent assez constamment, rendent la navigation du descendant. ' le courant qu’en: le