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Le moindre déficit dans ie poids est quelquefois puni aussi sévèrement, que la
fraude la plus manifeste. C ’est dans cette crainte que la plupart des vendeurs pré-
fèrent avoir des poids plus forts, ou trébuchons, selon le-sens de 1 expression
dont ils se servent.
Les balances en Égypte sont, en général, semblables aux nôtres, et la plupart se
tiroient autrefois d’Europe.
Les petites balances, qui se fabriquent dans le pays, ont assez souvent le défaut
d’être sourdes, c’est-à-dire que le levier est courbé, et le point d’appui, ou centre
de gravité ,• au-desjus des points d’attache des bassins ; ce qui rend la balance peu
sensible, ou difficile à faire trébucher.
On fait dans le commerce, sur-tout pour les poids un peu forts, un grand usage
de la balance que nous connoissons sous le nom de romaine, et qui est divisée suivant
le système de poids adopté en Égypte dans le commerce, i
P O ID S U S IT E S A L A M O N N O IE .
L es poids de la monnoie, qui se faisoient en cuivre jaune, avoient, en général,
la forme de polyèdres à faces octogonales. Cette forme s’obtient en tronquant les
angles du cube ; elle a sur la forme cubique l’avantage de présenter des angles solides
moins aigus, qui s’altèrent moins promptement, et dont le choc a -moins
d’inconvéniens, soit pour dégrader les balances, soit pour blesser les mains ou
les pieds des ouvriers. \
Les forts poids sont ordinairement garnis, à la partie supérieure, d’une anse
ou main, qui peut se relever ou s’abattre. Le nombre des drachmes qu’ils représentent
est gravé, au poinçon, sur une des faces du poids.
Il paroîtra sans doute digne de remarque, que, dans un pays où les connois-
sances sont bien moins avancées qu’en Europe, on ait eu cependant, depuis si 1
tous les lieux où se trouvent des marchands ou des de-
taillans, il se fait représenter les poids et les balances
d’un ou plusieurs vendeurs pris au hasard ou choisis a
son gré.;
Quelquefois il interroge les domestiques qui viennent
d’acheter quelques denrées, et s’informe du prix qu’ils les
ont payées, du poids pour lequel on les leur a livrées,
et de quel marchand ils les tiennent. 11 fait peser devant
lui ces denrées, e t , s’il y a fraude dans le poids, ou surtaxe
de prix, il fait venir le marchand et le fait punir
sur place.'
Cette punition consiste ordinairement en des coups
de (jourbâg sur là plante des pieds.
Les domestiques ou esclaves de I’aghâ saisissent le
délinquant, Fétendent la face contre terre, lui prennent
les jambes dans une espèce de joug en bois, et plusieurs
bourreaux armés de qourbâg lui appliquent jusqu’à deux ou
trois cents coups sur la plante des pieds. L’aghâ compte
les coups par les grains de son chapelet. Le patient demande
grâce, en implorant l’aghâ, ie Prophète, ou Dieu,
dont i l répète les cent noms ou perfections.
Le malheureux marchand estropié, ou les pieds déchi- I
rés, ne pourroit regagner sa maison,-si quelqu’un de I
ses amis ou des spectateurs ne l’y portoit, en le soutenant
sous les bras.
. Quelquefois, lorsque les détaillans ont été pris souvent I
en fraude, ou lorsqu’ils se sont entendus pour f a ir e ren- I
chérir les denrées, de manière à faire crier ou am eu ta I
le peuple, l’aghâ, pour donne,r un exemple plus terrible, I
fait trancher la tête à quelqu’un d’entre eux.
On peut dire, en général, que c’est une marque dira-
moralité et de dépravation, de la p a r t du peuple, q u e de
témoigner de l’intérêt au coupable et de■■•paroître afflige I
lorsqu’il est puni; niais la peine est si terrible et souvent
appliquée avec tant d’injustice, qu’on est moins étonne
de voir la populace témoigner sa pitié au délinquant,
le flatter et le consoler. Il n’est que trop ordinaire que
les aghâ abusent de leur pouvoir arbitraire, pour se faire
donner de l’argent ou des présens par les marchands; iis
ne punissent souvent celui qui a des balances et des
poids exacts, que parce qu’il n’a pas eu la politique
de leur faire remettre son tribut.
long-temps,
ionv-temps, pour la fabrication des monnoies, l’idée d’adopter la division décimale
des poids, quoique cette division ne fût pas celle du système des poids du pays:-
Cet usage s’est sans doute introduit, parce qu’une longue expérience avoit démontré
aux agens de la monnoie que cette division, s’accordant avec le système
de la numération, étoit infiniment plus commode pour le calcul ( 1 ).
Les poids de la monnoie sont donc divisés de 10 en 10 drachmes, et en multiples
et sous-multiples de 10 drachmes. Les plus usités étoient ceux de 2000;
1000; 500; 200; 100; 50; 25; i o ; y ; 4 ; 3 ; z ; r. Ces multiples et sous-multiples
n’ont point de noms particuliers, en sorte qu’on ne se sert que du seul nom de
l’unité de poids, qui est la drachme, et tous les calculs se font en drachmes.
La drachme est la même que celle du commerce, et l’on peut lui appliquer
tout ce que nous avons dit précédemment; mais, au lieu d’en rechercher la valeur
dans le poids des grains de blé ou de caroubier, on en a conservé les étalons
dans7une suite de poids déposés à la monnoie, et qui ne servent qu’à vérifier
les autres en cas de besoin.
En adoptant, pour les poids de la monnoie, le système décimal, les Égyptiens
modernes n’ont pas su conserver, par analogie, la même division pour les fractions
ou sous-multiples de la drachme.
Ils l’ont divisée, comme elle l’est dans le commerce, e n - j - , -j-, ou j ,
comme nous l’avons dit ci-dessus.
Le mitqâl, tel que nous l’avons précédemment fait connoître, n’a guère son
usage à la monnoie que pour les essais d’or.
Les essais Se font sur un mitqâl ou. demi-mitqàl.
Le mitqâl se divise en 24 karats, et le karat en 4 grains ; le grain se subdivise
lui-même en -j-, 4 , 7 > ce qui revient à. notre division du karat en
32 parties.'
C’est principalement dans les hôtels des monnoies, sur lesquels le Gouvernement
exerce une surveillance constante, et où les procédés exigent une grande
précision, qu’on doit retrouver le plus d’exactitude dans les poids.
Nous avons confronté ceux dont on se servoit usuellement a la monnoie
et dans le commerce, avec ceux qu’on gardoit en réserve comme étalons, et nous
avons écarté tous ceux qui nous ont paru visiblement défectueux ou altérés.
Nous avons ensuite pesé, séparément ou ensemble, avec des poids de marc
très-bien ajustés, les poids étalons de la monnoie : nous avons reconnu que la
somme des poids inférieurs étoit, aussi exactement que possible, égale aux poids
de 2000 et 1000 drachmes, dont ils étoient des subdivisions; mais que chacune
de ces subdivisions étoit affectée, soit en plus, soit en moins, de très-petites
erreurs, qui, se compensant à peu près entre elles, devenoient cependant d autant
plus sensibles , lorsqu’on en concluoit la valeur des plus forts poids, que le poids
fractionnaire étoit plus petit; ce qui doit être en effet, et ce qui indique que le
(1) On ne se servoit des poids adoptés dans le com- la monnoie; mais tous les calculs et tous les comptes se
merce que pour peser les différentes substances, autres faisoient en suivant le système décimal,
que les matières d’or et d’argent dont s’approvisionnoit
É . M . T O M E II. Hh