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I l n’en faut pas davantage pour fe repréfetifer un
payfage délicieux. Nunc feg e s ubi Troja fu i t . In
cLiJfem c'adit opine nemus. V o ilà des tableaux
eiquifles d’un feul trait.
L e Tafle parle en maître fur l ’art de peindre en
Poéfie avec plus ou moins de dé ta il, félon le plus
o u ïe moins de gravité du f ty le , en,quoi i l compare
V ir g ile & Pétrarque. .
. Dederatque comas diffundere ventis t |
dit V irg ile , en-parlant de Vénus déguifée en chaf-
ferelfe. Pétrarque dit la même choie*, mais d’un ftyle
plus fleuri :
Erano i capei d’oro à V aura fparjî,
Ch‘ in mille dolci nodi g li avolged.
Anibrojiaque coma divinum vertice odorem
Spiraycre . . . . . Virgile.
E tuto i l c ie l, cantan do i l fuo bel nome ,
Sparfer di rofe i pqrgoletti amçrï, Pétrarque.
E l ’unOy e V altro conobbe i l cotivenevole nellafua
Poejia. Perche Virgilio fuperb tutti voete heroïci di gra-
v vita f i l Petrafca tutti g li antichi liriçi di Vdghe\\a.
f e TaiTe*
L e poète ne peut ni ne doit finir la peinture de
la beauté "phyfique : i l ne le p eu t , manque de
moyens pour en exprimer tous les traits avec la
correction, la délicàreffe que la nature y a mife ,
& pour les accorder avec cette harmonie, cette
unité, d’où dépend l ’ effet de l ’enfemble; i l ne le
doit pas , en eut-il les moyens, par la raifon que
plus i l détaille ion objet, plus i l aflùjettit notre
imagination à la fienne. O r quelle eft l ’intention
du poète? Que chacun de nous fe peigne vivement
ce qu’i l lui préfente. L e foin qui doit l ’oecuper eft -
donc de nous mettre fur l a voie , & i l n’a befoin pour
cela que de quelques traits vivement touchés,
Belle fans ornem ent, dans le Ample appareil
D ’une Beautç qu’on vient d’arracher au fommeil.
Q u i de nous , à ces mots , ne voit pas Junie comme
Néron vient de la voir? Mais i l faut que ces traits
qui nous indiquent le tableau que nous avons à
peindre , foient tels que nous n’aÿons aucune peine
a rémplir les milieux. L ’art du poète çonfifte alors
à marquer ce qui ne tombe pas fous les fens du
commun des hommes , ou ce qu’ils ne faififfenc pas
d’eux-mêmes avec aflez de délicateffe ou de force ;
& à pafler fous filence ce qu’i l eft facile d’imaginer.
( M. M armoutkl. )
E T , conj’onétion copul. Grammaire. C e mot
marque l ’aârion de l ’efprit qui lie les mots & les
phrafes d’un difcours , e e f t à dire, .qui les confidère
lo u s le même rapport. Nous n’avons pas oublié ce-ete
particule qu mot C onjonction; cependant i l ne
fera pas inutile d’en parler ici plus particulièrement,
i° . Notre & nous vient du latin &. Nous l ’écri-
yons de la même manière , mais nous n’en pronon-
E T
çonS j'amais le t , même quand i l eft fuivi d*ané
v o y elle : c’eft pour cela que, depuis que notre Poéfie.
s eft perfectionnée, on ne met point en vers un &
devant une v o y e lle , ce qui feroit un bâillement ou
hiatus que la Poéfie ne fouflre plus ; ainfi , on ne
diroit pas aujourd'hui :
Qui ferc ,& aime Dieu, pofsède toutes chofes.
i ° . En latin le t dé l ’<S* eft toujours prononcé
de plus Y& eft long devant une confonne , & i l eft
bref quand i l prébède une vo y e lle :
Q u i mores hominum multoruni v ld ït et urbes.
Horat. de Arte po'êticâ , y. 143,
Reddere qui voces jam fa it puer , et ped e clrto
Signât humum ,• g e fiit paribus colLüdere, etïràm
Co llig ii et p on it temerè, et mutatürin horas.
Ibid. v. ij 8.
30. I l arrive fouvent que la conjonction & paroît
d’abord lier un nom à un autre, & le faire dépendre
d’un.même verbe; cependant quand on continue de
lir e , on voit que cette conjonction ne lie que les
propofitions , & non les mots. Par exemple , Ce'far,
a éga lé le courage d ’Alexan d r e , & fo n bonheur
a été f a t q l à larépub liq ue romaine: i l fernble
d’abord que bonheur dépende d’égale', aufli bien
que courage i cependant bonheur eft le fujet de
la propofition Suivante. Ces fortes de 'conftruétions
font des phrafés louch es, ce qui eft contraire à la
netteté.
4°. Lorfqu’un membre de période eft joint au
précédent par la conjonction 6*, les deux corrélatifs
ne doivent* pas être féparés par un trop. grand
nombre de mots intermédiaires , qui empêchent
d’appercevoir aifément la relation ou liaifon des
deux,corrélatifs.
50. Dans les dénombrements la conjonction & doit
être placée devant le dernier fubftantif ; la f o i , l ’ef-
pé ran ce, & la charité. O n met aufli & devant le
dernier membre de la période : on fait mal de le
mettre devant les deux derniers membres, quand i l
n’ eft pas à la tête du premier,
Quelquefois i l y a plus d’énergie de répéter & : je.
Vai d it & à lui 8 ç à fa femme.
6°. E t même a fuccédé à voire, meme, qui eft au-
j ourdhui entièrement aboli,
7 ° . E t donc ; , V augelas dit {Remarque 4? 9. )
que Coeffetau & Malherbe ont ufé de cette
façon d,e parler : Je Ventends dire tous les jours>
à la Coup, pourfuit-il , à ceux qui parlent le
mieux ; i l obferve cependant qiïe e’eft une expref-
fion gafeonne, qui pourroit bien avoir été introduite
à la C ou r, d it- il, dans le temps que les gafeons
y étoient en règne : aujourdhui elle eft entières
ment bannie. Au refte , je crois qu’au lieu d’écrire &
donc , on devroit écrire h é donc : ce n’ eft pas la
feule occafion où Ton a écrit & au lieu de l ’inter-*
j.eCtion h é , & biçn au lieu de hé bien , &c.
8°. L a conjonction & eft renfermée dans la
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négative ni. Exemple : ni les honneurs ni les biens
ne valent pas la fanté , c’eft à dire-, & les biens
G les Honneurs ne valent pas la fanté. I l en eft
de même du nec des latins, qui vaut autant que &
non. "
f i . Souvent , au l ie u d’écrire & le refie , o u bien
& les autres, on écrit pa r ab rév ia tion peu. c ’ e ft à
d ir e , & caetera. ( M . du M ar s â i s .)
(N .) É T E N D U E , f. £ E n G ram maire & en L o g iq u e
i l eft e flen c ie l de remarquer deux chofes dans le s
noms ; la compréhension de l ’idée ( Voy e-[ C om -
' préhension.), & Y Étendue de la fign iiication.
P z r \ Y É te n d u e^de l a figiiifica tion , on entend la
quantité des individus auxquels on a p p liq u e a c tu e lle ment
l ’ idée de la nature énoncée pa r les' noms.
P o u f bien entendre c e c i , i l faut obferver qu’ i l n’exifte
ré e llem en t dans l ’univers qu e des individus ; que
chaque individu a fa nature pro pre & incommunic
ab le ; & qu e n u lle part l a nature commune n’ exifte
fe u le , t e lle qu’e lle eft énoncée pa r l e nom a p p e l-
l a t i f ( F 'o y e 'i A p p e l l a t i f ) : c’eft une idée fa étice
qu e l ’e fprit humain com po lb en q u e lq u e fo rte , de
toutes les.idées, des attributs femblables qu’ i l d i s tin
gu e pa r abftraétion dans le s individus ; & e lle
demeure ainfi abftraite dans le s noms a p p e lia tifs ,
p r is en e u x -m êm e s , de manière qu’ ils n’ énoncent
rien autre cho fe que l ’ idée g én éra le qu i en conftitue
l a fign ifiç a tio n ., à moins qu e , pa r l e fecours de
q u è lq u e autre mo t o u au m o y en des circonftances
de la . p h r a fe , ils ne fo ient determinément a p p liqués
aux in dividus, dont ils font pa r eux -m êm e s
abftraétion.
L e nom ap pella tif homme, par exemple , ne
montre, pour ainfi dire, que la compréhenfion de
l ’idée générale dont i l eft le ligne. Quand on dit
agir en homme ; cela fignifie agir conformément
à la nature humaine, & i l n’eft abfolument quef-
tion d’aucun individu ; l ’abftraétion eft générale, &
l e nom homme eft. ici fans Étendue. C ’eft tout autre
ch ofe, fi l ’on dit Y avis d’un homme, la mort de
cet homme, la vigilance de mon homme , le témoignage
de trois hommes, une gardé de plufieurs -
hommes , les caprices des hommes, &c. Dans les
trois premiers exemples ', le nom ap pella tif homme
eft appliqué à un feul individu, diverfement défigné
par les mots un, c e t, mon ; -dans le quatrième ,
le nom eft appliqué à trois individus, fans autre
détermination que la précifion numérique ; dans le
cinquième , i l eft appliqué à un nombre, vague
d’individus , défigné par plufieurs ; & dans le
fixième, à la totalité des individus auxquels peut
'convenir l ’idée générale de ce nom. Ainfi, la fipni-
fleation du même nom ap pella tif peut en effet recevoir
différents degrés Y Êtendu e,félon la différence
des moyens qui la déterminent.
Moins i l encre d’idées partielles dans celle de la na-
ture générale énoncée par le nom appellatif, plus i l y
a d individus auxquels elle peut convenir ; & plus au
contraire i l y entre d’idées partielles, moins i l y
# d individus auxquels la totalité puifle convenir.
E T H
Par exemple, l ’idée àe figur e eft applicable à un
plus grand nombre' d’individus que ce lle de triangle,
de quadrilatère , &c ; parce que "cette idée ne
renferme que " le s idées ^ partielles d’efpace de
bornes, de côtés, & d’an g le s , 'lefquelles fe re-
trouvent toiïtes dans les idées de tricmgle, de quadrilatère
, &c ; au lieu, que l ’idée " de tr ian g le ,
qui renferme les mêmes idées partielles, comprend
encore l ’idée précife de troié côtes" & de trois
angles , ce qui exclut les quadrilatères, les pentagones
, Scc ; l’ idée de quadrilatère, outre les mêmes
idées partielles qui conftituent ce lle de fig u r e ,
renferme de plus ce lle dé quatre côtés & de quatre
angles f ce qui exclut les ' triangles, les pentagones
, &c. • ; r
) ou- i l fuit i°. que tous les noms appeliatifs
n étant pas applicables a des quantités égales d’individus
, on, peut dire qu’ils n’ont pas la même
latitude Y Etendue ; & l ’on voit bien que j ’ap pelle
ainfi la quantité plus ou moins grande des individus
auxquels peut convenir chaque nom appellatif.
i ; Que , fi l ’on compare des noms qui expriment
des idées fubordonnées les unes aux autres, comme
animal & homme, figure,8c triangle , la compré-
henfîon de ces noms & la latitude de leur Étendue
fon t, fi je peux le dire ainfi, en raifon inverfe l ’une
de 1 autre : parce que , comme je viens de le
remarquer, moins i l -entre -d’idées partielles dans
la comprehenfion, ^plus i l y a d’ individus auxquels
on peut appliquer l ’idée générale ; & qu’au contraire
plus la^ compréhenfion renferme d’idées partielles ,
moins i l y a d’individus auxquels on puifle .l ’appliquer.
- ■ . ' r
3 . Que tout changement fait à la compréhenfion
d un nom a p p e lla tif, fuppofe & entraîne un changement
contraire dans la latitude de YÉtendue-, q u e ,
exemple, l ’idée d homme eft applicable à plus
d individus, que ce lle Y homme f a v a n t, par la raifon
que ce lle-ci comprend plus d’idées partielles que la
première.
4 • Que la latitude de 1 Étendue des noms propres,
fiT’on peut dire qu’ils en ayent une, eft la plus ref-
treintè qu i l foit ^poflible ; puifqu’ ils défignent les
êtres par lid e e dune nature individuelle : que par
confequent ia compréhenfion de ces noms eft au
contraire- la plus " complexe & la plus grande , 8c
qu i l n eft pas po/îible d’y ajouter aucune autre idée
partielle , fans cefler .dé regarder comme nom propre
celui, dont on augmenteroit ainfi la compréhenfion.
Ainfi , quand on dit le riche Lu cu lle , on re-
Lu cu lle comme un nom appellatif, commun
a plufieurs individus, & l ’on diftingue de tout autre
celui dont on p a r le , par l ’idée ajoutée de riche :
qiais fi pu dit le f avant Newton , en ponfidéranc
Newton comme un nom propre ; alors fa v a n t ne
tombe pas fur Newton , i l tombe fur l e nom appella
t if foufentendu homme ou philofophe, comme fi
l ’on .difoit,. le fa v a n t ( philofophe ) Newton.
{M. B e a v zé e .)
( N . ) É T H O P Ê E , f. £ Efpèce particulière de