diômes différents dgnt elle aura adopté les locutions
propres ? M. du Marfais parole avoir fend cet inconvénient,
dans le détail qu’ i i lait des figures de conf-
trudion, aux articles C onstru ct ion & F ig u r e :
i l n’y cite l ’Hellénifme que comme un exemple' de
la figure qu’ i l appelle Imitation. Mais i l n’a pas
encore porté la réforme aufli loin qu’elle pouvoit
& q u e lle devoit a lle r , quoiqu’ i l en ait expofé nettement
le principe.
3°. C e principe eft que ces Iodations empruntées
d’üne langue étrangère, étant figurées même
dans cette langue , ne le font que de la meme manière
dans ce lle qui les a adoptées par imitation ,
& que dans l ’une comme dans 1 autre , on doit les
réduire à la conftru&ion analytique St à l ’analogie
commune a toutes les lan gu es , fi 1 on~veut en faifir
le fens. ■ " -
Voici', par exemple, dans'Virgile ( Æ n . iv .)
un Hellénifme » qui n’eft qu’une phrafe elliptique :
Omnid Mercurio fimilis, vocemque, coloremque ,
E t crines flavos , & membre, décora juventee.
L ’analyfe de cette phrafe en fera-t-elle, plus lumj*-
neu fe, quand on aura doctement vdécidé que c’eft
un Hellénifme ? Faifons cette analyfe comme les
grecs mêmes l ’auroient faite. Ils y auroient fous-
entendu la prépofidoii x a r à , ou la prépofition mfi ;
les latins y fous-entendoient les prépdfitions équivalentes
fecundùm ou per : fim ilis Mercurio fecundùm
omnia , & fecundùm vocem , & fecundùm
çolorem , & fecundùm crines f la v o s , & fecundùm
membra décora ju ven tæ . L ’ ellipfe feule rend ici
raifon de la conftruction & i l n eft utile de recourir
a la langue grèque que pour indiquer l ’origine
de la locution., quand elle eft expliquée.
Mais les gr-ammatiftes , accoutumés au pur matériel
des langues qu’ils n’entendent que par une
efpèce de tradition, ont multiplié les principes
comme les difficultés , faute de fagacité pour démêler
les raports de xonvenance entre ces principes
& les points.généraux où ils fe réunifient. 11 n’y a
que le coup.aoeil perçant & sûr de la Philofophie
qui puifle apercevoir ces relations & ces points de
réunion, d’où la lumière fe répand fur tout le fyf-
tême grammatical , & diflîpe tous ? ces fantômes
de difficultés , qui ne doivent fouvent leur
exiftence qu’à la foiblefle de l ’organe de ceux qu’ils
effraient. ( M., B e a u z é e . )
H E L L É N IS T IQ U E ., ( L angue ) H iß , e c c lé f
O n croit que c’ eft la langue en ufage parmi les
'juifs g re c s , & ce lle dans laquelle, la .ver fion des
Septante a été fa ite , & les livres'du nouveau T e s tament
ont été' écrits par les apôtres. M. Simon
l ’appelle Langue de fynagogu e. Ainfi , i l y avoit
autrefois un grec de fynagogue , comme de nos
jours i l y a en Efpagne un efpagnol de fynagogue.
J JHelléniflique étoit un compofé d’hébraïfme & de
Xyriacifme. Saumaife n’eft pas de ce Sentiment, mais
on ne fait trop fur quoi fondé : i l ne difpûfe le
plus fouvent que des mots dans les deux volumes
qu’i l a publiés fur cette matière. ( M . D i d e r o t . )
H ÉM IS T ICH E , f. m. Littérature. Moitié de
vers, demi-vers , repos au milieu] du vers. Cet article
, qui paraît d’abord une minutie , demande
pourtant l ’attention de quiconque veut s’inftruire*
C e repos ; à la moitié d’un v ers, n’eft proprement le
partage que des vers alexandrins.La néceflité de couper
toujours ces vers en deux parties ég a le s , & la né-
ceffiîé non moins forte d’éviter la monotonie , d’ob-
ferver ce repos & de le cacher , font des chaînes qui
rendent l ’art d’autant plus précieux qu’ i l eft plus
! difficile.
V o ic i des vers techniques qu’on propofe (quelque
foibles qu’ils foient ) pour montrer par quelle méthode
on doit rompre cette monotonie , que la lo i
de YHémifiiche femble entrainer avec elle.
Obfervez YHémifiiche , & redoutez l’ennui
. Qu’un repos uniforme attache auprès de lui.
Que votre phrafe, heureufe & clairement rendue,
Soit tantôt terminée, & tantôt fufpendue ;
C’eft le fecret de l’Arc. Imitez ces accents .
Dont l’aifé Géliotte avoir charmé nos fens :
Toujours h a rm o n ieu x& libre fans licence,
Il n’appefantit point fes fôns 8c fa cadence.
Salle V dont Terpfycore avoir conduit les pas ,
Fit fentir la mefure , 8c ne la marqua pas.-
Ceux qui n’ont point d’oreille n’ont qu’à confiilter
feulement les points & lés virgules de ces vers .:
iis verront qu’étant tou jours partagés en deux parties
égales , chacune de fîx fy llab e s , -cependant la • c?C-
dencé y eft toujours variée ; la phrafe y eft contenue
ou dans un demi vers , ou dans un vers-entier',
ou dans deux. O n peut même ne completter le
fens qu’au bout de fix ou de huit ; & c’ eft ce mélange
qui produit une harmonie dont on eft frapé-,
& dont peu de lecteurs voient la caufe,
Plufieurs dictionnaires difenr que YHémifiiche eft
la même- chofe que la eéfure ; mais- i l y a une
-grande différence : YHémifiiche eft toujours à là
-moitié du vers; la eéfure’ qui rompt l e v e r s , eft
partout où e lle coupe la phrafe.
Tiens, le voilà. Marchons. Il eft à nous. Viens. Frape.
Préfque chaque mot eft une eéfure dans ce vers. -
Hélas ! quel eft le prix de? vertus? La fouffrance. ...
Dans les vers de cinq pieds ou de dix fyllabes ,' i l
n’y a point YH ém ifiiche, quoi qu’en difent tant de
dictionnaires’ j i l n’y a que des céfures : on ne peut
couper ces vers en deux parties égales de deux pieds
& demi.
Ainfi partagés, | boiteux 8c mal faits,
Ces vers languiffans J ne plairoient jamais.
Oa
O n en voulut faire autrefois de cette efpèce , dans,
l e temps qu’ôn cherchoic l ’harmonie qu’on n’ a que
très-difficilement trouvée. O n prétendoit imiter les
vers pentamètres latins , les fouis qui ont en effet
naturelle ment, c e tHérnifiiche : mais -on nefonge'oit
pas que les vers pentamètres ét oient variés par les fpon-
dées & par les da âyles ; que leurs Hémifiiches pou-
voient contenir ou cinq , ou fix, ou fept fyllabes. Mais
ce genre de vêts françois au contrairene pouvant jamais
avoir que des Hémifiiches de cinq fyllabes égales , &
ces deux mefures étant tropraprochées , i l en réfultoit
néceflairement cette uniformité ennuyeufe qu’on ne
peut rompre, comme dans les vers alexandrins. D e
p lu s , le vers pentamètre latin venant après un
hexamètre , produifoit une variété qui nous manque.
Ces vers de cinq pieds à deux Hémifiiches égaux
pourroient fe fouffrir dans des ohanfons : ce fut p.our
la Mufique que Sapho inventa chez les grecs une
mefure à peu près femblable , qu’Horace les imita
quelquefois lorfque le chant étoit joint à la Poéfie,
{elon fa première inftitution. O n pourrait, parmi
nous introduire dans le chant cette mefure qui approche
de la faphique.
L ’amour eft un dieu J que' la terre adore;
Il fait nos tourments, | il fait-les guérir. .
Dans un doux repos . heureu? qui l’ignore !
Plus heureux cent fois } qui peut le fervir !
Mais1 ces vers ne pourroient être tolérés dans des
ouvrages de longue ha le ine, à caufe de la cadence
uniforme. Les vers de dix fyllabes Ordinaires font
d’une autre mefure ; la céfiire fans Hérnifiiche eft
prefque toujours à Ta fin du fécond p ied , de forte
que le vers eft fouvent en deux mefures,. l ’une de
quatre , l ’autre de fix fyllabes : mais on lui donne
àùffi fouvent une' autre p la c e , tarit la variété eft
uéceflaire.
Languiffànt, foible , & courbé fous les maux ,
J ’ai confumé mes jours dans les travaux j
Quel fut le prix de tant de foins? L'envie.
Son fouffle impur empoifonna ma vie.
A u premier vers la- eéfure eft après le mot f o ib le ;
au fécond après jo u r s ; au troifième elle eft encore
plus lo in , après fo in s ; au quatrième e lle eft après
impur.
Dans les vers de huit fyllabes i l n’y a jamais
YHémifiiche , & rarement de eéfure.
Loin de nous ce difeours vulgaire ,
Que la nature dégénère ,
Que tout paîTe St que. tout finit.
La nature eft inépuifable ,
Et le travail infatigable
Eft un dieu qui la rajeunit.
A u premier vers s’i l y avoit une eéfure , e lle ferait
à la troifième fyllàbe , loin de nous ; au fécond
vers à la quatrième fy lla b e , nature. I l n’eft qu’un
cas où cçs vers confacrés à TOde ont des céfures,
G r a m m * e t L i t t é r a l , Tome I L
c’eft quand le vers contient deux fens complets,
comme dans celui-ci :
Je vis en paix , je fuis la Cour.
I l eft fenfible que j e vis en p a ix , forme une cé-
fure ; mais, cette mefure répétée feroic in tolérable.-
L ’harmonie de ces vers de quatre pieds confifte dans
le choix heureux des mots & des rimes croifées j
foible mérite fans les penfées & les images.
Les grecs & les latins n’avoient point YH ém if-
tiche dans leurs vers hexamètres ; les italiens n’eu
ont dans aucune de leurs poéfies.
L é donnéx j cavalier , l'armi, g li amori ,
L é çortéjie , Vdudaci impresé jo canto
Ché furo al tempo ché paffaro j mori
L ‘ Africa i l mar, e in Francia nocquer tant» , 8cc.
Ces vers font compofés d’onze fy llab e s, & le génie
de la langue italienne l ’exige. S’i l y avoit un H é -
mifiiche , i l faudrait qu’i l tombât au deuxième p ied
& trois quarts.
L a Poéfiè àngloifé eft dans le même cas : les
grands vers anglois font de dix fyllabes ; ils n onr
point YH ém ifiich e , mais ils ont des" céfures marquées.
A t tropington | not far f rom Cambridge , fiood
A crofs a pleajing fiream 1 a bridge o f wood,
Bear it a mill j ih loW and plashy ground,
Where corn for a il the neighbourmg parts I va s grown’d.
Les céfures différentes de ces vers font défignéespar
les tirets |.
A u refte , i l eft peut-être inutile de dire que ces
vers font le commencement de l ’ancien conte du
berceau, traité depuis par la Fontaine. Mais ce
qui eft utile pour les amateurs ; c’ eft de favoir que
non feulement les anglois & les italiens .font affranchis
de la gêne de Y Hérnifiiche, mais encore
qu’ ils fe permettent to.us les hiatus qui ^choquent
nos oreilles ; & qu’à cette liberté ils ajoutent ce lle
d’alonger & d’accourcir les mots félon le befoin ,
d’en changer la terminaifon, de leur ôter des lettres ;
qu’enfin , dans leurs pièces dramatiques & dans
quelques poèmes, iis ont fecoué le joug de la
Rime de forte qu’i l eft p lus aifé de faire cent vers
italiens & anglois pafiabies , que dix françois , à
génie égal.
Les vers allemands ont un Hérnifiiche^Tes e s pagnols
n’ en ont point : tel eft le génie different
des langues, dépendant en grande partie de celui
des nations. C e génie qui confifte dans la conftruc-
tion des phrafes, dans les termes plus ou moins
lo n g s , dans la facilité des inverfîons , dans les verbes
auxiliaires , dans le plus ou moins d’articles, dans
le mélange plus ou moins heureux des voyelles
St des confonnes ; ce génie , dis-je , détermine toutes
les différences qui fe trouvent dans la Poéfie de
toutes les nations : Y Hérnifiiche tient évidemment
à ce génie des langues.
C ’eft bien peu de chofe qu’un Hérnifiiche : ce mot
H k