
tention des jeunes gens; ce font Homère & V irg ile :
fefons-les leur connaître' par le P a ra llè le ingénieux
quen a fait Pope ; & pour les encourager au trava
il par- un grand exemple , mettons fous leurs
ieux la traduaion qu’en a faite de l ’anglois feu
JV1. le Dauphin , p^re du roi Louis X V I .
Homère f u t le p lu s g rand génie; & V ir g ile ,
le meilleur artijle ; dans l 'u n , nous admirons
p lu s Vauteur ; & dans Vautre , Vouvrage. Homère
nous tranfporte & nous entraîne avec empire
& impétuofité ; V ir g ile nous attire par une
in ajejlé féduifante : Homère répand avec une
généreufe .profufion ; V irg ile diftribue avec une
magnificence réglée : Homère, femblable au N i l ,
veife fies riche fie s avec une efpèce - de. débordement
; V irg ile eft femblable à une rivière q u i,
renfermée dans f e s limites , coule avec confiance
& modération. Qu and j e confédéré leurs bataille s,
çes deux poètes me paroiffent rejfembler a u x
héros qu’ ils ont célébrés. Homère , comme
A c h i l le , ne connoît ni limites ni réfifiance ; i l
renverfe tout ce qui s ’ oppofe à lui ; & p lu s f a
témérité augmente , p lu s i l paroît brillant : V ir g
ile , hardi , mais avec tra n q u ilité , comme
Énée , paroît fa n s trouble au milieu même de
Vaction; i l arrange tour ce qui eft autour de
lu i f i & i l eft encore tranquile après la victoire.
Quand nous confidérons leurs divinités, H omère,
femblable à fo n Jupiter , ébranle VOlympe j fa i t
briller des é c la ir s , & met tout le ciel en f e u ;
V irg ile reffemble au même d ieu , lo r fq u il tient f e s
confeils avec les d ieux inférieurs , qu’ i t forme des
p la n s pourVEmpirée, & qu’ i l met Vordre & la règle
dans tout ce q u i l a créé.
Aux deux P a ra llè le s que j’ai cités de Corneille
& de Racine, j’aurois pu & peut-être dû joindre
celui qu’en a fait M. de Vauvenargues, dans fon
Introduction à la connoijfance de Vefprit humain
(pages 2.06— 2 3 1 ) . C ’eft par difcréeion que
je m’en Puis abftenu , parce que Ce morceau a trop
d’étendue : mais j’en confeille fort la leéture ; parce
qu’on y trouvera de nouvelles idées très - fatisfe-
fanies, & peut - être néceffaires pour la connoiffance
parfaite des deux héros. Je renverrai encore
le leâreur a deux P a ra llè le s , l’ un de Philippe &
d’Alexandre , l ’autre de Philippe & de Céfar,dans
la préfacé hiftoiique de M. de Tourreil à la tête
de fa Traduction de D ém o flh è n e ; & à celui de
Turenne & du grand C.ondé., dans l ’ Oraifon fiu-r
tièbre de celui-ci par l ’éloquent &fublime BofTuet.
Juger des hommes par des P a r a llè le s bien fa its ,
eft une voie affez sûre pour les bien apprécier ;
& c’ étoit la vûe de Plutarque , quand i l écrivit
Çes. P a ra llè le s des hommes illufires grecs & romains.
Mais1 lé P a ra llè le n’eft pas un fîmple rapprochement
de Profopographies , d’Etopées , de
P o r tra its ( voyez ces mots ) : tous les objets fuf-
CCptjbles de Pefçription peuvent donner lieu au
P a ra llè le . Maflïllon , dans fon Sermon fu r le
pardon des injures , pour le Vendredi d’apres les
Cendres , fait cet admirable P a ra llè le de l ’amour
de goût 3c de l’amour de charité : I l y a un amour
de raifon & de religion, qui doit toujours Vemporter
fu r la nature. V É v a n g ile n’ exige p a s
que vous ayez du goût pour, votre frère ; i l exige
que vous Vaimiez > c’eft à d ire, que vous le
fou ffr ie \ , que vous Uexcufie\ , que vous cachiez
f e s d éfauts , que vous le f e r v i e e n un m o t ,
que vous fa jfie z pour lui. tout ce que vous voudriez
qu ùn f î t pour vous-même. L a charité n ’eft
p a s un goût aveugle & bifarr e, une inclination
naturelle \ une fympathie d ’humeur & de
tempérament : c ’ eft un devoir ju fte , é c la ir é ,
raifonnable ; un amour qui prend f a fource dans
les mouvements de la grâce & dans les vues de
la f o i . Ce n’ eft p a s aimer proprement nos frères ,
que de ne les aimer que p a r goût ; c’ eft s ’aimer
foi-même : i l n e ft que la charité qui nous les
fa jf e aimer comme i l f a u t , & qui puiffe former
des amis fo lid e s & véritables. Car le goût change
f in is cejfe ; & la charité ne meurt jam a is : le
goût ne cherche que lui-même ; & la charité ne
cherche p a s f e s propres intérêts , mais les in térêts
de ce qu’ elle aime : le goût n’ efi p a s a
Vépreuve de t o u t , d’une p e r te , d ’ un procédé ,
d ’une difgrâce ; & la charité eft p lu s fo r te que
la mort : le goût n’ aime que ce qui Vaccommode ;
& la charité s ’ accommode à to u t , & fouffre tout
pour ce qu’ elle aime : le goût eft aveugle y & nous
rend fouvent aimables les vices mêmes de nos
frères ; & la chanté n’applaudit jam a is à l ’iniquité
, & n’.aime dans les autres que la vérités
L e s amis de la grâce fo n t donc bien p lu s sûrs
que ceux de la nature : le même goût qui lie les
coeurs y fouvent un inftant après les fépare ; mais
les liens formés p a r la charité durent éternellement.
Lorfqu’on rencontre dans l ’Hiftoire ancienne des
morceaux intéreffants, .& des évènements qui ont
une grande conformité avec les faits plus récents ,
on pourroit s’ exercer à en faire la cômparaifon j
ce lle du fiècle d’A u gu fte , par exemple , avec le
fiècle de Louis le Grand ; l ’hiftoire de Charles XII»
que nous a donnée Voltaire , avec ce lle d Alexandre
par Quinte-Curce : on aprendroit , par ces P a rallèles,
à juger fainement & du mérite du héros
& de celui des hiftoriens. L ’abbé Mallet , de qui
j’emprunte cette réflexion , a mis pour exemple,
dans fon EJfai fu r l ’étude des B e lle s - Lettres
(pages 171 — 18$ ) , le Pcirallele de la Conjuration
de Catilina contre Rome , écrite par Sallufte ,
avec la Conjuration des efpagnols contre Venife en
16 t 8 , dont l ’abbé de S. Réal nous a donné l ’hiftoire.
C ’eft un morceau bien fait , & dont je confeille la
lecture , ne pouvant le tranfcrîre i c i a caufe de fa
longueur. , ..
L e P a ra llèle eft fouvent chargé d’ Anthithèfes ;
de c’eft furtout quand les objets compares font
entièrement
entièrement oppofés. Cicéron nous en fournit un
exemple dans fon P a r a l l è l e des forces de la République
& de celles du parti de Ca tilin a , que
j’ai cité & traduit fous le m o t A ntithèse. On
eut en voir encore un femblable entre le joug de
éfus-Chrift & le joug du monde, dans l ’exemple
de Maflïllon , qui termine l ’ a r t i c l e Épanorthos*.
I l réfulte de cette remarqué , que l ’ufage du P a r a l l
è l e exige autant de circonfpeétion & de fag efle, que
celui de l ’A n t h i t è f e .
« Les P a r a l l è l e s & les Portraits, dit l ’abbé de
» Befplas ( E J f a i f u r l ’É lo q u e n c e d e l a C h a i r e ,
» page 188 ) , font fort goûtés dans ce fiècle. On
» doit les autorifer, quand ils ne paffent pas mie
» jufte mefure, étant fufceptibles d’un degré très-
» fuffifant d’Éloquence , par la variété qu'on y peut
» répandue & la chaleur avec laquelle on peut
» les tracer : mais la pente eft douce * & i l eft
1» facile de s’y lai (Ter entraîner. Les Portraits 3c
» les P â r a l l è l e s bleffent prefque toujours l ’unité
» du fu je t , détournent les ieux de l ’ aétion prin-
» cipale , fubftituent une froide fymétrie à des
» mouvements. Ils offrent un autre danger : on
» facrifie le goût & fouvent le- jugement , aux
» P a r a l l è l e s qu’on veut établir ; on préfère l ’objet
» chéri, à celui qui lui prête fes probres.Ainfi , le
» Saint du jour obfcurcit & furpafle tous ceux des
» autres fêtes ; un héros voit immoler à fa »gloire de
» plus grands capitaines que lu i ; une vertu efface
» toutes les autres ».
Obfervation excellente fur l ’ufage des P a r a l l è l e s
dans les- difeours d’Éloquence : mais e lle n’a plus
lieu pour les P a r a l l è l e s dont le but eft uniquement
d’apprécier les objets comparés , comme celui
dont je viens de confeiller la leârure dans l ’E J f a i
de l ’abbé Malle t. ( M . Beauzée. )
( N . ) P A R E C B A S E , C. f. napgx/3a®-« , D i -
grejfio ; de Iïapsx^a/v« , digredior, compofé de
»apgx, extra , & de iSa/v« , gradior. C ’eft donc,
fous une forme grèque , le nom de ce que nous
appelons Digrejfion. Vofftus croit que ce terme
eft relié-pour défîgner, par une dénomination propre,
l ’exagération d’un crime au delà de ce qu’i l eft
convenable. A la bonne heure : mais ce n’eft pas
un mot fort néeeftaire , même dans ce fens particulie
r ; & i l l ’eft encore moins dans le fens de D i -
grejjîon. ( M. B e a u z é e .)
( N . ) P A R É CH È S E , C f. nap fo*™ ,. n im ia
r e p e t i t io ; de Tapn^éw , n im i s f o n o : RR. -rapà ,
p e r p e r a m ; & , f o n u s , ou «x® , é c h o ( fon
répé té ). Nous défignons par ce mot un. vice de
diÊtion , qui confîfte dans la répétition trop fréquente
d’une même fyllabe ou d’une même articulation
, comme P e r i r e m e m a l im m à l i s m o d i s ;
L e p a i n d o n t n o u s n o u s n o u r r i j f o n s ; J l n e
f a u t d o n n e r f a c o n f ia n c e q u ’ à q u e lq u ’ u n q u ’ o n
c o n n o î t b i e n . L a délîcateffe de notre langue pré-
•fere , L e p a i n q u e n o u s m a n g e o n s ; J l ne f a u t
Gramm. B r Llttérat. Tom IJ*
donner f a confiance qu’ à des perfonnes bien
connues.
L a conftitution des langues anciennes avoit donnéj
à ceux qui les parloient , des idées d’Euphonie
toutes différentes de celles qu’ont adoptées nos
idiomes modernes. L a Paréchèfe étoit pour eux une
figure de diction par confonnance, q u i, au gré de
leur o r e i lle , y répandoit un agrément digne d’attention.
L e nom cependant qu’ils lu i avoient donné,
en indiquant un excès, marque un abus : û bien
qu’en juftifiant notre g o û t , qui dédaigne certe cacophonie
, cette dénomination dépole contre l e
goût des anciens, q u i, après avoir -paru appréciet
la chofe par ce nom , ne laifterent pas de s’en
amufer & d’y attacher même une idée de mérite..
( M . B e a u z é e . )
( N . ) P A R E M B O L E , f. f. n w e«A«', dérivé
de Traps^êaAAû) , immitto ; RR. îrapet, qui
en compofition a quelquefois le fens de <rv» , Jimul5
sv, in ) & ÊaAAw , ja c io . Efpèce particulière de
Parenthèfe ( V oy e z ce mot ) , qui quoiqu’e l le
interrompe la fuite d une propofition , a pourtant
un rapport exprès au fujet de cette propofition.
C ’eft l ’idée qu’en donne Vofîius ( R h é t .Y . pag*
334.) : ainfi, la Parembole fe raporte au fujet dont
on parle; & la Parenthèfe proprement dite lui eft:
étrangère.
Selon cette notion , i l y a P arembole dans ces
vers de V ir g ile ( Æ n . 1 , 647. ) ; parce que la
propofition qui interrompt la principale a raport a
É n é e , fujet de cette première :
Ætieas ( neque enirn patrius confiflere mentern
Paffus amor) rapidum ad naves proemittit Achatem
E t c’eft une Parenthèfe proprement dite P dans!
ceux-ci ( Georg. 1 1 1 , 1 1 . ) ; parce que la propofition
interpolée n’a aucun raport aux chevaux %
qui font le fujet de la principale :
Ardebantj ipjique fuos jam morte fub oegrâ
( D i meliora plis , erroremque hojiibus ilium ! )
Difcijfos nudis laniabant dentibus artus.
Diftinguer avec tant de fubtilité des différences ü
peu importantes, c’eft perdre fon temps, & s’expofer
à fe croire favant parce qu’on entend des mots qui
ont un air feientifique. I l fa llo it cependant tenir
compte de c e lu i- c i, paifqu’i l exifte ; mais i l fuffit de
s’en tenir à celui de Parenthèfe. ( M . B e a u z é e .)
( N . ) P A R E N TH È S E , I f. , du
verbe «•apsrnâ'vi/tM , obiter impono , obiter inf
e r o. L e mot Parenthèfe fignifie donc légère inter-
pofition : on l ’emploie dans le langage ordinaire »
pour défîgner une interruption au cours de la c o q -
verfation, née pourtant du fond même ou à l ’oc-
cafion de ce qui fe dit : S o it d it p a r Parenthèfe :
Je v om dirai p a r Parenthèfe, q u e , &c.
D d d d d