
dans Tes Hypomnefes de linguâ g a llicâ (p. 7 1 .) •
A g a ll is interponi litteram T fciendum è jî , Jèd
in pronunciatione p o tiù s quam in fcripturâ. Ils
'écrivaient alors fou ffr e - i l , parla - e l le , viendra-
û n , quoiqu’ils prononçaffent comme nous : c’eft
aufli la pratique & la règle de Robert Eftienne dans
fa Grammaire f rang oife.
S eft ordinairement la terminaifon de la fécondé
perfonne fingulière, & du pluriel dans les noms
& les adjeéhfs : de là l ’ufe'ge où nous .femmes
d’en faire une lettre euphonique dans deux circonf-
tances caraélérifees par ces deux afpeifts.
L a première eft après la fécondé perfonne fingulière
du préfem pofterieur de l ’Impératif des verbes
J e la ï . conjugaifon , ou de ceux en ir dont
l e préfent indéfini de l ’Indicatif eft en e ; on y
insère une s euphonique, fi ces Impératifs font
fuivis de l ’un des adverbes en ou y ; mais cette
lettre s’écrit alors comme terminaifon de l ’Impéra
t if: V a s -y y donnes-y tes f o in s , offres - y tes
co jife ils y acceptes-en Vhommage , ouvres - en
Vavis j vas - en prendre la défenfe. L a lettre
-euphonique n’a point lieu , fi en eft prépofition :
• V a en Ita lie , accepte en changé ce b ijo u ,
fo u ffr e en patience les caprices de cei homme.
L à fécondé circonftance eft à l ’égard de cette
phrafe quatre y eux y où l ’ufege le plus commun
eft d’inférer l ’x p lu r iè le , mais fans l ’écrire : ainfi ,
l ’on dit comme fi l ’on é c rivo ifj Quatre s yeux
valent mieux que deux , la chofe fe paffa entre
quatres yeux, je-erois qu’i l feroit mieux de l ’écrire j
al ne refteroiü aucun doute for la prononciation.
J ’ai vu s’élever à ce fujet une conteftation entre
quelques gens de Lettres , qui furent d’ayis différents
\ la queftion portée à l ’Académie la partagea
de même. Pour m o i, qui n’ai point fo ies
raifons refpeélives des confultants , je penfe qu’i l
y auroit inconvénient à ne pas introduire s dans
la prononciation j parce qu’alors i l faudroît prononcer
quate y eux y en altérant le premier mot,
o u quatre ïeux en déco mpofont le fécond comme
celui d'ieufe : au lieu qu’on ne gât,e ni l ’un ni
l ’autre en introduifont Ys euphonique, c p i d’ailleurs
a de l ’analogie au nombre pluriel defigné par
quatre. (M . B e a u z é e . )
* S ’ É V A D E R , S”É C H A P E R , S’ E N FU IR .
Synonymes.
Ce s mots diffèrent, en ce que s Evader fe fait
en fe c re t , sÊchaper foppofe qu°on a déjà été
pris ou qu’on eft près de l ’être , s’E n fu ir ne fup-
pofe aucune de ces conditions.
O n s’ évadé d’une prifon ; on déchape des
mains de quelqu’un ; on $ enfuit après une bataille
perdue. ( M . d 'A l e m b e r t .)
I l faut de l ’adrefie & du bonheur, pour s'évader;
de la préfènce d’efpri: & de la force’,pour sYcÆ<z-
p er\ de l ’agilité & de la vigueur, pour s'enfuir.)
( M . B e a u z é e . )
(N.) É V E I L L E R , R É V E IL L E R . Synonymes.
L e premier de ces mots eft d’un plus fréquent
ufoge dans le fens littéral ; le fécond eft plus
foüvent employé dans le fens figuré. L ’un fe fait
quelquefois fans le vouloir ; mais l ’autre marque
ordinairement du deffein.
L e moindre bruit éveille ceux qui ont le fommeil
tendre. I l faut peu de chofe pour réveiller une pal-
lion qui n’a pas été parfaitement déracinée du coeur..
( L 'a b b é G i r A R D . )
Ces deux verbes, dans le propre & quand i l
-s’agît du fom m e il, fe confondent a nez fouvent ,
& nos meilleurs écrivains ne les diftinguent pas
trop.
Après y avoir.fait réflexion, i l m’a femblé qu’on
pouvoit mettre quelque différence entre Eveiller
& Réveiller : que le premier fe dit proprement
par rapport à une heure réglée 5 le fécond , par
rapport à un temps extraordinaire. Je m’explique.
Un homme qui a coutume de fe lever à cinq
heures du matin, & qui ne veut pas dormir da-
vâîkage , dira à fes gens : » N e manquez pas de
méveiller à cinq-heures ». A u contraire , une
perfonne qui a en tête une affaire importante , &
qui attend quelques nouvelles avec impatience ,
dira en fe couchant : « S’i l vient des lettres cette
» n u it , qu’on ne manque'pas de me Réveiller ».
Réveiller emporte quelque chofe d’irrégulier &
de fubit, ou une affaire qui fondent tout à co u p ,
ou un bruit qu’on n’a pas accoutumé d’entendre.
( B o u H OURS. )
Éveiller foppofe une heure réglée , ou une cefo
fotion fpontauée du fommeil. ( M. B e a u z é e . )
Selon ces deux règles , E ve ille r & Réveiller
font bien dans les exemples foivants : « I l eft
» agréable de s E veille r de foi-même, lorfque le
»corp s a p ris tout le repos qu’i l lui* faut. L am i-
» ral s’étoit couché tard & fon premier fommeil
» duroit encore , lorfque fon valet de chambre le
». réveilla & lui dit , qu’i l y avoit à „ la porte des
» perfonnes mafquées qui demandoient à lu i par-
» le r ».
Ce s exemples, d is -je , me femblent correéls y
mais, je doute que ceux-ci le foient: « I l eft fâ-
» cheux d’être éveillé par le bruit ; Jofeph étant
» réveillé fit ce que l ’ange du Seigneur lui avoit
» ordonné » . Car un bruit fait qu’on fe réveille $
& un fon ge, qui n’ a rien de trifte ni.d’affreux, n’ empêche
pas qu’on ne s'éveille. (B o u i io u r s .)
(N.) É V È N EM E N T , A C C ID E N T , A V E N -
J U R E . Synonymes.
Évènement fe dit en général de tbut ce qui
arrive dans le monde, foit. au public foit au
particulier; & i l eft le mot convenable pour les
faits qui concernent l ’Etat ou le Gouvernement.
A cc ident fe dit de ce qui arrive de fâcheux, foit
à un feul foit à plufieurs particuliers ; & i l s’ applique
également aux faits qui ne font pas per-
lonnels comme à ceux qui le font. Aventure fe
dit uniquement de ce qui arrive aux perfonne? ,
foit que les chofes viennent inopinément foit
qu’elles foient la fuite d’une intrigue ; & ce mot
marque quelque chofe qui tient plus du bonheur
que du malheur. I l me îemble aufli que le haferd
a moins de part dans l ’idée d’Évènement, que dans
ce lle & Acc iden t & d’Aventure.
Les révolutions d’Étàt font des Évènements : les
chutes d’édifices font des A c c id en ts : les bonnes fortunes
des jeunes gens font des Aventures.
L a vie eft pleine A'Évènements que la prudence
ne peut prévoir. L a plupart des A cc iden ts n arrivent
que par défaut d’attention. I l eft peu de gens qui
ayent vécu dans le monde fens avoir eq quelque
Aventure bizarre. ( L 'a b b é G lR A R D . )
(N .)E X A G É R A T IO N , f. f. Figure de penfée par
raifonnement, qui confifte à mettre , à la place
de la véritable idée de la ch o fe , une autre idée
du même genre , mais d’un degré fopérieur par
rapport à la qualité bonne ou mauvaifè que Io n
veut défiguer : comme fi l ’on appeloit cruel celui
qui n’eft que févère , avare celui qui n’eft économe
, &e ; ou fi l ’on donnoit à une fa u te légère
le nom de crime énorme, à une f r a g ili té pardonnable
celui de méchanceté atroce, &c.
» L a Poéfie, dit M. de Voltaire , eft fortout
» le champ de ¥ Exa géra tion. Tous les poètes
» ont voulu attirer l ’attention des hommes par des
» images frapantes. Si un dieu marche dans l ’ îliade ,
» i l eft au bout du monde à la troifième enjam-
» bée. C e n’étoit pas la peine de parler des mon-
» tagnes pour les laiffer à leur place 5 i l falloit les
»> faire faut.er comme des chèvres, ou les fondre
» comme de la cire.
» L ’O d e , dans tous les temps, a été confecréé
» à Y Exa géra tion. A u f li, plus une nation devient
» philofophe , plus lès odes à enthoufiafme & qui
» »’apprennent rien aux hommes, perdent de leur
» prix.
» De tous les genres de Poéfie , celui qui charme
» l e plus les efprits inftruits & cultivés, c’eft la
» Tragédie. Quand la nation n’a pas encore le
» goût formé quand elle eft dans ce paffage de
» l a barbarie à la culture, de l ’efptit; alors pref-
» que tout dans la Tragédie eft gigantefque & hors
» de nature.
» Rotrou, q u i , avec du génie , travailla pré-
» cifément dans le temps de ce paffage., & qui
» domia dans l ’année 1636 fon Hercule mourant,
» commence par faire parler ainfi fon Héros :
M Père de la clarté, grand Aftre, Ame du monde,
91 Quels termes n'a franchi ma courfe vagabonde?
» Sur quels bords a-t-on vu tes rayons étalés ,
» Où ces bras triomphants ne fe foient fignalés?
» J ai porte la terreur plus loin que ta carrière,
** P^us l°*n qu’où tes rayons ont porté la lumière 5
» J ai force des pays que le jour ne voit pas,
» E t j’ai vu la nature au delà de mes pas ;
» Neptune & fes tritons ont vu d’ un cei! timide
»j Promener mes vaifleaux fur leur campagne humide.
» L’ air tremble comme l’onde au féul bruit de mon nom,
» Et n'ofe plus fervir la haîne de Junon.
33' Mais qu’e» vain j’ai purgé lé féjour où nous fommes !
ïï Je donne aux immortels la peur que j’ôte aux hommes.
» O n voit par ces vers combien Y exagéré y
» l ’ampoulé , le forcé , étoient encore à la mode ;
» & c eft ce qui doit faire pardonner à P. C o r -
» neille.
» I l n’y avoit que trois ans que Mairet avoir
» commencé à fe rapprocher de la vraifemblance
» & du naturel dans fa Sophonijbe. I l fut le pre-
» mier en France , qui non feulement fit une
» pièce régulière dans laque lle les trois unités
» font exactement obfèrvées, mais qui connut le
» langage des palfions & qui mit de 1a vérité dans
» le dialogue : i l n’y a rien d 'exa g é r é ; rien d’am-
» poule dans cette pièce. L ’auteur tomba dans un
» vice tout contraire; c’eft: la naïveté & la fami-
» liarité , qui ne font convenables qu’à la Comédie ;
» cette naïvet*é plut alors beaucoup.
t » L a première entrevue de Sophonifbe .& de
» Maffiniffe charma toute la Cour. L a coquetterie
» de cette reine captive , qui veut plaire à fon
» vainqueur, eut un prodigieux foccès. O n trouva
» même très-bon que de deux fuivantes qui acçom-
.» pagnent Sophonifbe dans cette fcèn e, l ’une dît
» a l ’autre, en voyant Maflïniffe attendri , M a
» Compagne.y i l f e prend: ce trait comique école
» dans la nature , & les difcours ampoulés n’y font
» pas; au fli, cette pièce reftaplus de quarante années
» au Théâtre.
» L 'E xa g é ra tion efpagnole reprit bientôt fe
» place dans l ’ imitation du Cid que donna P . Cor-
» neille d’après G u illa in de Caftro & Baptifta
» Diamante , deux auteurs qui avoient traité ce
» fujet avec foccès à Madrid. Corneille ne craignit
» point de traduire ces vers de Diamante :
» Su fatigre fennor que en humo
»> Su fentimiento efplicàva ,
ï» Por la boca que la vyerté
» D e verfe a lli denramada
33 Por otro que por fu rey.
» Son fang fur la pouffiè&é écrivoit mon devoir.
» Ce fang q u i, tout forti, fume encor de courroux
33 De fe voir répandu pour d’autres que pour vous.
» L e comte de Gormas ne prodigue pas 'des Exa**
» gérât ions moins fortes, quand i l dit :
33 Mon nom fert de rempart à toute la Caftille ;
»j Grenade & l’Arragon tremblent quand ce fer brille,
»3 Le prince, pour elïài de généralité,
33 Gagnerait des combats marchant à mon côte*