
la gue rre, fe prend fouvent pôur la guerre
même , ou pour la fortune de la guerre , pour
1 événement des combats > l ardeur , Vavantage
des combattants. Les hiftoriens difent fôuvent
qu on a combattu avec un Mars é g a l, aequo Marte
pugnatum efl , c’ eft à> d ire , avec u n a v a n ta g e éga l \ ancipiti Marte , avec un fuccès douteux j vario
Marte ,- quand l ’avantage eft tantôt d’un c ô t é &
tantôt de l ’autre.
C Jeft encore prendre la caufe pour l ’e f fe t , que
de dire d’un Général ce q u i à la le t t r e , ne doit
être entendu que de fbn armée : i l en eft de même
lorfqu’on donne le nom-de l ’auteur'à Tes ouvrages ;
i l a lu Cicéron , Horace, Virgile, c’eft a dire les ouvrages de Cicéron, &c. Jéfus-Chriftlui-même
s’eft fervi de la Métonymie en ce fens, lo rfou ’i l a
d i t , parlant des juifs {Luc. x v j, 251), H a b em M o ï- fen & prophetas > ils ont M oïfe & les prophètes ,
c ’eft à dire, ils ont les livres de Moïfe & ceux des
prophètes.
On donne fouvent Je nom de l ’ouvrier à Loua
g e : on dit d’un drap, que c’eft un Van-Robais ,
un RouJJeau , un Pa g n on , c’eft à dire un drap de
la m a n u fa c tu r e de Van-Robais, ou de ce lle de Rouf-
Teau j &c. C ’eft ainfi qu’on donne le nom du peintre
au tableau : on d i t , j’ai vu un beau Rembrant, pour
dire un beau tableau fait par Rembrant on d it d’ un
curieux en eftampes , qu’i l a un grand n om b r e de Lallots , c’eft à dire, un grand nombre d’eftampes
gravées par C a llo t.
O n trouve fouvent dans l ’Écriture fainte , Jacob, Jfraêl, Juda , qui fon t des noms de patriarches ,
pris dans un fens étendu pour marquer tout le peup
le juif. M. Fléchier ( Oraifon funèbre de M. de
' Turenne ) parlant du fage & vaillant Macchabée ,
auquel i l compare Mi- de Turenne ,. a dit : « Cet
» homme qui réjouïffoit Jacob par fes vertus &
”** exploits». Jacob P “f , c eft à-dire , le peuple ,
A u lieu du nom de l ’e ffe t, on fe fert fouvent du
^nom de la caufe inftrumentale qui fert à le pro-
duire^; ^infi , pour dire que quelqu’un-écrit bien,
c a dire qu’i l forme bien les caractères de l ’écritu
r e , on dit qû’ zt a une bette main. L a plurTie eft
auflr^ une caufe inftrumentale de ré c r itu re , & par
confequent de la compofition : ainft, plume fe d i t , *
par Métonymie, de la manière de former les carac-
•teres de 1 écriture & de la manière de compofer. Plume fe prend auffi pour l ’auteur même : ceft
une bonne plume , e’eft à dire , c’eft un auteur qui
e>cri f , eP ’ c ef i une de nos meilleures plumes c eft a dire , c eft un de nos meilleurs auteurs. Style f ig n i f ie aufîi ,< par figure, là manière d’exprimer
les penfees. Les anciens avoient deux ma-
Bieres de former les caradères de l ’écriture. L ’une
etoitpmgendo , en peignant les lettres ou for des
feuilles d arbres, ou fur des peaux préparées, ou
fur la petite membrane intérieure de l ’écorce de certains
arbres : ( cette membrane4 s’appelle en latin
liber, d’où vient livre ) P ou fer de petites tablettes
faites de l ’arbriffeaüpapyrus ou for de la to i le , f e ;
Ils ecrivoiemt alors âvec^dé petits rofeaux , & dans
la fuite ils fe fervirent auffi de plumes comme nous.
L autre manière d’écrire des anciens étoit incidéndo,
en gravant les lettres fur des lames de plomb ou de
cuivre , ou bien fur des tablettes de bois enduites
de cire. O r pour graver les lettres fur ces lames ou
fur çes tablettes , ils fe fervoient d’un poinçon qui
étoit pointu par un bout & aj>plati par l ’autre : la
pointe fervoit a graver , & l ’extrémité applatie fer—
voit à effacer ; & c’eft pour cela qu Horace dit
V 7* Sac. x . 7 z ) Jlylum vertere , tourner le ftyle-,
pour dire efface r, corriger, retoucher à un ouvrage.
Ce poinçon s-’appeloit J ly lu s , de sV ào?,
colomna,. columella , petite colonne ; tel eft, le
fens propre de çes mots : dans le fens figuré ,
i l lignifie l a maniéré d’exprimer les penfées. G’ efo
en ce fens que l ’on dit le f iy le fublime,. le f iy le
ample . - l e f i y k médiocre, 1 e f iy le foutenu, le f iy le
g ra v e , le f iy le comique , le f iy le poétique, le f i y l e
de la converfation, & o . V o y . S t y l e .
P in cea u ; outre fbn- fens p rop re , fé dit aufîi
quelquefois par Me'tony mie, comme p lum e , fiy le .:
0« dit d’un habile peintre , que c’eft un favant pin*
ceau. 1
V o ic i encore quelques exemples tirés de. l ’Écriture
fainte, où la caufe eft prife pour l ’effet. S i
peccaverit anima, . povtabit iniquitatent
( pÇVit, F". 1 elle portera fo n iniquité ,,
c e ft a dire , la peine de fbn iniquité. Iram,Dominé,
portabo , quoniam p eccavieu (Mich. V I I .9 .) ; où
vous voyez que par la colère du feigneur-, i l faut
k entendre la p ein e qui eft une foite de la colère»
JXcm morabitur opus mercenarii m i apud te ufque
rtume ( Levit. x I X . - 13.*) ç opus, Vouvrage , c’eft
dire , le fa la ir e j, la récompenfe qui eft due à . 1 ouvrier à- caufe de fon tra v a il To b ie a dit la même
chofe a fon fils tout Amplement ( zV. 1 ^ ). Quicun-
que tibi aliqu id operatus fu e r i t , fia tim ei mer-
cedetn refiitu e, & merces mercenarii tu i apud ter
omnino non remaneat. L e prophète Ofée dit ( zV.
8 } que les prêtres mangeront les péchés du peii*.
p l e j peccata populi mei corne d e n t ,. c’eft à. d i r e ,
les viéhmes offertes pour les péchés.
I f. L effet pour la caufe. Comme lorfqu’Ovide
( Métamorpli.\ x u . *13 ) dit que le mont Pélio-n
n a point d’ombres , net habet P e lio n umbras ;
c e f t a dire qu’i l n’a point d’arbres , qui, font la
caufe dè l ’ombre-: lom b r e , qui1 eft l ’effet des,arbre»;,
eft prife ici pour les; arbres mêmes;
Dans h i Genèfe^ ( x x v . 13 ) i l eft dit de Rébecca-,
Tue £Îeux nations étoiênt en elle ; duce gentes fu n t
in utero tuo , & duo. p opu li e x ventre tuo d iv ï-
dentur ; c’eft à dire, Efaii & Jacob , les pères des
deux nations ; Jacob, des j'ui'fs,} Efair., des Iduméens.
Le s poètes difent la p â le mort, lès p â le s maladies
; la mort & les maladies rendent pâle :
pallidamque Pyrenen ( Perf. prol. ) , la p â le fontaine
de Pjrrène ; c’étoit une fontaine confacrée aux
tnufes : l ’application à la Poéfîe rend p â le > éômme -
toute autre application violente. P a r la même raifon
.Virgile a dit ( Æ n . V I . 2 75 ) :
Patientes habitant morbi, trillifque fenectus i
Sc Horace ( I. Od. iv .) p a llid a mors. La m o r t , la
maladie, & les fontaines confacrées aux mufes ne
font point pâ les,' mais elles produifent la pâleur :
ainfi ,f on donne à la caufe une épithète qui ne convient
qu’a l ’effet. ^ ' -j •
III. L e contenant pour le contenu. ^ Comme
quand on dit, H aime la bouteille, c e ft a dire , i l
aimé le v in . V irg ile dit ( Æ n . 1. 743 ) <lue Diclon
ayant préfenté àJBitias une coupe d’or pleine de v ia ,
Bitias la prit, & f e lava , s ’arrofa de cet or plein ;
c’eft à dire , de la liqueur contenue dans cette coupe
d’or :
. , , llle impiger haujit
Spumantem pàteram & pleno fe proluit aura.
Au ro éft pris pour la coupe 5 c’eft la matière pour
la chofe qui en eft faite ( voy. S y n e c d o q u e ) , en-
fuite la coupe eft prife pour le vin.
L e c i e l , où les anges & les feints jouïffent de la
préfence de Dieu , fe prend fouvent pour Dieu
même : implorer lefecours du Cie l ; grâce au Ciel;
P a t e r , peccavi in Coelum & coram te ( mon Père,
j’ai péché contre le Ciel & contre vous ) , dit l ’enfant
prodigue à fon père ( L u c . xv» 18. ). L e Ciel
fe prend aufîi pour les dieux du paganifme.
L a Terre f e tu t devant Alexandre ( I . Maehab.
j. 3.) j fe lu it Terra in confpectuejus ,* c’eft à dire ,
les peuples de la terre fe fournirent à lui. Rome
défapprouva la conduite d’Appius ; c’eft à dire,
les romains défepprouvèrent. . . .
Lucrèce a dit ( V . i z f o . j , que les chiens de
cKaffe mettoient une Forêt en mouvement j fepire
p la g is Saltitm , canibufque ciere : où l ’on voit qu’i l
prend la Forer pour les animaux qui font dans la
forêt. 4 U n N id fe prend auffi pour les p e tits oifeaux
qui font encore au nid.
Carcer ( prifon ) fe dit en latin d’un homme qui
mérite la prifon.
IV» L e nom du lieu où une chofe fe f a i t , fe
prend pour la chofe même. On dit un Caudebec, au
lieu de dire un chapeau fait à Caudebec, v ille de
Normandie.
On dit de certaines étoffes , c’ eft une M a r fe itte ,
ce ft à dire, une étoffe de la manufeétare de Mar-
feille : c’eft une P e r fe , c’ eft à dire., une toile peinte
qui vient de Perfe.
A propos de ces fortes de noms, j’obferverai ici
une méprife de M. Ménage, qui a été fuivie par les •
auteurs du Dictionnaire univerfel, appelé communément
D ic t . de Trévoux ; c’eft au fojet d’une forte
de lame d’épée qu’on appelle Olinde. Les olindes
nous, viennent d’Allemagne , & fur-tout de la v ille
de Solingen , dans le cercle de Weftphalie : on prononce
S e lingue. I l y a apparence que c’eft du nom
d e c e t t e v i l l e q u e l e s é p é e s d o n t je p a r le o n t é t é
a p p e lé e s d e s Olindes p a r a b u s . L e n o m tfOUnde,
n om r o m a n e fq u e , é t o i t d é jà c o n n u c o m m e l e n o m
d e Sylvie : c e s fo r te s d’ ab u s f o n t a f f e z o rd in a i r e s en
f a i t d’É t y m o l o g i e . Q u o i q u ’ i l en f o i t , M . M é n a g e
& l e s a u te u r s d u D i c t io n n a i r e d e T r é v o u x n’ o n t p o in t
r e n c o n t r é h e u r e u f em e n t , q u an d i l s o n t d it q u e les
Olindes ont été ainfi appelées de la ville d ’ Olinde
dans le B r é fil ^ d’ o ù i l s n o u s d ife n t q u e ces fo r te s
de lames, fo n t venues. L e s o u v r a g e s d e f e r n e
v ie n n e n t p o in t d e c e p a y s - l à : i l n o u s v ie n t d u
B r é f i l u n e fo r t e d e b o is q u e n o u s a p p e lo n s Br é fil ;
i l e n v ie n t a u ff i d u fu c r e , d u t a b a c , d u b a um e ,
d e l ’ o r d e l ’ a r g e n t , &c ; m a is o n y p o r t e l e fc c
d e l ’E u r o p e , & fu r - t o u t l e f e r t r a v a i l l é .
L a v i l l e d e D a m a s en S y r i e , a u p i é d u m o n t
L i b a n , a d o n n é fo n n om à u n e f o r t e d e fabres
o u d e couteaux q u ’ o n y . f a i t : i l a un vrai
D am a s , c ’ e f t à d ir e , u n fe b r e o u u n c o u t e a u q u i
a é t é f a i t à D am a s . O n d o n n e a u l f i l e n o m d e
D am a s à u n e fo r t e d’ é to f f e d e f o i e , q u i a été f a b
r iq u é e o r i g in a i r em e n t d an s l a v i l l e d e D a m a s : o n
a d e p u is im i t é c e t t e f o r t e d ’é to f f e à V e n i f e , à
G ê n e s , à L y o n , &c / a i n f i , o n dit D am a s de V e -
n i f e , de Lyon , & c . O n d o n n e e n c o r e c e n om à
u n e f o r t e d e prune , d o n t l a p e a u e f t f le u r ie d e f a ç o n
q u ’ e l l e im i t e l ’ é to f f e d o n t n o u s v e n o n s d e p a r l e r .
Faïencexft. u n e . v i l l e d’ I t a l i e d an s l a R o m a g n e :
o n y a t r o u v é l a m a n iè r e d e f a i r e u n e f o r t e d e
v a i f f e l l e d e t e r r e v e r n i f f é e , q u -o n a p p e l l e d e l a
Faïence ; o n a d i t e n f u i t e , p a r Métonymie , q u ’ o n
f a i t d e fo r t , b e l l e s Faïences e n H o l l a n d e , à N e -
v e r s , à R o u e n , &c.
C ’ e f t a in f i q u e l e Lycée fe p r e n d p o u r l e s d i f e i -
p l e s d’A r i f t o t e , o u p o u r l a d oC t r in e q u ’A r i f t o t e e n -
f e i g n o i t d ans l e L y c é e . L e Portique fe p r e n d p o u r
l a r h i l o f o p h i e q u e Z é n o n e n f e i g n o i t à fe s d i f c i p l e s
d ans l e P o r t i q u e . . . . On ne p enfe p o in t ainfi d ans
le Lycée ; c ’ e f t à. d ir e q u e l e s d i f c ip l e s d ’A r i f t
o t e n e fo n t p o in t d e ’ c e fe r r t im e n t . . . L e Portique
n e fl p a s toujours d ’accord avec le Lycée ; c ’ effc
à d ir e q n e l e s fe n t im e n t s d e Z é n o n n e f o n t p a s
to u jo u r s c o n fo rm e s à c e u x d?A r i f t o i e . R o u fT e a u ,
p o u r d ir e q u e C i c é r o n , dans fe m a i fo n d e c am p a g n e ,
m é d i t o i t l a p h i l o f o p h i e d’A r i f t o t e & c e l l e d e Z é n
o n / s ’ e x p l iq u e e n c e s t e rm e s : ( liv. 1 1 , Od. i i j . )
C’efl là que ce romain, «font l’éloquente voix
D ’un joug prefque certain fauva fa République,
Fortifioit fon coeur dans l’étude des lois
Et du Lycée & du Portique,
A c a d ém u s l a i f f a p r è s d’A t h è n e s u n h é r i t a g e o ù
P l a t o n e n f e i g n a l a p h i l o f o p h i e . C e l i e u fu t a p p e l é
A ca d ém ie , d u n om d e fb n a n c ie n p o f f e f f e u r : d e l à
l a d o é t r in e d e P l a t o n fu t a p p e lé e l ’Aca démie. O n
d o n n e a u lf i , p a r e x t e n f io n , l e nomd’Académie à difi-
r e n te s a f f em b ié e s de Sa v ants- q u i s’ a p p l iq u e n t à c u l t
iv e r l e s L a n g u e s , l e s S c ie n c e s , o u l e s 1 B e a u x A r t s .
R o b e r t Sç>rbon ,■ c o j j f e f f e u r & a u m ô n ie r d e f e i a i