
compatriotes : je dirais à R om e, qu’i l faut les
appliquer à la langue italienne ; à Madrid , j’ in-
diquerois la langue efpagnole ; à Lifbonne, l a
port'ugaife ; d V ien n e , 1 allemande ; à Londres,
1 angloife ; pa rtout, la langue maternelle des enfants.
C ’eft que les généralités font toujours les
rcfultats des vues particulières & même individuelles
; qu’elles font toujours très-loin de la plupart
des efprits , & plus loin encore de ceux
des enfants ; & qu’i l n’y a que des exemples familiers
& connus qui puiffènt les en rapprocher.
Mais la Méthode de defeendre des généralités aux
cas particuliers , eft beaucoup plus expéditive que
ce lle de remonter des cas particuliers fans fruit
pour la fin’-, puifqu’elle eft inconnue , & que dans-
ce lle - là au contraire on envifage toujours le terme
d’où l ’on eft parti.
Je conviens qu’i l faut beaucoup d’exemples pour
affermir l ’idée générale , & que notre livre élémentaire
n’en comprendra pas affez : c’eft pourquoi
je fuis d’avis que , des que les élèves auront apris,
par exemple, le premier traité des Éléments de
La. V o i x , on les exerce beaucoup à appliquer ces
premiers principes dans toutes les le&ures qu’on
leur fera fa ire , pendant qu’ils aprendront le fécond
traité des Éléments de L’ Oraifon ; que, celui-ci apris,
on leur en faffe pareillement faire l ’application
dans leurs lectures , en leur y fefant reconnoître
les différentes fortes de mots-, les divers temps des
verbes, &c , fans négliger de leur faire remarquer
de fois a autre ce qui: tient au premier traité y
enfin que, quand ils auront apris le troifième des
É lém en ts de la P ropojition , on le s occupe quelque
temps à en reconnoître les parties , les efpèces,
& la forme dans quelque livre f-rançois.
: Cette pratique a deux avantages : i °. celui de
mettre dans la tête des enfants- les principes rai-
fonnés de leur propre langue-, la langue qu’i l
leur importe le plus .de favoir r & que communément
on n égligé le plus malgré les réclamations
des plus fages , malgré l ’exemple des anciens qu’on
eftime le plus , & malgré les expériences réitérées
du danger qu’ i l y a à négliger une partie fi effon-
ç ie lle ; z°. celui de préparer les jeunes élèves- à
l ’étude des langues étrangères, par la connoi fiance
des principes qui font communs à toutes , & par
l ’habitude d’en faire l ’application raifonnée. I l ne
faudra donc point regarder comme perdu le temps
qu ils emploieront à ce premier objet , quoiqu’on
ne puifie pas encore en tirer de latin : ce tveft
point un détour; c’ eft une autre roüte, où ils apren-
çent des chofes eflencielles qui ne fe trouvent
point fur la ro-ute ordinaire : ce n’eft point une
perte; c e ft un retard u t ile , qui leur, épargne une
fatigue fuperflue & dangeréufe, pour les mettre
en état d’a ller enfuite plus aifément, plus sûrement,
& plus vite , quand ils entreront dans l ’ étude
du la t in ,& qu’ils pafleront pour cela au fécond livre
élémentaire.
z°i .Éléments de la Langue latine. Ce fécond
volume fuppofera toutes les notions générales cônw
prifes dans. le premier, & fe bornera à ce qui-eft-
propre a la langue- latine. Ces différences propres*
naiffent du génie de cette langue , qui a admis
trois genres , & dont là conftru&ion ufuelle eft
tranfpofiiive ; ce qui y a introduit l ’ufage des cas
& des déclinaifons dans les noms , les pronoms, &
les adje&ifs : i l faut les expofèr de fuite, avec des
paradigmes bien nets pour fervfr d’exemples aux
principes généraux des déclinaifons; & ajouter en-
fuite des mots latins avec leur tradu&îon, pour
être déclinés comme le paradigme : on joindra aux
déclinaifons grammaticales des adj,e&ifs, la formation
des degrés de lignification , qui en eft comme la
déclinaifon philofophique. L ’ufage dès cas , dans
la Syntaxe latine , doit être expliqué immédiate-»
ment après; i° . par raport aux ad je&ifs , qui fe
revêtent de ces formes, ainfk qjie de celles des genres-
& des nombres, par la lo i de concordance ;: z°. par
raport aux noms & aux pronoms , qui prennent
tantôt un.cas & tantôt un a u t r e f é lo n l ’exigence
du régime r 8fr c e c i, comme, on-voit, amènera naturellement
à propos de l ’accufatif & de l ’ablatif,
les principaux ufages des prépofitions.- Viendront
enfuite les conjugaifons des verbes dont les paradigmes,
rendus les plus clairs qu’i l fer^poffible ,
feront également précédés des règles de forma--
tion les plus générales , & fuivis de verbes-
la t in s , pour être conjugués.comme le paradigme
auquel ils-feront rapportés. Les conjugaifons feront
fuivies de quelques remarques - générales fur les
ufages propres de l ’in fin itif, des gérondifs , des
fupins-, & fur quelques autres latinifmes analogues.
Partout on aura foin d’indiquer les exceptions les
plus confidérables ; mais i l faut attendre de lu fa g e
la- connoiffance des autres. V o ilà toute la.matière
de ce fécond ouvrage élémentaire , qui fera, comme
on voit,- d’un volume peu confidérable. V o y e \
ceux des articles déjà cités qpi conviennent i c i , &
fpécialement S u p e r l a t i f , I n f i n i t i f , G é r o n d i f ,
S u p i n . ) .
O n doit bien juger qu’i l en doit être dé ce livre
comme du précédent ; qu’à - mefure que l ’enfant en
aura apris les- différents artic le s, i l faudra lu i en
faire f a i r e l ’application fur du la t in , l ’accoutumer
à y reconnoître les cas , les nombres, les genres ,
a remonter d’un cas oblique qui fe préfente , au
nominatif, & de là à la déclinaifon, d’ün comparatif
ou d’ u n fupe rlatif, au pofitif : puis r quand il
aura apris les conjugaifons , les lui faire reconnoître
de la même manière, & fe hâter enfin de
l ’amener â l ’analyfe te lle q u ’ o n l ’a vue ci devant ;
car cette provifion de principes eft fu f f i fk n te ,
pourvu qu’on ne faffe analyfer que des phrafes
.choifies exprès. Mais j’avoue qu’on ne peut pas
encore aller bien loin : parce qu’i l eft rare de
trouver du latin fan s figures., ou de di&ion ou
de c o n f t r u & io n , & fans tropes ; 8c que , pour bien
entendre le fèns d’un é c r it , i l faut au. moins être
eu état d’entendre les obfcrvations qu’un, maître
Intelligent peut faire fur ces matières. C’eft pourquoi
il eft bon, pendant ces exercices préliminaires
fur les principes généraux, de faireaprendre au jeune
élève les fondements du difeours figuré dans le livre
qui fu it. ^ .
2°. Eléments grammaticaux du D f cours figure t
qU Tra ité élémentaire des Métaplafmes , des
Tropes , & des Figures de eonjlruction. C e livre-
élémentaire ie partage naturellement en trois parties
analogues & correfpondantes à celles du premier;
& i l appartient, comme le premier,,à la G rammaire
générale : mais on en prendra les exemples dans-
les deux langues. L e traité des Metaplalmes fera
très-court ( Poye% M È t a p l a s m e ) : les deux
autres demandent un peu plus de developement ,
q u o iq u il faille encore s’attacher a y réduire la
matière au moindre nombre de cas , & aux cas
les plus généraux qu’i l fera poifible. Les définitions
doivent en être claires , juftes, & précifes r
les ufages des figures- doivent y être indiqués,
avec gont & intelligence : les exemples doivent
être choifis avec circonfpe&ion, non feulement par
raport à la forme , qui eft ici l ’objet immédiat,
mais encore par raport au fonds , qui doit toujours
être l ’objet principal. On trouvera d’excellentes
chofes dans le bon ouvrage de M. du Mar-
fais furies Tropes; & fur Y E llip fe en particulier ,
qui eft la principale c le f des lan gu es, mais fur-
tout du latin , i l faut confulter avec fo in , &
pourtant avec quelque précaution , la Minerve
de Sahctkis, & , fî l ’on veut, le Traité des E llip fe s
de M. G rim m , imprimé en 1745 à Francfort &
à Leipfic : j’obferverai feulement que l ’un & l ’autre
de ces auteurs donnent à peu près une lifte alphabétique
des mots fupprîmés par ellipfe dans les
livres la t in s ; & que j’aimerais beaucoup mieux
qu’on expofât des règles générales pour recon.-
noître & l ’ellipfe & le fupplément , ce qui me
paraît très-poffible en fuivant à peu près l ’ordre
des parties de l ’ôrai fon avec- attention aux lors
générales- de la Syntaxe. Poye^ T r o p e s , & les
articles de chacun en particulier, C o n s t r u c t i o n
F i g u r e , &c.
Je fuis perfuadé qu’enfin avec cette dernière
provifion des principes, il n’y a plus guère à. ménager
que la progreiîion naturelle des difficultés ;
mais que cette attention même ne fera pas long
temps néceffaire : tout embarras doit difparoître ,
parce qu’on a la clef de tout. La feule chofe donc
que je crois néceffaire , c’eft de commencer les premières
applications de ces derniers principes- fur
la langue maternelle , & peut être d’avoir pour
le latin un premier livre préparé exprès pour le
début de notre Méthode : voici nia penfée.
4°. Extraéîoe êprobatijjimis feriptoribus Ecïogee.
Ce titre annonce des phrafes détachées ; elles peuvent
donc etre choifies & difpofées de manière que les
difficultés grammaticales ne s’y préfentent que fuc-
ceffivement. Ainfi, on n’y trouverait d’abord que des
phrafes très - fimples & très- courtes ; puis d’autres
au fil fimples , mais plus longues ; enfuite des phrafes
complexes, qui en- renfermeraient d’incidenies ;
enfiu des périodes ménagées avec la même gradation
de complexité. I l faudrait y préfenter lest
ours elliptiques avec la même diferétion , & ne
pas montrer d’abord les grandes ellipfes où i l faut
luppléer plufieurs mots.
Malgré toutes les précautions que j’infinue
qu’on n’aille pas croire que j.’approuvaflc un latin-
faétice ,. où i l ferait aifé de préparer cette gradation
de difficultés ; le titre même de l ’ouvrage
que je propofe me juftifie pleinement de ce foup-
çon : j’entends que le tout ferait tiré des meilleures
fources & fans aucune altération, y & la,
raifôn en eft fi m pie. Je l ’a i déjà dit ; nous n’étudions
le latin - que pour nous mettre en état d’entendre
les bons ouvrages qui nous reftent en cette
lan gu e, c’eft le feul but où doivent tendre tous:
nos efforts : c’eft donc le latin de ces ouvrages
mêmes qui doit nous occuper , & non un lan g a g e
que nous n’ y rencontrerons pas ; nos premières
tentatives doivent entamer notre tâch e, & l ’abréger
d’autant : ainfi, il n’y doit entrer que ce que'
l ’on pourra Copier fidèlement dans les auteurs- delà
plus pure la tin ité , fans toucher le moins du:
monde à leur texte ; & cela eft d’autant plus facile
, que le champ eft vafte au prix de l ’étendue-
que doit avoir ce volume élémentaire, q u i , tout
confidéré , ne doit pas excéder quatre â cinq feuilles
d’impreftion, afin de mettre les commençants'
auffi tôt après aux fources. mêmes.-.
Du refte, comme je voudrais que les enfants
appriffent ce livre par coeur à mefure- quuls l ’en-
tendroient , afin de meubler leur mémoire de
mots & de tours latins; i l me femble qu’avec un
peu d’art dans la tête du compilateur , il. ne lu i;
ferait pas i-mpoffible de faire de ce petit recueil
un livre utile par le fonds autant que par la.
forme : i l ne s’agirait que d’en faire une fuite
de maximes intéreffantes, q u i, avec le temps, pourraient
germer dans les jeunes efprits où on le s
aurait jetées fous un autre prétexte ,. s’y dèvélo
per , & y produire d’excellents fruits. E t quand:
je dis des maximes , ce . n’eft pas pour donner une
préférence exclufive au ftyle purement dogmatique :
les bonnes maximes fe peuvent préfenter fous toutes
les formes ; une fable , un trait hiftorique , une'
épigramme , tout eft bon pour cette fin-; la Morale
qui plaît eft la meilleure.
Qu el mal y au ra it- il a accompagner ce recueil
d’une tradu&ion élégante, mais fidèle vis à v is
du texte? L ’intelligence de c e lu i - c i n’en ferait
que plus facile ; & i l eft aife de fentir que l ’étude
analytique du latin empêcherait l ’abus q u i
réfulte communément des tradu&ions dans la M é th
o d e ordinaire. On pourrait auffi , & peut - être
feroit-ce le mieux, imprimera part'cette traduction
, pour être le fujet des premières applications
de la Grammaire générale à la langue maternelle ;
cette tradu&ion n’en ferait que p lus utile quand