faut le prononcer & conféquemmçnt l ’écrire dans
C a p tif mal. Mais par quelle inconféquence s’ eft-on
avifé de fupprimer au pluriel le t final des mots
terminés au fingulier par n t , s’ ils font polyffyl-
labes j de conferver ce t dans les monoffyilabes de
même terminaifon ; & d’excepter encore de 'cette
exception le nom pluriel gens , auquel je joindrai
tou s par analogie ? De ce qu’on écrit également
au pluriel p d y fan s & bienfefans , un étranger ,
un francois même peu inftruit de la partie pofitive
de fa langue , mais lâchant que l ’on dit au féminin
H en fefan te , trompé par l ’efprit d’Analogie & par
l ’identité de i ’Orthographe , . peut en conclure que
l ’on ditvaufli payfante au lieu depayfane. D ’a i lleurs
i l eft contraire au bon fens de reftreindre ,
par des exceptions inutiles , bizarres , embarraflantes,
& contradictoires, la règle de la formation de
nos p lu r ie ls , qui fait ajouter f à la fin des noms
& des adjeétifs finguliers non terminés par f ou ?.
L ’Ana logie enfin exige qu e , dans tous les mots
de la même famille , une lettre néceflaire à la
prononciation de quelques-uns foit confervée dans
tous , pourvu qu’elle ne nuife pas à la prononciation.
A in fi, i l faut écrire é , è , ê par a i dans tous les
mots d’une même fam ille , fi quelques mots de
cette famille font entendre a en même place 3
cômme
j aimai ~ tu aima.r.
aimer , amour.
chair . charnel,
c la ir clarté.
faifeeau S fafeine.
naiflancç ÏP natif.
praiton (Cyl-. orateur.
paifiblç pacifique.
plain e aplani.
vaiffe au vafe.
adverbes venus des adjeCtifs en ant s’écriront fim-<
plement & analogiquement par ament ; de fa v a n t ,
in f a n t , p u i jfa n t , on formera fa v am e n t , infia-
mçnty puijfament. Quant aux adverbes venus des
adjeCtifs en e n t , outre la fupprefiion de la première
m , qui y eft également néceflaire, i l faut
y introduire un a , puifqti’on l ’y entend ; cet a doit
même entrer dans l ’orthographe de l ’adje&if pour
caraCtérifer l ’analogie : ainfi , écrivons dirigeant
& dilige ament, négligeant & néglige ament ; pru-
dant 8c prudament , violant & violament ; je
çonferve i ’e dans diligeant 8c négligeant ", parce
qu’i l y eft néceflaire pour faire fiffler le g 8c l ’em-
pécher d’être guttural ; & je fupprime Ve dans pru-
dant 8c v i o l a n t parce qu’i l y feroit abfolument
inutile.
J1 faut écrire le fon o par au dans les mots dont
les analogues ont a ou a l en même place , Sc
par eau dans ceux dont les analogues ont e où et
dans la fyllabe correspondante; coinme
CAiaud, chaafer chaleur,
f dits , îàiL(faire fa/ijfier. '
hazzt, haaffer exalter.
maudire m malédiction,
naufrage o navire. .
pfaume, pfizutier P pfa/mifte.
n Agneau
agne/ér.
beauté
Cu
O bél.
chapeau chape/iér.
grumeau grume/ér.
manteau mante.
roui eau xoulér.
Si l ’on entend dans quelque mot un o fimple ou
la v o y elle compofée- o u , l ’Analogie exige que ,
dans tous les mots de la même famille où au lieu
de q ou de ou on entendra eu , on écrive oeu .*ainfi
écrivons-nous
Quoiqu’on entende un a dans le mot femme ,
q ui fe. prononce famé , i l n’eft pourtant pas pof-
fible d’écrire cet a dans les dérivés f e mêle, fém in in ,
èféminé ; d’autre part fam é , avec un a fimple ,
«n peignant fidèlement^ la prononciation , ne ferojt
aucunement deviner Ve des' dérivés : écrivons donc
feam e ; nous peindrons la prononciation par a &
Ve muet qui le précédera fera , fans altérer la
prononciation , le lien du radical avec fes dé-
f i yés.
Le s adjectifs terminés en ant ou enp forment
leurs adverbes, de manière que l ’oreille les entend
finir par ament cependant les uns s’écrivent par
amment & les autres par emment : les étrangers
les nationaux peu inftruits font en danger de
prononcer ces deux fyllabes comme les deux premières
du mot emmqnreher , -ou de prononcer la
première des deux comme la première des mots
'pm-monipe, Em-manuel. Supprimons donc la pre-
jjftère m , puifqu’elle ne fe prononce plus , 8C les
hoeu£ • bouvier.
coeur cordial;
choeur chorifte.
moeurs o moral»
nçeu s nouer»
oeu£ ovaire & oval.
oeuvre o ' ouvrier. '
foeur for oral.
voeu vouér ou voter.
D ’après ce principe, combiné avec la manière
dont je propofe d’écrire l mouillée , i l faut écrire
oe u ll au lieu de, oe il. Puifqu’il eft rèçu d’écrire
voe u , à caufe de vouer; pourquoi n’écriroit - on
pas ayoeu , tant par analogie avec voeu qu’à caufe
ef avouer ? Nous écrivons cueillir , & -nous.y prononçons
e u , qui n’y eft point écrit : les mots çor
lèclé , colècleur, c o lè c lif , co lè& ion , qui font dé
la nié me fam ille , nous indiquent oe 8c nous1 avertiren
t d’écrire coeullir, a coe u llir , recoeullir ; de là
q coeu ll f reçoçull, même ce rcoeull, & par l ’analogie
des fons prgoeiill où l ’on prononce oeu , puis or-
goélleus, parce qu’on n’y prononce que e.
6 i8°. Nous avons réuni mal à propos en un
feul mot des mots naturellement. diftinéts & fé- •
parés, 8c dont les fens partiels fe préfentent les
mêmes dans l ’enfemble que s’ils étaient encore
féparés : tels font les mots a f in , a lo r s , auprès ,
a u ffitô t, autrefois , autour , b ie n tô t , enfin ,
en fu ite , lorfque , parce q u e , p lu tôt , pourquoi,
p u ifq u e , quelquefois, toutefois. L ’exaÇtitude grammaticale
& l ’intérêt d e là clarté exigent également
que l ’on diftingue & que l ’on fépare chacune des
parties élémentaires.
Écrivons donc à f i n , comme nous écrivons à
ca u fe ,. & comme on écrivoit à celle' f in , qui
fubfifte encore dans le langage populaire de quelques
provinces, & qui eft la vraie interprétation
de à f in ( in hune finem ).
Nous avons en françois lors , qui eft un véritable
nom fignifiant à peu près Vheure , le moment;
& qui fe conftruit comme les noms : i l fert de
complément à quelques prépofitions, dès lors ,
pour lors ; i l prend un complément déterminatif
annoncé par d e , lors de fo n mariage. 11 faut donc
écrire lors féparément en toute occafion : à lo r s ,
comme dès lors , pour lors ; lors q i i i l fa u d ra
compter, comme lors donc qu’ i l fa u d ra comp-
ter. Obfervons feulement que lors étant immédiatement
fuiyi de q u e , on en prononce Vs finale ,
qui en toute autre circonftance demeure muette :
i l faut donc écrire avec l ’accent grave lors q u e ,
& fans accent à lo r s , dès lo r s , pour lors , lors donc
que vous voudre
On écrit féparément de loin , de p r è s , de loin
à loin i de près à près ; on écrit pareillement au
lo in , & i l ne manque que d’écrire en deux mots au
■ près pour compléter l ’Analogie : complétons - la
donc.
Suivons - la de même qnand elle nous fuggère
d’écrire en deux parties aujfi t ô t , bien tô t , p lu s
tôt-, comme nous écrivons aujfi tard , bien tard ,
p lu s ta rd , & comme nous écrivons ajje^ t ô t ,
trop t ô t , ainfi que les corrélatifs ajfe% tard , trop
tard. L e Dictionnaire d’ Orthographe de Poitiers ,
revu par Reftaul , écrit en une pièce p lu ta rd , &
ajoute cette remarque : « O n écrit auflîp lu s tard
» en deux mots : mais c’eft l ’oppofé de p lu tôt ;
» pourquoi donc n’écriroit - on pas plutard ? »
V o ilà comme -un écart en entraîne un autre ,
Abjyjfus abjyjfum invocat j i l fa llo it renverfer le
raifonnement & dire : « On écrit p lu s tard en deux
» mots : mais c’ eft l ’oppofé de p l u t ô t pourquoi
» donc n’écriroit-on pas p lu s tôt ?»
Tout le monde convient que Autour- défîgne
un raport de fituation ; & cela eft vrai , parce que
le nom Tour défîgne ic i l ’efpace environant : i l
faut-, donc traiter cette expreflion comme toutes les
autres qui énoncent aufli des raports de fituation ,
(Ut d edans, au dehors , au dejfus , au d e jfçu s,
&RAMM. E T L lT T É R A T * jQtïlfi I L
au milieu , au bou t, au d e v a n t , au loin ; c’eft
aufli par ce principe analogique que nous nous
fommes décidés pour au p r è s , & que nous devons
écrire de même au tour en deux parties.
L e mot f o i s eft univerfellement reconnu pour
un nom féminin : une f o i s , deux f o i s , p lufieurs
f o i s , p a r f o i s , pour cette f o i s , de f o i s à autre ,
tant de f o i s , trop de f o i s , une première f o i s ,
une autre f o i s , &c. I l n’y a donc aucune raifort
de raprocher ce nom de quelque adjeétif que ce
puifle être & en quelque circonftance que ce foit ;
& i l faut écrire féparément autre fo is , quelque
f o i s , toute f o i s , de même qu’on écrit féparément,
vous me le dire\ une -autre f o i s , toutes f o i s &
quantes i l vous p la ir a , 8cc.
Dans les deux mots en fin , en fu ite , on entend
diftinéfcement la prépofition, en 8c les noms f in 8C
fu i t e ; c’eft à peu- près comme fi l ’on difoit a la
f in , à la f u i t e , ou bieu en dernier lieu , en
conféquence ; . i l eft donc jufte d’écrire diftinftement
e n f in , en f u i t e , pour diftinguer dans l ’Orthographe
les idées élémentaires qui font très-diftinéles
dans le fens.
I l eft évident que l ’on doit écrire en trois mots
p a r ce q u e , quand i l fignifie p a r la raifon que ,
à caufe que ( en latin quia ) ; car ce eft l’ équivalant
de la caufe ou de la raifon , & il faut le
diftinguer de la prépofition précédente par. L ’habitude
de voir en deux mots parce que pour figniner
à caufe que , n’eft pas une'raifon fuififante pour
continuer de l ’écrire de même. L a prétendue équivoque
qu’i l y auroit dans cette , phrafe, P a r ce
que vous me mande\, j e cannois le véritable état
de laffair e ; cette équivoque , dis- je , n’eft pas
une raifon plus péremptoire que la première :
i° . quand un mot équivoque -par lui-même eft en
place , les circonftances en déterminent le fens,
comme on le voir dans la phrafe précédente ; z °. pour
éviter, le doute qu’on objeéte i c i , on a un moyen
bien fimple indiqué par l ’Académie dans fon Ob-
fervation fur la Remarque x c v n r de Vaugelas :
« Pour, écrire purement & fans équivoque , i l ne
» faut jamais fe'fervir de p a r ce que , que dans le
» fens de à caufe que , ou de quia, des latins: au
.» lieu .d e dire, je 'c o n n a is paxr ce que vous me
» mander d’ un t e l, i l faut dire , j e connois p a r
» les chofes .que vous me mandez d ’un tel ».
3°. Cette prétendue équivôque eft réellement nu lle,
vu que p a r ce que fignifie dans tous les cas par la
raifon que , ou à peu près.
Si i ’on continue décrire tout d’une pièce pourquoi
, i l faut donc écrire de même pourqui ,
p oiirquand , 8c même pour moi, pourlui , pour-
tout y & c : ou fi l ’on fépare les mots élémentaires
dans ces exemples, i l faut les féparer aufli dans
p ou r quoi , qui fignifie en effet pour quelle raifon >
ou pour quelle ca ufe , ou pour quelle f i n , &c.
Les éléments de puifque font féparables , puif-
qu’on les fépare de fait pour jeter donc encre
N n n a