
grec 8pm« ( cheveux ) ; quod p u llo s gallinaceos
ïnvclvant & impediant ca pilli. Tripaud adopte
cette conjecture , & afiùre que ce mot le dit proprement
des poulets qui ont les pieds empêtrés parmi
des cheveux, & q u'il vient du grec *», ,. chev
eu x .
Intrigue , dans ce fens, eft le noeud ou la conduite
d’une pièce dramatique ou d’un roman, c’eft
à dire , le pius haut point d’embarras où le trouvent
les principaux perfonnages , par l ’artifice ou
la fourbe de certaines perfonnes , & par la rencontre
de plufieuirs évènements fortuits qu’ils ne peuvent débrouiller.
V oy e \ N<suDf
I l y a toujours deux deffeins dans la Tragédie , la
Comédie, ou le poème épique. L e premier & le
principal , eft celui du héros ; le fécond comprend
tous les deffeins de ceux qui s’oppofent à fes prétentions.
Ces caufes oppofées produifem auffi des
effets oppofés , (avoir les efforts du héros pour l ’exécution
de ion deffein , & les efforts de ceux qui lui
font contraires.
Comme ces caufes & ces deffeins font le commencement
de l ’aétion , de même ces efforts contraires
en font le milieu , & forment une difficulté
èt un noeud qui fait la plus grande partie du
poème ; e lle dure autant de temps que l ’efprit du
jleéteur eft fufpendu for l ’évènement de ces efforts
'contraires. L a folution ou dénouement commence,
lorfque l ’on commence a voir cette difficulté levée
& les doutes éclaircis. V oye\ A c t i o n , F able ,
&c.
Homère & V ir g ile ont divifé en deux chacun
de leurs trois poèmes, & ils ont mis un noeud & un
dénouement particulier en chaque partie. -
L a première partie de l ’ îliade eft la colère
d’A ch ille , qui veut fe venger d’Agamemnon par
l e moyen d’Hector & des Troyens. L e noeud comprend
le combat de trois jours qui fe donne en
î ’abfence d’A ch ille : i l cbnfifte, d’ une p a r t , dans la
réfiftance d’Agamèmnon & des grecs ; & de l ’autre,
dans l ’humeur vindicative & inexorable d’A c h i l le ,
qui ne lui permet pas de fe réconcilier. Les pertes
des grecs & le défefpoir d’Agamemnon difpofent
au dénouement , par la fatisfaétion qui en revient
au héros irrité. L a mort de Patrocle, jointe aux
offres d’Agamemnon , qui feules avoient été fans
effet , lèvent cette difficulté & font le dénouement
de la première partie. Cette même mort eft auffi
le commencement de la fécondé partie, puifqu’elle
fait prendre à A chille le deffein ae fe venger d’Hector
: mais ce héros s’oppofe à ce deffein ; 8c cela
forme la féconde In trigue, qui comprend le combat
du dernier jour.
V ir g ile a fait dans fon poème le même partage
qu Homère. L a première partie eft le voyage 8ç ’1 arrivée d’Énée en Italie ; la fécondé eft fon éta-
kliffement. L ’oppofition qu’i l effuie de la part de
Junon dans ces deux entreprifes, eft le noeud général
d e i’Iéli.Pîî entièi'Ç»
■ Quant au choix du noeud & à la manière d’en
faire le dénouement, i l eft certain qu’ils doivent
'naître naturellement du fond & du fojet du poème«
L e Père le Boffu donne trois manières 'de former
le noeud d’ un poème : la première eft ce lle
dont nous venons de parler ; la fécondé eft prife
de la fable & du deffein du poète ; la troifième
confifte à former le noeud , de telle forte que le
dénouement en foit une fuite naturelle. V* C a t a s t
r o p h e & D é n o u e m e n t .
Dans le poème dramatique , l’Intrigue confifte
à jeter les fpedateurs dans l ’incertitude fur le fort
qu’auront les principaux perfonnages introduits dans
la fcène ; mais pour cela , elle doit être naturelle,
vraifembiable, & prife , autant qu’il fe peut , dans
le fond même du fojet. i°. Elle doit être naturelle
& vraifembiable : car une Intrigue forcée ou
trop compliquée , au lieu de produire dans l ’efprit
ce trouble qu’exige l ’adion théâtrale , n’y porte
au contraire que la confofion & l’obfcuriié ; &
c’eft ce qui arrive immanquablement, lorfque le
poète multiplie trop les incidents ; car ce n’eft
pas tarit le furprenant & le merveilleux qu’on doit
chercher en ces occafîons , que le vraifembiable :
or rien n’eft plus éloigné de la vraifemblance
que d’accumuler dans une ad ion, dont la durée
n’eft tout au plus fuppofée que de vingt - quatre
heures , une foule d’adions qui pourroient à peiné
fe paffer en une femaine ou en un mois. Dans
la chaleur de la repréfentation , ces forprifes multipliées
plaifent pour un moment: mais à la dit-
euffion, on font qu’elles accablent Fèfprit, & qu’au
fond le poète ne les a imaginées que foute de
trouver dans fon génie les reffoarces propres à
foucenir l ’adion de fa pièce par le fond même de
fa fable. De là tant de reconnoiffances , de dégui-
fements , de foppofitionsx d’état dans les tragédies
de quelques modernes, dont on ne foit les pièces
qu’avec une extrême contention d’efprit. Le poète
dramatique doit à la vérité conduire fon fpedateuc
à la pitié par la terreur , & réciproquement à la
terreur par la pitié ; il eft encore également vrai
que c’eft par les larmes , par l ’incertitude , par
l’efpérance, par la crainte , par les forprilès , 8c
par l’horreur , qu’il doit le mener jufqu’à la ca-
taftrophe : mais tout cela n’exige pas une Intrigue
pénible & compliquée. Corneille 8c Racine par
exemple, prodiguent - ils à tout propos les. incidents
, les reconnoiffonces, &les autres machines
de cette nature, pour former leur Intrigue ? L ’action
de Phèdre marche fans interruption , & roule
for le même intérêt , mais infiniment fi mple ,
jufqu’au troifième aéte , où l ’on apprend le retour
de Théfée. La préfence de ce prince & la prière
qu’i l foit à Neptune , forment tout le noeud 8c
tiennent les ‘ efprits en fofpens. II n’en fout pas
davantage pour exciter Fhorreur pour Phèdre, la
crainte pour Hippolyte , & ce trouble inquiétant
dont tous les coeurs font agités dans l’impatience (
de diçouyrj.r ce qui doit arriver. Dans Àchalie f
le fecret du grand prêtre fur le deffein qu’i l a
formé de proclamer Joas roi de Juda , l ’empref-
femenc d’Athalie à demander qu’on lui livre cet enfin.
inconnu-, conduifent & arrêtent comme par degrés
l ’action principale , fans qu’i l foit befoin de recourir
à l ’ extraordinaire & au merveilleux. On
verra de même dans C in n a, dans Rodogune , 8c
dans toutes les meilleures pièces de Corneille ,
que l ’Intrigue eft auffi finïpie dans fon principe ,
que féconde dans fes, fo ire s .-2°. E lle doit naître
du fond du fojet, autant qu’i l fe peut; car lorfque
la fable o u ï e morceau d’hiftoire que lo n t r a ic e ,
fournie naturellement les incidents & les obftacles
qui doivent contrafter avec Faétion principale ,
qu’e ft-il befoin de recourir à des épifodes , qui ne
font que la compliquer ou partager 8c refroidir
l ’intérêt ? ( L’abbé Mallet. )
I n t r i g u e . Dans l ’aétion d’un Poème , on entend,
par Y Intrigue , une eombinaifon de circoiiftances
& d’incidents, d’intérêts & de caractères , d’où résultent
, dans l ’attente de l ’évènement, l ’incertitude,
la curiofité, l ’impatience , l ’inquiétude , &c.
L a marche d un Po èm e , quel qu’i l foit , doit
être celle de la nature , c’ eft à dite , telle qu’i l
nous foit facile de croire que les chofos fe font
paffées comme nous les voyons. O r dans la nature,
les évènements ont une fu ite , une lia ifo n , un
enchaînement ; X In tr ig u e d’un Poème doit .donc
être une chaîne dont chaque incident foit un anneau.
Dans la Tragédie ancienne , l ’Intrigue étoit peu
de chofe, Ariftote divife la fable en quatre parties
de quantité : le prologue , ou l ’expofoion ; i ’épi-
fod e, ou les incidents ; l ’exode , ou la conclufion ;
& le choeur que nous avons fopprimé , otiofus cu-
rator ferum. I l parle du noeud & du dénouement ;
mais le noeud lie l ’occupe guères- I l diftingue les
fables Amples • & les fables implexes. I l appelle
Jimpies, les aétions q u i, étant continues & unies ,
finiflenc fans reconnoiffance & fans révolution. Il
appelle implexes , celles qui ont la révolution
ou la reconnoiffance , ou mieux encore toutes les
deux. O r la feule règ le qu’i l preferive, à l ’une &
à l ’autre efpèce de fab le, c’eft que la chaîne des
incidents foit continue ; qu’au lieu de venir l ’u n ,
après l ’autre , ils naiffent naturellement les uns
des autres, contre l ’attente du fpeftateur , & qu’ils
amènent le dénouement : & en effet, dans fes principes
i l n’en foliole pas davantage , ’ püifqù’i l ne
demandoit qu’un évènement qui laifsât le fpeéta-
teur pénétré de terreur & de compaflion. C e n’eft
donc qu’au dénouement qu’i l s’attache. Mais quel
fora le pathétique intérieur de la fable? C ’eft ce qui
l ’inréreffe peu.
- O n voit donc bien pourquoi , for le théâtre des
grecs , la fable n’ayant à : produire qu’une catastrophe
terrible & touchante , elle pouvoir être fi
fim p le ; mais cette fimplicité qu’on nous vante,
H étoit au fond que le vide d’une .action ftérile.de
fo nature. En e f fe t , la caufe des évènements étant
indépendante des perfonnages , antérieure à l ’aétion
mêm e, ou fuppofée au dehors, comment la fable
auroit-elle pu donner lieu au contrafte des caractères
& au combat des partions ?
Dans Y Q & .d ip e , tout eft foit avant que l ’aétion
commence. Laïus eft mort; OEdipe a époufé Jo-
cafte : i l n’a p lu s , pour être malheureux, , qu’ a
fe reconiioître inceftueux & parricide. Peu à peu le
v o ile tombe, les faits s’éclairciffent ; OEdipe eft
convaincu d’avoit accompli l ’o rac le , 8c i l s’en punit.
V o ilà le plan du chef-d’oeuvre des grecs. Heureu-
fement i l y a deux crimes à découvrir ; & ces
éciairciffements, qui font frémir la nature, occupent
& rempliffem la fcène. Dans l ’Hé cube, dès
que l ’ombre d’A ch ille a demandé qu’on lui immole
Polixène , i l n’y a pas même à délibérer ; Hécube
n’a plus qu’à fe plaindre, & Poiixène n’a plus
qu’à, mourir. Auffi le p o è te , pour donner à la
pièce la duree preferiçe, a-t-il été obligé de recourir
à l ’épifode de Poiidore. Dans Y Iphigénie
en Tauride , i l eft décidé qu’Orefte mourra ,
même avant qu’i l arrive ; fa qualité d’étranger foit
fon crime : mais comme la pièce eft imp lex e, la
reconnoiffance prolongée remplit le vide & fupplée
à Faction.
Gomment donc les grecs , avec un évènement
fatal & dans leque l le plus fouvent les perfonnages
n’étoient que paffifs, trouvoient-ils le moyen
de fournir à cinq aftes ? L e voici : i ° . on donnait
for leur théâtre piufieurs tragédies de fuite dans le
même jour ; Dacier prétend qu’on en donnoit ju f qu’à
feize. .2°. L e choeur occupoit une partie du
temps, & ce qu’on appelle un a été n’avoit befoin
que d’une fcène. 30. Des plaintes, des harangues,
des defçriptions , des cérémonies, des déclamations,
des difputes philofophiques ou politiques ache-
voienc de remplir les vides ; & au lieu de ces
incidents qui doivent naître les uns des autres &
amener le dénouement , l ’on entreméloit Faction de
détails épifodiques, & fuperfliis. L ’ O r e f ie d’Euripide
va donner une idée de la conftruétion de ces
plans.
Orefte , meurtrier de fa mère & tourmenté par
fes remords , paroît endormi fur la fcène ; Éleétre
v e ille auprès de lui ; furvient Hèlène , qui gémit
for les malheurs de-fa famille ; O re fte, après un
moment de repos , s’éveille & retombe dans fon
égarement ; Éleétre tâche de le calmer; le choeur
fe joint à e lle & conjure les furies d’épargner ce
malheureux prince; V o ilà le premier aéte. Dans
le fécond , Orefte implore la protection de Mé-
nélas - contre les argiens, déterminés à le foire
p é r ir ; arrive Tindare, père de Ciytemneftre, qui
accable Orefte de reproches; Orefte fe défend 8c
preffe de nouveau Ménélas de le protéger ; mais
celui-ci ne lui promet qu’une ti mide & foible en-
tremife auprès de Tindare & du peuple. Pvlade
arrive , & plus courageux ami, jure de le défendre
& de le délivrer, ou de mourir avec lui. Cet acte