
nouvelles jetées ou de nouvelles combmaifons
Aidées en impofent la nécefiué , & forcent de
■ recourir a la Langue du peuple auquel on eft
redevable de ces nouvelles lumières: & c’ eft ainfi
que le nom de la bouffole a paffé chez tous les
peuples qui en connoillent i ’ufage , & que l ’orfoinc
italienne de ce mot prouve en même temps à qui
1 univers doit cette découverte importante, devenue
aujourdhui le lien des nations les plus éloignées,
in f in les mo ts font dans une mobilicéperpétuelle. bien
reconnue & bien exprimée par Horace ( ibid. 7 0 . )
M u l t a r en a fe en tu r q uoe jam c t c id e r c ; ca d en tq u e Quoe n u n e fu n t in h o n o r e v o c à b u la ,! f l v o le t u fu s ,
Quem penesobitrium c jl, & ju s , & norme, lâqumii.
1 ° . L a queftion du mérite refpeétif des Langues
j d“ deSre f fi préférence q u e lles peuvent pré&n-
dre le s unes fur les autres , ne peu: pas fe réfoudre
par une dec.fion fimple & précife. 11 n’y a point
d idiome qui n ait fon mérite , & qui nc puiffe ,
g S ? •?CT rePC7 devenir P«®rable d tou ï autre.
Amh , | eft neceffaire 1 pour établir cette folution
d r r f / 0 en’ e‘" S,.f° lld,CS’ de difti‘W les diverfes
* n oe , ° " J-,0“ £e trou v e, & les différents
raports fous lesquels on envifage les Langues.
i a Iimple enonciation de la penfée eft le ore-
tnier but de la p a ro le , & l ’objet commun de tous
le o V ? } ” “ > , c donc Ie premier raport fous
leque l i l convient ici de les envifager , m u rp o fe r
t S . f r,nClpeS, ra‘ fd,nnJaUes f t t J t j queftion dont i l 5 agit. O r i l eft évident q u a cet égard i l n’y a
point de Lairgue qui n’ait toute la perfeftion poffi-
ble & neceffaire a la nation qui la parle. Une
L a n g u e , -je l a i déjà d i t , eft la totalité desufages
propres a une nation pour exprimer les penfées
par la voix ; & ces ufages fixent les mots & la
lyntaxe. Les mots font les lignes des idées , &
e^ S’ der manière qu’une nation for
mec & diftinguee par fon idiome j ne faaroit fait,
1 acquifition d’une nouvelle idee, fans faire en mêm,
temps ce lle d un mot nouveau qui la repréfente
fi elle tient cette idée d’un p e îp le voifin , eü<
en tirera de meme le figne vocal , dont tout ai
plus e lle réduira la forme matérielle à i ’analogit
de on langage ; au lieu dtp a f io r elle dirapafteur
au lieu d embaxada, avibaffa.de ; au lieu de batten
t o t r e , & c : fi ce ft de fon propre fonds quelle tirs
la nouvelle idée ce n’eft peut-être que ?e réfui“ '
ée quelque combinaifon des anciennes , & voila la
toute tracee pour aller jufqu’à la formation du mol
qui en fera le t y p e \puijfance fe dérive de p u isa n t ,
comme 1 idée abftraite eft prife dans l ’idée^ con-
a e t e , p a ra fa i eft compofé de parer ( garantir) ,
de ce uieu lle eft l é
relultat de la combinaifon des idées féparées de l ’aftre
qui darde des rayons brûlants, & d’un obftade qui
puilTe en parer les coups. I l n’y aura donc aucune
idee connue dans une nation qui ne foit défignée
par un mot propre dans la Langue de cette nation :
* comme tout mot noliveau qui s’y introduit, y
prend toujours l ’empreinte de l ’analogie nationale,
M clL le féeau néceffaire de fa naturalifation ; i l
elt aufli propre que les anciens à toutes les vues
de la lyntaxe de cet idiome. A in f i, tous les hommes
qui compofent ce peuple trouvent, dans leur Lan~
gue y tout ce qpi eft néceffaire à l ’expreffion de
toutes les penlées qu'il leur eft pofïïble d'avoir ,
pu ilquils ne peuvent penfer que d’après des idées
connues. C e la même eft l a preuve la plus immé-
diate & la plus forte de la néceftité où chacun e f t ,
d etudier fa Langue naturelle par préférence à
tout autre , parce que les befoins de la communication
nationale lont les plus urgents , les plus
univerfels, & les plus ordinaires. S i nefeiero vïrtit-
tem vocis ; ero , ei cui Loquor, barbants , & qui
loquitury mihi barbarus. ( I . Corinth, x j v r i . )
, veut porter fes vues au delà de la fimple
enonciation de la penfée , & envifager tout le parti
que 1 art peut tirer dt la différente conftitution des
Langue s y pour flatter l'o reille & pour toucher
le coeur, auflï bien que pour éclairer l'efprit 3 i i
faut les confiderer dans les procédés.de leu r s . conf*
tmârion analogue ou tranfpofitive : l ’hébreu & notre
françois fuivent le plus fcrupuleufement - l'ordre
analytique j le grec & le latin s'en écartoient avec
une liberté fans bornes ; l'allemand, l'anglois , 1 e s pagnol
, & l ’italien tiennent entre ces deux extrémités^
une efpece de milieu , parce que les inverfîons-
qui y font admifes font déterminées à tous égardâ
par les principes mêmes de la conftitution propre
de chacune de ces Langue s. L'auteur de la Lettre
fu r Les fourd s & m u e ts , envifageant les Langue s
fous cet afpeét, en porte ainfi fon jugement {pag*.
1 3 5 ) : « L a communication de la penfee étant l'ob je t
» principal du langage , notre Langue eft de toutes
>> l'es Langues la plus châtiée , la plus e x a d e , 8s
o la plus eftimable , c e lle , en un m o t , qui a retenti
»> le moins de ces négligences , que j'apellerois-
» volontiers des reftes de la balbutie des premiers
» a^es ». Cette exprefïîon eft confequente aufyftême
de 1 auteur fur 1 origine des Langues : mais ce lu i
que 1 on adopte dans cet article , y eft bien oppofe j,
& feroit plus tôt croire que les inverfîons, loin d'être
des reftes de la. balbutie des premiers â g e s ,, fon t
au contraire les premiers effais de l'art oratoire-
des fiècles poftérieurs de beaucoup â la naiffancé
du langage 3 la reffemblance du nôtre avec l'hébreu,,
dans leur marche an a ly tiqu ed o n n e à cette con—
je&ure un degré de vraifemblance qui mérite quelque
attention, puifque l'hébreu tient de bien près
aux premiers âges. Quoi qu'il en foit , l ’auteur
pourfuit ainfi : « Pour continuer le parallèle fans
» pa rtia lité, je dirois que nous avons gagné à n'âvoir
» point d’inverfions ( ou du moins à ne les avoir ni
trop hardies ni trop fréquentes ) , de la netteté , de
» la clarté ,. de lapréciuon*, qualités effencielles au
» difeours ; & .que nous y avons perdu do la chaleur,
» de l'éloquence, & de l'énergie. J’ajouterois volon-
» tiers' que la marche didactique & ré g lé e , à laq u e lle
» notre Langue eft affujettie , la rend plus propre
» aux fciences ; & q u e , par les tours & les Inverfîons
» q u e le g re c , le la t in , I ita lien , & lan g io is le
» permettent , ces Langue s font plus avantageufes
»> pour les Lettres : que nous pouvons mieux qu'au-
» cun autre peuple faire parler l'e fp r it , & que le
» bon fens .choifiroit la Langue françoife 3 mais que
» l ’imagination & les pallions donneroient la pré-
» férence aux Langues anciennes & à celles de nos
»> voifins : qu’i l faut parier françois dans la fociéte
» & dans les écoles de philofophie ; & g r e c , latin ,
» anglois, dans les chaires & liir les théâtres : que
» notre Langue fera ce lle de la vérité , . • • & que
» la grèque , la la t in e , & les autres feront les
» Langues de la fable & du menfonge. L e françois
» eft mit pour inftruire , éclairer , convaincre j le
» grec , le la t in , l'italien , & P an g lo is, pour per-
» luader , émouvoir, & tromper : pariez g rec , latin,
» italien au peuple 3 mais parlez françois au fage ».
Pour, réduire ce jugement à fa jufte valeur ,
i l faut feulement en conclure que les Langues,
tranfpofitives trouvent dans leur génie plus de
reffources pour toutes les parties de l'art oratoire
j & que celui des Langue s analogues les
rend d’autant plus propres à i'expoficion nette &
précife de la vé r ité , qu'elles fuivent plus ferupu-
leufement la marcher analytique de l'efprit. L a
chofe eft évidente en f o i , & l'auteur n'a voulu rien
dire de plus. Notre marche analytique ne'nous ôte
pas fans reffource la chaleur, l ’éloquence , l ’énerg
ie j elle ne nous ôte qu'un moyen d’en mettre
dans nos difeours : comme la marche tranfpolîtive
du latin , par exemple , l'expofe feulement au danger
d'être moins c la i r , fans lui en faire pourtant
une néceftité inévitable. C'eft dans la même lettre
( P a§ * 2-35» ) , que je trouve la preuve ae l'explication
que je donne-au texe que l ’on vient de voir.
« Y a -1 - i i quelque eara&ère , dit l'au teu r , que
» notre Langue n’ait pris avec fuccès ? E lle eft:
» folâtre dans Rabelais , “naïve dans la Fontaine
» & Brantôme, harmonieufe dans Malherbe & Flé-
» ehièr , fublime dans _ Corneille & Bofîuet 3 que
» n'eft-elle point dans Boileau , Racine , V o lta ire ,
» & une foule d'autres écrivains en vers & en profe ?
» Ne nous plaignons donc pas : fi nous favons nous
» en fervir , nôs ouvrages feront aufli précieux pour
» la poftérité , que les ouvrages des anciens le font
» pour nous. Entre les mains d'un homme- ordi-
» naire , le grec , le latin , l'anglois , & l ’italien
» ne produiront que des chofes communes j le fran-
» çois produira des miracles fous la plume d’un
» homme de génie. En quelque Langue que ce
» foit , l ’ouvrage que le génie foutient ne tombe
» jamais ». Voye\ A bondance.
Si l ’on envifage les Langue s comme des inftru-
ijnents dont la connoiffance peut conduire à d’autres
lumières 3 elles ont chacune leur mérite-, & la préférence
des unes fus les autres ne ..jfeut fe décider
. que par la nature des vues que l'on fe propôfe ou
des befoins où l'on eft.
L a Langue hébraïque & les autres Langue s
Mentales qui y ont rapport^ comme la chaldaïq
u e , la fyriaque , l ’arabique , & C , donnent à la
Th éo lo g ie des fecours infinis , par la connoiffance
précife du vrai fens des textes originaux de nos
livres faints. Mais ce n’eft pas là le feui avantage
qiie l ’on puiffe attendre de l’étude de la Langue
hébraïque : c’eft encore dans l ’original facré que
l ’on trouve l ’origine des peuples , des L a n g u e s ,
de l'idolâtrie , de la Fable 3 en un mot les fondements
les plus furs de l'Hiftoire , & les clefs les
plus raifonnables. de la Mythologie. I l n'y a qu’a
voir feulement la Géographie Jacrée de Samuel
Bochart, pour prendre une haute idée de l’ immenfité
de l ’érudition que peut fournir la connoiffance des
Langue s orientales.
L a Langue grèque n’eft guère moins utile à la
Th éo lo g ie , non feulement à caufe du texte original
de quelques-uns des livres du Nouveau Tefta -,
ment , mais encore parce que c'eft l'idiome des
Chryfoftomes, des Bafîle s, des Grégoires de N a -
zian z e, & d’une foule d’autres Pères dont les oeuvres
font la gloire & l ’édification de l ’Ég life : mais
dans quelle partie de la Littérature cette B e lle
Langue n'eft-elle pas d’un ufage infini ? E lle fournit
des maîtres & des modèles dans tous les genres 3
Poéfie , Éloquence, Hiftoire , Philofophie morale ,
Phyfique , Hiftoire naturelle, Médecine , Géographie
ancienne , &c. & c’eft avec raifon qu’Erafme
( EpiJL lib. X ) dit en propres termes : H o c unum.
experius video , :nuLlis in litteris nos ejfe aliquia
fin e græcitate.
L a Langue latine eft d'une néceftité indifpenfa-
ble 3 c’eft ce lle de l ’Égiife catholique , & de toutes
les Écoles de la chétienté , tant pour la Philofophie
. & la Théologie., que pour la Jurifprudence & la
Médecine : c’eft: d ailleurs , & pour cette raifon
même , la Langue commune de tous les favants
de l ’Europe , & dont i l feroit à fouhaiter peut-être
que l ’ufage devînt encore plus général & plus
étendu , afin de faciliter ‘davantage la communication
des lumières refpe&ives des diverfes nations
qui cultivent aujourdhui les fciences :• c a r , combien
d'ouvrages excellents en tous .genres , de la
connoiffance defquels on eft: pr iv é , faute d'entendre
les Langue s dans lefquelles ils font écrits ?
En attendant que les favants foient convenus entre
eux d'un langage de communication , pour s’épargner
refpeftivenient l ’étude longue , pénible, & toujours
infufHfante de plufîeurs Langue s étrangères 3
i l faut qu'ils-ayent le courage de s’appliquer à ce lles
qui leur promettent le plus de fecours dans les
genres d'étude qu'ils ont embraffés par goût ou
par la nécefïité de leur état. L a Langue allemande
a quantité de bons ouvrages fur le Droit public ,
fur la Médecine & toutes fes dépendances , fur
l'Hiftoire naturelle, principalement fur la Métallurgie.
L a Langue angloife a des riche (Tes im -
menfes en fait de Mathématiques , de Phyfique , &
de Commerce. L a Langue italienne offre le champ
le plus vafte à la belle Littérature, à l ’étude des
Arts & à ce lle de l ’Hiftoire.. Mais la L a n g u e
françoife, malgré les déclamation*de ceu? qu* ea