
» cherchent à Fenvi Ton alliance «. U n autre
Hymne à la même déeffe eft employé tout en
entier à peindre Tes amours avec Anchife, & les
couleurs n’y font que trop affonies au fujet.
Les Hymnes qui s’adreflfent à Mercure , roulent
communément fur fon adreffe inimitable a dérober.
« Vous n’étiez encore qu’enfant, dit Horace,
» dans Y Hymne qu’i l lui adreffe , lorfque vous
» dérobâtes fi finement les boeufs d A p o llon ; i l eut
» beau prendre un ton menaçant pour vous forcer
» â le s rendre , i l ne put s empêcher de rire en
» fe voyant fans carquois ». 11 eft pourtant vrai que les. Hymnes poétiques
n e font pas toujours de ce caractère. O n trouve
quelquefois, & principalement dans ceux de C a lli-
maque, des traits propres à infpirer la vertu, ou
Je refpeél pour les dieux. Si dans 1 Hymne de
ib ian e , cet aimable poète- décrit les plaiiirs & les
amufements de la déeiTe , i l peint aufli, mais d une
manière vive & touchante, le bonheur du ju fte, 8c
le malheur des méchants. S’i l dit ailleurs que Jupiter
prit naiffance en Arcadie ; i l ajoute incontinent
que ce dieu tire de lui feul toute fa puiffance , qu i l
eft le maître & le juge des rois , & qu’i l diftribue
à fon gré les couronnes & les Empires.
11 eft même arrivé que la plupart des Hymnes
poétiques , ceux de Callimaque fürtout, paffèrent
dans le culte public. O n les chantoit dans les fo-
lennités durant la cérémonie du l'acrifice , & dans
les veillées qui précédoient ces folennités, pendant
que le peuple s’affembloit. L ‘Hymne de C a llimaque
pour Jupiter, dont nous venons de parler,
fut chante tandis qu’on offroit au dieu le facrifice
ou les libations ordinaires, &c. L ’ Hymne intitule
Perv ig ilium V e n e r is , & qu’un magiftrat illuftre
dans les lettres, M. Bouhier , raporte au fiècle des
premiers C é fa r s, femble être un de ces cantiques
que l ’on chantoit aux veillées de Vénus.
O n fait que ceux qui chantoiénr les Hymnes
s’a p p e lle n t Hymnoiles ; & que ceux qui les com-
pofoient fe nommoient Hymnographes. Voye\
H ymnodes & H ymn ographes.
J’entends par Hymnes philofophiques ceux que
les philofophes ont compofés fuivant leur fyftcme
religieux , non que les philofophes enflent un
culte particulier différent du culte p o p u la i r e i ls
fe conformoient au peuple dans la pratique , &
venoient. par bienféance ramper avec lui aux pieds
des idoles ; mais ils différoien: bien du peuple par
la croyance. Ils reconnoifloient un Dieu fuprême,
foupce & principe de tous les êtres. Plufiéurs admettaient
avec ce Dieu fuprême des êtres fubal-
ternes-, qui fefoient mouvoir les refforcs de la nature
& en régloient les opérations. Pour les aventures
des dieux poétiques , les idoles , & les apo-
théofes, ils les metcoient au rang des fictions iniou-
tenables.
L e Dieu fuprême eft donc en général l ’objet
des Hymnes philofophiques ,* i l eft feulement queluefois
déguifé fous le nom de Jupiter, ou^ du
o le il ; & quelquefois caché fous le voile de 1 allégorie.
Sa toute - puiffance , Ion immenfi.é , fa
providence , & fes autres attributs, en font la matière
ordinaire.
Nous aurions un exemple ancien & précieux d un
Hymne philofophique ample , fi Y Hymne , que
les pères de l ’égiife défenfeurs de notre f o i ,
S. Julien , S. Clement , Eu lebe , & autres , ont
cité fous le titre de P a lin o d ie , étoit véritablement
d’Orphée. Je dis que cet exemple feroit précieux,
car i l furprend pour le fond des chofes, & la grandeur
des images. « T e l eft (dit.cet H ym n e) 1 Etre
» fuprême , que le ciel tout entier ne fait c^ue fa
» couronne ; i l eft aflis fur fon trône entouré d anges
» infatigables; fes pieds touchent la terre ; de fa-
» droite , i l atteint jufqu’à -l’extrémité de l ’Océanj à
» fon afpeôt, les.plus hautes montagnes tremblent,
» & les mers friflonnent dans leurs profonds abi-
» mes». Mais la critique range cette pièce parmi
les fraudes pieufes qui ne forent pas inconnues aux
premiers fiècles du chriftianifme.
Si Y Hymne qu’on vient de lire appartenait a.u
péripatéticien Ariftobuie , comme on le c ro it , i l
eft encore moins ancien qu’un autre Hymne fem-
blable , que Stobée nous a conlèrve, 8c que l ’on
attribue à Cléanthe , fécond fondateur du Portique ;
c’ eft d’ailleurs un des plus beaux monuments qui
nous foit rëfté en ce genre", le leéteùr en va
juger.
« O Père des dieux ( dit Cléanthe ) ! vous qui
» réunifiez plufiéurs noms , 8c dont la vertu eft
» une & infinie ; vous qui êtes l ’auteur de cet uni-
» vers -, & qui le gouvernez fuivant les confeils de
» votre fageffe; je vous faine , ô-Roi tout-puiffant,
» car vous daignez nous permettre de vous invo-
» quer. Vous ferez , ô Jupiter , la matière de
» mes louanges , & votre fouveraine puiffance fera
» le fujet ordinaire de mes cantiques. Tout plie
» fous votre empire ; tout redoute les traits donc
» vos mains invincibles font armées ; fans vous rien
» n’a été f a i t , rien ne fe fait dans la nature : vous
» voulez les biens & les maux, félon les confeils
» de votre lo i éterne lle.,Grand Jupiter , qui faites
» entendre votre tonnerre dans les nues y daignez
» éclairer les foibles humains ; ô:ez-leur cet efprit
» de vertige qui les égare ; donnez-leur une por-
» tion de cette fageffe avec laquelle vous .gou-
» vernez le monde. Alors ils ne chériront d autre
» occupation que ce lle de chanter éternellement
» cette lo i univerfélle qu’ ils méconnoiflent ». y
T e l eft le caractère des Hymnes philofophiques
; je recueille tout ce détail en deux mots. ■
Les Hymnes théurgiques n’écoient propres qu’aux
initiés; & ils ne renferment, avec des invocations
fingnlières , que les attributs divins, exprimés par
des noms myftiques.
Les Hymnes poétiques ou p o pu la ir es , en général
, fefoient partie du culte public , & ils roulent
fur les aventures fabuleufes îles dieux.
Enfin IcsHymnes philofophiques ou n’étoient point
chantés, ou ils l ’étoient feulement dans les feftins
décrits par Athénée; & iis fon t, à proprement
p a r le r , un hommage fecret que les philofophes
ont rendu a la divinité.
Je laiffe à des mains favantes le foin de prouver
les avantages qu’on peut retirer des différentes ef-
pèces Y H y m n e s qui ont. .pafle jufqli’à nous. I l me
iûffir de dire que les H y m n e s t h é u r g iq u e s peuvent
répandre de là lumière fur les initiations ; que
les H y m n e s p o é t i q u e s d’Homère & dé Callifnâquè
donnent , au moins pour les temps où ils-1 forent
èompofés, une idée de l a croyance populaire des
anciens' par raport à la religion publique ;■ enfin -,
que les H y m n e s - p h i l o f o p h i q u e s font dé quelque
fccours pour nous infiruire de la oroÿane-ê religieufè
des philofophes. J’ajoute que les H y m n e s de C a llimaque
, de Pindare f d’Horace , & d’autres-poètes ,
outre des dogmes & des üfag.es relig ieu x, renferment
encore des traits pour l ’Hiftoire profane -,
donc les littérateurs vraiment éclairés (auront toujours
habilement profiter.
Dans notre ufage moderne, nous entendons par
H y m n e ( fi f. ) une ode, un petit poème eonfacréà la
louange de Dieu , ou des myftères. Mais nous
avons très-peu d’hymnographes recommandables*
Santeuil s’eft quelquefois diftingué dans,cette carrière
, car toutes fes H y m n e s ne font pas également
bonnes ; une. vue d’intérêt en a gâté la plus grande
partie , & les connoiffeurs fentent bien que les inf-
pirations de fa mufe étoient Couvent réglées par le
profit q u e lle en retiroic. Les odes facrées , de
Rouffeau nous offrent tout ce que nous,.avons de
plus parfait en ce .genre. Pour les H y m n e s r im é e s
des douze & treizième fièc le s, ils font le fceau de
la barbarie; ce n’étoit pas fur ce ton qu’Horace,
chantoit les jeux féculaires. { L e chevalier DE Ja u -
COURT.)
( ^ L ’ H y m n e facrée, dans fafu b limité, e f t l ’ex-
preifion folennelle de l ’enthoufiafme de tout un
peuple , le concert & l ’accord d’une multitude
d’âmes qui s’élèvent à D ie u , foit en admiration
des . merveilles de la nature , foit en adoration
des prodiges de la grâce , foit dans un tranfporc
unanime de ieconnoiilan.ce & d’amour , ou dans
un mouvement de crainte , d’étonnement, & de
refjpeft.
Ainfi, dans .toutdoit, être en fentiments
& en images.^, L ’élévation en eftTe caraélère : car
toutes le s penfées, toutes lés relations en font de
l ’ homme vau créateur ; 8c ce n’eft pas en difant de
l ’Etre fuprême , comme dans Y H y m n e attribué à
Orphéé.,qu’ri f o n a f p e c l l e s p l u s h a u t e s m o n ta g n e s ,
t r e m b l e n t , & q u e l e s m e r s f r i f f o n n e n t d a n s l e u r s
p r o f o n d s a b îm e s ; ce n’èft pas non plus en lui
difanc, comme dans Y H y m n e attribué à Cléanthe,
V o u s v o u le \ l e s b i e n s & l e s m a u x d a n s l e s
c o n f e i l s d e v o t r e l o i ; ce n’eft pas, dis-je , ainfi
qu’on louera FÊternel : car i l ne réfiilte de ce ga,-
ümàthias orient«! ni une haute idée de fa puiffancei
ni une haute idée de fa juftice. L a goutte d’eaiï
de l ’O c é a n , le grain de fable des montagnes, ne
font rien en parfont de celui qui d’un louffle a
créé les mondes ; & dire de lui qu ’i l a voulu le s
biens. 6 lé s maux fé lon les. confeils de f a loi ÿ
c’ eft le louer comme un flatteur peut louer un
tyran,
L e fiiblime n’eft pas difpenfé d’être raifonnable;
& lé-vrai fublinte eft celui qui eft â la fois fi
fimple & fi fràpant, qu’i l faint tout d’un coup &
fans peine tous les efpritsv Tedoi t être celui de
Y Hymne y car l ’Hymne eft faite pour la multitude;.
& en même temps qu’elle do.it être re li-
g ieu fe , elle doit êrré morale : o r , ’e llé fera l ’un
8c l ’autre , fi e lle donne de l ’Etre fuprême l ’idée
qu’on, en doit avoir , pour l ’âdoier avec crainte &
avec amqur ; fi , en louant les. faints , e lle eft la
leçon la plus touchante des vertus qu’ils ont pratiquées;
fi , en célébrant les myftères , e lle y fait
voir autant de motifs ci’amour 8c, de reconnoiffancé
que d’objets' de culte 8t de foi.
Les anciennes Hymnes de l ’Ég life ont le mérite
de: la fimplicité , mais n’ont que. celui-là. ( I l faut en
excepter quelques profes qui ont une beauté réelle ,
comme le D ie s irce , 8c le H e n i, fa n c ie S p i-
ritus. ) •
Le s nouvelles Hymnes donnent pour la pluv
part dans l ’excès contraire à la fimplicité : elles
font brillantées , ornées jufqu’au lu x e , pleines d’imagination
, dénuées de fentiment , & en deux
mots , élégantes & froides. Les auteurs penfoient
à Horace en les compofant ; c’ eut été à D a v id , &
fiirtout â Moïfe qu’ i l eut fallu penfer.
L a fameufe Hymne de Santeuil, Stup ete agente s ,
eft un amas d’antitliêfes qui ne répandent ni
chaleur ni lumière ; & le compliment à la
V ierg e , '
Inirare fanchim quid pavebas,
Fada Dei priùs ipfa templum ?.
eft fpirituel ,. mais déplacé : ni l ’enthoufiafme ni
la piété n’ont de cet efpric-là.
Lorfque YHymne n’eft pas fublime , elle doit
être ontlueufe & touchante ; elle doit prendre tour
à tour le caractère de Bofluet dans fes élévations
d’une a me à D ieu , ou celui de Fénelon & de
François de Sales dans leurs oeuvres, myftiques. )
( M. M a r m o r t e l . !
H YM N O D E , fi m. Lirtérat. anc. Chanteur
Y-hymnes'. C ’eft ainfi que les grecs ont appelé ceux
qui cliamoient les hymnes comme ils ont nomme
Hymnographes ceux qui les compofoient. P qy*
H y m NOGFvAPHE.
Les chanteurs d’hymnes ne finrem pas toujours
& dans toutes les oçcafions., de même fexe & d<
même rang. Tantôt c’étoit des filles feulement
comme dans les fêtes de Pallas ; tantôt des choeur
compofés dé jeunes filles 8c de jeunes garçons