
» & du préjugé. Le s organes accoutumés à une ■
•» te lle impreflion en (ont flattés de te lle forte , / :
» qu’une impreflion différente ou contraire les j
» afflige : ainfi, malgré l ’examen &c les dilcuflîons, |
» nous continuons fouvent à admirer ce qu’on nous I
i> a fait admirer dans les premières années de notre • !
» vie 3 & de là peut-être les deux partis, l ’un des
» anciens & l ’autre des modernes. [M.- DU MARS
A I S . )
J’ai quelquefois ouï reprocher à M. du Mariais
-d’être un peu prolixe 3 & j’avoue qu i l étoit pof-
f ib le , par exemple, de donner moins d exemples
de la Métaphore , & de les dèveloper avec moins
d’étendue : mais qui eft ce qui ne porte point envie
fl line fi heureufe p rolixité ? L auteur d un Diétioq-
naire de langues ne peut pas lire cet article de la
Métaphore , fans être frapé de l ’exaétitude étonnante
de notre grammairien, à diftinguer le fens
propre du fens figuré, & à afligner dans l ’un lé
fondement de l ’autre : & s’i l le prend pour modèle j
croit-on que le Dictionnaire qui fortira de fes mains,
ne vaudra pas bien la foule de ceux dont on accable
nos jeunes étudiants, fans les éclairer ? D ’autre p a rt ,
l ’excellente* digreflion que nous venons de voir fur
le goût y n’eft-eile pas une preuve des précautions
qu’i l faut prendre de bonne heure pour former celui
de la Jeunefle ? N ’indique-t-elle pas même ces précautions
? E t un infti tuteur , un p è re 'd e fam ille ,
qui met beaucoup au deflus du goût littéraire, des.
chofes qui lui font en effet préférables, l ’honneur,
la prob ité, la re lig io n , verra-t-il froidement les
attentions qu’exige la culture de l ’e fp r it , fans conclure
que la formation du coeur en exige encore
de plus grandes, de plus fuivies , de plus fcrupu-
leufes ? Je reviens à ce que notre philofophe a
encore fl nous dire fur la Métaphore. ] {M . B e a u -
ZÉE. )
« Remarque fu r le mauvais ufage des Méta-
» phores. Les Métaphores, font défeCtueufes ,
» i° . quand elles font tirées de fujets bas. L e P.
» de Colonia reproche fl Tertullien d’avoir dit que
» le déluge univerfel fut • la ieflive de la nature :
» Ign obilitatis vitio laborare videtur celebris ilia
» Tertulliani Metaphora, quâ diluvium appellat
» naturæ generale lixivium . ( D e arte rhet. )
■ » x°. Quand elles font forcées , prifes de lo in ,
» & que le raport n’eft point afTez naturel, ni la
» comparaifon affez fenfible ; comme quand Théo-
y> p hile a dit : Je baignerai mes mains dans les
p ondes de tes cheveux 3 & dans un autre endroit
» i l dit que la charnue écorche la p la in e. Théo-
» p h i le , ait M. de la Bruyère ( Caracl. chap. j.
» D e s ouvrages de l ’ efvrit) charge fes defcrip-
» tions f s’appefantjt fur les détails 3 i l exagère, i l
» paffe le vrai dans la nature , i l en fait le roman.
p On peut raport.er à la même efpèce les M é j
p taphore's qui font tirées de fujets peu connus.
» 2°. I l faut aufii avoir égard aux convenances
» des différents ftyles. I l y a des Métaphores qui
y, conviennent au- ftyle poétiqu e, qui feroient de-
» placées dans le ftyle oratoire. Boileau a dit ( Oie.
» J u r la p rife de Namur) i
Accourez, troupe favante»
Des fons que ma lyre enfante
Ces arbres font réjôuïs.
» O n ne diroit pas en profe cgi une lyre enfante
» des fo u s . Cette/obfervation a lieu aulli fl l ’égard
» des autres tropes : par exemple , lumen dans le
» fens propre, lignifie lumière 3 les poètes latins
» ont donné ce nom à l ’oe il par Métonymie. ( Voye%
.» Mé t o n ym ie ). Les ieux font l ’organe de la lu -
» miè re , &lont , pour ainfi dire, le flambeau de
» notre corps. Lu cenia corporis tui e jl ociilus
» tuus ( Lu c , xj. 34). Un jeune garçon fort aimable
» étoit borgne j i l avoit une loeur fort belle qui
» avoit le même défaut : on leur appliqua ce diff-
» tique , qui fut fait à une autre oceâfion , fous le
» règne de Philippe I I , roi d E lpagne :
Parve Puer , lumen quod habes concédé forori ;
Sic tu cctçus Amor , fie erit ilia Venus ;
» ou vous voyez que lumen fignifie l ’oeil. I l n’yî»
» rien de fi ordinaire dans les poètes la tin s , que
» de trouver lumina pour les ie u x ; mais ce mot
» ne fe prend point en ce fens dans la profe.
» 40. On peut quelquefois adoucir une Mé-r
» taphore, en la changeant en comparaifon ou
» bien en ajoutant quelque correétif : par exemple,
» en difant pour ainfi dire , f i Von petit- parler
» a infi\ &c. V a n doit être pour q in fid ir e^
» enté fu r la nature 3 la nature foutient l ’art <V
» lu i fe r t de bafe , & V a n embellit & perfectionne
r> la nature..
» 5°. Lorfqu’ i l y a pluficurs Métaphores de
» fuite , i l n’ eft pas toujours necelTaire q u e lle s
» foient tirées exaftement du même fujet , comme
» on vient de le voir dans l ’exemple précédent!
» -enté eft pris de la culture des arbres; fo u t ie n t ,
b bafe font pris de l ’Architeâure : mais i l ne faut
b pas qu’on les prenne de fujets o p p fé s ni que
» les termes métaphoriques dont 1 un eft dit de
b l ’autre, excitent-des idées qui ne pujifent point
b être liées ; comme fi l ’on difoit d un orateur
b c’ e jl un torrent qui s ’ allume , au lieu de dire
» c ’e fl un torrent qui entrains. O n a reproche a
» Malherbe d’avoir dit ( liv. II. V o y e z les objerv,
B de Ménage fu r les poéfies de M a lh e r h ) ,
Prends ta foudre, L o u is , & ya pomme un lion,
b i l fa llo it plus tôt dire, comme Jupiter. _
b Dans les premières éditions du Q d , Chimene
b d ifo it, a{t. l i t , Jfç. 4-
Malgré des feux fi beaux qui rompent ma colère,
b F e u x & rompent ne vont point enfemble : c eft
» une obfsrvatioq de l ’Académie fut les vers du C jd ,
■ ■ - v D a n *
Dans les éditions fuivantes on a mis troublent
» au lieu de rompent; je ne fais fi cette correction
» répare la première faute.
» Ecorce, dans lè^ fens propre, eft la partie
» extérieure des arbres & des fruits , c’eft leur cou-
» verture : ce mot fe dit fort bien dans un fens
» métaphorique pour marquer les dehors, 1 ap-
» parence des chofes. Ainfi, l ’on dit! que les igno-
» rants s’arrêtent à l’écorce , cgx’ils s attachent,
» qu’ï/j* s’amufent a Vécorce. Remarque^ que tous
» ces verbes s’arrêtent , s’attachent s am ufent,
j? conviennent fort bien avec écorce pris au propre :
» mais vous ne diriez pas au propre fondre le -
» corce ; fondre fe dit de la glace ou du métal,
» vous ne devez donc pas dire au figuré fondre
b Vicorce. J’avoue que cette expreffion me paroît
b trop hardie dans une ode dé Rouffeaui'Ç l. III,
B ode 6 ). Pour dire que l ’hiver eft paffé & que les
Jj’Hiver, qui fi long temps a fait blanchir nos plaines ,
N ’enchaîne plus le cours des paifibles ruiffeaifx ; ;
Et les jeunes Zéphyrs, de leurs chaudes haleines,
Ont fondu Vécorce des eaux.
» 6 ° . C h a q u e l a n g u e a d es Métaphores p a r t i -
» c u li è r e s q u i n e f o n t p o in t e n u fa g e d ans l e s a u t r e s
» la n g u e s : p a r e x em p l e , l e s l a t in s d i fo ie n t d’ une
» a rm é e , dextrum & finiflrum cornu ; & n o u s
» d i f o n s , l’aile droite & l ’ aile gauche.
' » I l e f t f i v r a i q u e c h a q u e l a n g u e a fe s M é -
i> taphores p r o p r e s & c o n fa c r é e s p a r l ’ u f à g e , q u e ,
» fi v o u s e n c h a n g e z l e s te rm e s p a r l e s é q u iv a le n t s
» m êm e q u i e n a p p r o c h e n t l e p lu s , v o u s v o u s
» r e n d e z r id i c u l e . U n é t r a n g e r , q u i d e p u i s d e v e n u
» u n de n o s , c i t o y e n s s’ e f t r e n d u c é lè b r e p a r fe s
» o u v r a g e s , é c r iv a n t dans l e s p r em ie r s t em p s de
» fo n a r r iv é e e n F r a n c e fl Io n p r o t e c t e u r , lu i d i f o i t :
» Monfeigneiir, vous ave\ pour moi des boyaux
» de père ; i l v o u l o i t d ir e des entrailles.
V » O n d it mettre la lumière fo u s le boiffeau ,
o p o u r d ir e c a c h e r fe s t a le n t s , l e s r en d re in u t i le s .
» L ’ a u te u r d u P o è m e d e l a M a d e l e in e ( liv. V U y
» p a g . t 1 7 ) , n e d e v o i t d o n c p a s d i r e , mettre le
» flambeau fo u s lem uîd ». ( M . d u M a r s Aï s . )
Q u ’ i l m e f o i t p e rm is d’ a jo u t e r , fl c e s fix r e m
a r q u e s ,, u n f e p t i èm e p r in c ip e q u e je t r o u v e dans
Q u in t i l i s n ( In fl. V I I I , v j ) : c ’ e f t q u e l ’ o n d o n n e
à un m o t u n fe n s métaphorique , o u p a r n é c e f l i t é ,
q u an d o n m a n q u e d u t e rm e p r o p r e ; o u p a r u n e
r a i fo n d e p r é fé r e n c e , p o u r p r é f e n t e r u n e id é e a v e c
p lu s d’ é n e r g ie o u a v e c p lu s d e d é c e n c e : t o u t e M étaphore
q u i n ’ e f t p a s fo n d é e fu r l ’ u n e d e c e s c o n -
f id é r a t io n s , e j l d é p la c é e . îd facimus, aut quia
neceffe eft , aut quia fign ifie antius , aut quia de-
cgntius : ubi n ih il horum p roe fla b it, quod trans-
feretur imprôprium erit.
M a is l a Métaphore y a f fu je t t ie a u x l o i s q u e l a
r a i f o n & l ’ u fa g e d e c h a q u e l a n g u e l u i p r e f e r i v e n t ,
Gr am m . ET L i t t é r a t . Tome IL
eft , non feulement le plus beau & le plus ufite des
trop es, c’en eft le plus utile : i l rend le difeours
plus abondant par la facilité des changements & des
emprunts j & il prévient la plus grande de toutes
les difficultés, en défignant chaque chofe par une
dénomination caraétériftique. Copiam quoque f e r «
monis augetpermutando , aut mutuanîlo quod nofi
habet ; quodque difficillimum e j l , proeflat ne u lli
reinomen deeffe videatury (Quintil. In fl. v i l ly vj).
Ajoutez fl cela que le propre des Métaphores, pour
employer les termes de la traduction de M. 1 abbé
Colin , » eft d’agiter l ’e ip r it , de le tranfporter tout
» d’un coup d’un objet fl un autre ? de le preffer , de
» comparer foudainement les deux idées qu’elles
» préfentent, & de lui caufer, par ces vives & promptes
» émotions , un plaifir inexprimable ». Eoe propter
fimilitudinem transferunt animos & r e ferunt, ac
movent hue Ù illu c ; qui motus co g ita tion is , célérité
r agitants y per f e ipfe deleclat ( Cicer. orat.
n. x x xix, fe u 1 3 4 , & dans la traducl. de l ’abbé
C o l in , ch. x ix ) . « L a ■ Métaphore, dit le père
» Bouhours [M a n . de bien p en fe r , dialogue z ),-
» eft de fa nature une fource d’agréments ; & rien
» ne flatte peut-être plus l ’e fp r it , que la repré-
» Tentation d’un objet fous une image étrangère.
» Nous aimons , fuivant*la remarque d’A r illo te ,
» fl voir une chofe dans une autre 3 & ce qui ne
» frape pas de foi-même furprend dans un habit
» étranger & fous un mafque ». C ’eft la no^e du
traducteur fur le texte que l ’on vient de .voir.
( M . Beauzée. )
(N.) M É T A P L A SM E , f. m. C e mot eft grec :
MsTtt’jrAacTAsV, transformatio ; du verbe ^era-
1rÀaWw , transformo, compofé de la prépofition
fjkirà , trans , & du verbe firaple ttàa<r<rm , for.mo.
C ’eft le nom général que l ’on donne en Grammaire
aux figures de diCtion, c’eft fl d ire, aux
diverfes altérations qui arrivent au matériel des
mots , pour quelque caufe & en quelque façon que
ce fo it , mais néanmoins fous le bon plaifir & avec
l ’autorifation de l ’ulage.
11 y a trois manières générales d’altérer le matériel
des mots5 addition, fouftraCtion,'& changement.
L e Métaplafme par addition fe fait ou-aucom-
me'ncement, ou au milieu , oux à la fin du mot 3
d’où réfultent trois figures différentes, que l ’on
nomme P r o f lh è fe , Epenthèfe, & Paragoge.
Voyei; ces mots.
L e Métaplafme par fouftraCtion produit de la
même manièïé trois figures, qui font l ’Apherèfe ,
la S y n cop e , & Y Apocope. Ùoye\ ces mots.
Enfin le Métaplafme par changement fe fait ,
ou en fefant deux fyilabes d’une feule diphthongue -,
ou en unifiant en diphthongue deux vo ix eonlécu-
tives qui fe prononçoient féparément, ou en troublant
l ’ordre primitif des éléments du ^ mot , ou
en fubftituant un élément fl la place d un autre j
X x x