
En e t fens, un Livre eft diftingué, par la longueur,
d’un imprimé ou d’une f-euiile volante , & d’un
tome ou d’un volume■> comme le T ou t l ’eft de fa
partie ; par exemple ,1’hiftoire de Grèce de Temple
Stanyan eft un fort bon Livre, divifé entrois petits
volumes. -
Ilïdore met cette diftinition entre Liber & C o d e x ,
que le premier marque particulièrement un ouvrage
féparé, fefant feul un tout a p a r t , & que le fécond
lignifie une collection de Livres ou d§écrits. ( Ifid.
Origin. lib-. v I . cap. xiij. ) M. Scipion Maftei
prétend que Codex lignifie un Livre de forme carrée
; & L ib e r , un Livre en forme de regiftre. ( Poyei^
M a ffe i, H i ß . diplom. lib. I I . bibliot. ita liq. t. I l ,
p a g . 244. Poye^ aulïi Saalbach , D e lib. vet.
parag. 4. Reimm.Ideaf y j lem . ant. l ic ie r .p . 130.)
Selon les anciens, un Livre différoit d’une le tt re ,
non feulement par fa groffeur , mais encore parce
que la lettre étoit pliée , & le J^ivre feulement
roulé. ( P o y e\ Picifc. L . ant. tom. 1 1 , p ag. 84.
voc. Libri. ) I l y a cependant divers Livres anciens
qui exiftent encore fous le nom de Lettres : te i eft
VA r t poétique d’Horace. Poye \ Ép itre, L ettre.
. - O n dit un vieux , un nouveau L iv r e , un Livre
grec , un Livre latin ; compofer , lire , publier ,
mettre au jo u r , critiquer un L iv r e ; le titre , la
dédicace, la préface«,, le Corps, l ’index ou la table
des matières , l ’e r r a * d’un Livre. *
Collationner un L i v r e c’eft examiner s’ i l eft
çorreéï, fi l ’on n’en a pas oublié ou tranfpofé les
feuillets , .s’i l eft conforme au manuferit ou à l ’origina
l fur lequel i l a été imprimé. -
Les relieurs difent, plier ou brocher, coudre,
battre, mettre en preffe, couvrir, dorer, lettrer un
Livre.
Une collection confidérable de Livres pourront
s appeler improprement une Librairie : 011 la nomme
mieux Bibliothèque, Un inventaire de L iv r e s î,ait'
à deifein d’indiquer au ieCteur un Livre en quelque
genre que ce fo i t , s’appelle un Catalogue.
Cicéron appelle M. Caton IJelluo Librorum, un
dévoreur de Livres. G a za regardoit les Livres de
Plutarque & Hermol. Barbaro ceux de Pline ,
comme les meilleurs de tous les Livres. Gentsken,
H iß . philofoph. p a g . 130. Harduïn. P roe fa t . ad
B l in . '
Barthol. ( D e libr. legend. dijjert. I I I , p a g . 66 )
a fait un traité fur les meilleurs L iv r e j des auteurs
: félon l u i , le meilleur Livre de Tertullien
eft fon traité D e p a llio ; de S . Àuguftin, L a c ité
de D ie u ; d’Hippocrate , Coacoe proenotiones ; de
Cicéron , L e traité D e officiis ; d’ Ariftote, D e ani-
malibus ; de G a l lie n , D e ufu partium ; de V ir g
ile , le fixième livre de l ’Énéide ; d’H o ra ce , la
première & la feptième de les Épitres ; de Ca tu lle ,
Coma Berenices ; de Juvenal , la fixième fatire ;
de P lau te , Ÿ E p id icu s } de Théocrite , la vingt
feptième idylle ; de Paracelfe, Ç.hirurgia'; de- Sé-
yénuus, D e a b ç e f f ib u s , £udé, Jes Comoie^-
taires fur la langue grèque ; de Jofeph Scaligér j
D e em en d a tion e temporum ; (je Bellarmin, D t
f ç r ip to r ib u s e c c l e f a j l i c i s ; de Saumaife, E x e r ç i -
ta t io n e s P l in ia n c e ; de V o ifiu s , In j l itu t io n e s ora-
tor ioe ; d’Heinfius, A r i / la r c h u s , f i c e r jd e Cafaubop*
E x e r c i ta t io n e s in -B a r o n ium .
II eft bon toutefois d’obferver que ces fortes de
jugements qu’un auteur porte de tous les autres ,
font fbuvent fujets à caution & à réforme : rien
n’eft plus ordinaire que d’apprécier le mérite de
certains ouvrages qu’on n’a pas feulement lus , ou
qu’on préconife fur la foi d’autrui. ■
I l eft néanmoins néceflaire de cqnnoître par foi-*
même , autant qu’on le p eu t, le meilleur Livre
en chaque genre de Littérature ; par exemple, la
meilleure Logiqu e , le meilleur Dictionnaire, la
meilleure Phyfique, le meilleur Commentaire fur
la B ib le , la meilleure Concordance des évangé-
liftes , le meilleur Traité de la Religion chrétienne
, &c : par ce moyen, on peut fe former une
bibliothèque compofée des meilleurs Livres en
chaque genre. On p e u t , par exemple, confulter
pour cet effet le Livre de P o p le , intitulé Centu
ra celebrium aucîorum , ou les ouvrages des
plus confidérables écrivains & des meilleurs auteurs
en tout genre font expofés ; connoiffance qui conduit
à en faire un bon choix. Hais pour juger de
la qualité d’un Livre , i l faut , félon quelques-
uns , en çonfidérer l ’auteur, la date, les éditions ,
les* traductions, les commentaires , les épitomes
qu’on en a faits , le fuccès , les éloges qu’i l »
mérités , les critiques qu’on en a faites , les' con-
dannations ou la luppreflîon d;ont on l ’a fiétri, les
adverfaires ouïes défenfeurs qu’i l a eus , les continuateurs
, &c.
L ’hjftoire d’un Livre renferme ce que ce Livre
contient ; & c’eft ce qu’on appelle ordinairement
E x t r a it ou A n a ly f e , comme font les journaliftes ;
ou fes acceffoires , ce qui regarde les littérateurs &
les bibliothécaires.
L e corps d’un Livre confifte dans les matières
qui y font traitées; & e’eft la partie de l ’auteur :
entré ces matières i l y a un fujet principal £
l ’égard duquel tout le refte eft feulement aeçef-
foire.
Les incidents acceffoires d’un Livre font le titre ,
l ’épitre dédicatoire ? la préface , les fommaires , la
table des matières , qui font la partie de l ’éditeur,
à l ’exception du titre , de la première page ou dit
frontifpice, qui dépend quelquefois du libraire.
Les fentiments doivent entrer dans la compofi^
tion d’un L iv r e , & en être le principal fondement
; la méthode ou 1 ordre des matières doivent
y régner ; & enfin le ftyie , qui confifte dans le
choix & l ’arrangement des mots, eft comme le
coloris qui doit être répandu fur le tout.
O n attribue aux allemands l ’invention des hiC-
toirès littéraires, comme les jo u r n a u x , les çata-
M m , & autres ©uvrages ©d l ’on rend compte
de$
Jes Livres nouveaux; & un auteut Se cette natio
n ( J e an - Albert fabricius ) ait raoaeftement
que les compatriotes font en ce genre fugu eu r s
a toutes le s autres nations; V o y e i ce quon doit
penfer de cette prétention au mot Journal. Cet
-auteur a donné l ’hiftoire des Livres grecs & la tins
j Wolfius, ce lle des Livres hebreuxj B o ed er ,
■ celle des principaux Livres de chaque fcience ;
Struvius, ce lle des Livres d’Hiftoire , de Lois , & de
Philofophie ; l ’abbé Fabricius , ce lle des Livres de
La propre bibliothèque j Lambecius „ ce lle des L i -
vres de la bibliothèque de Vienne ; L e lo n g , ce lle
-des Livres de l ’Écriture ; Mattaire, ce lle des Livres
imprimés avant 15^0. ( Éroye\ R eimm .Jùbl. acroam.
i n proefa t. parag. 1 , pag. 3 , Bofi ad not.
J c r ip t . ecclef. cap. tv. para g. xiij. p a g . 124 f
f e q . ) Mais à cette foule d’auteurs, fans parler de
la Croix-du-Maine , de Duverdier, de Fauchet ,
de Colomiez , & de nos_ anciens bibliothécaires,
ne pouvons-nous pas oppofer MM. B a ille t , Du p
in , dom C e ll ie r , les auteurs du Journal des Savants
, les journaliftes de Trévoux, 1 abbe Desfon-
laines, & tant d’autres que nous pourrions reven-
tdiquer, comme B a y le , Bernard , Bafnage , &c ?
Brûler un Livre : forte de punition & de flétrif-
fure fort en ufage parmi les romains ; on en com-
mettoit le foin aux triumvirs, quelquefois aux
.préteurs ou aux édiles. U n Certain Labienus, que
fon génie tourné à la- fatire fit lurnommer R a -
jbientts, fu t , dit-on , le premier contre les ouvrages
duquel on févit de la forte. Ses ennemis
-obtinrent un fénatus-confulte, par leque l i l fut
•ordonné que tous les ouvrages qu’avoit compofés
cet auteur pendant .plufieurs années, feroient recherchés
pour être brûlés : chofe étrange & nouv
e lle , sJécrie Sénèque , févir contre les fciences l
R e s nova & infueta , fupplicium de Jlu diis
J iimi ! exclamation au refte froide & puérile ; puifi-
qu’en ces oecafions ce ri’ eft pas contre les fciences,
mais contre l ’ abus des fciences , que févit l ’Autorité
publique. O n ajoûte que Calfius-Servius, ami de
Labienus, entendant prononcer cet arrêt, dit qu’i l
T a llo it aulïi le brûler , lu i qui avoit gravé ces
Livres dans la mémoire : mine me vivum aom-
:buri oporteî, qui illo s didici ; & que Labienus
■ ne pouvant furvivre à fes ouvrages , s’enferma dans
l e tombeau de fes ancêtres, & y mourut de langueur.
( Poye^ T ac it. In agric. cap. ij. n°. 1. V a l.
Max. lib. 1 yeap. j , n°. 12. T a c it. A n n a l, l i b . i v ,
cap. xxxv , n°. 4. Sénèq. Controv. in proefat.
para g. 5. Rhodig. A n t iq . L e c l. ca p. xn] , lib. u .
Salm. A d Pan c iro l. tom. I , tit. xxij. p a g . 6 8 .
Pitifcùs , Le£L antiq. tom. n , p a g . 84). O n trouve
flufieurs autres preuves de cet ufage de condaïuier
es Livres au feu dans Reimm. ( Idea fyftem. ant.'
litter. p a g . 389 & fu iv . )
A l’ égard de la matière des Liv r e s , on croit
que d’abord on grava les caraiftères fur de la pierre;
témoin les tables de la lo i données à Moïfe ,
qu’on regarde comme le plus ancien Livre dont
Gr am m . e t L i t t é r a t . Tome IL
i l loi t fait mention : enfuite on les traça fur des
feuilles de palmier, fur l ’écorce intérieure’;& extérieure
du t i ll e u l , fur ce lle de la plante d’É g yp te nommée
papyrus. O n fe fervit encore de tablettes minces
enduites de cire , fur lefquelles on traçoit les caractères
avec un ftylet ou poinçon ; ou de peaux ,
furtout de celles des boucs & des moutons , dont
on fit enfuite le parchemin. L e p lomb , la toile ,
la fo ie , la co rn e, & enfin le papier furent fuc-
cefiïvement les matières fur lefquelles on écrivit.
{ ,P o y e \ C a lm e t , D i jf . I , fu r la Gen. Comment.
tom. 1. D ic tion , de la B ible , tom. 1 , p ag. 3 16 ,
Dupin , Libr. D i jf . iv ,p a g . 70. H i j l . de L’A ca d ,
des Infcript. B'iblioth. ecclef. tom. X I X , p . 381.
Barthole , D e legend. t. III , pa g . 103. Schwartz,
D e ornam. libr.. D i j f . I. Reimm. Idea fy f t -
antiq. litter. p a g . 2 3 5 , & 286 & fu iv . Montfau-
con , P aleogr . livre 1 1 , chap. viij. pa g e 180 &
fu iv . G uiland, p a p ir memb. 3. )
Les parties des végétaux furent lon g temps la
matière dont on fefoit les L iv r e s , & c’eft même
de ces végétaux que font pris la plupart des noms
& des termes qui concernent les Livres , comme
le nom grec ./3/Cào* ; les noms latins fo lium , ta~
b u loe , lib e r , d’où nous avons tiré f e u i l le t , tas-
blette , L iv r e , & le mot anglois book. On peut
ajouter que cette coutume eft encore fuivie par
quelques peuples du N o rd , tels que les tarlares
kalmouks, chez lefquels les rufïiens trouvèrent,
en 1 7 2 1 , une bibliothèque dont les Livres étoient
d’une forme extraordinaire. Ils étoient extrêmement
lo n g s , & navoient prefque point de largeur.
Les feuillets étoient fort épais , compofés
' d’une elpècede coton ou d’écorces d’arbres, enduit
d’un double vernis, & dont l ’écriture étoit blanche fur
un fond noir. ( Mém. de l ’A c . des B e lle s -L e ttr e s ,
tom. p a g . 5 & 6 . )
Les premiers Livres étoient en forme de bloc
& de tables , dont i l eft fait mention dans l ’Écriture
fous le nom de Sepher qui a été traduit par
lesfeptante a|ov»h, tables carrées. I l femble que
le Livre de l ’alliance , celui de la l o i , le Livre
des malédi&ions , &- celui du divorce , ayenteu cette
forme. ( P o y e \ les Commentaires de Calmet Jur
la B ib le . )
Quand les anciens avoient des matières un peu
longues à traiter , ils fe fervoient plus commodément
de feuilles ou de peaux coufues les unes au
bout des autres , qu’on nommoit R o u le a u x , appelés
pour cela par les latins P o lum in a , & par
lès grecs x owaX.a j coutume que les anciens juifs,
les grecs, les romains, les perfes , & même les
indiens ont fuivie qui a continué quelques fiècles
après la naiffance de J. C.
L a forme des Livres eft préfentement carree ,
compofée de feuillets féparés ; les anciens fefoient
peu ofufage de cette form e, ils ne l ’ignoroicnt
pourtant pas. E lle avoit été inventée par A l ta l e ,
roi : de Pergame , à' qui l ’on attribue aufîi 1 invention
du ’parchemin. Les, plus anciens manuferits