
lès tranfinettre en fens contraire fur le papier
âu moyen d’une encre préparée; & que * dans
celle d’un grammairien, il indique tantôt les'figues
& tantôt les fons élémentaires , mais toujours
d’une manière fuffifiamment déterminée par les
circonftances.
« L ’é c r itu red it M. Duclos .( R e m . fu r la
» Gram. g é n . I. y. ) , n’eft pas née , comme le
» langage , par une progreffion lente & infenfible :
>> elle a été bien des fiècles avant que de naître;
» mais elle e'ft née tout à coup, comme la Tii- f» mîèré . . . fi l’on y réfléchit, on vtftra que cet
» art, ayant une fois été conçu, dut être formé
» prefque en même temps . . . En -effet, après
» avoir eu le génie d’apercevoir que les fions d une
» langue pouvoient fie décompofier & fie diftin-
» guer , l’énumération dut en être bientôt faite. Il » étoit bien plus facile décompter tous ‘ les fions
» d’une langue, que de découvrir qu’ils pouvoient v fie compter.: l’un eft un coup de génie.; l’autre,
» un fimple effet de l ’attention ».
Les diverfes nations qui couvrent la furface
de la terre , ne diffèrent pas feulement les
unes des autres par la figure & par le tempérament;
elles diffèrent encore par l ’organifà-
tion intérieure , qui doit néceffairement fie ïëflentir
de l ’influence du climat & de l ’imp#flîûïi dès habitudes
nationales. Or i l doit réfulter , de cette
différence- d’organifiation, une différence confîdé-
rable dans les ions élémentaires dont les peuples
font ufage. De là vient que nous n’avons point
reçu dans notre langue , & qu’il nous eft très-
difficile de bien prononcer l’articulation que les
Allemands repréfentènt par ch ; qu’eux-mêmes ont
bien de la peine à prononcer notre articulation j
comme nous la prononçons, quoiqu’ils fie fervent
du'même caractère pour repréfénter un autre' fion ,
qu’ils croi.ent être une articulation , & que je crois
réellement une voix fimple; que les chinois, dans
leur langue parlée, ne connoiffent point nos articulations
h , d , r , quoiqu’ils fanent ufagé des
cqrrefpondantes p , r , Z, &c. •
Les fions élémentaires ufités dans une langue
n étant donc pas les mêmes que ceux d’une autre,
les mêmes Lettres ne peuvent pas y fervir., dit
moins de la même manière : c eft pourquoi il eft
impoftible de faire connoître à quelqu’un par écrit
la prononciation exacte^d’une langue étrangère,
fiurtout s’il eft queftion de fions in.u fi tés dans la
langue naturelle de celui que l’on voudïoit infi-
îruire. Je ne parle ici que des fions bruts , & abftrac-
tion faite de toutes les variations qu£peut y mettre
l ’accent tonique. Or fi la tranfmiflîon exa&e des
fions élémentaires d’une langue eft impoffible par les
Lettres ufitées dans une autre, il eft. beaucoup plus
impoftible encore d’imaginer un corps de Lettres qui
puiffe fervir à toutes les nations : les caractères
chinois ne font connus des peuples voifins, que
parce qu’ils ne font pas lés types des fions élé-
«êntaîres d’une langue parlée , & qu’ils fpflt les
fymboles immédiats; dés chofies & des idées ; Se
de là vient qué ces caraétères font lus diverfement
par les différents peuples qui en font u fag è, parce
que -chacun d’eux exprime diverfement, félon le
génie- de fia langue , les" différentes idées dont i l
à le fynibole fous les ieiix. G’eft ainfi que nos
chiffres1 ï , i , 3’ , 4 , 5 , 6 > 7 , 8 , 10 , x 3 -, &c.
fient employés par plufieurs nations de l ’Europe ,
mais que chacune les li t à fia manière ;- parce qu’ils
repré’fbhtent les idées des nombres défignés dans'chaque
langue par des termes propres, 8é non pas le s
fions élémentaires^des termes qui les défigneht dans
quelque langue eri particulier : nos chiffres font des
caractères réels, ou des lignes de chofies ; nos Lettres
font des caraCtères n om in a u x , ou des lignes devions.
Chaque ' ‘langue dévroit donc avoir fion corps
propre de Lettres : mais, i l feroit àifouhaiter que
chacune eut admis précifément alitant de Lettres
qu’e lle a admis de fions élémentaires Fondamentaux J
que le même fion élémentaire ne,. fût pas rèpre-
fenté par divers caractères ; que le même caractère
ne fut pas chargé de diverfes repréfientations ; St
que l ’union de plufieurs caraCtères ne1 fervît jamais
qu’à marquer I’uniön des fions élémentaires dont on
les a primitivement inftitués; lignes. Toutefois i l
n’eft aucune langue qui jouïffe de cet avantage.
M. du Marfais ( E n cy cl. A lphabet. ) fefort;dès
voeux p oùï Voir propofer parmi nous & autorifer par
qui i l convient un nouveau xorps de Lettres plus
complet , plus exaCt, & plus régulier que celui
que nous avons emprunte des latins. T ou t le monde
fient bien , & je le fens rqpi-même comme tout le
monde , qu’i l n’y a aucun fonds à faire fur une
pareille innovation : mais je ne peux penfer qu’i l
raille pour cela en dédaigner le proje t, ne pnt-il
que fervir à montrer comment on envifage , en
général & en d é ta il, un objet qu’on a intérêt de
connoître. L ’art d’analyfier , qui eft p eu t-ê tre le
fieul art de faire ufage de la r a ifo n , eft auffi difficile
que néceffaire ; & l ’on ne doit rien méprifer
de ce q ui peut tendre à le perfectionner. Ce tte
réflexion doit fuffire pour juftifler la liberté que je
vas prendre.
Huit voyelles' fuffifent pour repréfenter les huit
voix fondamentales ufitées dans notre, langue
( Voye-{ V oyelle ). En y ajoutant un figne de
nafalicé , comme pourroit être notre accent circonflexe
( A) , dont les deux pointes dëfigneioient les
deux iffues de la voix ; 6c un figne de longueur ,
( - ) ; on auroit tout ce qu’i l faut pour repréfenter
toutes les ‘ variations des voix fondamentales : la
v o y e lle en effet qui n’auroit pas le figne de nafia-
li të , reprëfenteroit par là même une voix orale ;
& ce lle qui n’auroit pas le figne de longueur &
de gravité , reprëfenteroit un fion bref & aigu. Pour
ce qui eft des confionnes , i l eft certain que nous
devrions en avoir dix fiept, pour repréfenter les
dix fiept articulations ufitées dans notre langue.
( Voye^ A rticulation. )
Au moyen 4e cet appareil t çp nç yerroit plo*
4 t0ÎS' voix différentes ■ repïéferitéeè/ par la mime
voyelle , comme dans-notre mot fe rm e té , d®nl le
premier e .repréfiente la fécondé voix retentiffante
orale aigue , le fécond* repréfiente la première voix
labiale orale muette , & le troifième repréfiente la
troifième yoix retentiffante : on ne verroit plus une
voix firnple -répréfentée par l ’union de deux v o y e lle s ,
comme eu dans feu. , ou dans f o u j union néceffaire
pourtant dahs l ’état'préfient du catalogué" de nos
Lettres dont le nombre ne fiuffit pas à nos befioins :
i l n’y aû'roit plus aucun motif - fonde fur cette infuf-
fifaïice, pour fubftituer a une v o y e lle fimple une
tombinaifon d’autres "voyelles , à l imitation des
combinaifôns amenées par la aieceftite , comme a i
pour é dans;/aimai, pour e dans nous f a i f o n s , pour
e dirPédidître „ &c : :on ne verroit- plus les con-
fonnès n f k n devenir auxiliaires pour la repréfièn-
-tàtioif ' des Voix nafiâles pmfqu’un figne fur la
vo y e lle produiroit Cet effet^ nous ne ferions pins
dans le cas dé répréfenter l ’articulation linguale
Xfflante palatale for te , par la combinaifon équivoque
des deux Lettres C H , ni autprifés-, par la fauffe
analogie 4e cet exemple , à Xubftituer PH à F ,
‘tômme'Æhs p hïlôfôphe.
C e ne feroit pas encore affez de nous être, pourvus
des vingt', cinq Lettrés qui nous font riécefi-
.faires ; la pérfê<^ion éxigeroit, ce me fembié ,
qüe la lifte alphabétique de ces Léttrés fuivît un
ordre dont on pût rendre un compte raifionnablè.
'Des caufiés , incotinues- pour nous , mais fenfibies
apparemmeht dans le temps de- l’ infti'fution, ont
produit, dans les alphabets de toutes les langues
un arràngèmént ou nous. lié' voyons ni fuite • ni
intelligence ; les genres les éfipècës , & toutes Tes
çïàffes fli.bâlternès y font dans la cônfufibn.: & de là
vient que qui connôît, a force de mémoire , l ’ordie
pes Lettres dans l ’alphabet latin , m’a prefque 'aucune
avance pour;celui des g rec s, poûr' c e lu i' des
hébreux , '&c. I l étoit pourtant affez ; fimple; de
fiiiivre l ’ordre de la génération des fions.éiémen-
tâires :.;lqs voyelles jeroient à.la .tête , & les çôn-
Xpnnes viendi-piént énfuite-; les' diverfes diftmétions
que j’ai faites dès Unes.&ydes;autres ( 'V à fe j A r t i c
u l a t i o n I), auroiént fiervi à les arranger par cla.ffes
chacune dans leur efipèce , conformément aux deux
.tableaux raifionnés que j’en ai faits.
’ Me permëttra-t-pn encore une remarque, qui peut
fembler minutieufie , mais qui me paroît cependant
raifonna,blè ? C ’eft que je crois qu’i l auroit pu y
.avoir'quelque.'utilité.à donner^aux Lettres d’ une
même claffe mie forme analogue diftinguée de
l a forpie Commune aux Lettres d’une autre claffe :
l ’ânalôgië doit avoir les Mêmes effets dans l ’écriture
que dans la prononciation; elle facilite f in -
telligence du langage , & on ne fianroic mettre
trop de facilité dans le commercé qu’exige la f o -
ciabilitë.'Ainfi., 1 on pourroit né fomter lesVoÿelles ,
par exemple , qi^e de traits arrondi«!, & garder les
.traits droits pour les feules conformes; repréfenter
Jes voyelles retentiffàntès par deux traits arrondis,
& "les labiales par un fieul; les variables par une
figure fermée -, & les confiantes par une* figure
ouverte; ne f e ; fervir que de traits droits pour les
confionnes organiques, & mêler un trait arrondi
■ avec un droit pour la confonne afpirée ; compofier
les confionnes labiales de traits droits égaux , 6c les
linguales de traits inégaux; donner deux traits aux
■ foibles , & trois aux fortes ; lier ces traits par le
haut pour les- muéttës } & par le bas pour lés
•fifflaotes ; placer'égalemen t, ou le premier ou le
dêffiier, -le trait majeur des confionnes qui ne diffèrent
que par le degré de force , avec attention
d’en tenir également l ’excès au deffus ou au defTous
•‘du corps de la Lettre. En tenant dans une fituation
Verticale tous ces traits droits pour les confonnes
braies1 j -on pourroit'commencer les nafiales par un
trait-droit h o r izon ta l, pour marquer la fécondé
■ voie par ou s’éehape l ’air ; du rêne la figure en
Xeroit la même que celle d e là première muette
foible du même genre , parce qu’elle s’opère par
Tè même organe 6c par le même mécar.ilme. :
- M. T h ié b au lt , dans le quatrième Mémoire du
compte qu’i l a rendu à l ’Académie royale dë
Berlin de ma Grammaire générale, parle en ces
termes du projet que je viens de propofer ( vol.
de iT j i - f p a g i 518. ) : « En réalifiant ainfi le plan
» dé M. Beauzéj?, on y découvre d’âbôrd un grand
» ' inconvénient ; c?eft qu’en fie fervant de cet a l-
» phabet , j oia auroit une écriture peu agréable à
» l ’oeil ; & - c’eft néanmoins un article qu’ i l ne
» falloit pas n ég lig e r, •& qu’i l eft fans doute pofi-
» fible^d.e-concilier avec l ’analogie que cet auteur
» .à . cherché à établir" entre les fohs & leurs fignes.
» C e réptôche que'nous- lui félons ic i , on peut
» le' faire avec juftice à la plupart des alphabets
» qui nous iont été propbfiés.' M . le p réfident des
» Brojfes en a deux dans fion T ra ité de La form a-
» pion méchanique d es langues ( tom. 1. ch. 5 .) ;
» & 10,us les deux font fujets au même inconvé-
» nient , le fécond : fiirtout, qui eft néanmoins
» ce lu i. que’ cet auteur paroît préférer. Je le ré-
V p ète : Ces .deux -auteurs o n t , à ce qu’i l mè
» iemble , heureufiement rencontré pour ce qui*'
» doncérne l ’analogie ; mais ' pourquoi n ég li-
» ger le plaifir des ieux ? L ’agrément influe ,
» beaucoup plus qu’on ne penfie , fur le choix que
». nous fefions des chofies mêmes qui n’ont pas
» l ’agrément .pour objet : fiouvent nous préfiérous
» le plus agréable au plus utile ; & nous n’avons
» pas tor t, puifque nous le fefions fous la direélion
» de rinftinft. On ne doit donc pas féparer ces
» deux avantages, lorfiqu’on peut les réunir ».
Je fuis Tout à fiait de l ’avis" de M. Thiébault,
fur la néceffité de concilier l ’agréable avec l ’utile ;
& fi j’ av.ois été jufqu’à vouloir mettre fous les ieux
les caractères que" je viens de décrire , j’aürois.
peut être réuffi à ^obtenir le fuffrage de l ’acar
demieien , qui ne condamne mon fiyftême que d’après
l ’exécution qu’i l en a lui-même propofiëe. En prenant
littéralement ce que je dis des confionnes, U