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peu près la même ch ofe, quand i l aflure que la
marque de la bonté d’un Livre^efl l ’eftime que lui
accordent ceux qui pofledent le fujef dont i l traite,
fùrtout s’ils ne font ni gagés pour le préconifer,
ni ligués avec l ’auteur , ni intéreffés par la- conformité
de religion ou d’opinions fyftématiques.
( Budd. De criteriis boni Libripaffinv. W a te , Hiß.
critiç. ling. lac. cap* viij y, pag. 32©» Mem. de
Trev. année 1 7 5 1 , art. 17. r i eu man , Comp,
dup. litter. cap. v j , part. r vantes. y i , page- 280 & fuLeD
i Tons quelque chofe de plus précis. Les marques
plus particulières de la bonté d’un L i v r e ,
font :
i °. Si l’on fait que l ’auteur excelle dans la partie
abfolument néceffaire pour bien traiter te l ou te l îujet qu i l a. choifi , ou- s’i l a déjà publié quelque ouvrage eftimé dans le; même genre. Ainfi , Ton
peut conclure que Jules-Céfar entendoit mieux le
métier de la. guerre que F . Ramus ;. que Caton:,
Palladius , & Columelle favoient mieux liAgriculture
qu’Ariftote ; &. que Cicéron fe connoiffoit en É lo quence
tout autrement que Varron* Ajoutez qu’il ne
fùffitpas>qu’un aùteurfoit verfé dans un art, qu’i l faut
encore qu’i l poflede toutes les branches-de ce même
art. I l y a des gens , par exemple, quhexcellent dans
l e Droit c iv i l, &.qulignorentparfaitementleDroit
public. Saumaife , à en juger par fes exerciiations
for P lin e, eft un excellent Critiqu e, pa^oît très-
inférieur à-Milton , dans fon Livre intitulé D efen ß o
regià. . • :
2-0* Si. le Livre roule fur une'matière qui de-=-
mande une grande leéhire,. on doit préfumer que
l ’ouvrage eft. bon, pourvu que l ’auteur ait eu les
focours néceftaifes> ; quoiqu’on doive s’attendre à
' accablé de citations,. luEtout, dit Struvius*, fi
l ’auteur eft jurifconfulte. *
: 30. U n L i vre a la eampofition duquel um auteur
a donné beaucoup de temps , ne peut-manquer
d’être bon. V illa lp an d , par e x em p le em p lo y a quarante
ans à faire fon Commentaire fur Ézéchiel ;
Baronius en mit trente a fes Annales ; 'G’ouflet n’en
fut pas moins à écrire fes Commentaires fur Fhébreu T
& Pau l-Émile fon Hiftojre. Vaugelas & Lamy en
donnèrent autant, l ’un à fà-Traduction de Quinte-
( Curce , l ’autre à-fon Traité du temple. Em. The-
fàuro fut quarante ans à travailler fon Livre;\nût\i\é
Idea argutæ d ic îion is , auflî bien que le jé fu ite
G a r ra , à fon Poème appelé Columbus. Cependant
eeux qui confacrent un temps fi confidérable à un
même fu je t , font rarement méthodiques & foutenus ,
outre qu’ils font fujets às’affoibiir & a devenir froids';
car l ’efprit humain ne peut pas être tendu fi long
temps fur le même fujet fans fe fatiguer , & l ’ouvrage
doit naturellement s’en reffentir. Auflî'a^t-sm j
remarqué que; dans les màfles volumineufes, le commencement
eft chaud, le milieu tiède , & la fin
froide : A p u d vaßorum voluhiinum aucîores , prin-
eipia f e r v e n t , medium tepet , ultima fr ig eh t. I l
faut donc faire provifion de matériaux éxcèlîen|f
quand on veut traiter un fuj.et qui demande utt
temps fi- confidérable. C ’eft-' ce qu’obfcrvent les écrivains
efpagnols, que cette exactitude dift-ingue db
leurs "voifins. L e Public fe trompe rarement dans
les jugements qu’i l porte fuir les auteurs , à qui leurs
productions ont coûté tant- d’années, comme i l arriva
a Chapelain q ui mit trente ans à compofer fop
Poème de là- P u c e l l e c e qui. lui attira cette ép i-
gramme de- Montmàur.-
I lla Gapsllani dudum expexiata pnella„>
Pofi tanta in lucern tempora prodit anusc
Quelques-uns , i l eft v ra i, ont pouffé le fcrupulb
a? un excès miférable : comme PauL-Manuce , qui:
employoit trois ou quatre mois à-écrire une épitre ;
& lfocràte, q u i mit trois olympiades à compofer un-
panégyrique. Qu el em p lo i, ou plus tôt quel abus due.
temps !
4°. Les Livres qui. traitent de doétiine & font
compofés par'des auteurs!mpartiaux & défintéreflés.*.
font meilleurs que les ouvrages faits par des é c r i vains
attachés à unefeefte particulière.
5°. I l faut confidérer- l ’âge de l ’auteur. Les L i vres
qui demandent beaucoup de fom font ord inairement
mieux faits par de jeunes gens que pa r
des gerfonnes avancées en âge. Onrremarque plus
de feu dans les premiers"ouvrages dé Lu th er, que.
dans ■ ceux qu’i l a. donnés fur la fin. de fà vie. Les-
forces s’énervent avec, l ’âge ; les embarras d’èfgrit
augmentent; quand on a déjà vécu.un certain temps ,
cm fe confie trop â-'fon jugement,, on néglige de
faire" les recherches néceffairês..
6°. O a doit avoir égard"- àl.l’état & a la corn*
dition de l ’auteur. Ainfi., on peut regarder comme :
benne , une hiftoire dont les faits font écrits par un
homme qui en-a-été témoin..oculaire..ou employé-
aux affaires publiques ; ou q u ia eu communication,
des actes publics ou autres monuments -authentiques
ou- qui a écrit d’après des'Mémoires furs & vrais ;;
ou qui eft impartial, & qui-n’a. été ni aux gagés*
des Grands, ni Honoré, c’eft à' dire , .corrompu p a r
les bienfaits des princes. Ainfi, Sallufte & Cicéron-
étoient très-capables de bien-écrire l ’hiftoite de
la conjuration de- Catilina , ce fameux évènement,
s’étant paffé fous leurs' ieux. De- même D a v ila -,
Commines , Guichardin Clarendon , &c?3 qui.
étoient préfents à: ceux qu’ils décrivent. Xénoplion
qui fut-employé dans les affaires publiques à Sparte y
eft un guide fur pour tout ce qui'concerne cette
république. Arnelot de la H ou n a y e , qui: a vécu
long temps à Yenife r a été ■ très-capable de nous
découvrir les fecrets de-là- Politique de cet État.
Cambdèn a écrit les annales de fon temps. M. de
Thou avoit des correfpondances avec les 'meilleurs
écrivains; de. chaque pays. Puffendorf & Rapiii
Toyras ont eu communication d e s ‘ archives pu*
bliques. Ainfi, dans la- T h éo lo g ie morale & pra^
t iq u e , on doit confidérer davantage ceux qui font
chargés des fondions paftotales & de la direction
des Oonfciences, que les auteurs purement fpecii-
latifs & fans expérience. Dans les matières de L i t térature,
on doit préfumer en faveur des écrivarns
qui ont eu la diredion de quelque bibliothèque. ^
■ 7 0. I l faut faire attention au tempsy-aii fiècle ou
vivoit l ’auteur; chaque âgé , dit B a r d a i , ayant fon
. génie particulier. ( V o y e z Barthol. D e lib. legend.
dijfert. pag. 45". Struv.: lib. etc. cap. v. parag. 3 .
p. 3510. Bud. D ijfe r c .d e cric, boni L ib r i, parag.
7 . p . 7 , Heuman. Comp. reip. ùccer. pa.g. i^ z.
Struv. lib r é c itâ t , para g. 4. pag- 393* M ifc e ll.
. Lepf. tom. 3. p . 2-87'. Struv. lib. cit. parag. y.
p . 396. & fid v . B a ille t , ch. ix. page 378. M.
chap. 1 page 1 z 1 <S* fu iv . Barthol. D ijfe rt, 2.
p . 3. Struv. parag. 6 . pag- 4.6* & parag. 1?. p a g .
404 & 430. Heuman. V ia ad h ijl. licier, c. yij.
par. 7 .pa g . )> •
Quelques-uns croient qu’on doit juger d’un Livre
d’après fa groffeur & fon volume , fuivant. là règle
,da grammairien- Callimaque ; que plus un Livre
•eft gros , & plus i l eft rempli de mauvaifes chofes,
.fitya. BjCa.iov x.ccy.oyÇ- ( Voye^ Barthol. Lb. cit.
Dijfert. 3 , p ag. 6z & fuiv. ).; & qu’une feule feuille
des Livres des fibylles étoit préférable aux va fiés
Annales de Volufîus. Cependant Pline eft d’ iine opinion
contraire, & qui fou-vent fe trouve véritable ;
d'avoir, qu’un bon L.ivré eft d’autant meilleur qu il
eft plus gros, bonus Liber melior e jl quif que y
.quo major,. ( P lin. Epiji. 20 , lib. 1 .: ) Martial nous
enfeigne un îemède fort aifé contre l ’immenfité d’un
Livre 7 c’eft d’en, lire peu.
Si nimius videar, ferâque coromidè longue
‘ Ejfe Liber 3 legit&■ pauca , libellus ères,
A in f i, la brièveté d’un Livre eft une- préfompti-on
;de fa bonté. I l faut qu’un auteur foit ou bien igno-
irant ou bien ftérile , pour ne pouvoir pas produire
une feuille , ni dire quelque chofe dé curieux,
ni écrire fi peu de lignes d’une manière intéreffante.
Mais i l faut bien d’autres qualités pour fe foutenir
.également, foit dans les- chofes , foit dans le ftyle ,,
dans le cours d’un gros volume : auflî dans ceux <fe
cette dernière efpèce, un auteur eft fuj.et a s’affoiblir,-.
â fommeiller , à dire des chofes vagues ou inutiles.
Dans combien de Livres rencontre-t-on d’abord un-
préambule affommant & une_longue .file de mots
fuperflii’s , avant d’en venir au fujet l Enfuite , &
dans le cours de. l ’oüvrage , que de longueurs. &
de chofes uniquement placées pour le groiîir ! C ’eû
ce qui fe rencontre plus, rarement dans un ouvrage
.court ou l ’auteur doit entrer d’abord en matière^,
traiter chaque partie vivement, & attacher également
le lecteur par la nouveauté des Idées & par
l ’énergie ou les grâces; du ftyle : au. lieu que les
meilleurs auteurs mêmes qui. cornpofent de gros
volumes, évitent rarement le s détails inutiles ; &
qii’i l eft comme impoffible de n’y j>as rencontrer des
expreflîons hâfarcîées, des obfervationsrS: des penifee*
rebattues & communes. ( V oy e \ le Spectateur
^’A d iflon , »VI24)*
V o y e z ce qui concerne les Livres dans les
auteurs qui ont écrit fur l ’Hiftoire littéraire , les
bibliothèques , les feiences , les. arts , &£ , foi-tout
dans Salden. fC h r iJ l. Liberius , id e j l , G u il. Sal-
denus, - j3/€A«cprAKx , - jiv e de libr. fe rib. & leg*
U tr e cht, 168 r , - in -i 2. & Amjleràam , 1688 i/z-8-
Struv. Intrôd. a d h ijl. litter. c. v. parag. 21. p a g .
454. Barthol. .D e lib. legend- 1671 i n - 8'°.- &
Francof. 1711 , in - 12. Hcdannus , Dijfert. de H ile
g . tianov. 1765 in -8°. Sacchinus, D e rations
L-ibros cumprofe clu legendi. L ip f. 17 1 r. B a ille t ,
Jugement des Savants fu r les principaux ouvrages
des auteurs y tome l. Buddcus, D e criteriis
boni Libri. Jence, 171-4. Saalbàch, Sch ediafma, de
lib. veterum griphis: 1705-. in - t f . Fabrk iu s, B ib l.
ant. c. xin..part. V I I . p a g . 607. Reimman , Idea
fy jlem . antiq. litter. p a g . 229 & fu iv . G a b -
Pulherbeus, D e t attendis & expurganâis m a lis
Librisparti. 154p. m -8°; Struvius, lib. cit. ca p.y ïiu
p . 6514. & f Théophil. Raynaud, Cramai a de bonis
& m alis Libris, L y on , 1683. in -g 3. M or h o ff, P o ly -
hifkor. litt-e. 1. I. c. xxxvj;, 11. 28. p . 1 1 7 . Schufnery
D ijf . acad. de multitud. Libror. Jence, 1702 .in-af.
Lauffer, D ijfe rtat. ad verf nimiam Libror. multit-
Voye-^ aujji le Journal des Savants , tome x v r
p . 572. Chr. G ot. Schwartz, D e or. Lib . apud veter-
L ip f. 170y & 1 7 0 7 . Reimm- Idea fy jlem . ont. lit~
p . 335. Erennius , D e Lib. fe rip. opiimis & u tilif .
L u g . B a ta y . 176-4, i/z-8°. , dont on a- donné un
extrait dans les A cl. erud. L ip f. dnn. 1704. p'.
y 2 6 & fu iv . ) O h peut auffi cohfiilter divers-
autres- auteurs qui ont écrit for la- même matière.-'
L e mot Livre fignifie particulièrement une"
divijion ou fe c tion de volume. Aii.fi ,. l ’orw
d it , le Livre de la Genèfe , le premier Livr'e
des Rois , les cinq L ivres de Moïfe , qui font
autant de parties de l ’ancién Teftament. L e premier1,,
le fécond-, le vingtième le trentième Livre de:
rH-ifto-ire- de M. de Thou. L e Digefte contient cinquante
L iv r e s , & le Cod e en renferme douze. O a
divife ordinairement un Livre en chapitres , 8c quelque
fois-en-fe étions ou en paragraphes. Les écrivains
exacts citent les chapitres & les Livres. O n fe
-fert auflî du mat Liv r e , pour exprimer un" catalogue
qui1 renferme lé iram de plufieurs perfonnes»-
T e ls étoient, parmi les anciens, les Livres des cen<-
fe-urs , Libri cenforii : e’étoienr dès tables- ou régi
fores qui eoirtenomt les noms- dès citoyens dont
on avoit fait le dénombrement, 8k. particulièrement
fôtis Àugùfte. T'ërtàiiieu nous âprend q u e , dansée
Livre cenforrai d’Augufte , on trouvoit le nom.
dé Jéfus-Chrift. ( Vqye\ TertuM. conv. Màrcion,
lib. IV. cap. vij. D e cenfû A u g u j li , quem tejlem
jvdeltjjrmitm ’ dbminiece ndtivitatis romanes archiva
cujlodiunt. V o y e \ auffi Lome ier D e bi*-
•bliot.’ p ag. 1-04. Pitifc. I- ant. tom. 2. p. 84. }>
( ’A nonyme..)♦