
mologie de la terpinaifon celtique dunutit, où'
i l réfute; l ’opinion commune qui fait venir cette
terminaifon ci un prétendu mot celtique & tudefque ,
qu’on veut qui fignifie Montagne» I l produit une
longue énuçiérarion des l ie u x , dont le nom ancien
fe terminoit ai.nfî : Tours s’appeloit autrefois
Ccefarodunum ,• Leyde , Lugdunum Batavorum.
Tours & L.eyde. font fitués dans des plaines. Plu-
lieurs lieux, fe, font appelés Uxellodunum , &
Z/xel fignifioit, auffi Montagne ; ce feroit un
pléonafrae. L e mot de Noviodumiin, auffi très-
commun , fe trouve, donné a des lieux fitués dans
des vallées ; ce feroit une contradiction.
14°« C ’eft cet examen attentif de la choie , qui
peut feul. éclairer fur les rapports & les analogies
que les hommes ont dû faifir entre les différentes
idées , fur la jufteffe des métaphores & des tropes ,
par lefquefs .©nr a, fait fervir les noms anciens à
défigner des objets nouveaux. I l faut l ’avouer ,
ç’eft;peut-être par cet endroit, que l ’art étymologique
eft le, plus fufceptible d’incertitude. Très-
iouvent le defaut de jufteffe & d’analogie ne
donne pas droit de rejeter les Étymologies fondées
fur des, métaphores j je crois l ’avoir dit plus haut,
en traitant, de l ’invention. I l y en a liirtout deux
raifons : l ’une eft le verfement d’un m o t , fi j’ofe
ainfi parler , d’une idée principale fur l ’acceffoire ;
l a nouvelle extenfion de ce mot à d’aütres idées ,
uniquement fondée, fur le fens acceffoire fans
égard au primitif , comme quand on. dit un cheval
fe r r é d'argent ; & les nouvelles métaphores entées
fur ce nouveau fens ,. puis: les unes fur les autres ,
au point de préfenter un fens entièrement contradictoire
avec le fens propre : l ’autre raifon qui
a introduit dans les langues des métaphores peu
juftes , e ft l ’ efnbarras où les: hommes fe font trouvés
pour nommer, certains objets qui ne frapoient en
rien le fens de l ’o u ïe , & qui n’avoient avec les
autres objets de la nature que dés rapports très-
éloignés ; la néceffité eft leur exeufe. Quant à la
première , de ces deux efpèces de métaphores , fi
éloignées du fens. primitif, j’a i déjà donné la foule
règ le de .'Critique fur laquelle on puiffe compter;
c’eft de rie les admettre que dans le feul cas où
tous les changeirients intermédiaires font connus «
e l le refferre nos jugements ; dans dès limites bien
étroites; mais • i l faut bien les refferrer dans les
limites de la certitude; Pour ce qui regarde les
métaphores produites par la néceflité, cette néceflité
même nous procurera un feçours pour les vérifier :
en effet, plus elle a été réelle & preffante, plus
e lle s?eft fait fentir à tous les hommes, plus elle
a marqué toutes les langues de la même empreinte.
L e rapprochement des tours femblables
dans plufieurs langues très-différentes, devient alors
une preuve que cette façon détournée d’envdfager
l ’objet étoit auflî néceflaire pour pouvoir lu i
donner un nom , qu’elle fem b le^za rre au premier
coup d?oeil. V o ic i un exemple affez fingulier,
qui juftifiera notre règle. Rien .né paroît d'abord
plus étonnant que de voir le nom de pupilla ,
petite fille , diminutif de pupa> donné à la prunelle
de l ’oeil. Cette Étymologie devient indubi-»
table par le rapprochement du grec xop« , qui a -
auffi ces deux fens, & de l ’hébreu, bath-ghnain, fa
p ru n elle , & mot pour mot la fille de l 'oe i l : à
plus forte raifon ce rapprochement eft - i l utile
pour donner un plus grand degré de probabilité
aux Étymologies fondées fur des métaphores moins
éloignées. L a tendreffe maternelle eft peut - être-
le premier fentiment que les hommes ayent eu à
exprimer ; & l ’expremon en, femble indiquée par-
le mot de marna ou ama , le plus ancien mot-
de toutes les langues : i l ne feroit pas extraordi-!
naire que le mot latin amare. en tirât fon origine.
C e fentiment devient plus vraifemblable , quand on
voit en hébreu le même mot amma , mère , former
le verbe amam, amavit ; & i l eft prefque porté'
jufqu’ à l ’évidence, quand on.voit dans la même
langue rekhem, utérus , former le verbe rakham,
vehemejiter amavit.
1 5 °. L ’altération fuppôfée dans les fons forme
foule une grande partie de l ’art étymologique , &
mérite auflî quelques considérations particulières.
Nous avons déjà dit ( 8°. ) que l ’altération du-
dérivé augmentoit â mefure que le temps l ’éloi-
gnoit du primitif ; 1 & nous avons ajouté, toutes*
chofes d’ ailleurs, égales , parce que la quantité
de cette altération dépend auffi du .cours que ce
mot a daris le Public. I l s’ufe , pour ainfi d ire ,
en paffant dans un plus grand nombre de bouches „
furtout dans la bouche au peuple , & la rapidité
de cette circulation équivaut à une plus longue
durée ; les noms des faints & les noms de baptême
les plus communs en font un exemple : les mots
qui reviennent le plus fouvent dans les langues ,
tels que les verbes être, faire , vouloir, aller , &
tous ceux qui fervent à lier les autres mots dans
le difoours, font fujets à de plus grandes altérations
; ce font ceux qui- ont le plus befoin d’ être
fixés par la langue écrite. L e mot inclinaifon,
dans notre lan gu e , & le mot inclination, viennent
tous deux du latin inclinatio. Mais le premier,-
qui a gardé le fens phyfique, eft plus ancien dans
la langue ; i l a pané par la bouche des arpenteurs
, des marins , &c. L e mot inclination nous
eft venu par les phiiofophes foholaftiques , & a
fouffert moins d’altération. On doit donc fo prêter
plus ou moins à l ’altération foppofée d’un mot ,
fuivant qu’i l eft plus ancien dans la lan gu e , que-
la langue étoit plus ou moins formée, étoit for-:
tout ou n’étoit pas fixée par l ’écriture lorfqu’i l y
a été introduit ; enfin , fuivant qu’i l exprime des
idées d’un ufage plus ou moins fam ilie r, plus ou
moins populaire.
16°. C’ eft par le même principe que le temps
& la fréquence de l ’ufage d’un mot Ce compenfent
mutuellement pour l ’altérer dans le même degré.
C ’eft principalement la pente générale que tous
les mots ont à s’adoucir ou à s’abréger qui les
altère; & la caufe de cette petite eft la commodité
de l ’organe qui les prononce. Cette caufe agit fur
tous les hommes; elle agit d’une manière inferi-
fible, & d’autant plus que le mot èft plus répété.
Son aétion continue , & la marche des altérations
qu’elle a produites à dû être & a été obfervée..
Une fois connue , elle devient une pierre dé
touche sûre pour juger d’une foule de conjectures
étymologiques ; les mots adoucis ou abrégés par
l ’euphonie ne retournent pas plus a leur première
prononciation, que les eaux ne remontent vers
leur fource. A u lieu à'obtinere, l ’euphonie a fait
prononcer optinere; mais jamais à la prononcia-
tiori du mot optare , on ne fubftituera celle à’obtare.
A in fi, dans notre langu e, ce qui fe prononçoit
comme e x p lo it s , tend de jour en jour a fe prononcer
comme fuccès'y mais une étymologie où
l ’on feroit paffer un mot de cett;e dernière prononciation
a la . première ne feroit pas recevable.
17°. Si de ce point de vire général on veut
defeendre dans les déta ils, & confidérèr les différentes
fuites d’altérations dans tous les langages
que l ’euphonie produifoir en même temps , &
en quelque forte parallèlement les unes aux autres
dans toutes les contrées de la terre ; fi l ’on veut
fixer auffi les yeux for les différentes époques de
ces changements, on fera furpris de leur iïrégu-
lité apparente. O n verra que chaque langue , &
dans chaque langue chaque dialeéte , chaque
peuple , chaque fiecle, changent conftamment certaines
lettres en d’autres lettres , & fe refufenr à
d’autres changements auffi Conftamment ufités chez
leurs voifins. On conclura qu’i l n’y a à cet égard
aucune règle générale. Plufieurs fàvants, & ceux
en particulier qui ont fait leur étude des langues
orientales , o n t , i l eft v ra i, pofé pour principe ;
que les lettres diftinguées dans la Grammaire hébraïque
& rangées par claffes' fous le titre de
lettres des mêmes organes, fe changent réciproquement
entre e lle s , & peuvent fe fubftituer indifféremment
les unes aux autres daris la même
elaffe. Ils ont affirmé la même chofe des v o y e lle s ,
& en ont difpofe arbitrairement, fans doute parce
que le changement des voyelles eft plus fréquent
dans toutes les langues que celui 'dès’ corifonnes,
mais peut-être auffi parce qu’en hébreu les voyelles
ne font points écrites. Toutes ces ' obferYations ne
font qu’un fyftême, une conclufion générale de
quelques faits particuliers démentie par d’autres
faits en plus grand nombre. Quelque variable que
foit le fon dès voyelles , leurs changements ‘ font
auffi confiants dans le même temps & dans le
meme lieu que ceux des confonnës. Les grecS orit
changé le fon ancien de Yn '& de Yu en i ; les
anglois donnent, foivant' dès règles conffarites , à
notre æ l’ancien fon de Y êta des grecs. Les
.voyelles font comme lès'confonnës partie de la
prononciation ‘dans toutes les langues ; & ' dans,
aucune langue la prononciation n eft arbitraire,
parce qu’en tous les lieux on parle pour être
entendu. Les italiens , fans égard aux divifions de
l ’ alphabet hébreu , qui met Yiod au rang des lettres
du palais & Y l au ring des léttrès de la langue ,
changent 1 / précédé d’une confcnne en z tréma ou
mouille foibie qui fe prononce comme Yiod des
hébreux : p la te a ', p ia ^ a ; b la n c , bianco. Le s
.portugais dans les mêmes circonftatïces changent
conftamment cet l en r , branco. Les françois ont
changé ce mouillé - foibie ou i en confonne des
latins, en notre j confonne , & les efpagrîôls en
une afpiration gutturale. N e cherchons donc point
à ramener à une lo i fixe des variations multipliées
à l ’infini dont les caufes nous échapent ; étudions-
en feulement la focceffion conirile on étudie les
faits hiftoriques. Leur variété corinue , fixée à
certaines langues , rarrienée à certaines dates fuivant
l ’ordre des lieux & des temps, deviendra une
fuite de pièges tendus à des fuppofitions trop vagues
& fondées fur la fimpie poffibilicé d’un
changement quelconque. Ori Comparera ces fu p -
polirions au lieu & aü teriips, & l ’on n’écoutera
point celui q u i, pour jüftifïer dans une Étymologie
italienne un changement de Y l latin précédé d’une
confonne en r , ailègueroit ' l ’exemple des portugais
& l ’affinité de ces deux fons. L a multitude
des règles de Critique qu’on peut former fur ce
plan , & d’après les détails que fournira l ’étude
des - Grammaires, dès diale êtes , & des révolutions
de chaque^ lan gu e, eft le plus sûr moyen pour
donner à l ’art étymologique toute la folidité dont
i l eft fufceptible ; parce qu’en général la meilleure
inéthode pour afsûrèr lès résultats de tout art
conjecturai , c’eft d’éprouver toutes fes fuppofitions,
en les rapprochant fans cefle d’un ordre certain de
faits très-nombreux & très-variés.
i8 ° . Tous lès. changements que fouffre la pro-*
nonciation rie viennent pas de l ’euphonie. Lorfqu’un.
mot, pour être tranfmis de génération en générat
io n , paffe d’un homme à l ’autre, i l faut qu’i l
foit entendu avant d’être répété ; & s’i l eft mal
entendu , i l fera mai répété : voila deux, organes
& deux foiirces' d’altération. Je ne voudrois pas
décider que la différence entre ces deux fortes
d altérations puiffe être facilement appercue. Ce la
dépend de favoir a quel point la fenfibilité de
notre oreille eft aidée par l ’habitude où nous
fommes de forrrier certains fon s, & de nous fixer
a ceux que la difpôfition dçs organes rend plus
faciles. Qu oi qu’i l en fo i t , j ’insererai ici une réflexion
, q u i, dans le cas où cette différence pourront
être apperçüe , ferviroit à diftinguer un mot
venu d’une langue ancienne ou étrangère d’avec
un mot qui "n’auroit fubï que ces changements
infenfibles que fouffre une langue d’une génération
a ^ autf£-> ^ Par- Ie feul progrès des. temps. Dans
ce derftier cas-, ‘c’eft l ’euphonie feule qui caufe
toutes les alterations. Un enfant naît au milieu
de fa famille & de gens qui Fayent leur langue ;
i l eft forcé de s’étudier a parler comme e u x S ’i l