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& je dis à mon antagonifte : Vous convenez que
tout ce qui eft étendu eft divifible ; vous convenez
aufli que tout atôme eft étendu ; vous devez donc
convenir que tout atôme eft divifible^ parce qu’ une
chofe ne peut pas être & n’être pas ce q u e lle eft.
A in f î, l ’idée 8 étendu vous doit faire apercevoir la
connexion ou rapport d’identité qu’i l y a entre
atôme & divifible ,- étendu eft donc un troifîème
terme, qu’on ap pelle le medium ou moyen , par
leque l on aperçoit la connexion des deux termes
de la conclufîon ; c’eft à dire que le moyen eft le
terme qui donne lieu à l ’elprit d'apercevoir le rapport
qu’i l y a entre l ’un & l ’autre des termes de
la conclufîon ; ainfî, p e t it terme , grand -terme ,
moyen terme, voilà les trois'cermes effenciels à tout
Syilogifme régulier.
O r la difpofition du moyen terme avec les deux
autres termes de la, conclufîon, eftce que les logiciens
appellent F igur e.
i ° . Quand le moyen eft fujet en la majeure &
attribut en l a mineure , c’ eft la première Figure.
Tout ce qui eft étendu eft divifible ,
Tout atôme eft étendu; -
Donc tout atôme eft divifible.
V o ilà un Syilogifme de la première Figure ; étendu
eft le fujet de -la majeure & l ’attribut de la mineure.
a°. Si le moyen eft attribut en la majeure & en
la mineure, c’eft la fécondé Figure.
3°. Sil^ moyen eft fujet en 1 une & en l ’autre ,ce la
fait la troifîème Figure. -
4°. Enfin fi le moyen eft attribut dans la majeure
& fujet en la mineure, c’eft la quatrième F i -
gure. |
I l n y a point d’autre difpofition du moyen terme
avec les deux autres termes de la conclufîon; ainfî , i l
n’y a que quatre Figures en Logique.
Outre les Figur es , i l y a encore les modes , qui
font les différents arrangements des propofitions ou
prémiffes par rapport à leur étendue & à leur
qualité. L ’étendue d’une propofîtion confîfte à être
ou univerfelle, ou particulière, ou fingulière j & fa
q u a lité , c’ eft. d’être affirmative ou négative.
A u refte , ces obfervations méchaniqües fur les
F igur es & fur les modes des Syllogifmes , peuvent
avoir leur utilité.; mais ce n’ eft pas là le droit chemin
qui mène à la connoiffance de la vérité. I l
eft bien plus utile de s’apliquer à apercevoir, i ° .
la connexion ou identité de l ’attribut avec l,e fujet :
i ° . de voir fi le fujet de la propofîtion qui eft en
queftion eft compris dans l ’étendue de la propofi-
tion générale ; car alors l ’ attribut de cette propofîtion
générale conviendra au fujet de la propofîtion
en queftion, puifque ce fujet particulier eft compris
dans l ’ étendue de la proportion générale : par exemp
le , ce que je dis de tout, homme, je le dis de
Pierre & de tous les individus de Fefpèce humaine
: ain fî, quand je dis que tout homme eft
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fujet à l ’erreur, je fuis cenfé le dire de Pierre , de
P a u l , & c ; c eft en cela que confîfte toute la valeur
du^ S yilo g ifme. O n ne fauroit refafer en détail ce
qu on accorde expreflément, quoiqu’en termes généraux.
Figure eft encore un terme particulier de Grammaire
fort ufîté par les grammairiens qui ont écrit
en latin : c eft un accident qui arrive aux mots , &
qui confîfte à être fimple ou à être compofé; res
eft de la Figure fimple , pub lica eft auffi de la
Figure fim p le , mais refpublica eft un mot de la
Figure compofée. C ’eft ainfî que Defpautère d i t ,
que la Figure eft la différence qu’i l y a dans les
mots entre être fimple ou être compofé : F igura
e jl j im p lic is à compofito diferetio. Mais aujour-
dhui nous nous contentons de dire qu’i l y a des mots
Amples , qu’i l y en a de compofés ; & nous laifïons
au mot Figure les autres acceptions dont nous avons
parlé. (M . d u M a r s a ï s . )
( T Qu’eft-ce qu’on entend précifément par F i gure
? Ce root fe prend ici lui-même dans un fens
figur é. Comme la Figure , dans le fens primitif &
propre, eft la détermination individuelle d’un corps
par i ’enfembledes panieafenfibies de fon contour; de
même une Figur e de langage eft la détermination
individuelle d’une locution p a rle tour particulier qui
la diftingue des autres locutions analogues.
Dans chaque langue , l ’Ufage & l ’Ana logie ont
décidé le matériel de la D ié tio n , le fens primitif
& les formes accidentelles des parties de l ’O ra i-
fo n , les règles de Syntaxe qui conviennent à ce premier
fonds J préparé par le génie de la langue ;
v o ilà , pour ainfî dire, la forme univerfelle du L a n -
g a g e , qui fe retrouve la même dans tOus les discours
, mais qui y reçoit néanmoins diverfes modifications
particulières lefquelles ne laiffent jamais
apercevoir cette forme primitive fous le même
afpect. C ’eft ainfî que tous les hommes ont une
forme commune à l ’efpèce entière , & qu’ils fè ref-
femblent tous par cette conformation générale :
mais fi on compare les individus , quelle variété î
quelles différences ! pas un feul ne reffemble à un
autre ; la forme eft toujours la mêm e, toutes les
Figur es font différentes. C ’eft la même chofe des
locutions dans une langue : toutes affu jetties à une
forme générale qui eft inaltérable au fonds , elles
on t, fi j’ôfe le dire , chacune leur phyfionomie propre
, qui réfulte de la différence des Figur es modificatives
de la forme commune; ces Figur es font
comme celles qui caraéfcérifent les individus parmi
les hommes , elles annoncent l ’ame & la peignent.
A u refte, i l ne faut point d’art pour faire des
Figur es dans le difeours ; i l ne faut que s’abandonner
à la nature, qui les fuggère toujours à propos. C e
n’eftdonc pas pour perfedionner une pratique qui
n’a pas befoin de leçons, qu’i l eft utile de con-
noître le fyftême général & les diverfes efpèces de
F igur es : mais i l eft important de les diftinguer le s
unes des autres , d’apprendre à les reconnoître dans
les ouvrages où la nature & le génie les ont fait
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éc lore, & de difeerner, foit par fenriment folt
par réflexion, les heureux effets qu’elles y pro-
duifent. De pareilles obfervations ne donneront pas
fans doute le talent de l ’Eloquence , qui eft un pur
don d u jC ie i; mais elles peuvent perfectionner le
g o û t, diriger le génie dans fon enthoufiafme, &
redreffer même la nature, qui donne quelquefois
dans des écarts : elles apprendront au moins à re-
connoître tout ce qui eft caché fous le matériel
des paroles , les fenciments auffi bien que les pen-
fées , les affections de l ’ame auffi bien que les
idées de l ’efpric, mille chofes imputantes qui ne
font pas énoncées, mais que les diverfes Figures
décèlent & font fentir à ceux qui font inftruits.
Afin de préfenter le fyftême des Figur es fous
un point de vue lumineux & auffi naturel qu’i l
m’eft poffible , j ’ôferai ne pas fuivre fcrupuleufe-
lement les divifions reçues par l e commun des
grammairiens & des rhéteurs. Je les envifagerai
dans les différentes parties du langage qu’elles modifient
-, & ce premier coup d’oeil donnera la di-
vifion la plus générale des Figur es ; Figures de
jDiction, F igur es de S y n ta x e , Figur es d3 Oraifon,
F igur es d’Elocution , & Figur es de S ty le : ce
font comme autant de reffources ménagées pour les
intérêts de Y Euphonie , de Y Energie ,'de Y Imagination
, de Y Harmonie , & du Sentiment.
I. L ’Eu phonie, chargée de ménager la fenfibilité
dédaigneufe de l ’oreille , s’occupe, dans la D i c tion
, des fons élémentaires qui en compofent les
fy lla b e s , du nombre & de l ’accent -profodique de ces
fyllabes , & de la manière plus ou moins agréable
dont les diverfes combinaifons de toutes ces chofes
peuvent affeCter l ’oreille. D e là deux efpèces de
F igur es de D ic tio n ,■ les unes par Métaplafme
-ou transformation, & les autres par Confonnance.
i . Le s Figures de D ic tio n par M é ta p la fm e ,
ou plus Amplement les M é tap lafm e s , confiftent
dans des altérations faites au matériel primitif d’un
mot : ces altérations fe font ou par addition, ou
par fouftraftion , ou par mutation : l ’addition donne
naiffance à trois Métaplafmes, qui font la Profthèfe,
YEpenthèfe , & la Paragoge ; trois autres fe font
par fouftraCtîon, favoir YA ph é r è fe , la Syncope ,
&t Y Apocope ,* enfin la mutation en produit quatre,
qui font la Diérèfe , la Contraction , la Métathèfe,
& la Commutation..
i . Les Figur es de. D ic tio n par Confonnance,
principalement deftinées à rendre remarquable une
pen fée, une maxime , une relation particulière ,
& c , en fixant d’une manière marquée l ’attention
de l’ oreille , fe font de deux manières : les unes
admettent une Confonnance purement phyfique ,
parce que l’ identité des fons n’entraine aucune analo
g ie dans les idées , favoir YAntanaclafe & la
Paronomafe, les autres ont une Confonnance ra-
tionelle , parce que l ’identité des fons y défigne
de l ’analogie entre les idées, favoir la Dérivation &
le P o ly p tote .
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II. UÊnergie fe trouve fouvent génée par l ’ob -
fervation trop fcrupuleufe des règles de la Sy n ta
x e ,* alors elle fe permet d’en alteter la plénitude
ou l ’ordre analytique : fi e lle altère la plénitude
de la phrafe , c’eft ‘ou par addition ou par fouftraction
, ce qui fait d’une part Y A ppofition , le P lé o -
n a fn e , & d’une autre part Y E llipfe ; fi e lle altère
l ’ordre analytique , c’eft en renverfant fimplemene
.cet ordre par Y Inver f o n , ou en le rompant par
Y Hyperbate.
I II. L ’Imagination a fouvent befoin d’ être aidées
par des images , ou e lle vient elle - même, avec
des images qu’elle fabrique, au fecours de l ’intel—•
ligence ; elle déroge alors .aux conventions primi--
tives qui avoient fixé la lignification de chacune
des parties, de Y Oraifon : de là naiffent les Figur es
S Oraifon j que les grammairiens défîgnent fous l e
nom général de Tropes ; ils font fondés fur un
rapport, ou de reffemblance , ou de fubordination,
ou d’ordre , ou de co-exiftence, & ce font la M é ta phore
, la Synecdoche, la Métonymie , & la Mé ta-
le p j ï.,.: '
IV . U Ha rmonie, toujours d’autant plus parfaite
qu’elle accommode les plaifirs de l ’ore ille avec les
vues de l ’efprit , ou plus tô: quin’exifte réellement
que dans cet accord, décide ou doit décider les traits
cara61criftiqu.es & les nuances locales que doit prendre
la D ié îio n , pour rendre avec plus de vérité &
d’âme la Figure individuelle de chaque penfée.
De là trois différentes efpèces dé Figur es d3Élocution
, qui dépendent tellement du choix & de la
difpofition des mots , que la Figure difparoît dès
qu’on change les termes ou qu’on en dérange la
difpofition, quoiqu’on ne touche pas au fonds de la
penfée.
i . Les unes fe font par union : fi l ’union eft
marquée par des conjonélions expreffes, c’eft le
Polyjpyndéton ; fi elle n’eft que rationelle & dans
le fens feulement, c’eft Y Ad jonc tion.
i . Le s autres fo font par défunion : dans l ’une
les conjonctions font fuppriniées, dans l ’autre ce
font les tranfîtions ; la première e f t l’Affyndéton , la
fécondé eft la D is jon c tion .
3. D ’autres enfin fe font par Répétition ; & la
Répétition y eft p arallèle ou antiparallèle. L a R é p
é tition eft para llèle , quand les mots répétés font
placés femblablêment dans des membres fembla-
bles ; ce qui produit, félon les pofîtions, ou Y A n a -
phore , ou la Converfion, ou la Complexion. L a
Répétition eft antiparallèle en deux manières : la
première eft quand les mots répétés font dans le
même membre, ce qui donne la Réduplication ,*
la fécondé eft quand les mots répétés font placés
diverfement dans des membres femblables , d’ou naifi-
font 1 ’AnadiploJ'e, la Concaténation, YEpanadi-
p lo f e , & la Rég reffon.
V . L e Sentiment, c’eft à dire , la manière dont
l ’ame eft affeétée des chofes que le difeours-doit
énoncer, eft une fource abondante de F igur es qui